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MÉMOIRES
e w
SOCIETE ACADEMIQUE
D'AGRICULTURE
DES SCIENCES, ARTS ET BELLES -LETTRES
DU DÉPARTEMENT DE L'AUBE, Tro^e*
TOME XL1X DE LA COLLECTIOH
TOME XXII. — TROISIÈME SERIE
ANNÉE 1885
TROYES
LIBRAIRIE LÉOPOLD LACROIX
83, RIS NOTRE- BAH
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GKLOSB^IKE
DU
PATOIS JE 11 FORÊT DE CLAIRVAOX
PAR
M. ALPHONSE BAUDOUIN
MEMBRE ASSOCIÉ DE LA SOCIÉTÉ ACADÉMIQUE DE L'AUBE
INTRODUCTION
I
C'est une simple liste de mots rustiques dépareillés, avec
leur valeur exacte, sans étymologie, sans dissertation savante
d'aucune sorte.
Nous ne sommes ni assez érudit, ni assez patient, pour
faire les recherches que nécessiterait un véritable glossaire.
Nous avons dressé cette liste de mémoire, à la sollicitation
d'un ami, parce que ce vieux langage, quelquefois très
expressif, disparaît de jour en jour, chassé par le diction-
naire français. Nous en connaissons encore bon nombre de
termes, avec les nuances justes et les diverses significations
qu'on y attache, du moins dans notre village et aux environs.
Nous avons choisi ce titre : Patois de la Forêt de Clair-
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6 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX
vaux, parce que la plupart des mots recueillis sont employés,
à quelques petites différences de prononciation près, dans
tous les villages qui avoisinent cette forêt, notamment à
Cunfin, Fontette, Saint-Usage, Champignolle, Arconville,
Ville-sous-la-Ferté, Juvancourt, La Ferté, Villars, Silva-
rouvre, Àutricourt, etc.
Dès qu'on s'éloigne de cette région, souvent entre deux
pays qui confinent, le langage, ou plutôt la prononciation
change brusquement.
« De nos jours, c'est surtout par la prononciation
que nos patois diffèrent de la langue ordinaire *. » L'auteur
eût pu ajouter avec non moins de justesse: et diffèrent entre
eux dans la même province *.
On distingue dans le midi de l'Aube, deux formes parti-
culières, deux prononciations se caractérisant, se résumant
pour ainsi dire dans le mot cest, que Ton prononce ç'ost et
ç'ast*. Dans les villages où l'on prononce ç'ost on emploie
l'article lou 9 et dans le pays du ç'ast, l'article eul
(l'ancien ell)
Le patois dit Riceton, c'est le patois du ç'ost. Il rayonne
1 P. Tarbé : Recherches sur l'histoire du langage et des patois
de Champagne; Reims 1851, tome 1 er , page 144 et suivantes.
* D'où viennent ces similitudes de langage entre des pays quelque-
fois assez éloignés relativement, et ces différences, au contraire,
entre des pays voisins ? Des origines, des migrations, des relatious,
du genre d'occupations ? Il serait intéressant, au point de vue histori-
que surtout, de chercher à résoudre ce problème. 11 y a plus de
ressemblance dans les habitudes, les mœurs, le langage surtout,
entre Fontette, Cunfin, Ville-sous-la-Ferté, Juvancourt, et même
certains villages de la H tute-Marne et de la Côte-d'Or, qu'entre
Fontette et Noé-les-Mallets, par exemple, dont les fi nages sont
battants. On dirait des traînées de semence emportée par un coup
de vent
8 Nous orthographions ainsi ces mots, pour nous éloigner le moins
possible de l'orthographe du français actuel.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUT 7
jusque dans la vallée de l'Ource, où il se mêle au patois du
çast, plus particulièrement parlé dans la Forêt de Gairvaux.
Mais la ligne qui sépare le çost du ç'ast n'est pas, comme
on le pense bien, nettement tranchée, À Noé-les-Mallets,
par exemple, on prononcera ç'ost avec To très ouvert, se
rapprochant de Ta, tandis que dans certains villlages de la
vallée de l'Ource, on coiffe ce même o de plusieurs accents
circonflexes. — Entre ces deux prononciations, il y a des
nuances multiples, des mélanges, des accents passés d'un
pays dans un autre... En plein pays du çast, on termine
une grande quantité de mots en ow, particulièrement tous
les adjectifs en eur, tandis que dans les pays du ç'ost et de
l'article loti on termine ces mêmes mots en eux. À Cunfin,
on prononce bû (bois) et à Yille-sous-la-Ferté boa, pres-
que bd.
A Fontette, on emploie ç'ast et eul; à Noé, ç'ost et /ou,
comme aux Riceys.
Chaque village se moque un peu de l'accent du village
voisin. À Fontette, par exemple, on imite en l'exagérant,
dans la phrase rimaillée suivante, le parler d'Essoyes, où
les è et les ai sont démesurément ouverts :
« Saint-Remy et Saint-Hilâre
« Gadiez nos filles ai bin fâre,
a Nos gaichons ai bin boire,
o Nos chenevâres ai bin venin,
« Po fâre des frondouilles ai nos gaichenots
« Po aille aibaitt' lès cacas de lai cote Crechot. »
Saint-Remy et Saint-Hilaire (les patrons d'Essoyes), gardez
nos filles à bien faire, nos garçons i bien boire, nos chêne-
vières à bien venir, pour faire (avec le chanvre) des frondes
à nos enfants pour aller abattre les noix de la côte Crechot.
Mais, dans tous ces pays, ce sont les mêmes tournures
de langage et presque toujours les même vocables.
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8 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVACX
Le prétendu patois riceton n'est donc pas autre chose
que le patois de la Forêt de Clairvaux, avec quelques
variantes, quelques nuances de prononciation.... C'est plus
particulièrement la nuance du ç'ost.
Pour bien connaître un patois, il faut l'avoir pratiqué. Et
jusqu'à présent, la plupart de ceux qui ont publié des espèces
de glossaire sur les patois de l'Aube, paraissent n'avoir fait
que recueillir, à la volée, quelques expressions superficielles
auprès des paysans
Qu'on nous permette d'essayer de justifier cette assertion.
MM. Guenin et Ray, dans leur Statistique du canton de
Biceps 1 , après trois ou quatre lignes de début empruntées
à M. P. Tarbé, disent en tête de leur court lexique : « Le
patois riceton ayant perdu, par la désuétude, la plupart de
ses expressions propres et indépendantes, il n'en est resté que
quelques locutions bizarres... vouloir aller plus loin...., ce
serait se jeter du connu dans l'inconnu et du positif dans
fincer tain.... »
Et ils concluent : « Nous nous bornerons donc à en
donner une idée par un vocabulaire abrégé o
Malheureusement, ce vocabulaire est non seulement
abrégé, incomplet, très incomplet, mais encore il est quelque-
fois inexact, comme nous le verrons plus loin.
La chanson de noce du XVIIP siècle 2 , publiée par
M. Eug. Ray, nous paraît l'œuvre d'un rimailleur préten-
tieux, qui ne savait ni le patois, ni le français. Cela semble
fait à plaisir, à l'aide d'expressions notées en fréquentant
les vignerons, mais mal comprises, ou mal entendues, et
orthographiées en conséquence. Nombre de mots ne sont
pas du style populaire, et ont dû être patoisés, adaptés
par l'auteur.
1 Mémoires de la Société Académique de l'Aube, 1852, t. 16,
p. 153.
* Annuaire de l'Aube, 1868, p. 45.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAOTC 9
Ainsi lou chiel, dans le sens de Dieu, Providence, n'est
point employé par nos paysans.
Itole (étole) n'a pas de patois, c'est évidemment un
mot arrangé ad imitationem.
Aineau ne se dit pas pour anneau ; dans ce cas, on dit
bague.
Au pied de Faute est du rimeur : on dit ai coûté f au
long, vai, en bas, contre, et non au pied.
Saint-Leu, pour Saint-Lieu, est de la langue de Racine
patoisée.
Offrande ne se dit pas, mais offerte, etc., etc.
Le travail de M. Lucien Coûtant, intitulé : Recueil de
notes et de pièces historiques pour servir à r histoire des
Riceys, Paris, Erard, 1840, page 155 et suivantes,
nous paraît plus sérieux... Mais on sent encore que l'auteur
parle une langue étrangère. La propriété des termes, les
nuances lui échappent, et son orthographe est de pure
fantaisie. Il écrit par exemple : stulay (celui-là) au lieu de
ç tu-lai ou çtu-llai, du vieux français cestuy-là.
Comment lire Guiaude, ou Glodieu dans Gloïde (Claude)?
Cette orthographe bizarre ! , constitue en majeure partie
l'originalité du prétendu patois riceton. Donnons encore des
exemples. M. Coûtant écrit :
Benajey pour bin âgé ou agè (bien aisé);
A ïheul pour à Vheule (à l'huile) ;
Fusy pour fiisi' ou fusiWe (fusil) ;
Leyberté pour léberté (liberté) ;
Peypier pour paipier (papier) ;
Gouitte pour gouttieu (goutte) ;
Quosce ? pour qu'o$t-ce ? (qu'est-ce) ;
1 C'est La Monnoye, du reste, qui a inventé cette manière de
faire une langue d'apparence étrangère, avec des mots français et
prononcés correctement : arjan, an/an, etc.
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10 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIHVAUI
Qu'mande pour c 'mande (commande) ;
Chien o qu'pou pour chi ç'n'osl que pou (si ce n'est
que pour) ;
Ça spouro pour ça s'pourrot (cela se pourrait) ;
Vie t'en v'ons voi pour vie ten vô voi (viens t'en voire
voir), etc.
Il écrit :
Foeuilles (feuilles) dans un endroit, et failles dans un
autre ;
Os fol ben avant dans Venveyl (est -elle bien avant
dans l'envers ?) et ailleurs al o (elle est) ; envèt
(envers).
Il écrit :
Ein et oin (un) ; pleue et pieu (pluie) ; pourrot et pou-
drait (pourrait), etc.
Il écrit :
Tro (trop); tou (tout); ney (nez); taba (tabac); luur
(lourd) ; voulo pour voulos (voulais) ; peuy qu'
(puisque) ; stellai (celle-là) ; ste (ce), etc., etc.
Pourquoi cet abus d'y? Ces changements d'orthographe
d'une ligne à l'autre? Ces suppressions de lettres qui ne se
prononcent pas plus en français qu'en patois?
Il faut le dire aussi, le texte de son dialogue entre deux
vignerons est défiguré par des coquilles sans nombre : on
n'est jamais certain de l'orthographe propre de l'auteur.
Ainsi on trouve (p. 188) redyeme (remède)? Nous pensons
qu'on doit lire remédye, mot qui se prononce à peu
près remédieu (eu faible). Page 190, ligne 2, au lieu de po
ou nibiey, il faut lire sans doute, conformément au glossaire
pou umbiey ou imbiey, etc.
Nous reprocherons aussi à M. Coûtant, chercheur très
méritant d'ailleurs, d'avoir patoisé des mots dont les vigne-
rons se servent rarement, pour ne pas dire jamais, et qui
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PATOIS DI LA FOEÊT DE CUIRVAUX li
n'ont pas de patois : providenche (providence), moetion
(motion), pditatif (portatif, registre), etc.
Aux erreurs et aux fautes de M. L. Coûtant, M. P. Tarbé,
dans ses Recherches sur F histoire du langage et des patois
de Champagne, en ajoute une foule d'autres, que ses protes
à lui ont sans doute encore doublées
« Le département de l'Aube, dit-il, plus près des cen-
tres, n'en a pas moins conservé dans le canton de Riceys,
et surtout dans la commune de ce nom, un patois très
net.., » Le patois riceton! une erreur de M. Coûtant, re-
produite par le savant M. Tarbé, et par MM. Guenin et Ray.
Tous les travaux cités sur le patois riceton ne contiennent
pas cinquante mots qui ne soient [employés couramment à
Cunfin et à Fontette, où Ton trouverait, au contraire, plus
de mille vocables qui ne figurent dans aucun lexique rice-
ton.
Revenons à M. Tarbé.
Sa parabole de l'Enfant prodigue est pleine de mots dé-
figurés comme à dessein, de tournures embarrassées, dé-
fectueuses. On y reconnaît l'œuvre de qui ne sachant pas,
ou sachant mal le patois, essaie de le parler.
Et l'orthographe ! Incertaine, fantaisiste, fausse. ..
M. Coûtant a écrit : vieix (vieux), déjai (déjà), d'ia
pleue iene s.... aculeyl (de la pluie une s . • . . averse ! hodjeu
(aujourd'hui), thotey (la maison), demey (demain), galène
(vent du nord-ouest), stulay (celui-là), aveu (avec), soulet
(soleil), etc.
Et M. Tarbé écrit : viey, déjae^ die pleue iene boune
aculée, aujacTheu, fhostè, dimin, galerme, stilay, avè y
slé, etc.
Pourquoi ici : « Je ne sume deigne, » et là : « je ne
seux pas deigne? (Je ne suis pas digne). Ici : « mins en
colère, » et plus bas, même page (conversation entre deux
vignerons) « mis? »
Pourquoi baillé (donné) et beillé? Queneu (connu) et
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12 PATOIS DB LA FORÊT DE CLAI1YAUX
requenu (reconnu)? Poudrait (pourrai!) et pourrot ou
pourro?
Il écrit au dialogue des vignerons : « J'avo oublier/, »
et au glossaire imbiey ou umbiey; au même dialogue :
iene (une), et dans l'Enfant prodigue eine, au masculin
eing, oin; et au glossaire, m, ine (un, une). On trouve
au glossaire en (on), et dans le dialogue : « pou mingey
on o bé (pour manger, on est bien).
Comment prononcer : apotchez (apportez), motchi
(mort), motchi (mourir), etc.?
Pourquoi représenter le pronom il tantôt par t, tantôt
par y? Pourquoi ly pour H (lui)? boete pour boitte (bois-
son). Pourquoi pas de / à c'éto (c'était) et un / à i fallot
(il fallait)? Pourquoi les premières personnes du pluriel des
verbes sans si Pourquoi doi pour doigt, geulée pour
gelée, etc?
On lit dans le glossaire, au mot cale, cette simple et
absurde définition : tête (au lieu de bonnet). M. Coûtant a
dit quelque part : beiller ou f... su lai cale, et M. Tarbé en
conclut que cale signifie tétel
Il définit ainsi les mots suivants :
En teille : taille de la vigne ! MM. Guénin et Ray disent :
travail commencé, ce qui est plus juste.
Feurdailler : percer, casser !
Grosnet : argent ! (c'est-à-dire gros nez, du nez de Louis
Philippe sur les pièces de cinq francs).
Curot : serpette ! (instrument, outil pour curer, ôter la
terre, qui tient à la pioche, à la houe, à la pelle, etc.)
Miche : pain !
Pchourey ; écraser ! (pressurer).
Gayette : chèvre! (MM. Guenin et Ray disent mieux :
mauvaise vigne).
Sarpotte : serpe! (Il ne voit pas même qu'il a affaire à
un diminutif! Serpe se dit sarpe), etc., etc.
Cette syllabe euphonique eu 9 espèce de sifflement, qu'on
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVÀUX 13
emploie dans certains cas devant certains mots pour en faci-
liter la prononciation, comme nous le verrons plus loin,
M. Tarbé la met sans distinction partout, et il écrit : eur-
douillerj eurmener, elc, pour redouiller, remener, etc.
Il rend pourrait ici par poudrait, là par pourrot, qu'il
met aussi pour pourra !
Il écrit prebis pour beurbis (brebis), jeveau (cheval), re-
cuei (recueillir), quosque (qu'est-ce que), stelay (celle-là),
etc., etc.
En outre chez lui, comme chez M. Goûtant, quantité de
mots ne paraissent différer du fiançais que par l'orthographe
bizarre dont il les affuble.
Quelle autorité peut bien avoir un pareil travail ? Cette
question finale est l'unique but de notre critique.
Le Vocabulaire troyen, de Grosley ! , plus exact en gé-
néral, pèche aussi sous les mêmes rapports; et malgré le
respect que nous portons à la mémoire de notre célèbre
compatriote, nous oserons dire qu'il ne connaît pas toujours
le sens véritable et les nuances justes des expressions qu'il
a recueillies. Quelques exemples, au hasard, de définitions
impropres ou imparfaites :
Bocquer : heurter par contre-coup ;
Brique : petit reste, miette ;
Caffre : tuf;
Guignander : demander bassement et avec importunité ;
etc., etc. (Voir ces mêmes mots plus loin, au Glossaire).
Quelquefois, il fait un terme particulier d'un mot fran-
çais légèrement altéré. Ainsi il définit rédicule : sot, impa-
tientant, déraisonnable, sans dire que ce mot n'est que le
français ridicule dans une de ses acceptions communes. Il a
donné, d'ailleurs, pour du patois, plusieurs vocables qui
1 Voir Ephémérides de P.-J. Grosley, par L.-M. Patris-Debreuil.
Paris, 4811, t. 2, p. 160 et «rivantes.
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14 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIE VAUX
figurent dans tous les dictionnaires avec la même significa-
tion.
M. Thévenot, dans sa Statistique du canton de Rame-
rupt, a publié aussi un court lexique où nous avons trouvé,
relativement, beaucoup de mots employés dans le patois
de la forêt de Clair vaux. Les définitions, presque toujours
exactes, sont incomplètes parfois et manquent d'exemples...
du reste, il parait s'en être un peu trop souvent rapporté à
Grosley.
A l'occasion, nous relèverons, dans notre Glossaire, quel-
ques autres erreurs de ces différents lexiques 1 .
II
Avant de consigner les observations que nous avons à pré-
senter sur l'orthographe et la prononciation, disons que les
mots de notre patois pourraient se diviser en trois classes :
1° Les mots venant directement du latin, de l'italien, du
romain, etc. , et qui ont dû être usités tels que, ou à peu près,
du xii* au xvin e siècle 2 : aujdheu (aujourd'hui), loguet
(petite flaque d'eau, ou d'un autre liquide), airoiller (écouter
en épiant), etc.;
2° Les mots d'origine difficile à déterminer, onomato-
4 La plupart de ces glossaires pèchent :
lo En donnant des mots français vulgaires ou bas pour des mots de
patois. Exemple : Fripouille, engoncer, torgniole, blouser, bouffer,
se rebecquer, piauler, rogaton, longe, reluquer, rie à rie, etc.
2° Des mots d'argot ou de langue verte employés par toute la
France. Exemple : Faire sa crevaison, crêper (prendre aux cheveux),
débailler, débine, débiner, dèche, gnognotte, etc.
* Ils n'ont souvent pas de synoymes exacts en français. Quelques-
uns ont gardé la physionomie complète du moyen-âge : c'tus-ci (ces-
tuy), U (lui), hus (porte), char (chair), pour (peur), etc.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVACX 15
fées, mimologismes, mots comme forgés à plaisir par des
Rabelais paysans : griliot (étui à aiguilles), gringoller (agi-
ter, secouer quelque chose de sonore), bèel (fi 1), coudrou
(dindon), toûter (corner), tuiter,veziller } tùter y trottignon y
hottitie, etc., etc.;
3° Les mots défigurés, estropiés par des bouches igno-
rantes. Ces derniers sont probablement de beaucoup les plus
nombreux, et nous sommes loin, sans doute, d'en avoir
dressé la liste complète ; car nous ne pouvons nous flatter
de les avoir retrouvés tous dans notre mémoire, bien que
nous les notions, au vol, depuis plusieurs années... Mais
nous pensons avoir donné au moins un exemple des variations
les plus bizarres et les plus caractéristiques. Nous avons
d'ailleurs l'intention de compléter ce recueil à fur et à me-
sure que nos souvenirs nous le permettront.
m
Voici comment nous représenterons certains sons :
Nous conserverons autant que possible à chaque vocable
en titre les lettres étymologiques, l'orthographe des radicaux,
lorsque nous croirons les connaître, afin que la physionomie
des mots patois ne soit ni trop altérée, ni trop étrange ; et
nous écrirons, dans les exemples, le mot d'après sa pro-
nonciation seulement^ lorsque cette prononciation pourra
présenter quelque difficulté. C'est dire que lorsque le mot
ou la syllabe se prononceront comme en français, nous gar-
derons r orthographe française. Ainsi les infinitifs de la pre-
mière conjugaison, les noms d'arbres fruitiers en er — et
dont Yr ne sonne pas plus en français qu'en patois — - conser-
veront leur r. Nous écrirons, par conséquent, raiguger^
pommer, etc., (aiguiser, pommier, etc.), qu'on devra pro-
noncer raigugé, pommé, etc. , comme on prononce aiguisé,
pommié.
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16 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX
Nous ne remplacerons pas non pins d'ordinaire par une
apostrophe, ainsi que l'ont fait MM. Coûtant et Tarbé, cer-
tains c muets qu'on élide en parlant, attendu qu'en français
ils sont élidés de même, ou à peu près dans les mots sem-
blables. Nous écrirons donc : recaler, recoider, replat, etc.,
qu'on prononce rcaler, rcouler, rplat, etc., parce qu'en
français on ne fait sentir non plus cet e que très légère-
ment.
Bien entendu que dans les mots dont l'origine nous sera
inconnue, nous n'introduirons d'autres lettres que celles qui
nous paraîtront rigoureusement nécessaires pour bien figurer
les sons.
Ai sera en général ouvert, comme dans air, aigle, laie,
c'est-à-dire qu'il aura absolument le son de Yè. Nous em-
ploierons ai ou è pour le même son, selon l'étymologie du
mot : aimer (amer), prononcez : èmère; dèfrochurer (ôter
la frochure, le foie, les entrailles, déchirer), etc. Quand ai
devra se prononcer comme é fermé, nous l'écrirons en ita-
lique dans le romain et en romain dans l'italique.
Ei aura toujours le son de lé fermé, nous l'emploierons
au lieu de Té dans les mots où le son de 17 s'est changé en
é 9 conservant ainsi Yi du français : meineut (minuit), meidgli
(midi), etc.
Au, eau et 6 ont à peu près le même son — plus ou
moins long cependant — et seront employés selon l'étymo-
logie, ou d'après le mot français correspondant : moingneau
(moineau), mau (mal), envôe (envoie, 3* pers. du prés, de
l'ind. de envoyer), etc.
est toujours bref et se prononce comme dans les mots :
pot, lot, sot, écho : sonnot (son), petiot (petit), etc.
E. Faute d'un accent particulier, nous employons quelque-
fois Ye muet à la fin de certaines syllabes pour en allonger
la prononciation : envôe. Ainsi dans les mots en ou long :
faijoue (faiseur), dansoue (danseur), etc., dont la voyelle
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PATOIS DE LA FORÊT DB CLAIRVAUX 17
composée ou se prononce comme dans roue, boue, moue, bien
que ces mots soient du masculin, le féminin étant en oure.
Du reste, l'accent circonflexe placé sur une voyelle seule, ou
sur Tune des voyelles d'une diphthongue, indiquera toujours
aussi une syllabe longue : peu (laid), prononcez : peue
(comme queue), et peu (et puis), prouoncez : et peue;
chait (chai), prononcez : chaie, comme craie, laie, baie, etc.,
bien que le féminin chaitte soit très bref.
Lorsque dans un mot le son de Ve muet se fera sentir très
fortement, nous remplacerons cette lettre parla voyelle com-
posée eu : peurter (prêter). — (Voir à Y article pour l'em-
ploi de cette voyelle eu, par euphonie).
Parlons maintenant d'un certain son d'à ou d7/ mouillées,
aussi fréquent que difficile à figurer, et variant de Tt simple
au g H doux italien, selon les cas el les diverses syllabes qu'il
affecte. Nous en résumerons les principales nuances dans
les mots : plaice, pote, meidi (place, porte, midi). Le pre-
mier se prononce comme si / était fortement mouillée, à
peu près comme piaice, en mêlant intimement le premier i
avec Y a. Nous figurerons ce son des // mouillées par / en
italique dans le romain, en romain dans l'italique; ainsi :
plaice, clou, englouti (place, clou, englouti), devront se
prononcer à peu près : piaice, quiou, enguiouti.
Pote se prononce à peu près comme si // mouillées se
trouvaient entre le /et Ye : pot-Ile ; ou, si l'on veut, en fai-
sant sentir fortement le son de Ye muet précédé du son confus
de Vi : potieu (n'appuyez que très légèrement sur ieu). Ce
son ne se rencontre guère que dans les syllabes finales
muettes : trouble, faites, dites. . . Nous le figurerons en mouil-
lant 17, quand il y aura une / : trouble, faible (trouble,
faible), et en remplaçant Ye muet par ieu dans les syllabes
qui n'ont pas d7; faitieu, difieu, etc.
Meidi se prononce comme si // mouillées se trouvaient
entre le det Yi final, à peu près comme dgli doux italien.
T. xux 2
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18 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIftYACX
Nous rendrons ce son par / mouillée plutôt que par gli afin
de moins défigurer les mots : meidli (midi), aisseulM (suivre
en travaillant, aller aussi vite), aiffautM (priver de nourri-
ture, affaiblir), etc.
IV
Mutations de lettres et de sons
A et les voyelles composées où entre Va
Presque toujours (principalement dans les monosyllabes
et dans les syllabes formées de la lettre a seule), a se ebange
en ai ou ai : vai, lai, çai, aimer ', ailler, raippoute, baille,
chaipé, mailaide, sailaide, saibbait, sauvage, raivsîige,
vaiche, triche, pairtaige, raimrige, etc., (va, là, la, ça,
amer, aller, rapporte, battre, chapeau, malade, salade,
sabbat, sauvage, ravage, vache, tache, partage, ramage,
etc.).
An se change fréquemment en ain : hainche, mainge,
chainge, grainge, trainche, ètrainge } etc. (hanche, mange,
change, grange, tranche, étrange, etc.); quelquefois en
oin: moinche ou moinge, emmoinger, dèmoinger, re-
voinger, etc. (manche, emmancher, démancher, revan-
cher, etc.).
Le contraire a lieu assez souvent aussi, c'est-à-dire que
ai se change en a bref ou long : aibâcher, lâcher (a très
bref), pdché, etc. (abaisser, laisser, paisseau, etc.).
La plupart des mots en able perdent la lettre /, ou la
mouillent et prennent plusieurs accents circonflexes sur Va
(on en a plein la bouche en les prononçant) : misérable,
exécrable, insupportable, jâble, didbe, hontdble ou hon-
tdbe, sable, prononcez presque : m'\$eràbieu,jdbïeu, etc.).
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PATOIS DB LA FORÊT DE CLAIRVAUX 19
Cependant on dit érable, tabeou iab\e (érable, table), avec
un a bref. — (Voir à /.)
Ai el si se changent assez fréquemment en oi : poinne,
toinde, traivoiller, bouteille, airoille, conoille, voilier,
révoilier, rèvoil, etc, (peine, teindre, travailler, bouteille,
oreille, corneille ou corbeau, veiller, réveiller, réveil, etc.)
Les / restent mouillées bien entendu.
Beaucoup de mots en au ou plutôt eau, changent cette
finale en é (en è dans certains villages) :
Coulé (couteau, avec mépris 1 ; autrement on dit cou-
tieau) ;
Troussé (trousseau);
Grume (grumeau) ;
Mante (manteau, avec mépris; autrement mantieau) ;
Chaipé (chapeau ; on dit aussi chaipieau) ;
Cisé ou cigé (ciseau) ;
Gâté (gâteau, avec mépris; autrement gâtieau);
Feusé (fuseau) ;
Châié (château, avec mépris ; autrement chfttieau) ;
Aingniè (agneau) ;
Formé (fourneau) ; on dit aussi fournieau;
Taure (taureau) ;
Pdché (paisseau) ;
Mouché ou moucé (morceau) ;
Maté (marteau, avec mépris; autrement martieau), etc.
On trouve ai et ei changés en i : airignée, tignache,
tignoux (araignée, teignasse, teigneux) ; en o : croe (craie);
a en u ; mumelle (mamelle), etc.
i C'est peut-être parce que les mots se sont rapprochés peu à peu
du français, que les plus vieilles formes sont devenues termes de mé-
pris» de moquerie, de dédain?...
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20 PATOIS DB LA FORÊT DE CLA UVAUX
E, E, E, E*
Le son^ et le son £ou é se substituent fréquemment l'un à
l'autre : école, écurie, écrire, ètrainge, répande, réponde,
etc. (école, écurie, écrire, étranger, répandre, répondre) ;
fiéve, liévej liéfe, régie, couturêre, lumére, ceumetére,
boutenére, tête, fête, etc. (fièvre, lièvre, lèvre, règle, coutu-
rière, lumière, cimetière, boutonnière, tête, fête, etc.).
Dans ces deux derniers mots, la voyelle fermée reste longue.
er, au commencement ou au milieu des mots se change
souvent en ar, quand IV ne se supprime pas : sarrer, varge,
vart (au féminin vade ou vadieu), ètarnuer, sarpe, char-
cher, sarpent, jarbe, harbe, liarre, piarre, luzarne, etc.
(serrer, verge, vert, éternuer, serpe, chercher, serpent,
gerbe, herbe, lierre, pierre, luzerne, etc.).
Quand IV est supprimé, Ye devient quelquefois grave :
pèdu ou pedlu (perdu), prononcez presque pèdiu, en mêlant
très intimement l'i à Tu.
On trouve :
e changé en a, en è, en 6, en oi, en ou : vous seras,
dangereux , mâtrôsse, boirger, demoure, etc. (vous serez,
dangereux, maîtresse, berger, demeure, etc.).
é changé en d> i, o : flétri, gigier, locher, etc. (flétri,
gésier, lécher, etc.).
è, é en eu, o, 6, oi, â : t seume, f se leuve, soche ou
choche, prôt, aipprôter, moiche,pie-griâche,châne, crâte,
etc., (il sème, il se lève, sèche, prêt, apprêter, mèche, pie-
grièche, chêne, crête, etc.).
On trouve er changé en eu : veuderet (verderet) ; eu en
o, en où, etc. : popilier,ùllol, pour, etc., (peuplier, tilleul,
peur).
Eut et eux, (voir plus loin, aux adjectifs).
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PATOIS DB LA FORÊT DB CLAIR VAUX 21
Le son i nous parait entrer de trois manières dans les
mots :
1° Directement : coutieau, créier, vieau, Léion, sitiôt,
ridieau, lai, mai, etc., (couteau, créer, veau, on dit aussi
vée, Léon, sitôt, rideau, la, ma, etc.);
2° Par / mouillée 1 : b\anc (prononcez presque bian, en
mêlant complètement les sons i et an), bleu, plaincher,
pile, argile, glaice, plainche, plat, ètraingler (prononcez :
ètrainguier), englouti, raclure, clou (prononcez : enguiouti,
raqwure, quiou), filer, filé, haibile, filandre, emplâtre,
semble, etc., (prononcez : empidtre, sembieu), etc. (bleu,
plancher, pile, argile, glace, planche, plat, étrangler, en-
glouti, raclure, clou, habile, filer, (il à coudre, filandre,
emplâtre, semble, etc.);
3° Par le son du g placé devant Yn : vingner, mingne,
dingner, coingner, ètourgneau, prungneau, moingneau,
1 N'est-ce pas cette tendance populaire à mouiller VI qui fait qu'on
prononce presque partout souyè, escayé, pour soulier, escalier? et
dans nos pays en particulier, mille, ville (dû fois cent, cité), comme
la dernière syllabe de charmiïte et cheville ?
Dans certains mots de patois pur, comme guiandon, par exemple,
ceux qui veulent raffiner introduisent une / non mouillée et pronon-
cent glandon. Ce ne peut être que par analogie, puisque le mot n'a
sans doute jamais été écrit. Du reste on n'introduit beaucoup moins
fréquemment VI dans les mots semblables, qui n'ont pas d7 ; on pro-
nonce : blond, bianc, plomb, piaie, piait, pieut, etc., (blond, blanc,
plomb, plaie, plaît, pleut, etc.), et bon, banc, pont, paix, peut, etc.,
comme en français. On dit cependant bleau (beau). Uiotacisme était
général dans nos pays il y a une trentaine d'années. Tout le monde
prononçait Napoléion, déhlors (dehors), et les chantres d'église
criaient Deius meius.
Le patois du ç'ost a moins de ces i et de ces / mouillées. Tandis
qu'à Fontette et à Gunfin on prononce ç'ost çai de IcUpieue l à Eguilly,
Gbenrey, etc., on dit : ç'ost ça, de la pleue (c'est cela, de la pluie).
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22 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX
baidingner, chemingnée, etc. (viner — rendre beaucoup
de jus, de vin : se dit des raisins ; voir au Glossaire —
mine, dîner, mettre un coin, étourneau, pruneau, moineau,
badiner, cheminée, etc. 1 ).
En revanche, Vi se retranche de beaucoup de mots :
pommer, poirer, couturére, fumer (on dit aussi fieri), lu-
mére, matéraux, inguéter, darré ou darrer, etc., (pom-
mier, poirier, couturière, fumier, lumière, matériaux,
inquiéter, derrière et dernier, etc. — Voir plus loin, la
diphthongue oi.
L'i peut se changer en é> eu, 0, oi, ou, in, etc. : gévre,
ceumetére, veu ou veud\m, lotiére, ploïer, loier, dèloïer,
soutier, pingeon, etc., (givre, cimetière, vide, litière, plier,
lier, délier, siffler, pigeon, etc.) — Voir à Yo.
Or précédé d'une consonne comme cor, tor, etc., se
change souvent en ou, ou perd simplement IV : coudeler,
mouché, courdieau, mourtia, courvée, pouter, bône, otie,
soti, todu ou todiu, etc. (cordeler, morceau, cordeau, mor-
tier, corvée, porter, borne, ortie, sortir, tordu, etc.).
Le contraire a lieu aussi : gormand, forment, formé, ton-
ner, jonnée, etc. (gourmand, tourment, fourneau, tourner,
journée, etc.).
se change assez souvent, en ou et réciproquement :
couchon, coûté, brousse, brousser, etc., (cochon, côté,
brosse, brosser, etc.), — copé, copesse ou copasse, polie,
côtxl, gôdron, etc., (coupé, coupure, poulie, coutil, gou-
dron, etc.).
On trouve on et changé en eu : seûner, etc. (sonner,
1 On pourrait aussi bien admettre que Pt entre directement dans
ces mots et écrire : ètournieau, moinnieau, etc.; mais le son du g
seul rend exactement la prononciation mêlée des deux voyelles.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX 23
etc.); — ou en a : canne (couenne); — ou et o en eu ou
eu : meurt, teûssi, peurri, neurri, meûlin, eûtil, feûlie,
deurloter, etc. (mourir, tousser, pourrir, nourrir (ou pourri,
nourri), moulin, outil, folie, dorloter, etc.).
Nœud fait nond, genou, genon.
U
U se change facilement en i : riban, vinèraire,pignas,
pignage, Heur, jiment, limera, himeur, pitois, enc\ime 9
ètiver, etc., (ruban, vulnéraire, punais, punaise, lueur, ju-
ment, numéro, humeur, putois, enclume, étuver, etc.)
On trouve aussi des u substitués à des i ; lumaice, lu-
maiçon (limace, limaçon).
u se change aussi assez souvent en eu et réciproquement :
heurter, peut, meûr, sailmeure, treuffe, breûler, seucer,
seuçon, seuçot, etc., (hurler, put, mûr — en maturité, —
saumure, truffe, brûler, sucer, etc.) — aibruver, Ugène,
(abreuver, etc.).
Diphthongues 01 et UI.
Ces diphthongues sont très souvent détruites et ne gardent
qu'une des deux lettres qui les composent : sor, nor, crore,
vor, lor,g\ore, chogi, etc., (soir, noir, croire, voir, loir,
gloire, choisir, etc.) — Voir aux noms et adjectifs les mots
en oir qui perdent IV). — Frut, brut,puts, lu ou U, relure
hussier, burotte, heule,jun, menuserie, sue, rungne, etc.,
(fruit, bruit, puits, lui, reluire, huissier, buire, huile, juin,
menuiserie, suie, ruine, etc.).
Quelquefois les deux lettres sont remplacées ou déplacées :
choir fait cheur; pluie fait pleue (pieue) ; muid, meud,
suivre, seugue (du latin seçui?); cuire, cueure; cuisse,
cueuche, etc.
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24 PATOIS DB LA FORÊT DE GLAIRVAUX
b se substitue facilement au p et au v. (Voir à ces deux
lettres.).
b se change quelquefois en m : Coulas M'ncrdin, pain
m'rdn (Nicolas Bernardin, pain bénil).
Ç, S, SS
ç doux et ss, s dur, se changent fréquemment en ch :
pincher, pinchon, puche, pécher, picher, pichon, chochi,
dèchochi, pdchè, lâcher {a très bref), frochure, tignache,
voichi, finichons, bennichant, mouchelot, etc. (pincer, pin-
çon et pinson, puce, percer, pisser, pissat, sécher ou séché,
dessécher ou desséché, paisseau, laisser, fressure, teignasse,
voici, unissons, bénissant, morcel ou morcelet, etc. *).
Le contraire arrive aussi : sainger, torcher ', cabosson
(changer, chercher, cabochon — couvercle d'une ruche).
Les s doux (z) ont une grande tendance à se changer en g
doux (ou/); aiguger, ragin, aimuger, aiviger, rugé, briger,
âge, âgé, bêttge, cerége, merége, mâtrîge, lige, frige,
grige, p\agi, majon, rajon, bujon, lifons, fayons, brijant,
frijant, brijaque ou brisaque, ma/eu, etc. , (aiguiser, raisin,
amuser, aviser, rusé, briser, aise, aisé, bêtise, cerise, me-
rise, maîtrise, lise, frise, — de lire et friser, — grise, plai-
sir, maison, raison, buson, lisons, faisons, brisant, faisant,
briseur — qui use beaucoup — meshui, etc.).
D
d se supprime souvent devant r ; penre, poure, etc.
(prendre, poudre, etc.). — Voir à r.
4 On trouve la même prononciation an xvi* siècle : émorche (amorce).
Rabelais.
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PATOIS DB LA FORÊT DB CLÀIBVADI 25
fse change quelquefois en ve, au masculin : tôtwe pour
(ôtif (hà\if\, veuve pour veuf : ein homme veuve.
On dit au contraire : lièfe pour lèvre,
/final se perd dans soi (soif).
G
g se change quelquefois en che ou c dur, et réciproquement :
bauche, grabuche, chante, ocre, etc., (bauge, grabuge,
jante, de roue, ogre, etc.), — dèmoinger, revoinge, revoin-
ger f postige, etc., (démancher, revanche, revancher, pos-
tiche, etc. ! ).
g remplace Ys doux. — Voir au Ç.
g entre volontiers dans certains mots pour s'unir à Yn :
moingneau, ètourgneau, que je veingne, etc. (moineau,
étourneau, que je vienne, etc.). — Voir à Yi et au pronom.
Nous remplaçons par cette lettre le g doux devant les
voyelles a, o, w, dans les mots où la prononciation patoise
amène ce son.
/de je devant une consonne, se change parfois en euf .
(Voir au pronom.)
L
Tantôt cette lettre est supprimée complètement : viné-
raire (vulnéraire), didbe (diable), etc.)
Tantôt, comme nous l'avons vu à la lettre t\ elle devient
mouillée : g\aude y b\eu, $oufl\e, ensemble (prononcez à
peu près : guiaude, bieu, $ou/fieu, ensembïen.)
1 Dans les contes des xin°, xiv«, xv e siècles, on trouve : domache,
fromache, vanche, etc., (dommage, fromage, venge).
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26 PATOIS DB LA FORÊT DE CLAIEVAUX
Quelquefois même, elle paraît s'être insinuée, mouillée
toujours, dans des mots qui n'en ont pas en français : mei-
d\i (midi), prononcez meid-//i ou meidgli, à l'italienne; re-
froidi (refroidi, etc.) — II esl impossible de figurer autre-
ment cette prononciation.
Les syllabes finales ble 9 fie, gle, etc., ou mouillent leur
/ ou la perdent : trouble, souffle, règle, tabe (ou table),
didbe,jâble, etc. — Voir les mots en able à l'A.
/ se change volontiers en n et vice-versà : nentille, s'è-
branner, coronnel, farbana> mane, annumelle, caneçon,
etc., (lentille, s'ébranler, colonel, falbala, malle — cas-
sette, — alumelle — vieille lame de couteau, — caleçon,
etc.), calonnier, lommer, relommée, limèro, velin, veli-
moux, Bèlonni, etc., (canonnier, nommer, renommée,
numéro, venin, venimeux, Bénoni, etc.)
/ se change quelquefois en r et vice-versà : rabourer, ra-
bouroue, armonnd, farbana ou farbonna, carcul,virbeur-
quin, rècarcitrant, etc., (labourer, laboureur, almanach,
falbala, calcul, vilbrequin, récalcitrant, etc.), — râle,flam-
boise, flamaçon, libambelle, raletè, colidor, etc., (rare,
framboise, franc-maçon, ribambelle, rareté, corridor, etc.)
/ s'emploie souvent comme lettre explêtive, redondante
et non mouillée après le pronom eulle (elle) : eulle 1 ast
venûn (elle est venue); eulle 1 ast drôle; çai r 1 ast (ce
Test, c'est lui, c'est elle, c'est cela, etc.). C'est une de ces
prononciations difficiles à corriger, et que Ton conserve quel-
quefois longtemps après avoir changé son patois en fran-
çais...
M, N
Ces lettres se redoublent presque toujours et se font sentir
à la fin de la syllabe précédant celle qui commence par l'une
d'elle : prommer (premier), caimmion (camion), raimme
(rame de haricots), raimmer (ramer) , aiffaimmer (affamer),
raimmeaux (le dimanche des) , raimmier (ramier — pigeon) ,
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PATOIS DB LA FORÊT DE CLAIRVAUX 27
mammie (mamie), aibîmmer (abîmer), rèiaimmer (rétamer),
Nannette (Nanette), Nannon, année, bannal, damné,
Anne, etc., pronoqcez : prom-mer, caim-mion, raim-
me, etc., Non-nette, an-née, ban-nal, etc.
Le son n se fait entendre fortement avant le gn doux,
soit que ce gn résulte de l'addition du g dans le mot patois,
soit qu'il existe dans le mot français correspondant : von-
gner, empoingner, saingner, soingner,gaingner, singner,
moingneau, arguingner, raivingner, etc., (rogner, em-
poigner, saigner, soigner, gagner, signer, moineau, taqui-
ner, raviner, etc.).
P
p s'emploie pour b et vice-versà. On dit : beset ou pe-
set (fanes de pommes de terre, tiges de pois, etc.); beser
(prononcez b'ser) oupeser (peser, etc.).
Après le p, comme après le b, / est presque toujours
mouillée : pieun (plein), p\ant (plant), etc., prononcez à
peu près : pieun, piant. (Voir /et L.)
R
Comme l'a très bien observé M. P. Tarbé, et comme l'ont
répété MM. GueninetRay, «on supprime IV» souvent aussi
dans le patois de la forêt de Clairvaux..., moins souvent,
pourtant, que dans les autres formes ou nuances des patois
de Champagne, à en juger par les travaux des auteurs que
nous citons. Si on dit : chanve, chambe, gade, dbre* cône,
code, paler, jadin, veuderet, pèdu, totu, todu, chadon,
modu, pouter, vinaigue, orféve, fiéve, soti, pati, hadi,
prope { , etc., (chanvre, chambre, garde, arbre, corne,
corde, parler, jardin, verderet, Gèvre, sortir, partir, hardi,
1 On trouve souvent ces mots écrits de même, du xm« au xvi*
siècle : paler, pelé, panre, etc., (parler, perle, prendre, etc.).
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28 PATOIS DE LA FORÊT DR CLAIRYAUX
propre, etc.). On prononce ; pour, aivoir, vor, aimour,
etc. (peur, avoir, voir, amour, etc.) 2
H y a même certains mots qui prennent un r de luxe :
/raîte, fruitière, chefre, usur fruit, précorce, espadron, rai-
fristoler, saufre, harper, bandrouillére, cartron, enceintre,
coutre, gître, jairle, etc., (faîte, faîtière, chef, usufruit,
précoce, sauf, rafistoler, espadon, happer, bandouillère,
carton, enceinte, coude, gîte, jale, etc.).
Quelquefois IV change de place ipraûve (pauvre).
Les syllabes finales bre, dre, fre, gre, etc., perdent gé-
néralement IV ; octobe, marbe, novembe, descende, en-
tende, coude, ponde, tonde, offe, chiffe, mette, c'neute,
chante, lette, prope, liéve, etc., (octobre, marbre, novem-
bre, descendre, entendre, coudre, pondre, tondre, offre,
chiffre, mettre, connaître, chantre, lettre, propre, lièvre,
etc.).
Les mêmes syllables au commencement ou au milieu des
mots se changent souvent en beur , cueur, deur, feur, gueur,
etc., beurloque, cueurtien, fanfeurluche* gueurdin, gueur-
lot, ègueurner, virbeurquin, cueurson, peurter, etc., (bre-
loque, chrétien, fanfreluche, gredin, grelot, égrener, vil—
brequin, cresson, prêter, etc.).
Il y a des mots qui gardent, au contraire, IV de ces syl-
labes et perdent la consonne qui le précède immédiatement :
prenre ou penre, tenre, poure, moûre, coure, etc.,) pren-
dre, tendre — adjectif, opposé de dur, — poudre, moudre,
coudre ou coudrier — noisetier, etc. ) l .
r final ne se prononce jamais à l'infinitif des verbes de la
première et de la seconde conjugaison. (Voir au verbe).
4 Dans certains villages on prononce cependant : aivoi, pouvoi,
etc. D'ailleurs, la syllabe our, en particulier, perd le plus souvent son
r : souci l, soude, loude, pou, poutant ou poutiant, etc., (sourcil,
sourde, lourde, pour, pourtant, etc.).
* On trouve de même au xm* et xiv« siècle : panre, poutre, etc.,
(prendre, poudre, etc.).
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PATOIS DB LA FORÊT DE CLAIR VAUX 29
Nous l'avons mis quelquefois, par analogie, à la un de
certains mots de patois pur Unissant en o bref, et sonnant
comme lot, pot, mot, etc. Exemple : virot, gritiot, etc.
v aime à se changer en b : habre sac ou habeur-sai,
cadabre^ raibigoter, etc. , (havre-sac, cadavre, ravigoter,
etc.).
Se substitue quelquefois à Vf. (Voir à VF.)
V
Sur les dix espèces de mots.
Article.
Les articles sont :
Mas. sing. Fém. sing.
ein 4 (un) eul 2 , le ou /' ou 7? (le) eunne, lai, V
Le pluriel, comme en français.
Exemples :
euiAbre, fane, eunn' aigu-Ile, l'oratoire,
ein raigujoue, Z'haibit, eunne vaiche, lai jiment,
etn repassoac, eul chien ou Ze chien, eunne chienne, lai chienne,
ein renard, eul raigujoue ou le raignjoue, eunne raigujoure, lai raigujoure.
Mais devant r suivi immédiatement d'une autre consonne
ou de Ve muet élidé et d'une autre consonne, on transpose
en quelque sorte la syllabe eu de l'article eul, et Ton dit :
1 J'écris ein avec e, à cause du féminin qui donne eu et non u :
eun-ne.
1 Est-ce encore l'eu euphonique, ou est-ce l'ancien article elf
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30 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX
reurpassouc, Veurnard. De même au féminin, on dit aussi
bien leurpassoure, ïeurlique que lai repassoure, lai re-
lique ; et on dira toujours avec l'article indéfini, eunn 1 eur-
passoure, eunn' eurlique, à cause de la difficulté de pro-
noncer eunn' Clique en élidant les deux e muets.
Ainsi cette syllabe eu, espèce de sifflement euphonique,
se place tantôt devant l'article le (eul) auquel il se joint,
tantôt devant le mot suivant, mais sans en faire partie in-
tégrante, comme l'ont cru MM. Coûtant, Guenin, Ray,
Tarbé, etc., puisqu'on dit régulièrement : ein renard, lai
relique, les reliques, les renards 1 .
11 est vrai que certaines personnes, notamment les en-
fants, prononcent quelquefois, par analogie, faisant confu-
sion de l'article avec le nom : ein eurnard; comme j'ai
eutendu dire « en Frique, en Mérique, » par des gens qui
qui confondaient l'A avec l'article la.
Du reste, il est souvent très difficile de distinguer dans la
prononciation française entre : Use remue et il s'eurmue,
pour te regarder, et pour (eur garder* etc.
C'est plus difficile encore en patois, à cause de la rapidité
avec laquelle on élide les e muets...
NOMS ET ADJECTIFS
Voici les principaux noms de baptême, patoisès :
Baptistot (Baptiste), Cadet, Cadichon, Cadol (Cadet), Co-
liche, Colichai*, Colichot, Coulas, Coulaïot (Nicolas), Charli,
Chariot (Charles), Dodo ? Edraot, Mottine (Edme), Falot ou
Phalot? Fanfan, Frère, Frérot, G/aude, G/audiche, G/audot
(Claude), Jacquot, Jeannot, Jeantin, Jeantine (Jean), Louiiot,
Pierriche, Pierrot, Paullot, Quentignot, Thommiche, Toi-
non, etc.
1 De même qu'on dit encore, comme au xiv« siècle
corpion, estattie, etc.
DicjitizedfcKoO<
PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX 31
Babel, Caihaû ou Cathos, Câlin (Catherine), Falotte, Fan-
chette, FiGne, FHlette, Jacquotte, Jeanneton, Geunne, Geun-
nolte (Geneviève), Marguitiew, Mondotte (Edmonde), Nan-
nette, Nannon, Neettolte (Anne, Annettej, Sœurette, Su-
zelte, Tiennett, Tiennon, Tonton, Tontinette, etc.
Ces noms, assez communs il y a une quarantaine d'années,
ne se donnent plus guère aujourd'hui.
Les noms propres et les prénoms prennent presque tou-
jours l'article : Y Henry, eul Durand, lai Mairie, etc. 1 .
Donnons aussi les noms des principales professions :
Airrmha, bûcheron ou copoue au bois, bourrier ou cole-
ron, couturére, couvroue, cocher (prononcez : çoquier),fau-
choue y feurtoue,filloure,laibouroue ou raibouroue, laivoure
de bute, maiçon, marronnier, moichenoue, menusier, mu-
mer, mairichau, pïaifonnoue, raigujoue ou repassoue ou
rèmouloue, rèiamoue ou retamoue, repassoure, rochoue,
semoue, scioue de long, tonnUer (prononcez tonniê), vin-
gneron, veninjoue, etc., (arracheur, — c'est-à-dire ter-
rassier, défricheur, — bourrelier, bûcheron, couturière,
couvreur, cerclier, faucheur, peigneur de chanvre, file use,
laboureur, laveuse de lessive, maçon, fabricant de merrain,
moissonneur, menuisier, meunier, maréchal, plafonneur,
gagne-petit, étameur ou chaudronnier ambulant, lingère,
plâtrier, semeur, scieur de long, tonnelier, vigneron, ven-
dangeur, etc.).
Nous avons essayé vainement de généraliser les règles de
terminaison des noms et des adjectifs... On a déjà pu voir
combien les cas de prononciation, d'orthographe, de défor-
mation varient ; presque toujours les exceptions sont aussi
nombreuses que la règle...
1 Les noms propres sont souvent précédés de l'adjectif possessif
note, vote, là (notre, votre, leur). Les parents, père, mère, frères,
sœurs disent : note Pierrot, note Fanchette, là Baptiste, etc.
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32 PATOIS DE LA FORÊT DR CLAIRVAUX
Voici, cependant, quelques remarques :
La plupart des mots en eur } désignant des professions
marquant Faction, pour ainsi dire, changent eur en où long,
que nous écrirons oue : buvoue, causoue, foyoue, paloue,
mainjoue, fauchoue, dz/oue, feurtoue, contoue, p\antoue y
mentoue ou menteux, traivoilloue, révoue, sacloue (pro-
noncez saquioue), etc., (buveur, causeur, faiseur, parleur,
mangeur, etc.).
Nous n'avons pas cherché à donner dans le Glossaire tous
les mots de cette catégorie * : ils sont à peu près aussi nom-
breux que les mots en eur français. . . Les moins employés
même, si par hasard on les emploie, changent eur en oue :
phrasoue, rimoue, politiquoue, etc., (phraseur, rimeur,
politiqueur, etc.).
Ceux qui se terminent en deur et en leur prennent sou-
vent un i après la consonne dout : fondioue, p\aidioue,
empruntioue, etc., (fondeur, plaideur, emprunteur, etc.).
Le féminin se fait en oure : buvoure, mainjoure, etc.
Quelquefois le même mot a deux terminaisons et deux
sens différents. Ainsi marié fait mairie et mairioue : je
viens de vor soti de VègMge eul jeune mairie et lai jeune
mairiée (je viens de voir sortir*de l'église le marié et la ma-
riée). — Mairier çail ein bieau mairioue ! An H todrot le
nez qui en sotirot enco du lait (Marier cela ? un beau ma-
rieur l un bel épouseur! (le mairion du xiu* siècle), on lui
tordrait le nez qu'il en sortirait du lait.
Beaucoup d'adjectifs en eux changent eux en ou (nous
écrirons oux, pour conserver Yx): fdchoux, velimoux, en-
vioux, pouroux, soingnoux, boilioux, heuroux, malheu-
1 Du reste, nous en oublierons bien d'autres 1 Ce patois se suffit
presque, et emprunte peu de mots nouveaux, peu de mots techniques
surtout : on tourne par des périphrases. Un journaliste s'appelle ein
fiijoue de journal, un puisatier ein creujoue ou creusoue de puts>
un carrier, ein tiroue de piarres, etc.
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PATOIS DR LA FORÊT DE CLAIR VAUX 33
roux y galout, fiévroux^ etc., (fâcheux, venimeux, envieux,
peureux, soigneux, boiteux, etc.).
Cependant, on dit : pairesseux, dangereux, sérieux, re-
ligieux, etc. La plupart des exceptions portent sur les mots
les moins employés, ou les plus nouveaux dans le patois.
Les adjectifs en eux changés en oux ont la voyelle ou
plutôt brève. Cependant cela dépend de la prononciation lo-
cale. En général on peut dire que quand l'adjectif marque
l'action, est employé verbalement, pour ainsi dire, le ou est
long : qui te ronce, rançoue ! (ranceur, tousseur), et quand
il marque l'état, la qualité simplement, il devient bref : ï
ast boitioux, sourd et rançou. (Il est boiteux, sourd et
enrhumé, asthmatique) 1 .
Le même mot peut donc avoir quelquefois deux signi-
fications différentes, selon que la syllabe ou est longue ou
brève : fouilloue, qui fouille, qui cherche, qui furète, fouiU
lou, ou fouillon, ou feuillon, groin ipouillouc, qui pouille,
cherche les poux à un autre ; pouilloux, pouilleux, qui a
des poux.
Os mots ont leur féminin en ouse : enviouse, bignouse,
(\eg est dur), soin g nome, etc., envieuse, chassieuse, etc.
Quelques mots changent leur terminaison eur en eu
ou eux : vouleux (voleur), menteux (menteur), etc.
Les noms en eu sont rares et ne changent guère de termi-
naison : feu, jeu, lieu, etc.; milieu se dit moitian (ceux qui
disent milieu, mouillent 17.).
La plupart des mots en oir se terminent en oi long,
quand la diphthongue n'est pas détruite, ou en ou long (voir
diphthongue oi) : miroie, tiroie ou tiran, avec mépris, ter-
roie, reposoie, mouchoie, airrosoie, ègrugeoie, etc., (mi-
' Boitiow signifie en quelque sorte boiUur : vilain boitioue !
c'est-à-dire: toi qui vas boitant; et boitioux marque simplement
l'état : ç 'ast ein boitioux (c'est un boiteux.)
t. xlix 3
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34 PATOIS DE LA FORÊT DE CLA1RVACI
roir, tiroir, terroir, elc); sacloue (prononcez: saguioue),
dèméloue, racloue, repoussoue, graitlouc, recueillons,
plantoue, frommoue, reposoue (bâton sur lequel on appuie
sa hotte, quand on s'arrête pour respirer), chargeoue, dè-
chargeoue ou dèsargeoue, etc., (sarcloir, démêloir, racloir,
repoussoir, grattoir, recueilloir (jale), plantoir, fermoir,
reposoir, chargeoir, déchargeoir, etc.)
Saloir fait saloie et sailoue; couloir, couloie et couloue ;
dévidoir, dèveudiol; blutoir, beurtieau, etc. On dit même
aussi : airrosoue, ègrugeoue.
Beaucoup de mots en oire ont leur terminaison changée
en oure : mâchoure, baingnoure, mainjoure, baissingnoure,
racXoure [raquioure) ou raclotte, ècumoure, etc., (mâchoire,
baignoire, mangeoire, bassinoire, racloire, écumoire,etc.).
Jabloire îaitjabloue (jabioue, masculin).
Les mots en ou et en oux gardent généralement la même
terminaison : clou (guiou), vrou, mou, fou, doux, etc.,
(clou, verrou, etc.). Dans quelques villages pourtant ou se
change en eu : c\eu, vreu, meu, leup, etc. ! .
Les mots en ard, art, ord, orl, comme lard, bavard, part,
mord, mort, tord, etc., ne changent guère non plus ; seule-
ment ils se prononcent des dents, d'une façon impossible à
figurer, Va ou Yo très bref, IV vibrant... Du reste, comme
nous l'avons dit déjà, la prononciation varie beaucoup d'un
village à l'autre.
Les mots en igné et en ine prennent en général la termi-
naison ingne : baibingne, bobingne, cugingne, dingne, fai-
ringne, èpingne,guingne, lingne, mailingne, mèdecingne,
raicingne, singne, terringne, vingne, cousingne, faimin-
gne, varmingne, matingne, etc., (babine, bobine, cuisine,
digne, farine, épine, guigne, ligne, maligne, médecine, ra-
cine, signe, terrine, vigne, cousine, famine, vermine, mâ-
tine, etc.)
« On trouve leu pour loup du xm' au xv« siècle.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX 35
Les mots en vne se changeât pour la plupart en ungne :
lungne, fortungne, chaicungne ou chsicunne, etc., (lune,
fortune, chacune, etc.)
Certains mots en se, se, si, son, etc., doux, se changent en
ge, géj gi,jon, etc.: cerége, brigè, chogi, aitujon^prinjon^
etc., (cerise, brisé, choisi, artison, prison, etc.) Voir à Ys
doux.
Certains mots en al ont leur singulier en au : vau % (val),
chevau (cheval), etc. : ein mav, ein an-nimau.
Quelques mots en euil, changent euilen eu : ècureu, œu,
chevreu, seu 9 etc., (écureuil, œil, chevreuil, seuil, etc.)
Quelques terminaisons en eil, tille, se changent en oil,
oille : paroil, oroille ou air oille, etc., (pareil, oreille, etc.)
Les terminaisons en mi,mis, ni, nis, nid, nil se changent
fréquemment en min et nin: commin (commis), aimin
(ami), frommin (fourmi), nin (nid), etc. — Voir aux verbes
et participes : tenin, venin, aigonin, fournin, gamin, mins,
endormin, etc 1 .
Dans ce patois, les diminutifs sont très nombreux. On
pourrait presque dire que chaque mot a le sien... Et puis,
quand on en manque, on en (ait, particulièrement des ad-
jectifs et des verbes.
En voici des plus usités parmi les noms. Ils sont géné-
ralement terminés en ot pour le masculin, oite pour le fé-
minin : bouchelot (petit, mauvais boucher), calot (petite
cale), chânot (petit chêne, chdne) , biquot (petite bique, che-
vreau), feuillot (petite feuille), coutelot (petit ou mauvais
couteau), panserot (petite panse, estomac de cochon), fieu-
tot (petite flûte), tuilot (morceau de tuile cassée), p\ainchot
1 Les noms propres même subissent cette altération souvent dé-
préciative... Sur les registres de l'état civil de Fontette des xvii* et
xvme siècles, on trouve le nom de Mony écrit tantôt Mony, tantôt
Monin et Mosgnien. On dit avec une nuance de dédain : du pain
b'nin ou m'nin (du pain bénit), d' l'eau b'nintieu.
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36 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRYAUX
(piainckot, petite planche, bout de planche), piochot (petite
pioche), rhumelot, tronchot, grumelot, pâchelot, poichot
ou pocho, gachenot, couchenot, pouchenot, mouchelot,
saichenot, ratelot, gobinot, ougelot, trouïot, vailot ou vè-
lot, boulot, cuvelot, etc. (Voir au Glossaire pour la signifi-
cation.)
Aiffairotte, quichotte, mainchotte, fourchotte (ne pas
confondre avec fourchette), vaichotte (espèce de prune),
pommotte, poirotte, souchotte, michotte, pellotte,poichotte,
pochotte, gachotte, haichotte, codelotte (on dit code, code-
lotte et courdieau), caichotte, bouchotte (petite bouche; ne
pas confondre avec bouchotte, ou long, jeu), poulotte, rai-
totte,p\ainchotte, burotte, boulotte, chrirolte, coupotie, bro-
quotte, parotte (petite part), fontenotte, piarrotte, curotte,
chaudrotte, ècuellotte ou ètuellotte, èpingnotte, feuselotte,
roulotte, ruellotte, guingnotte, cruchoite, cloiotte, etc., —
(voir au Glossaire.)
On en trouve en et : hotteret (petite hotte), botter et (petit
bot, petit crapaud), etc. ; en on: bureton (petite burotte),
rentillon (petite rente, intérêts des intérêts), pocheton (petite
poche); en i : coucheri (petit coq), cani (petit canard), ain-
gneli (laine d'agneau), etc.; en î long : créotie, etc. (Voir
au Gloss.)
Les diminutifs des adjectifs se forment de même : blain-
chot } blaincholte (de b\anc, blanc), norot, norotte (de nor,
noir), petiolot, petiolotte (de petit), etc.
On fait même fréquemment des diminutifs de diminutifs :
miottotte (de miotte, miette), poichenicot (de poichot ou po-
cho, peu), petiololot (de petiolot, tout petit), etc.
Quelques-uns de ces diminutifs ne le sont que par la forme
et l'origine. Ainsi souchotte ne veut pas dire petite souche,
mais désigne spécialement la souche, le tronc de la vigne ;
burotte nomme, au contraire, une grande bure ou buire,
dont le diminutif est bureton; fmjotte désigne en général la
fraise des bois ; poirotte et pommotte, les fruits du poirier et
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' PATOIS DB LA FORÊT DE CLAIR VAUX 37
du pommier sauvages; rougeotte, un champignon violacé ;
jaunoite, un champignon jaune, etc.
On fait de même des diminutifs de verbes à volonté : chan-
totter, beurluiotter, maingeotter, etc. (Voir au verbe.)
DÉTERMINATIFS
Çt, g* te : ce, cet, celte — (cY devant une voyelle et
ç'te devant une consonne).
Mon, ton, son, not\ vof, 16 : mon, ton, son, notre,
votre, leur 1 .
Mai, tai, soi, etc. : ma, ta, sa, etc.
Mes, tes, ses..., lôs...
Que : quel, quelle : que homme, que femme ! lai que l
(qu'elle est grosse, grande ! etc.)
Té : tel, telle : tèjou ast V prommer, té jou, F huit.
(Tel jour est le premier, tel jour est le huit).
Nun : personne, aucun : ri y ai 2 nun, an ne voit nun*
pa les vingnes. (Il n'y a personne, on ne voit personne par
les vignes).
Tourteus, tourtous, tortous, teurteus, selon les diverses
prononciations; féminin: tourteutes, tourtoutes, etc., si-
gnifie tous, sans exception. Cet adjectif se place ordinaire-
ment à la fin de la phrase, on dira : toutes nos beurbis sont
revenûns; et eulles sont revenûns* tourteutes (toutes nos
brebis sont revenues.) — A Cunfin, on prononce teut (tout);
aux Fosses, tot. p etc.
1 Dans quelques villages leur se rend par leû ou leû.
* Prononcez comme s'il y avait un g : gnai (d'une seule émission
de voix).
3 On disait de même au moyen-âge : voix d'un, voix de nun.
4 Prononcez r'venuns en allongeant, la dernière syllabe, comme
pour la féminiser. De môme tous les féminins des participes en un
ou en In.
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38 PATOIS DE LÀ FORÊT DE CLAIRVAUX
PRONOMS
Je, me, moi, nous, tu, te, toi, vous, ne changent guère.
Dans quelques villages on prononce to ou ta pour toi,
notamment à Cunfin, à Ville-sous-la Ferté, etc.
/, i's, (il, ils), eulle, eulles i , (elle, elles), /, li, lu, lé, le, t%
zeuXy 16 ou \ô (lui, le, elle, eux, leur).
On emploie me, le, pour moi, toi, au régime direct : baille
me, retire te, etc., (donne-moi, retire-toi, etc.).
La syllabe euphonique eu se place encore souvent devant
le pronom je : euje v'rôs (ou vourôs, ou veurôs) bin, qu'ï
fùge (ou fùffie) bieau temps demain! (Je voudrais bien
qu'il fit beau demain). Euje viens, mommanl (Je viens,
maman !).
Quelquefois, on entend ce sifflement de Y eu plus ou moins
fortement avant le deuxième pronom ou la négalion ne :
Euj' me dijôs ou jeumm' dijôs; euj' ne pourras oujeunri
pourras pas (je me disais; je ne pourrais pas). Eujete dijôs
ou jeu? dijôs, etc. 2
Le pronom nous s'emploie à tous les cas, excepté au su-
jet, où il est remplacé pur je, singulier : euje vons ai char-
rue.
1 Le patois du ç'ost, qui emploie l'article lou % prononce aile.
* Gomme nous ayons tu à l'article, cette syllabe eu se transporte
aussi fréquemment devant certains verbes : i' faut qu' j'eur tonne (il
faut que je retourne), et non i faut qu'euje retonne; eull* eurtonne
(elle retourne, etc.). C'est donc bien pour adoucir la prononciation,
et à cause des e muets, puisqu'on dit : tu rctonnes (prononcez rtonnes),
f retonne, plutôt que t'eurtonnes, i' eurtonne, qui s'emploient cepen-
dant aussi quelquefois.
Disons tout de suite, pour en unir avec cette syllabe, qu'on la place
encore devant certains autres mots : pronoms, adjectifs, prépositions,
etc., surtout au commencement de la phrase: euce maitin lai (ce
matin là), eucctus-ci (celui-ci). Quand f — Eudemain ; euje seûs pus
riche que toi. — Eud' combin f On dit : ç'ost reteurli (c'est ridé, ré-
tréci), et eul feu vai Veurteurli ; eulle 1 ast toute eurteurlie, tai
pomme, etc., (elle est toute ridée, ta pomme.)
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PATOIS DB LA FORÊT DE CLAIRYAUX 39
On trouve quelquefois nos ou nos pour nous : viens
nos deux (viens nous deux). Dans quelques villages nons :
viens aiveu nons (viens avec nous).
Le pronom i\ ïs se change en g devant Yn : griy ai rin;
griontrin, griy cùvot nun, griy en ai pus, etc., (il n'y a
rien, ils n'ont rien, il n'y avait personne, il n'y en a plus,
etc.). Prononcez : gnai, gnont, gnan 9 etc., d'une seule
émission de voix, malgré l'y, absolument comme gnai dans
saignait, gnon dans ognon, gnan dans d'Artagnan ou gro-
gnant, etc.
Eux est toujours précédé du son z : euje traivoille pou
zeux (je travaille pour eux), ç'ast et ai zeux, ou même de
faizeux lai majon (c'est d'eux la maison, c'est à eux 1 ).
U pour lui se place devant les voyelles el est toujours
mouillée : f l'ai dit (prononcez jiai dit, je lui ai dit),
f Y Y ai dit (même prononciation, je le lui ai dit) ; devant
une consonne on emploie M ou li : euje M dijôs (je lui disais)
ou euje Y Y dijôs (je le lui disais), ou euje li. . . euje M. . . sans
mouiller les/ 1 ).
Lu et lé (lui, elle) s'emploient surtout après le verbe
être : çast lu, c'ast lé (c'est lui, c'est elle) ; et comme com-
1 Cette bizarre tournure : o'ast d'ai moi, ou de t'ai moi, c'ast de
fai vout, etc., nous paraît résulter de remploi double, redondant,
des prépositions de et d, c'est-à-dire de la combinaison c'e$t à et c'est
de.
* Donc tantôt on mouille, tantôt on ne mouille pas VI ou les / de
ce U y c'est-à-dire qu'on prononce indifféremment gli ou H, soit pour
lui, soit pour le lui. Il doit y avoir confusion de ces deux pronoms.
Comme nous le disions d'ailleurs au pronom i', le g semble aussi
parfois entrer dans ces sons. On peut écrire : ï airot (Il aurait), ïl
iront (ils iront), (prononcez iai, i\U d'une seule émission de voix) ;
mais avec la négation, on ne saurait parfois rendre exactement sans
le g le mélange intime de n avec les pronoms f et y : gri 'airot (il
n'aurait, ou il n'y aurait) ; gn'y seront point (ils n'y seront point), etc.
Après le pronom indéfini an (on) l de li se change souvent en n :
an ni ai, pour an li ai (on lui a).
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40 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVÀUX
plément de préposition : ç'astpou lu, ç'astpou lé (c'est pour
lui, c'est pour elle).
Le (ou F pour le) s'emploient devant les voyelles et de-
vant les consonnes pour représenter les personnes et les
choses, comme en français : je le feras bin (prononcez jeul);
euje taimme bin (prononcez emme); euje te c 1 mande de
le faire ou deul faire (je te commande, etc.). On dit aussi
très souvent du faire, en contractant Ja préposition de avec
le pronom, comme on la contracte avec l'article.
Lia ou Là (leur). Ce son iô doit résulter encore de 17 et
même de deux // mouillées : je \ôz ai dit ou je \6s ai dit
(je leur ai dit), je Y ldz ai dit (je le leur ai dit). (Prononcez
dans les deux cas : jiôz ai dit) l . De même devant une
consonne : euje \6 diras (je leur dirais), ou euje Y\6 diras
(je le leur dirais 2 ).
Au contraire / de l'adjectif possessif 16, 16$ est rarement
mouillée : 16s gens (ses parents, leurs parents 3 .)
Cetu-ci, ceius-ci, ou cetal-ci (celui-ci), cetclle-ci (celle-
ci), cetu-lai ou cetuUlai (celui-là), cetelle-lai (celle-là),
ces-ci, ces-lai, celles-lai ou ceulles-lai (ceux-ci, ceux-là,
celles-là), çai (cela) 4 .
MAS. FÉM. PLURIEL DES DEUX GEXRES
Eul mienne
(le
mien)
Lai mienne
(ta...).
Les miennes,
eul tienne,
lai tienne,
les tiennes,
eul sienne,
lai sienne,
les siennes,
eul note,
lai note.
les notes,
eul vote,
lai vote,
les votes.
eul leur.
lai leur.
les leurs.
1 Cette liaison que j'indique par un z, résulte peut-être du pluriel
Ut?...
* Quelquefois cependant, on prononce lia sans mouiller 17 ; dis lia
que je seûs pâti (prononcez li comme dans lieu), (dis-leur que je suis
parti.)
3 Là ou \ô s'emploie aussi souvent pour eux : ïs s'en vont 16 deux
ou \ô deux (ils s'en vont eux deux, ensemble).
4 Ancien français : cestui, cette-cl, etc.
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PATOIS DE LA FORÊT DB CLAIRYAUX 41
\Jo de note, vote est loag oa bref, fermé ou ouvert, selon
les pays.
Le pronom indéfini on se prononce an. Nous écrirons an
pour distinguer ce mot de en pronom ou préposition [ .
Verbe et Participe.
Verbe été a (être).
PRÉS. DI L'ilfD.
IMPARFAIT.
PASSÉ
Euje ou je seûs,
J'ètôs ou ètaûs,
Euje ou je seûs z*eue,
t'ées »,
t'ètôs,
fées z'eue,
i'ast *,
i'ètot»,
i'ast z-eue 8 ,
je sont (oa euje).
j'è tains 7 ,
euje ou je sons r-eue,
vous êtes 6 ,
vous etains,
tous êtes r-eue,
i's sont.
i's ètaint.
i's sont r-eue.
1 On trouve an pour on dans les contes des xn* et xm* siècles.
' Le premier é de été est à la fois fermé et long.
8 L'u de tu 8'élide. Ce mot se prononce exactement comme il est
écrit, c'est-à-dire comme la dernière syllabe du participe gâtées. Dans
quelques villages, cependant, l'é fermé devient ouvert.
4 Cette syllabe est longue, et nous croyons devoir l'orthographier
ainsi, (prononcez iâ). Dans les interrogations cet ast se change en eust
(prononcez eu) : eust-ce que tu v'rôs m'en bailler f (est-ce que tu vou-
drais m'en donner?)
5 Le premier é est à la fois fermé et long comme à l'infinitif. Du
reste, nous ne saurions trop le répéter, les voyelles deviennent lon-
gues ou brèves, les e et les o fermés ou ouverts, d'un village à un
autre.
6 Généralement les deux premières personnes de l'imparfait ontl'd
fermé et la dernière syllabe longue ; la troisième a l'o ouvert et bref,
comme dans mot, lot, flot; l'é redevient ouvert dans ce temps... (pro-
noncez iètot). Il arrive souvent ainsi, dans notre patois, particulière-
ment dans les verbes, que la longueur ou la brièveté d'une syllabe
donne au mot une signification différente ou un rôle différent... (Voir
aux adjectifs en ou) .
7 Prononcez ètains, en traînant un peu la dernière syllabe. Nous
avons retranché l'e de ent à la 3e personne plurielle pour qu'on ne
puisse pas prononcer comme en français.
8 Qu'est-ce que ce mot eue ou zeue (prononcez comme queue) , ce
participe passé qui sert aux trois verbes être, avoir et aller f On dit
également : je seûs z-eue mailaide; je seûs z-eue aux vlngnes ;j'a*
z-eue mai part. (J'ai été malade; je suis allé aux vignes; j'ai eu ma
part.) On dit : j'y seûs z-eue ou j'y ai z-eue pour j'y suis allé.
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42 PATOIS DB LA FORÊT DE CLAIR VAUX
rOTOR CONDITIONNEL PRÉS. DU 5DBJ. IMFARP. DU 8UBJ.
Je serai (ou euje), Je ou euje ssrôs, Queje(pr.queuj')sôes, Que je feue,
tuseraies(pr.serée), lu serôs, que tu sdes* que tu feues,
i 'serai, i'serot*, qu'i'sot, quT feue,
euje ou je serons, je se rai as *, que je sains 6 f que je feus&ains,
▼ous seras l , vous serains, que vous sains, que v. feussains,
i's seront. i'sseraint 4 . qu'i's saint. qu'i's 7 feussaint.
* Seras, raz ou raes? Nous avons orthographié comme on pro-
nonce.
1 L'o est généralement ouvert et bref comme dans paletot.
8 Ou euje serains. Cet eu pouvant s'appliquer toujours devant le
pronom je suivi d'une consonne, même au subjonctif, après la conjonc-
tion que, nous ne reviendrons plus sur cette observation. — Ve de je
ne se fait jamais sentir dans la prononciation.
4 Seraint et serains, comme ètaint, chantaint, chanter aint, etc.,
se prononcent en allongeant la fin de la dernière syllabe.
5 Prononcez sô long — à la 3° pers. l'o est bref et ouvert.
6 Même observation que pour seraint, qnant à la prononciation. —
Résumons : os, syllabe longue et ô fermé, pour les deux premières
personnes de l'imparfait et du conditionnel ; ot, syllabe brève et o ou-
vert pour la 3* personne du singulier de ces deux temps ; ains, oins
et aint se prononçant d'une manière longue aux trois personnes du
pluriel de ces mômes temps ainsi qu'aux trois personnes du pluriel
du présent du subjonctif. Ceci s'appliqus à tous les verbes. — Remar-
quons cependant que dans quelques villages la 3' personne du sin,
gulierde l'imparfait et du conditionnel, est en ai : i' dat, f devrat-
(il doit, il devrait). — On dit à Cunfin : Et ta, norot ? Et ta, rou-
geolf Si mon cul s'effondrât tu seras binpenot. (Et toi, noirotf Et
toi, rougeotf Si mon cul s'effondrait, lu serais bien capon). Devinette :
dialogue entre le Feu et la Chaudière.
7 h'$ du pronom i's (ils) ne se fait jamais sentir : on prononce :
i' sont, Vêtaient, ï seront, qu'i saint, font, i' ait aint, qu' ï aint,
i' 1 iraint, etc.
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PATOIS DB LA FORÊT DE CLAIRVÀUI
43
Aivoir ou aivoi (avoir).
PRÉSENT. DE l/llfD.
IMPARFAIT
PASSÉ
J'ai»,
J'aivôs ou aivaûs, J'ai r-eue,
t'aies •,
t'aivôs,
t'aies r-eue,
Tsi •.
i'aivot,
i'ai ar-eue,
j'ons,
j'aivains,
j'oos r-eue
tous aftes 4 ,
vous aivains, tous aftes z-tue,
i's ont \
i's aivaiot.
i's ont *-eue.
FUTUR
COItDITIOXIfEL
PRÉS. DU SCBJ. IMPARFAIT. DU SUW.
J'ai rai,
J'airôs ou raûs t
, Que j'ôe, Que j'eue,
t'ai raies (proa. fairées)
6 t'airôs,
que t'ôes, que feues,
i'airai,
i'airot,
qu' i'ot, qu* i'eue,
j'airons,
j 'airains,
que j'ains, que j'eussains,
tous airâs (m ou raes?),
vous airains,
que vous ains, que vous eussains,
i's airont.
i's airaint.
qu' i's aint. qu' i's eussaint.
1 Ai ouvert comme dans clair, air.
* Se prononce absolument comme la même personne du môme
temps du verbe être. Nous l'orthographions différemment pour conci-
lier autant que possible l'étymologie avec la prononciation. — (Voir 4 .)
• Prononcez iai, comme une diphthongue, d'une seule émission de
voix.
* Môme observation qu'à la seconde personne du singulier... Dans
quelques villages, cependant, l'ai est ouvert aux deux secondes per-
sonnes, comme à la première du singulier et on supprime le t à la se-
conde personne du pluriel, qui se prononce alors comme la seconde
du singulier : vous aie*. Nous pensons donc qu'on doit écrire : Vous
zUesein bieau couchon, M. te Curé..., et non vous êtes, comme quel-
ques-uns l'ont cru ; puisqu'on dit au pluriel : /'ans ein bieau cou-
chon, et au prés, du sub. : i' faut que vous ains toujous ein pus bieau
couchon que les autes... y etc.
> Prononcez iont y comme une diphthongue. (V. la note 7 de la
page 42.) — C'est une règle générale d'ailleurs, qui admet très peu
d'exception : Vi se môle toujours intimement à la voyelle suivante.
• Dans quelques villages, Y ai fermé devient ouvert.
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44
PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIE VAUX
Euje chante >,
tu chantes,
i'chante,
euje chantons,
vous chantez,
i's chantent.
Chanter
Euje chantôs,
tu chantôs,
i'chantot s f
euje chantaint,
vous chantains,
i's chantaint.
roToa
Euje chanterai,
tu chanterates (pr. chanter éë),
i 'chanterai,
euje chanterons,
▼ous chanteras 3 ,
i's chanteront.
COXDlTIOSlfEL
Euje chanteras,
tu chanteras,
i'chanterot,
euje chanterains,
▼ous ehanterains,
i's chanteraint.
J'ai chanté,
t'aies chanté,
i'ai chanté,
j'ons chanté,
vous aftes chanté,
i's ont chanté.
PRÉ. DO SUBJ.
qu'euje chante,
que tu chantes,
qu' i'chanle,
qu'euje chantains,
que vous chantains,
qu' i's chantaint.
L'Impératif se fait du présent de l'Indicatif en supprimant
les pronoms.
On trouve des traces du passé défini et de l'imparfait du
subjonctif. Nous avons entendu des personnes âgées dire :
J'en bures (nous en bûmes). T faurot qu'euje fùgie, qu'euje
fdhgissains (il faudrait que je fisse, il faudrait que nous fis-
sions), au lieu de : J'en ons bue ou beue; ï faurotqi/euje
f*\je, faijains... Il nous souvient de trois frères, contem-
porains de mon aïeul, que la jeune génération surnommait :
J'en bures, S en heures et S en buvires. Mais ces temps sont
très peu employés hors du verbe être et du verbe avoir, et
nous n'en parlons que pour mémoire.
Nous bornerons là nos conjugaisons, pour ne pas faire
4 La difficulté de prononcer/ chante en supprimant Ve du pronom
je, amène ici forcément la syllabe eu.
1 Dans quelques villages on prononce : i f chantât. — (Voir la même
remarque au présent du subjonctif du verbe être.)
3 Quelquefois cette 2 a personne pluriel se confond dans la pronon-
ciation avec la seconde du singulier : vous ne vous plaindrées pas. . .
(Vous ne vous plaindrez pas...) Doit-on écrire drezf Est-ce la seconde
personne du pluriel qui est employée pour la seconde du singulier
et réciproquement?
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX 45
une véritable grammaire. Au surplus, dans le Glossaire,
nous citerons à l'occasion, et même nous conjuguerons
différents temps de verbes en ir, oir et re.
Ces verbes d'ailleurs sont beaucoup plus irréguliers qu'en
français. Même, parmi ceux de la première conjugaison,
peu suivent exactement le modèle chanter. Ainsi hier (lier;
prononcez lo-ier), fait : je /de, tu lôes, etc. ; que je loye
(prononcez /o-ieu), elc. ; pâcheler fait : que je pâcheulle,
etc.
LV final de l'infinitif de la première conjugaison ne se
prononce pas; mais, comme nous l'avons dit, nous le con-
servons, attendu qu'il en est de même en français.
Pour la 2 e conjugaison, nous le supprimons, car il ne se
fait jamais sentir. L'infinitif sonne absolument comme le
participe passé : J'ai fini; ï faut fini 1
Certains verbes en nir (participe passé : m), changent
nir, à l'infinitif, et ni au part, passe, en nin : aigonin,
fournin, garnin, dormin, endormin, etc., (agonir, fournir,
garnir, dormir, endormir, ou agoni, fourni, etc.) Venir et tenir
ayant, ainsi que leurs dérivés, l'infinif en in, ont le participe
passé en un: venun^ tenun % revenun, retenun, etc. Ces
participes en in ou un ne changent pas au féminin; seule-
ment on allonge la syllabe finale en la prononçant.
Dans quelques villages, à Cunfin et Ville-sous-la-Ferté,
par exemple, on supprime aussi l'r final des infinitifs de la
3* conjugaison, et on prononce : aivoi, pouvoi, saivoi
(avoir, pouvoir, savoir).
A la 4 e conjugaison, on supprime généralement ou IV
de la terminaison à l'infinitif, ou la consonne qui précède
cetr : mette, tende, penre, etc., (mettre, tendre, prendre,
etc.).
Il y a aussi des participe en in ou plutôt ins dans cette
conjugaison, prins, minSj aipprins, soumins, etc., (pris,
mis, appris, soumis) ; an féminin, la syllabe in ou ins, de
brève devient très longue, simplement.
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46 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX
Sentir et ses composés ont le participe passé en u, ne :
$entu,sentue (senti, sentie).
Les verbes en ailler (et on en compose ainsi, selon les be-
soins) marquent, pour la plupart, la répétition ennuyeuse,
la persistance inutile, agaçante, incomplète de Faction. U
y a un certain mépris, un reproche, de l'impatience dans les
mots : gibailler (de giber, jouer, s'amuser, plaisanter), se/?o-
menailler, maingeailler, beuvailler, tr&inailler, rôdailler,
chaissailler, glissailler (de glisser, patiner, courir sur la
glace), etc. Du reste, ils ont à peu près la signification qu'ont
en français les verbes de même terminaison : tirailler, ri-
mailler, courailler, etc. Nous n'en donnons que quelques-
uns dans le Glossaire, les plus communément employés.
On répète presque toujours le pronom i\ i J s (il, ils) après
un nom sujet : note champ, i* ast juste dans lai baisse
(notre champ est juste dans la basse — basse ou baisse, en-
droit plus bas, dépression de terrain, petit vallon).
MOTS INVARIABLES
Nous n'avons rien à signaler de particulier sur les ad-
verbes, les prépositions, les conjonctions... Nous dirons
seulement que les interjections sont assez fréquentes et très
expressives dans ce langage brusque, imagé, plein d'onoma-
topées, de mimologismes. Citons-en quelques-unes pour
exemples : ac 9 ac ac ac, cri pour marquer la sensation de qui
se brûle ou se pique ; iche, iche iche iche, pour exprimer
la sensation du froid ; oille, oille oille oille ou oye oye oye
(ahi?) pour exprimer la souffrance en général; frouste (qui
a donné le verbe frouster); poigre (pouacre?), beurdôo,
pûte, vourrr, ghiss, pitotot, housse ou ousse, etc. (Voir ces
mots au Glossaire).
Encore deux ou trois observations et nous clorons cette
préface ou introduction déjà trop longue.
En général pour faire une gradation, on répète le même
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAU1 47
mot ou le même membre de phrase plusieurs fois : ï y en
ai cheû, ï y en ai cheû, de ç'te pieue ! (Il en est tombé, il en
est tombé de cette pluie !) En italien on dit de même : met-
te te lo, vivo vivo nel fuoco (mettez -le tout vif dans le feu).
On remarquera une tendance à donner aux mots étranges,
techniques, inconnus, une orthographe positive d'après la
signification apparente des sons, la ressemblance que ces
mots ont avec d'autres mots connus, vulgaires. Ainsi, on dit :
virbeurquin (vilbrequin), de virer, tourner; F eau danum (lau-
danum) ; eau pionne (opium) ; feu nomenne (phénomène) ;
sang suce (sangsue); Mathieu sailè (Mathusalem); sang
d oreille (centaurée); mère eurluyingne ou r lugingne (mé-
lusine); mouche catholique (cantharide) ; Marie f ordonne
(majordome); pierre amide (pyramide); aigledon (édre-
don), terre aspic (thlaspi), estropisie (hydropisie), etc 1 .
Quelquefois le mot déformé, pa toisé, emporte une
signification différente du français, une idée de mépris qu'il
n'a pas quand il est bien prononcé. Ainsi on dira : mets tes
guêtres, et ç'ast ein vieî tr&lne-gdtres ; ote tes sales gdtres
du carron (c'est un vieux traîne-guêtres; ôte tes sales guê-
tres du coin de la cheminée). 11 y a même certains mots
qu'on n'emploie jamais qu'avec une nuance de mépris,
par opposition au mot français ou quasi français. Une mère
dira à son enfant : vai faire coper tes cheveux (va faire
couper tes cheveux) ; et : n'euscueille pas tes gogans su
note table (ne secoue pas ta perruque, tes crins, sur notre
table) ; mets tes cueulottes propes pou ailler ai lai messe
(mets tes culottes propres pour aller à la messe) ; et : brisa*
que ! euje seûs houdée (ou oudée?) de raic'môder tes mai-
i Phémie des Scènes de Bohème disait peigne noir, pour peignoir ;
et nous avons entendu le tambour de ville de Bar-sur-Aube, qui pro-
menait un âne à vendre au détail, terminer ainsi son annonce en
montrant le quadrupède c . . . dont voici Y espèce humaine t » — il
voulait dire le spécimen.
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A
48 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX
ringues (brise-tout! je suis fatiguée de racommoder ton
pantalon.)
Nous le répétons, nous n'avons pas recherché les origines
possibles des mots, et pour cause... Cependant, quand une
étymologie nous a paru certaine ou très probable, nous
avons mis en italiques le radical supposé suivi d'un point
d'interrogation.
Nos exemples sont généralement pris dans les maximes,
les proverbes, les' dictons populaires, formules, devinettes,
etc., ou tout au moins choisis parmi les locutions et les
phrases les plus fréquemment employées.
Quand les mots présentent quelques difficultés de pro-
nonciation avec l'orthographe du radical que nous tâchons
de conserver, nous les écrivons dans l'exemple, absolument
comme on les prononce. Ainsi nous écrivons sâc\ot en titre
avec 17 mouillée d'origine (sarcloir), et sâquiot dans
l'exemple (ou entre parenthèses, quand il n'y a pas d'exem-
ples).
Pour ne pas grossir inutilement notre recueil, nous en
avons écarté, en grande partie, les mots qui ne diffèrent du
français actuel que par une nuance de prononciation, par
des accents transposés... Ainsi panais qu'on prononce pa-
née, ètaux qu'on prononce èto, etc.
D'un autre côté, nous avons cru devoir y introduire quel-
ques mots français employés avec une signification tout à
fait différente de la signification française, comme par exem-
ple : curer, brancher ou broncher, fouler, etc. — (Voir au
Glossaire).
Un savant chercheur pourrait-il trouver là-dedans, une
origine, une filiation, la confirmation d'une seule hypothèse?
Nous le souhaitons. En tous cas, nous avons fouillé avec
émotion dans nos souvenirs... C'est notre premier langage,
et nous sommes suffisamment payé de notre peine.
Pour donner une idée de l'assemblage des mots, de la
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAItVAUX 49
construction, de l'harmonie des phrases, nous avons per-
pétré le sonnet que voici :
A M. E. SOCARD
Ces méchant' écœurjoux qui ont * lâché lai lés vingnes,
Qui s'en sont zeûs bè'lun, ai l'école, ai Pairi,
I's * ont bieau paie meux qu' nous, mett' des cheminges ûngnes
Les joua, des grands chaipés, des cales en midri;
End' tous lés taftions moi jeunn' bafll'rés pas quat' dingnes
De note chanve, ma fié, pas même de matri !
Et quand i's raippoutraint des sous pieun deux charpingnes,
Jeunn' v'rés point m' dèrainger d'çai pou les ailler qu'ri.
I's n' croyent a pus ai rin, i's tendent lés naqueltes,
Quand eul grand venredi, vous n' v'iez pas mainger d' lard.
D'ailleurs i's sont gormands, n'ié faurot que d'iai part.
Vous ait' bieau les boquer, défaire vos casquettes,
I's n' vous r'cueuneuchent pus ! Ma poutant si, quéqu'fois,
I's vous digent bonjou. . ç'ast quand i's ont b'sun d'vos voix !
Traduction
Ces méchants morveux qui ont abandonné leurs vignes,
qui s'en sont allés bien loin à l'école, à Paris, ont beau
parler mieux que nous, mettre des chemises fines, de
grands chapeaux (à haute forme) les jours ouvrables (par
opposition au dimanche) une casquette pointue, en cône,
(un képi) ; je ne donnerais pas, moi, de tous leurs co-
lifichets, leurs nippes, quatre brins de notre chanvre, ma
foi, pas même quatre brins flétris, desséchés. — Et, quand
ils rapporteraient des sous (de l'argent) plein deux corbeilles
1 Prononcez : quUmt y iont, d'une seule émission de voix.
' Prononcez : cro-ille.
t. xux 4
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50 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUI
(des espèces de mannequins d'osier), je ne voudrais pas me
déranger de ça (en faisant claquer son ongle sur ses dents),
pour les aller chercher i .
Ils ne croient plus à rien ; ils ricanent lorsque vous refusez
de manger du lard le Vendredi- Saint. D'ailleurs, ils sont
gourmands; il ne leur faudrait que de la viande !
Vous avez beau les frôler en passant, ôter vos casquettes :
ils ne vous reconnaissent plus ! Mais, si pourtant : quelque-
fois ils vous disent bonjour... C'est quand ils ont besoin de
vos voix ! (au moment des élections).
1 Ordinairement les parents, les amis qui possèdent des chevaux
vont chercher aux gares ou aux bureaux de messageries, les jeunes
étudiants, les employés, etc., qui reviennent passer des jours de va-
cances dans leur village natal.
J
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GLOSSAIRE'
abbe, n. c; arbre : ein gros ôbre (un gros arbre); entre Vàbre et
l'ècorce (entre l'arbre et Técorce...)— De aubre ? xni« et xiv #
siècle.
ac, ac ac ac ou Aie Aie Aie Aie 3 , interject.; cri de qui se brûle,
se pique, ou ressent une douleur semblable à une brûlure ou à
une piqûre. La personne qui empoigne par mégarde un charbon
incandescent ou une épine crie ac! l'enfant qu'on fouette crie ac
acacl — ChouctThév.*
accin, n., clos, propriété attenante à la maison; — de accedo ?
achi, n. c; essieu : % ai cassé l'âchi de sai voitiure; ï.ast fort
comme ein âchi de fer. (Il a cassé l'essieu de sa voiture; il est fort
comme un essieu de fer).
acle, ou haclb? (en), expression qui signifie en guenilles, les habits
tout déchirés; quelquefois tout percés, tout usés, en haillons :
*' ast rentré en aquieu du bois (il est rentré les habits tout dé-
chirés...); euje seûs en aquiexx (je suis en guenilles, en haillons).
4 Comme il n'y a pas d'à long ni d'italique en petites capitales, le
lecteur voudra bien se reporter à l'exemple pour avoir la prononcia-
tion exacte de certains mots.
1 Quand les mots auront ainsi deux orthographes, ou plutôt deux
manières de se prononcer, nous placerons la plus employée la pre-
mière.
• Nous citerons de cette façon les mots correspondants ou sem»
blables des autres patois de l'Aube, quand nous les connaîtrons. . .
Les signatures abrégées devront se lire ainsi :
Gros. : Grosley; — L. C. : Lucien Goûtant; — P. T. : Prosper
Tarbé ; — G. et R. : Guenin et Ray ; — ch. de n. : chanson de noce
(Eugène Ray) ; — Thév. : Thévenot.
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52 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX
aoa don et aigai don, interj . ; tiens, regarde donc : aga don F bel
ougelot, là bas! (Tiens, regarde donc le bel oiseau là-bas !) S'em-
ploie aussi pour marquer ï'étonneraent, l'admiration : ï ast zeue
paie lu-méme au Préfet — aga don ! ï ai ousu ? (il a été parler
lui-même au Préfet — tiens, il a osé?) Du vieux verbe agarder.
— Aga don /... G. et R.
âge, n. et adj.; aise : t" ast ai son âge (il est à son aise); i'ast bin
âge (il est bien aise, bien content).
âgé, adj.; aisé : çast bin âgé quand an fait ce qu'an veut (c'est bien
aisé, quand on fait ce qu'on veut) ; ce moinge-lai, i' ast bin âgé
(ce manche-là est bien aisé}. Çast bin agé 9 employé adverbiale-
ment signifie : après tout, malgré tout, etc., c'est l'expression
d'un regret, d'une protestation ironique : çast bin agé 9 ï ne fait
rin de lai sainte jonnée (c'est bien aisé, il ne fait rien de la sainte
journée). Un homme bat son cheval, sa femme lui crie : çast bin
âgé, tue-le ! — Ajé et benajey, L. C. ; aige y aise, P. T.; âgé, G. et
R.; aje t ch. de n.
agement, n.; récipient, vase quelconque en bois, en terre, en métal,
etc. : aies-Ju ein agement pou mett' eul vin qui restée (as- tu un
vase, un récipient pour mettre, etc.)
âges, n.; aîtres ou êtres : c'neute les âges d'eunne majon (connaître
les êtres d'une maison).
ai, prép. et verbe, à et a : ï ai ai boire et ai mainger (il a à boire
et à manger); ai /' s'emploie souvent pour au : baille ai mainger
ai V chien (donne à manger au chien).
aibacher, v., abaisser; s'aibâcher, se courber : aibâche4e, que je
monte ai graou, ai cavale su ton dos (abaisse-toi, courbe-toi, afin
que je monte sur ton dos...) — Voir ai graou et ai cavale.
aibauoue, n., bajoue, partie de la tête d'un porc; par analogie
grosse joue pendante : i ast gras comme ein fouin, t ai des ai'
baijoues !..
aibané (on èbané?) adj. ou part., grand ouvert. Se dit particuliè-
rement d'une porte ou d'une croisée : ïs ont * lâché lai pote, lai
croisée ouvrie toute aibânée (ils ont laissé la porte, la croisée
ouverte toute grande). Ou même, sans le participe ouverte ....
lai pote tout aibânée.
aibier, v., abuter, jouer un premier coup pour déterminer le rang
4 L'* de fs (ils) ne se fait jamais sentir. Prononcez iont.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAÏRVÀCX 53
des joueurs, au palet, à la galline, à la bique, etc. : aibie le*
prommer, tu jouerûes Vdarrer (abute le premier, tu joueras le
dernier), lai bin aibié, ma t'ai mal joué (il a bien débuté, mais
mal continué, mal fini).
aibîmmer, y. (prononcez aibin-mer), abîmer, briser, fatiguer outre
mesure, détruire, etc. : % ai aibîmmé sai faulx dans les piarres
fil a abîmé, brisé sa faui dans les pierres); ï aibîmme son chevau
ai V faire traivoiller si jeune (il abîme son cheval, etc.)
aiboutener, v., boutonner : aibouteunne tai cueulotte (boutonne ta
culotte). Momman, je me seûs aiboufné tout seul. — On dit
aussi raibouiener dans le même sens.
aibraimmer (prononcez aibrain-mer), v., avoir faim, une faim ca-
nine ; être affamé en tout temps : i' aibraimme, comme si gri a aivot
pas maingé depeûs huit jous (il est affamé comme s'il n'avait pas
mangé depuis huit jours); an dirot qui* aibraimme : %' ai tou-
jous eunn' aune de boyau veud'ieu (on dirait qu'il a la faim calle :
il a toujours une aune de boyau vide).
A1BRUVER, v., abreuver.
aibuger et aimuger, v., amuser. (Voir aimuger).
aicabler, v., accabler. Prononcez : aicâbier.
àicc'môdé, part. pas. du v. aiccmôder, accomodé, apprêté, assai-
sonné : vêlai ein \iéve qui ast bin aicc'môdé (prononcez quiast
d'une seule émission de voix). (Voilà un lièvre qui est bien ac-
commodé). — On prononce de même raicc'môder, raccommoder
et mode, mode. — Acmodé, apprêté, ch. de n.
aicc'môder, v., accommoder. (Voir akc'môde). — On dit dans le
même sens : airrainger (arranger).
aiccoler, v., accoler, lier aux échalas les nouvelles pousses de la
vigne. — Ècoler, acoler la vigne, Gros.
aiccouver (s'), v., s'accroupir : %' ast lai aiccouvé dans Vâtre qui se
chauffe, en piaice d'aiguger ses pâchés (il est là, accroupi dans
l'âtre, se chauffant an lieu d'aiguiser ses paisseaux) t'aies don les
côtes en long? bâche te, mâtin, et ne (aiccouve pas f (tu as donc les
côtes en long? baisse-toi, mâtin, et ne t'accroupis, ne t'écrase pas
sur tes talons). — S'écouver, se blottir, s'accroupir, Gros.; s'ac-
couver, s'affaisser, s'accroupir, Thév.
1 II est bien entendu qu'on ne prnoonce jamais Ye de le, quand on
emploie cet article.
• Si gn' pour s'il n'.
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54 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX
aiccueulé, adj. ou part, passé du verbe s' aiccueuler ; s'emploie no-
minativement, et signifie petit, qui a les talons encore trop près
du derrière, trop jeune; s'accompagne ordinairement d'un
autre adjectif comme prauve (pauvre), méchant, etc. : Méchant
aiccueulé, prauve aiccueulé! etc., s'applique à un gamin qui veut
faire l'homme trop tôt, qui projette quelque chose au-dessus de
son âge ou de ses forces : çai fume, çai pipe, euce méchant aie-
cueulé-lai t Se dit aussi d'un homme court et chétif.
aiccueulée, n., grande quantité d'une matière quelconque, versée
brusquement ; tas, hottée, fardeau sous lequel on aiccueulé, on
ploie : eunn 9 aiccueulée de piarres; i' en empoutot eunn' aicvueulée
dans sai hotte; c'est-à-dire, il en emportait une quantité qui le
faisait ployer; grande averse, provenant d'une nuée qui s'écrase
toute dans le môme endroit : i' ai piû, ï ai piû, t'en ai cheû eunn
aiccueulée du diâbe f (Il a plu, il a plu, etc.) On dit aussi ècrôlée,
ruche et verse : aiccueulée est plus énergique. — Aculey, averse, •
L. C.
aiccubuler, v., acculer : aiccueuler ein tombereau, le faire pencher
à l'arrière, le verser, le décharger ; aiccueuler sous quelque chose,
ployer sous le poids. Saiccueuler, s'abaisser, s'accroupir, s'aic-
couver : aiccueule4e darrer lai hâe, tu serties meux cûché (écrase-
toi, accroupis-toi derrière la haie, tu seras mieux caché).
aichaitti, v., affriander, rendre gourmand comme un chat : ï ast
zeue mailaide, çai-U'ai aichaitti. (11 a été malade, cela Ta rendu
friand, difficile). L'infinitif et le part, passé s'écrivent de même;
— de chaît.
àiGHETER, aigeter et aisseter (s), v., s'asseoir : t' s'aicheute su ses
tailons (il s'asseoie sur ses talons,) ; aisseute-te ai bas (asseoie- toi
par terre); t' s ast aigeté dans le mou (il s'est assis dans l'humi-
dité, dans un endroit mouillé). — Acheteij, L. G.; s'achetey, P.
T.; s'ajeter, G. et R. — On prononce de môme aicheter (ache-
ter).
aighbter, v. acheter.
AIGHETÔ, AISSETÔ, AICHETOUE, AISSETOUE, AIGETOUE, (OU AICHETEAU?
etc.), n., siège improvisé, sellette, banc, tronc, éminence de ter-
rain, et particulièrement la pierre que disposent pour s'asseoir
les vignerons, les braconniers à l'affût, etc. On dit aussi stô et
stoue : J'aivôs fait ein bel aistou, ein bieau stô, qui que ç'ast
qui me l'ai démoli, retivcliè, prins ? ("J'avais fait un beau siège,
qui est-ce qui me l'a démoli, renversé, pris ?) — Acketou, L. C.;
acheton, achetou, P. T.; ajetou, G. et R.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRYAUX 55
AicHBTOUB, n., acheteur.
aichevi et aigevi, v., iiif. et part, passé, achever; en particulier :
finir de tuer, donner le coup de grâce : Y bouge enco, ï faut l'ai-
chevi. (Il remue encore, il faut l'achever).
aicoitot, n., abri ; se metf ai l'aicoiyot, se placer dans un en-
droit où Ton est garanti du vent, du froid, de la pluie, surtout
du vent : Je n'ai pas zeue trop frod pou goûter, jeum' seûs
mins ai l'aicoiyot darrer l'èpingne. (Je n'ai pas eu trop froid pour
goûter (dîner), je me suis mis à l'abri derrière l'épine); ces çops
lai, qui étaint f ai l'aicoiyot desous les âbres, i's ne sont pas zeùs
gelés (ces ceps là, qui étaient abrités sous les arbres, n'ont pas
été gelés). — Ècoyau, abri, Gros.; acoyau et acoyo, L. C; acoyau
a coyo, P. T.; à coyo ou à l'acoyo f G. et R.; accoi (abri), Thév.
— Quand il s'agit de la pluie on dit plutôt ai Vaibri (à l'abri).
AicouREAti (ouêcourô?) n., branche sèche, écorcée t à demi pourrie,
tombée d'un arbre dans les forêts, ou y tenant encore : i' ai rai*
massé ein fagot d'aicoureaux (il a ramassé un fagot A'aicoureaux;
s'ï fayot ein grand vent, tous ces aicoureaux lai cheurraint (s'il
faisait un grand vent, tous ces aicoureaux-h, tomberaient).
aicouter, v., soutenir, étançonner, caler : on aicoute un mur qui
menace de tomber, une hotte qu'on veut faire tenir debout, une
roue de voiture pour qu'elle n'avance pas, etc. S' aicouter, se
soutenir, s'appuyer à, contre quelque chose : euje me seûs aicoutée
contre lai murûlle pou ne pas cheur (je me suis appuyée au mur
pour ne pas tomber). Ne pas confondre avec écouter (écouter),
entendre, obéir. — Acotiey, caler la roue, L. G. ; acotiey, ap-
puyer, P. T.; acoter (s'), s'appuyer contre..., Thév.
aicoutot(ou aicouteau?) n., pierre, tronc, etc., qui sert à aicouter
quelque chose; en particulier le bâton qui sert à aicouter une
hotte, quand on veut la faire tenir debout. — Ne pas confondre
avec ècoutot. — Écotot, appui en forme de coin, Gros.
aicroche, n. , mangeoire de la vache, espèce d'auge placée sur le
sol, devant la tête de ces animaux, et où l'on met leur nourri-
ture : renveuche lai chaudére de brouvée dans l'aicroche de lai
vsiche (renverse la chaudière de brouvée dans l'ange de la vache) ;
lai vûche, euW ai brigé son aicroche (la vache a brisé...). De
crèche? par la confusion de l'article avec le nom, de lai avec
l'ai?)— Ne pas confondre avec aiccroche, 3 e pers. du sing. du
prés, de l'ind. du verbe aiccrocher, accrocher.
1 Prononcez quiétaint.
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56 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUÏ
aicrômi et aicroumi, part. pas. (du verbe, j'aicrômi et j'aicroumi,
s'accroupir, s'aiccouver, peu employé à l'infinitif) accroupi,
resserré; qui a la tête renfoncée dans les épaules : cul co ï ai
l'air mailaide, i'ast aicrômi, ï trûne les peneaux... (le coq a
l'air malade, il est accroupi, il a le cou renfoncé, il traîne les
ailes...); eurdrevssete don, peut 1 aicrômi f (redresse-toi donc,
vilain refrogné, maussade, endormi I)
aicueu (ou ècueu?) part. pas. écorché, excorié parle frottement, la
marche ou la chaleur, à l'intérieur des cuisses : sitiât qui 9 mar-
che, t" ast aicueu, tant i' ast gras (aussitôt qu'il marche, il est
tant il est gras). Se dit aussi des enfants qui ont la peau
entamée par l'urine. Dans quelques villages on dit : avoir le
ou les frayons; voir scellé. Les délicats prononcent aicui ?
aidioue, n., aide, du verbe aidier (aider) : Çast ein bon aidioue,
aillez, qu'ein enfant comme çai ! (C'est une bonne aide, allez,
etc.) Par ironie.
aidos, n., ados ; les deux raies du milieu du champ jetées l'une
contre l'autre, adossées et formant une petite élévation, quand
on commence à labourer la pièce par le milieu : Faire ein aidos,
commencer de labourer le champ par le milieu de manière à ra-
masser la terre en dos fane et à creuser les rives. C'est le con-
traire de tirer ai dia. (Voir ce mot).
aidosser, v., faire un aidos en labourant.
aidreussb, n., adresse; eune rin faire d'aidreusse, faire tout de
travers, sans adresse, tout mal. Vai poutant fait çai d'aidreusse
en sai vie (il a pourtant fait cela bien en sa vie). Eté d'aidreusse,
être bien placé, à l'endroit convenable, dans le sens convenable :
Eurtonne çai, ce n'ast pas d'aidreusse (retourne cela, c'est placé
à l'envers, mal mis, etc.) ; mets-te d'aidreusse (place-toi bien,
comme il convient).
aidrot, aidret et adret, adj., adroit.
aiffaire, n., affaire, chose, outil, objet quelconque, comme en fran-
çais ; Eu je vas vous dire eunn ai/faire, eunne cheuse... (Je vais
vous donner une raison, une explication, un argument, etc.);
au pluriel, désigne tout particulièrement les vêtements, les ob-
jets de toilette. Une mère dira à sa fille : t' n'aies point soin de
1 Nous avons dit que nous écririons peut (laid) avec un eu long...
cependant devant un nom commençant par une voyelle, la pronon-
ciation devient brève et ouverte et le t se fait sentir.
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PATOIS DB LA FORÊT DB CLAIRTACJX 57
tes aiffaires; piaice tes ai ff aires. (Tu n'as pas soin de tes vêle-
ments, place tes vêtements). — On emploie dans le même sens le
mot briques.
aiffairottb, n., diminutif d'affaire, petit morceau d'une chose,
petit bout : ïai tiué { ein sainguier tout seul et ï ne m'en ai bûllé
rin qu'eunne méchant' petiote aiffairotte (il a tué seul un sanglier,
et il ne m'en a donné rien qu'un méchant petit — c'est-à-dire
tout petit — morceau).
aiffautli, v. et part, pas.; priver de nourriture, affaiblir, prendre
plus que sa part au râtelier commun, en parlant des animaux.
Quand deux chevaux vivent ensemble, par exemple, si l'un est
plus habile à manger ou plus vorace que l'autre, on dit que le
premier aiffautUt le second, et que le second est aiffautli ; (pro-
noncez presque aiffaut-gli ou aiffaut-lU; il est impossible de
figurer exactement ce son). On dit d'un enfant maigre et qui
mange bien, qui n'est privé de rien : ï nast ou gnast poutant
pas aiffautli. (Il n'est pourtant pas réduit à la portion congrue,
privé de..., etc.). — Affauti, manquer, L. C; affauti, man-
quer, P. T.
aiffétibr (ou ÈFFÉTiBR?) v., enlever les branches d'un arbre ou les
rameaux d'une branche, émonder. On aiffétieu une canne qu'on
vient de couper pour la rendre lisse, un osier avant de s'en ser-
vir : J'ai aiffétié mes parches a" arpents a et fait des fagots aiveu
les aiffétiurbs. (J'ai émondé, ébranché mes perches, etc.).
aiffourbr et raiffourer, v., remplir les râteliers des moutons, leur
donner à manger quand ils rentrent des champs : aies-tu aiffburé
ou raiffourè les beurbis ? (as-tu approvisionné, préparé les râte-
liers, etc ) ; — de affener? feutre ? fourrage?
aiffourée, n., ration : bailler eunne bonne aiffourée, (mettre une
bonne quantité de fourrage dans les râteliers).
aiffutiau (ou aiffutiot ?) n., se dit d'un engin quelconque, d'un ou-
til, d'un objet de toilette, etc., dont on ignore l'usage, ou dont on
veut parler avec dédain : quast-ce que ç'ast que et* aiffutieauAai
enco que tu raippoutes ? (qu'est-ce que c'est que cet engin, cet em-
4 Prononcez ce mot en mêlant intimement Pi et Pu. Cette pronon-
ciation de tuer se perd difficilement, plus tard, quand on veut parler
français : c'est comme le schibboleth du patois de nos pays.
2 Arpents, affouages; part d'arpents, part d'affouages. Bailler les
arpents, délivrer les portions affouagères.
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58 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX
barras, etc., que ta rapportes?) Ein bel aiffutiott ai quoi que
ç'ast prope ?
aiffutier, v., aller à l'affût, braconner : euce çoquier-lai taiffutien
pus qui 9 ne raiguge sai ptainne (ce cerclier-là, va plus à l'affût
qu'il n'émoud, n'aiguise sa plane). Jeu de mots sur aiffûtier,
aller à l'affût, et aiffutier, affûter, aiguiser, donner le tranchant
à un outil.
àiffutioub, n., celui qui va à l'affût, braconnier.
aigledon, n., édredon.
AIGOCER (OU AIOOSSER OU AIOAUSSER OU ÈGAUSSBR, etc.?) V. t amuser,
choyer un enfant, le bien accueillir, l'exciter à rire, lui faire des
agaceries, le caresser : J'ai mené lai petiote chez son onquieu, qui
l'ai bin aigocée et qui li ai bùllé ein gros mouchelot de sucre.
(J'ai mené la petite chez son oncle, qui l'a bien accueillie, bien
choyée, et qui lui a donné, etc.) ïaimme bin les enfants, x les
aigosse bin. — De agacer? de gasf badinage, plaisanterie au
xin e siècle? — Voir raimasser, môme sens.
aigraipe, n., agrafe.
aigraiper, v., agrafer : aigraip*. tai robe qui ast dègraipée (agrafe
ta robe qui est dégrafée).
aigripper, v., agripper, prendre à la dérobée, saisir au passage;
arracher des mains : Tai aigrippè ein mouchelot de sucre ai lai
cafetière. (J'ai tiré des mains...). Tgade son onquieu. pou tâcher
d' aigripper quèque cheuse.
aiguaissbr, gaisser et guiaisser (ou aigaicbr, etc.?) v., laver légère-
ment, passer à l'eau, rincer du linge qui n'a guère servi : vai
gaisser ou guiaicer les deux draps qui n'ont servi qu'eunne fois.
Mai hottèe d'hades laivée, eulle l ai cheû dans lai boue; je seûs
zeue obligée de tout aigaisser et de tout tode enco eunne fois... (va
passer à l'eau, etc. Ma hottée de hardes lavée, elle est tombée dans
la boue, et j'ai été obligée de tout rincer et de tout tordre une
seconde fois). On dit dans le môme sens aiguayer. — Ègacer,
passer du linge à l'eau, Gros.; égacer, rincer le linge, Thév.
aiguayeb, v., (voir aiguaisser).
aiguger, v., aiguiser, émoudre; s'emploie plutôt dans le sens de
rendre aigu: on aiguge des pâchés, des piquots, einquiou, etc.,
( des paisseaux, des piquets, un clou, etc.), et on raiguge
un outil tranchant, eunne sarpe, ein coutieau, eunn AaÀche, etc.,
(une serpe, un couteau, une hache, etc.).
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PATOIS DE LA FORÊT DB CLAIRVAUI 59
aiguiàincher \ y., éclabousser, faire jaillir de l'eau au visage ou
sur les vêtements : en pompant, ï m'ai aiguiainché (en pompant,
il m'a éclaboussé). Une roue de voiture, un cheval qui marche
dans l'eau ou même dans la boue, etc., aiguiainchent les passants.
— Êglisser, éclabousser, Gros.
aiguillie, n. , (aigurïïie), aiguillée, ce qu'on met de fil à une ai-
guille d'une fois.
AiGuiLLOTTBs, (aigu-l\ottes) y n. pi., nom d'une plante adventice, le
géranium, herbe à Robert.
aiûuillottes (aivoir les), — voir quingnais ou quingnets (même sens).
aigujon, n., pointe, partie aigûe d'un piquet, d'un paisseau, etc. :
tous les aigujons de ces pâchés lai, ïs sont peurris. (Tous les bouts
toutes les pointes des ces paisseaux-là sont pourries.)
ailagne, n., alêne: ç'ast pointiu comme eunn'ailâgne (c'est pointu
comme une alêne). Çai se cûche comme des ailâgnes dans un sai f
(ça se cache comme des alênes dans un sac; c'est-à-dire cela ne
peut se cacher).
atllaige (été en été en bon) être en marche, en train, en bonne
voie, en bonne allure : Note aiffaire eulM-ast en aillaige, en bon
atllaige. (Notre affaire est en route, en train, en bonne voie, va
bien.)
ailambille, n., alambic.
aille, interj., cri du voiturier pour exciter son cheval, hue. Faire
aille, crier aille pour démarrer, donner le premier coup de fouet,
commander le premier mouvement. Quand on s'est arrêté au
pied d'un coteau, on fait aille pour reprendre la marche (a-illi).
aille (ne pouvoir plus), être recru de fatigue, ne marcher qu'avec
grand' peine par suite de lassitude, de souffrance ou de vieillesse :
Je seus lassé que je ne peux pus aille. (Je suis si lassé que je ne
peux plus bouger). Oht leprauve vieï, % ne peut pus aille /(Oh !
le pauvre vieux, etc.). — Ahir, marcher avec peine. Gros.; ahir>
Thév.
aillé, part. pas. allé, parti: te vêlai aillée (te voilà parti?). On
adresse souvent cette question, pour dire quelque chose en pas-
sant, aux personnes qu'on rencontre allant aux champs. (Les II ne
sont pas mouillées).
1 Les beaux parleurs disent aiglancher. Encore un exemple de la
traduction de Yi en / mouillée.
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60 PATOIS DE LA FORÊT DE CLÀIBVAUI
ailler (en), v., en aller; se dit d'un vase qui laisse fuir, couler le
liquide par un trou, un joint, une fente; se dit du liquide lui-
même : note sieau ï ast eusé, ï en vai comme ein p'ner, (notre
seau est usé, il fuit comme un panier). Popa, viens vor les meuds :
le vin en vai tout pa lai caive. (Papa, viens voiries muids: le vin
fuit tout par h cave).
aillumer et ailleummer, v., allumer, éclairer: aillume ou ail-
leumme eulfeu; tiens lai lanterne drot ieu et aillume on ailleumme
me, (. . . tiens la lanterne droite et éclaire-moi).
ailluré, part, p., qui a de l'allure, dégourdi, élégant, quia l'usage
du monde. (Voir dèllurer).
ailouche, n., fruit comestible du sorbus torminalis, en patois ailou-
cher ou ailouchier. C'est un fruit rond, gris, un peu plus gros
qu'une cenelle, et ayant, quand il est blet, la saveur de la corme.
Ne pas le confondre avec le fruit du sorbus aria (en patois ailier,
ramée biainche), beaucoup moins agréable au goût, et qu'on
nomme aille. Les gamins, qui connaissent l'un et l'autre, chan-
taient en les cueillant ce refrain aussi peu galant que suranné :
Des ailouches
Pou mai bouche,
Des ailles
Pou mai mie
ailouchier et ailoucher, n., (voir ailouche),
aimer, n., fiel des animaux: aie$-*t* oté l'aimer de lai frochuref
(as-tu ôté le fiel du foie ?)
AIMIONAUDER et RAIMIGNAODER (OU A1MIONÔDBR, 6tC ?) Voir RAIMIGNOT-
TteR, même sens.
aimmottes, n., aimourettes? — (voir cage).
aimonnition, n., (voir monnition).
aimorti, part, passé (de l'inf. aimorti, peu employé), pas tout à fait
froid, presque tiède : C'f ieau-lai nast pas chaude eulle n'ast qu'ai-
mortie. (Cette eau n'est pas chaude, elle est a peine tiède). On
emploie quelquefois endormin dans le même sens.
àimour, n., amour. Ne s'emploie guère que pour marquer la pas-
sion d'un sexe pour l'autre. — Ameu, ch. de n.
aimourettes, n. pi.; outre sa signification française d'amourettes,
ce mot désigne encore : 1° certaines parties graisseuses des intes-
tins d'un porc, qui avoisinent les testicules : .rat mins les aimou*
rettes dans le boudin. (J'ai mis, etc.); 2° de petites boules d'étoupe
ou de poupée, représentant des amoureux et des amoureuses, aux-
quelles on met le feu dans les veillées, pour connaître l'amoureux
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX 61
ou l'amoureuse qui l'emportera en cas de rivalité : VAugusse vai
va lai Poline et va l'Henriette, ai ce qu'an dit... Si je foijains
des aimourettes pou vor lai que qu't chogirai f (Auguste va vers
— c'est-à-dire fréquente, fait la cour — Pauline et Henriette, à ce
qu'on dit. . . Si nous faisions des aimourettes pour voir laquelle
il choisira ' ?) C'est un moyen divinatoire comme un autre.
aimugbr et aibitger, v., amuser; s'aimuger, se divertir, plaisanter
aux dépens de quelqu'un ; cacher d'abord ses forces, ses moyens,
à un adversaire au jeu pour prolonger la partie et lui laisser
croire qu'il peut gagner : tu pèdrsùes; tu ne vois don pas qu't
s'aimuge t (tu perdras, etc.) — S'emploie aussi dans un sens ob-
scène.
aimujotte. n., amusette ; jouet d'enfant, joujou : je seùs zeue sou-
haiter lai bonne année (an née) ai mon parrain qui m'ai baillé
des belles aimujottes (j'ai été souhaiter la bonne année à mon par-
rain qui m'a donné de beaux joujoux). Y ai brigé ses aimujottes
(Il a brisé ses jouets.) Personne qui s'amuse, s'attarde facilement,
flâneur, traînard : Que aimujotte t lai voù qu'ï ast, V s'y tient t
(Quel pas-pressé, flâneur! là où il est, il s'y tient, il y reste). Ce
mot sert pour les deux genres. Cependant au masc. on dit quel-
quefois AiMUJOT et aimujoue, m ai s ce dernier s'emploie plutôt dans
le sens actif d'amuseur, c'est-à-dire qui amuse, retarde les autres.
aingné, n., agneau : Taivains deux beurbis ai r'tenin, qui ont fait
chsicueunne deux aingnés (nous avions deux brebis à retenir —
à cheptel. — qui ont fait chacune deux agneaux 9 ,).
' aingnelt, n., laine d'agneau, laine fine et courte, agneline.
aiouteb, v.; se dit des éclairs de chaleur qui ont lieu, sans nuée
visible, dans les soirées de juillet et surtout d'août : eul temps
aioute (ajoute).
aipairer, v., apparier, mettre par paire.
aippréte, n., apprête, mouillette de pain : fais tes aipprétes devant
de casser ton œu (fais tes apprêtes avant de casser ton œuf).
aippiôtâ, part, p., apprêté, habillé, paré, orné : % ast bin aipprôté
( bien habillé, bien ajusté, avec luxe).
1 On place l'amoureux au milieu, les amoureuses à proximité; on
.allume l'amoureux, et la première des amoureuses qui s'enflamme
est censée la préférée.
9 Qui ont f prononcez quiont d'une seule émission de voix ; chai-
cueunne, prononces chécutwte.
s
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62 PATOIS DE LA FORÊT DB CL AIR VAUX
aippbôter (5'), v., s'apprêter, s'habiller : aipprôte4e pou ailler ai
lai messe (apprête-toi, habille-toi, pour aller, etc.)
aiprées, prép., après; s'emploie pour autour de, à, contre, sur:
eulle met des farbonnas aiprées ses cotillons ; % piche aiprées le
mur; ï cruche aiprées moi, etc.
AiPBOuet aiper (ou éprou et êper?) n., sorbe, corme, fruit du cor-
mier; — de asper, âpre, ou de aper, sanglier ?
aiprouer, aipbouveb et aiperrier (ou èprouer, etc.?) n., cormier.
aiprousses [faire dés) % expression qui signifie faire des embarras,
faire l'important, l'affairé, s'agiter mal à propos : (en fais des
aiprousses, pou tai méchant' ribotte ! an dirot bin que t'aie* tout
le pays ai neurri t (Tu en fais des embarras pour ton mauvais
repas I on dirait bien, etc.)
aiquais, n., nabot, mal-venu, charculot, maladif; enfant qui veut
paraître au-dessus de son âge; homme chétif : toi, pouter ein fusill
(ou feusil) ein bel aiquais, ma fié t — C'ètot bin lai poinne de se
mairier si lunpou prenre ein aiquais comme çai t (toi, porter un
fusil ? un beau gamin ma foi ! — C'était bien la peine d'aller se
marier si loin pour prendre un avorton comme ça !) S'emploie aussi
en parlant des animaux, mais jamais des choses. (Voir aicueulé,
aitrâ, jaidrou, charcueulot, aicueubi ou aicueubit, ècœurjou, cha-
gnâ, qui s'emploient dans des sens à peu près identiques); — de
acquêt, par ironie ?
aiqueubi (ou aicueubit?) n. , sy nonyme de aiquais, et de aicueulé, etc. ;
s'applique plus particulièrement aux enfants petits de taille, parce
que jeunes; aiquais a un sens plus général ; aicueulé est plus in-
jurieux : ein bel aiquebi pou monter tout seul su ein chevautait*
tends que t'ôes maingé pus de soupe t — De acabit f
aiquiabi (ou ècLARi?) (lesbeaux parleurs disent éclari), part. p. du
verbe saiquiari ; se dit d'un vase de bois formé de plusieurs
pièces, fût, jale, seau, baril, etc., dont les douves ou les pièces
de fond sont disjointes par la sécheresse : quand les meuds sont
aiquiaris, ïs en vont 4 de tous les coûtés, (quand les muids sont des-
séchés, disjoints, ils fuient de toutes parts). Nous ne connaissons
pas de synonymes en français; — de éclaircif moins serré, moins
compacte...
aiquiabi (s 9 ) (ou s' Éclari?) v. infinitif ; se dessécher, se disjoindre.
— Voir le participe.
1 Prononcez ian vont.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX 63
airainnb, n., espèce de terre blanchâtre, plus friable que l'argile
qui forme le sous-sol de certains vallons, entre Fontette, Essoyes
et Noé-les-Mallets. Elle est complètement st érile, impropre à
la végétation. On l'emploie quelquefois dans les mortiers. —
De arena?
aire, adj., dur au toucher, sec, rèche, âpre, raboteux : aivoir les
mains aires, c'est à dire sèches, raboteuses, rudes, comme après
les avoir trempées dans l'eau de chaux. Du pain aire, du pain
manquant de moelleux, d'onctueux, etc.; de lai paille aire, etc.
— De areo? être desséché.
AiRE,n., planche de jardinage; eunn aire de pourreaux (une planche
de poireaux).
aire, part, passé, aéré.
airichal (fi 1 (T), n., fil d'arc h al.
aihtgnâe, n., araignée, insecte et toile. S'emploie aussi quelquefois
par plaisanterie, pour désigner les jambons et les morceaux de
lard pendus au plafond ou à la cheminée : Vous ne vous plain-
dras pas de n'aivoir rin ai mainger; en vêlai enco des airignées
ai vote piaincher! (Vous ne vous plaindrez pas de n'avoir rien à
manger; en voilà encore des araignées à votre plancher!)
aïroille (ou eiroille, par une inversion?) et oroille, n., oreille :
mets tes airoilles desous tai cale; (mets tes oreilles sous ta cas*
quette). An voit toujous aissez clair (quiair) pou mainger, an
ne poute pas ai son oroille. (On voit toujours assez clair pour
manger, on ne porte pas à son oreille).
airoiller (ou èroiller?) v., écouter pour tâcher de surprendre,
épier, s'arrêter comme pour voir d'où vient le vent : t' vai tou-
jous en airoillant, c'est à dire en épiant, le nez au vent, la
barbe sur l'épaule; — de l'ital. origliare ?
AffiONCE, n., ronce : ï ai des aironces pieun note champ (il y a des
ronces plein notre champ). S'emploie au figuré pour désigner
une personne grognon, d'un mauvais caractère, qu'on ne sait
comment aborder : i'ast comme eunn' aironceaujiheu, i's'ast mal
levé; çast eunn aironce; — voir broutné iams le même sens. —
Il doit y avoir ici, comme dans beaucoup d'autres mots sem-
blables augmentés de ai, confusion du nom avec l'article lai,
l'air once, pour lai ronce. — Êronce, Gros.
airraicha, n., terrassier, défricheur, arracheur de bois. On désigne
ainsi plus particulièrement les ouvriers terrassiers de la Creuse
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64 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUI
et du Cantal ; ç'ast des airréchas qui font les faussés du bois.
(Ce sont des terrassiers, des Limousins, qui font les fossés, etc.)
aihraicher, v., arracher.
airrhes, n., arrhes : bâiller des airrhes (donner des arrhes).
airuelle, n., ruelle. Confusion probable du nom avec l'article lai.
aisseter (*'), v. s'asseoir. — Voir s'aicheter.
aisseutli, v., suivre un ou plusieurs ouvriers, aller aussi vite que
lui ou qu'eux en faisant un travail qui est comme le complément
du leur... On dira d'un metteur en gerbes, par exemple, qu'il
aisseutlit un*, deux fauchoues (faucheurs); tu m'aisseutlirôs ai
mainger les cacas pendant que j a les épluche (tu me suivrais, tu
mangerais les noix à fur et à mesure que je les épluche); — de
assequi ? ou de assortir ?
aissou, aisseu, sou et seu, n., porcherie, tect à porc. On dit à un
enfant qui s'oublie : vai dans note aissou (va dans notre tect à
porc). Il y a encore sans doute ici confusion du nom avec l'ar-
ticle. — Seu, étable de cochon, Gros.; sou, seu, rang à porc,
Thév. — De sus?
aisteurlogue, n., astrologue,
aitailener (ou ètailener?) v., enlever le talon, la croûte d'une
miche de pain, le tour d'un fromage, etc.; couper mal, de tra-
vers, pour prendre le morceau de choix : t' n' faurot pas aitai-
F ner le pain comme çai f (Il ne faudrait pas couper ainsi le croû-
ton du pain). On dit dans le même sens aicroutener (ou ècrou-
tener?)
aitaine (ou aitêne ou ètène?) n. ,ennui, excès de besogne, tracas,
souci, souffrance morale, tourment, chagrin, tribulation, em-
barras : Tai zeue bin des ait aines } ou bin de V aitaine, dépens que
f (ai vu : Tai mairie note Fanfan, j'ai pèdiu ein chevau, j'ai
piùdié, etc., (j'ai eu bien de la besogne et de l'ennui depuis que
je t'ai vu : J'ai marié notre Fanfan, j'ai perdu un cheval, j'ai eu
un procès, etc.) ; — de atainer, irriter, obséder, xih* et xiv 6
siècles ?
aitelle, n., copeau de merrain ou de cercle, bûchette, menu bois;
éclisse : mets vor eunne poingniein d 1 attelles su le feu (mets voir
une poignée de copeaux sur le feu); — de atelle, petite planche,
ais?
1 Ne pas confondre un, adj. numéral, avec ein, article.
* Prononcez quexy'.
^v
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX 65
aitra (ou ètra?) il., voir aiquais. Exprime plus particulièrement la
délicatesse, le peu d'apparence physique, la faiblesse de constitu-
tion, etc.; se dira d'une jeune fille, d'un jeune homme, petit, fluet,
pâle... Oh, que aitrât Ein bel aitrâ f Ces mots ne s'appliquent
guère à des personnes d'âge. — Chitrât, faible, cbétif, petit,
Thév.
aitbebi et aiteurbi (ou ètrebi?) n., coup de vent qui soulève la pous-
sière en tourbillon sur les chemins ; espèce de trombe : r ai passé
ein aitrebi qui ai (quiai) empouté tous les tas de foin. V aif...
le camp comme ein èteurbi (Il est passé un tourbillon qui a em-
porté, etc. Il est parti comme un coup de vent). — De turbof
àjtteléb, n., temps pendant lequel les chevaux restent attelés à la
charrue; par analogie, temps pendant lequel un ouvrier reste à
son travail : Euje sonspatis depeûs les trois heures du maitinjfons
fait eunne bonne aitielée (Nous sommes partis depuis les trois heures
du matin; nous avons fait....)
aittloihe et aittloure, n., atteloire; pièce de l'attelage, petite che-
ville de Lois qui servait autrefois à fixer le grand anneau du
mancillon dans le limon de la charrette : Mon checau en s' élan*
çanl pou manier le grippo, ï ai rongné les deux aittloures. (Mon
cheval, en s'clançant pour monter le raidillon, a rogné les deux
atteloires.)
aittraipotte, n., chose qui attrape, piège : Eune passe pas dessus
dte K paille lai; ï ai de lai bousée desous : çast eunn aittraipotte.
Question en forme d'énigme, de devinette^ donnant lieu à une ré-
plique qui attrape : Vois-tu lai lunne (lisez lun-ne) ? — Oui. —
Eh bin, tu n'aies pas aiveugu\eu, ou mieux tu n'aie* pas de lai
m.... aux œux, ou encore une réponse obscène...
aittraipoue, n. adj., attrapeur, filou, voleur, surtout en parlant
des commerçants peu délicats : Je n'ïi aicheute (prononcez :
je grii aicheute) pus rin, çast ein aitttaipoue (Je ne lui achète
plus rien, c'est un attrapeur).
aitujon, n , arlison, insecte qui ronge la laine, les vêtements : Tai
cueulotte, eulle l ast maingée aux aitujons (Ta culotte est mangée
par les artisons).
aivachi, inf. et part, pas., avachir et avachi, élargir et élargi.
aivailée (ai l'), loc. adv., du haut en bas : Cheur ai l'aivailée
d'ein toit, d' eunne majon, d'ein chevau (Tomber du haut d'un toit,
1 II est entendu que le c de cUe et c'I ebt toujours doux.
T. XUX i
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66 PATOIS DE LA FORÊT DE GLAIBVAUX
etc.) Lai majon vienrai bintôt ai l'aivailée (La maison s'écrou-
lera bientôt, tombera bientôt en ruine).
aitailkb, v., avaler, faire descendre par le gosier : aivailer sai soupe;
aivailer son bien (avaler sa soupe ; manger son avoir) ; aivailer
sai cheminge, faire descendre sa chemise le long de son corps;
aivailer m jambes, ou absolument, s f aivailer, allonger ses jambes,
s'allonger, particulièrement dans le lit : Eune le mets pas en hir-
son, aivaile te, et t'aimes chaud (Ne te mets pas en hérisson ; al-
longe-toi, etc.) Qu'ast-ce qu'ein bon cueurtien doit faire en se cou»
chant ? — R.: Aivailer sai cheminge. (Qu'est-ce qu'un bon chré-
tien doit faire en se couchant? — R.: Allonger, tirer sache-
mise).
aivaile-tout-cru, n . , glouton, avaleur, affamé, qui mange beaucoup.
aivailoirb, n., partie du harnais d'un cheval; gosier, appétit : l'ai
eunne bonne, eunne s aivailoire (Il a un bon gosier, il mange
et boit bien); que aivailoire t (quel gosier t); s'applique à ceux
dont Rabelais disait : « S'ils montaient comme ils avalent, ils
iraient haut ! »
aivailon, n., ce qu'on avale de liquide d'un trait, gorgée : Boire
ein aivailon d'ieau-de-vie * , de tisane, etc. Gn'en restot pus quein
aivailon dans lai cruche (Il n'en restait plus qu'une gorgée dans
la cruche).
aivant, prép. empl. adverb., profondément : Mon liéve, ï ast zeue
cheur bin aivant dans le bois (Mon lièvre est allé tomber bien loin,
bien profondément dans le bois). D'ailleurs, euje v'rôs été dans lai
terre aussi aivant que V clocher (quiocher) ï ast haut! (En vérité,
je voudrais être dans la terre aussi profondément que le clocher
est haut !) S'asl-ï copé bin aivant? (S'est-il coupé beaucoup, pro-
fondément ?) Pousser aivant le feu, attiser, rapprocher les tisons,
les pousser au cœur du foyer. — La préposition avant est rem-
placée d'ordinaire par devant : Tèlôs venun devant lu (J'étais
arrivé avant lui).
aivant-z'hier, loc. adv., avant-hier.
aivelingne, n., aveline, espèce de noisette.
aiveu et d' aiveu, prép., avec : Viens aiveu moi ou d'aiveu moi (Viens
avec moi). — Dans quelques villages on prononce aiveur.
aiveuglon (ai V) et aiveuglotte, loc. adverb., à tâtons, sans y
voir, dans l'obscurité : Je seûs zeue dans lai cave ai Vaiveuguion,
1 Encore un % qui s'est fourré là sans doute pour une / mouillée !
On dit de Veau, de l'eau de vie.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX 67
c'est à dire sans lanterne. Tai r'coudu ein bouton ai l'aiveu*
guiotte ;fai enfiU mon aiguWe (enfi-ié, aiguAm) ai Vaiveuguion.
aivbuglot, n. adj., qui ne voit pas bien clair, myope ; qui, faute
d'attention ou autrement, ne voit pas un objet visible qu'il cher-
che : Ma rgaitiea don ai bas, çai te creuve les ceux, aiveuguiot t
(Mais regarde donc par terre, cela — l'objet cherché — te crève
les yeux — est devant tes yeux — aiveuguiot !)
AiviGER (**), v., s'aviser, se décider, se fixer, prendre un parti : I'ast
longtemps ai saiviger (Il est longtemps à se décider, à réfléchir).
Allons, aivige-te t (Allons, décide-toi, parle !)
aivigio.x, n., caprice, désir, fantaisie, volonté : Vlai eunn* aute ai-
vigion t (Voilà une autre idée, un autre caprice, un changement
bizarre !) Se prend toujours en mauvaise part. — De avision f
xiv« et xv« siècles.
aivoindb, v., (voir raivoinde, plus employé et plus énergique). On
prononce aivoinde et aivoindieu, raivoinde et raivoindim.
aivoir et aivoi, v., avoir : aivoir de quoi, être riche, aisé : OA, t* ai de
quoi, ï ast bin, c'est-à-dire, il est riche, à son aise. — Voir été bin.
aivocsirr et ajvousiller, v., opposé à tutoyer; employer le pro-
nom vous en parlant à une personne : /' ne faut pas nous aivou*
sier, dijons nous toi (11 ne faut plus employer vous en nous par-
lant, mais tu). Tu l'aivousilles? Moi, je U dis toi. — Êvoureyer,
parler à quelqu'un par vous, Gros. ; avouseiller, id., Thév.
AiXABiNGNB (ou EXARiNGNB ?) n. adj., jeune fille, enfant dissipée,
étourdie, en jouant, en courant, etc. : Tu vas pède tai cale,
grand' exaringnet (Tu vas perdre ton bonnet, grande étourdie!)
— Les beaux parleurs disent aixarine.
allé, pron., elle, dans certains villages, même de la nuance du
ç'a$t.
amm, — voir Hamm.
A*, pron., on. Nous l'avons écrit ainsi pour le distinguer de en,
pron. ou prépos. — Du reste, on l'écrivait de même au xm*
siècle.
. A5QK (ou eh scie ?) adj., agacée ; s'emploie dans cette expression :
^ aivoir les dents ancies, avoir les dents agacées par les fruits
verts.
anb, n., le chevalet, le tréteau sur lequel les scieurs de long fixent
la pièce de bois qu'ils doivent débiter.
amotieb (ou hamotier ?) n., petit voiturier, qui n'a qu'un cheval et
qui charrie pour l'un et pour l'autre; petit cultivateur mal ou-
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68 PATOIS DE LA FOBÊT DE CLAIRVAUX
tillé : Je ne sons pas des rabouroues, M. le juge de paix, je ne sons
que des anotiers. — De âne ?
ankumelle, n., alumelle, vieille lame de couteau séparée du man-
che : /' ai chaingé (ou saingé) son coûté pou eunn an-numelle, c'est-
à-dire il a fait un mauvais marché, échangé son cheval borgne
contre un aveugle. Quelquefois la lame du couteau non séparée :
L'an-numelle y eulle l ast cnco bonne, ma lemoinge ne vaut pus rin
(La lame est encore bonne, mais le manche ne vaut plus rien).
anscbnsion, n., ascension.
y anvot (ou anveau?) n., orvet; petit serpent à reflets d'argent qui se
brise en morceaux, comme du verre, dès qu'il reçoit un choc,
tel qu'un coup de baguette, de fouet, etc.; on le croit à tort, très
venimeux, d'où le dicton : l'anvot meunne au cro, c'est-à-dire
mène au trou, dans la fosse. — Dans quelques villages on dit
lanvot, ein lanvol. La lettre / fait-elle partie du nom, ou y a-t-il
confusion de l'article et du nom comme cela arrive souvent?
aoûtat, n., espèce de ciron qui s'attache à la peau et cause de vives
démangeaisons. 11 est très commun dans certains villages de
l'Aube en août, d'où son nom.
aqujer, n., chantier, besogne ; s'applique surtout au chantier du
bûcheron, du coupeur au bois : J'ai prins ein grand âquier c't'
année (J'ai entrepris à couper une grande portion de bois cette
année). J'ai lâché mai Imcheai mon âquier (... à mon chantier).
On dit aussi en parlant d'une maison mal tenue, d'une besogne
mal commencée, etc. : vlai ein bel âquier! — Voir Odon.— De
atelier ? d'abord âl\ier t âtier, puis âquier?
arbillot, n., pointe d'une boucle, ardillon.
arche, (voir harche).
archer, (voir harcher).
archer, n., araignée, le faucheux. — Archet, chenille, Gros.
archetêque, n., architecte.
arcôme, n., alcôve.
arcotte, n., râteau à dents de fer, dont se servent les jardiniers.
arcotter, v., se servir de l'arcotte, pour ameublir la terre, pour
niveler une planche de jardinage.
argot, n., ergot; par analogie, orteil, ongle, avec mépris : T ne
rongne jaimmas ses argots (Il ne fait jamais ses ongles,).
arguigner et auguingner, v., taquiner, asticoter, irriter, agacer,
contrarier: Allons, narguigne pas tai sœurt (Allons, ne taquine
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PATOIS DE LA FORÊT "DE CLAIR VAUX 69
pas ta sœur H Farguingnot le chien, et peite, t" ast zeua modiu.
(Il agaçait le chien, et puis il a été mordu). On dit aussi : faire
des arguingnes, dans le môme sens.
arguignoue et arguingnoub, n. et adj., (féminin: arguignoure et
arguingnoure) t celui qui arguiyne, pince, chicane, irrite les au-
tres, gens ou botes, par gestes, paroles, actes, etc.
aria, n.. train, ennui, dérangement, besogne, remue-ménage, em-
barras, tablature; dit moins qaaitaîne. Beaucoup de gens vous
tombent, cela vous fait de l'aria. Vous construisez, vous avez de
Varia. Que d'aria que ces enfants-lai me baillent t dira une mère ;
que charrue ! que odont se disent à peu près dans le môme
sens, pour quelle difficile besogne, quel travail! Que âquiert veut
plutôt dire quel désordre, quelle sale besogne, et 01*0' aria! quel
remue-ménage, quel embarras! De arroi? (train). — Aria,
embarras, travaux, Thév.
arminette, n.. erminette, espèce de hachette à l'usage des char-
rons.
abmonna, n., almanach. Faire des armonnâs, faire des cancans,
des paquets, babiller : Les femmes font des armonnâs ai lai /on-
taine, c'est à dire des bavardages au lavoir.
arpentodb, n., arpenteur; faucheux, espèce d'araignée.
arré et arrié, sorte d'interjection qui s'emploie très souvent et de
différentes manières, mais toujours pour exprimer un regret.
Quelqu'un raconte qu'il a été malade, qu'il a perdu sa mère, un
cheval, qu'il a étéenrhumé, qu'il a manqué son lièvre, etc., arrè l
lui répond son interlocuteur en signe d'intérêt, de compassion. Une
femme pressée découper du pain à ses enfants ne trouve pas son
couteau : Vlai mon coutieau qui ast pèdu, arrè t dira-t-elle.
ï"aie$ trouvé ein bieaujetion de mouches.,, etpeûs, vlai V diâbe,
arrié, je viens te l'rèclamer 1 : çast d'ai moi. (Tu as trouvé un bel
essaim, etc.) C'est Yarré ironique. Il est impossible de donner
dés exemples de tous les cas où Ton emploie le mot... — Arrié,
encore, sans doute, au contraire, Gros. ; arié, encore, G. et R.
— De arrière l comme pour conjurer? ou de arroi, train? —
Voir aute.
arrioler, v., hésiter, marcher sur place, ne savoir de quel côté
tourner. Se dit particulièrement d'un charretier qui tournaille à
droite, à gauche, sans sortir du môme endroit, faute de savoir
1 Prononces teul réquiamer.
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70 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX
conduire ses chevaux. Mas, aivance don, prends don ton che-
vaupa lai bridieu, et narriolepas tant! (Mais avance donc, prends
ton cheval par la bride et... n'hésite, ne tournaille pas tant).
Quelquefois perdre son temps à des détails au lieu d'aborder la
besogne franchement; chercher le côté le plus facile de cette be-
sogne; a aussi le sens de beurlauder, beurluter, etc. Voir ces
mots.
arrioloub, n. et adj., qui arriole, sujet à arrioler. Voir beurlau-
dier, tacotot, etc.
artifailles, n., atti failles, embarras de peu de valeur, vêtements
prétentieux. S'emploie toujours avec une nuance de dédain :
Piaice toutes tes artifailles (Place tous tes embarras, toutes tes
nippes, etc.)
artissb, n., artiste, vétérinaire : Euje vons charcher Partisse, note
chevau %ast mailaide (Xous allons chercher le vétérinaire, etc.)
aspergés, n., goupillon, et par extension tout ce dont on peut se
servir pour jeter un liquide, éclabousser quelqu'un, asperger :
rai fait ein aspergés d'aiveu sai poigniein d'aiccolure (Il a fait
un goupillon avec sa poignée d'accolure).
ast-çu, pour ast-ce, est-ce; v. interrog. : Diâbe ast-çu que çai?
(Diable est-ce que cela?) Ce çu pour ce est encore une espèce de
sifflement naturel amené par la difficulté de prononcer distincte-
ment Ve muet .. Ne serait-ce pas là l'origine du fameux ochu bé,
de MM. G. et R.? Ost-çubé x< f c'est-à-dire est-ce bien? est-ce
possible ? pas possible ?
atot, atiot et aitiot, n., orteil, doigt de pied : Tai l'ongle du gros
atot r'boulé (J'ai l'ongle du gros orteil écaché, replié, refoulé).
Atot de mort, atot de cosaque, la fève comestible. — Artot, ergpt
de coq, Gros. /
atout (recevoir ein) t recevoir un coup, particulièrement en p6 co-
gnant dans quelque chose : rai reçu ein bon atout. On dit aussi :
Euje M foutrôs son atout, c'est-à-dire un mauvais coup, le coup
de la mort. On dit encore, dans ce sens, son aiffaire, son compte.
Au figuré, reproche violent, vérité dure : V li ai envoyé ein bon
atout.
aujd'heu (ou auged'hed?) et aud'hieu, adv., aujourd'hui ; Çast
aujd'heu venredi (C'est aujourd'hui vendredi). — Aud'jeu, L. C;
aujad'keu, P. T.; aud'jeu, G. et R.
1 On trouve chu pour su : Y m' bayro chu la ealle (L. C.)
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PATOIS DK LA FOEÉT DE CLAIR VAUX 71
aulong, prép., auprès, près, vers, contre : Viens aulong de moi
(Viens auprès de moi). J'ai passé aulong du bois (. . . près du bois).
On exprime le long par de long, du long et tout de long : fax
passé de long, du long, ou tout de long de lai muraille (J'ai suivi
le mur, j'ai passé tout le long).
acte, adj. et pron., autre (prononcez été) : Ai £ autel espèce d'in-
terjection qui signifie : en voilà bien d'une autre ! voilà bien un
autre embarras, un autre ennui ! il ne manquait plus que cela,
etc. ; remplace quelquefois arré. Un commencement d'incendie se
manifeste, on court au puits, la corde casse : ai d'aute t vlai lai
code cassée t s'écriera- t-on. — Ai (f aute ! c'est-à-dire passez à un
autre, ou à l'autre. Un voiturier est embourbé, il prend son che-
val par la bride, vous poussez une roue qui avance un peu : Ai
et aute t vous crie alors le charretier, tout en continuant d'exciter
son cheval, c'est-à-dire passez à l'autre roue.
S auteur, n., cause : Si fées malaidrot, eust-ce que j'en seûs l'au-
teur? (Si tu es maladroit, est-ce ma faute, en suis-je cause?)
baba (ai), n., terme enfantin, à boire : /* vourot ai baba, et' enfant
lai (Il voudrait à boire, cet enfant-là).
baccaïer, v., se dit des cbiens qui suivent mal la piste d'un gibier,
qui s'égarent, donnent de la voix irrégulièrement, au hasard, de
tous côtés à la fois : Les chiens ïs ont bacca'ié deux heures euce
Méve-lai sans pouwi le faire soti de lai vente, ou ce \ieve-lai s'ast
fait baccater deux heures pa lai même vente (Les chiens ont battu,
chassé, etc.)
bache-dos, n., personne qui marche en courbant le dos. — On dit
aussi casse-dos.
bâcher (se), v., se baisser : Bâche-te (baisse-toi). — De même le
dérivé s'aibâcher.
bachique, adj., s'emploie pour bizarre, grotesque.
BAOONTB, n., espèce de droguet fin, à rayures de diverses couleurs,
qui servait à faire des jupons (bâconte).
bagnole (ou BAWOLB ?), n., mauvaise voiture; charrette, voiture»
avec mépris.
baibburre, n., babeurre, lait de beurre.
baibingne, n., grosse lèvre. Se dit en mauvaise part : F remue lai
baibingne comme ein lapin, rai des baibingnes comme ein rebord
de pot de chambre.
baioot, n., gerbe battue avec précaution, de manière à ne pas briser
les glumes, et qui sert à faire des glus (guius), — voir ce mot.—
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72 PATOIS DE LA FORÊT DE CL AIR VAUX
Bart, botte de paille non entièrement battue, Gros.; bacot,
■ grosse botte de paille de seigle, Thév.
baiguter et bacuter, v., s'occuper à des riens, par goût, par amour
des minuties, des détails, par excès d'ordre, ou pour éviter la
besogne plus sérieuse; perdre son temps; tourner autour du tra-
vail : r ferot meux de f... son camp aux vingnes que de baicuter
toujous pa sai cour, pa son jadin (Il ferait mieux de s'en aller
travailler aux vignes que de perdre son temps à mettre en ordre
sa cour, à peigner son jardin, etc. — Voir beurlauder, beurluter,
bricoler, tacoter, tanuger, etc. Les mots qui expriment cette idée
sont nombreux, et les nuances entre eux sont souvent difficiles
à saisir... — Bacuter, s'occuper de divers petits ouvrages peu
sérieux, Thév.
baidingner et BAiDiGNBR, v., badiner, plaisanter. Une mère mena-
çant son enfant dira : Fais aittention, je ne baidingne pas ! (Fais
attention, je ne plaisante pas, c'est-à-dire, la menace est sérieuse).
baigueulotte (ou bègueulotte ?) n., babillard, qui ne sait ce qu'il
dit, surtout vantard, fort en gueule, qui parle à tort et à travers :
Taise-te don, baiguelotte ; fées comme les escargots, tu n'aies que
de lai laingue! (Tais- toi donc, bavard, vantard; tu es comme les
escargots, tu n'as que de la langue).
bailier et bai loyer, v., balayer : J'ai bailoyé lai majon deux fois
aujd'heu (J'ai balayé la maison deux fois aujourd'hui).
bailioue et bailoyoi'e, n., balayeur.
bailiures et bailoyurbs, n., balayures.
baille, n., bouche, avec une nuance de mépris ou de colère :
Fromme tai bâille (Ferme ta bouche, tais-toi). S'emploie poliment
pour gueule (ba-ille)^
bailler, v., crier : c'est le gueuler poli ; gronder : Quast-ce que tu
cries don, mai gâchette ? — Çast momman qui m'ai baillée
(Qu'est-ce que tu pleures donc, ma fille? — C'est maman qui
m'a grondée!)— Voir piailler, môme sans. — Bâiller, crier,
gronder, brailler, Gros.
bailler, v., donner (vieux mot) : Brille-me du pain (Donne-moi,
elc). Bai/fer et peûs r briller, çast ein péché, c'est-à-dire donner
et puis redonner, etc., proverbe qui a cours chez les enfants pour
refuser de partager avec leurs camarades ce qu'on leur donne.
Briller ècœur (ou ai cœur?) dégoûter, donner la nausée : V ast si
sale qui'me brille ècœur (Il est si sale qu'il me donne la nausée). —
Bayro, bayer, batjey, rebeiller; y m' bayro chu la colle y L. C;
bailley. baye y, P. T.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX 73
baingnoure, il, baignoire, caveau oblong pour ramener les raisins
lors de la vendange : Note cuve euW a$t pieunne, et j'ons mins le
reste dans note baingnoure. Eu et' année (an-née), fn empli-
rons pas seulement note baingnoure (Notre cuve est pleine, et nous
avons mis le reste dans notre cuveau. Cette année, etc.)
baisse, n., (les beaux parleurs disent basse), petit vallon, creux,
dépression de terrain : Note champ, tast juste dans lai baisse
(Notre champ est juste dans le petit vallon). Une toute petite
baisse, ou le fond de h baisse, se disent baissolte. — De basse, bas?
baisser (ou baicer?), v., (syllabe bai très brève), agiter le liquide
d'un vase; secouer un vase où se trouve du liquide : Eune
baisse pas le baril en l'empoutani (Ne secoue pas, n'agite pas...).
l' faut baisser lai boutoille chaque fois quan en vendiea (Il faut
agiter la bouteille chaque fois qu'on en verse). — Bosser, agiter,
Gros., Thév. — De brasser?
baissin, n., casserole de cuivre munie d'une longue queue, qui
sert à puiser de l'eau dans le seau.
baissingnot (ou baissinniot?), n., la fleur jaune de la renoncule
rampante : l'ast jaune comme ein baissingnot (Il est jaune comme,
etc.) On la nomme aussi cocu, parce que c'est principalement cette
fleur qu'on répand, dans la nuit de la saint (îengoult, devant la
porte des maris trompés. — De baissin? petit bassin, jaune
comme un bassin de cuivre ?
baissot et baissicot, n., menu travail; les petits travaux du ménage
que fait la femme avant de partir aux champs : J'ai fait mes pe-
tits baissots, trait mai v&iche, etc., et peûs me vlai pâlie (J'ai fait
les petits ouvrages de la maison, trait ma vache, etc., et me voilà
partie).-- Bassot, corvée, minutie, Gros. — De bacelle, jeune fille?
baissotteb, v., faire les petits travaux du ménage, donner à manger
aux bestiaux, faire les lits, nettoyer la vaisselle, etc. S'emploie
pour caissotter. — Voir ce mot. — On dit aussi baissicotter.
baissottier, n., homme qui fait les travaux de la femme dans le
ménage. On dit plutôt caissottier et caissotte. — Voir ces mots.
bait-l'ane. n , bat-l ane, garçon meunier.
baitinjon, n , baptême, avec une nuance de mépris Rappliquant au
coté matériel de la cérémonie : Vlai ein bieau baitinjon qui' s
ont iquiont) fait lai ; gn'aivot pa seulement de dragées l (Voilà
un beau baptême qu'ils ont fait là : il n'y avait pas seulement de
dragées 1} — Baieyon, batison, enfant que Ton porte au baptême.
Gros.
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74 PATOIS DE LA FOBÊT DB CLAIRVAUX
baitte, v., battre.
baitte, n., la partie mobile du fléau lf\ée) f le morceau de bois qui
frappe, bat le grain. La baitte est attachée au manche de l' instru-
ment par une courroie de cuir, ou entrelacs. — Batte, Gros.
baittodre, BAiTTOiRB et BAiTTE-Ai-BEURRB, n., sorte de baril dans
lequel on bat le beurre, baratte.
baivb, n., bave.
baivbr, v., bayer. Au 6g., causer sans savoir ce que l'on dit, à
tort et à travers, surtout en faisant des reproches, en injuriant :
Ècoute-lai, mon imbèciie de femme, v'iai eunri heure qu'eulle
baive comme çai (Écoute-là, mon imbécile de femme, voilà une
heure qu'elle en dégoise ainsi).
baiverotte, n., bavette; le rabat du prêtre et du juge, la bavette
qu'on met aux petits enfants.
baivoux, adj. et n., qui bave. Au fig., homme qui cause sans
savoir ce qu'il dit; menteur, hâbleur, mal embouché : Si tu fais
aittention ai ce qu'ï te dit, c baivoux-lai, tu n'aie* pa fini t (Si
tu fais attention à ce qu'il te dit, ce menteur-là, ce bavard-là,
etc.).
ballants (les brats), les bras pendants, c'est-à-dire sans rien por-
ter : /' s'en aillot les brais ballants, quand moifètôs si çargée (Il
s'en allait sans rien porter, quand j'étais si chargée).
BALLER, v., battre, aplanir, frayer, en parlant d'un chemin : /' ai
passé pieun des voitiures su lai route : eull'4-ast bin ballée (Il est
passé beaucoup de voitures sur la route : elle est bien frayée, bien
battue).
yj> : baloquer, v., cahoter, danser, sauter, branler avec ou sans bruit»
par défaut de solidité : Airrainge don meux que çai tes eutils su
tai brouvotte: çai baloque (Arrange-donc mieux que celâtes outils
sur ta brouette : ça danse, ça saute...) S'emploie surtout intran-
sitivement. — Voir beurloquer, môme sens.
X baluchon, n., paquet d'habits, de hardes, de linge, St-Frusquin :
Prends ton baluchon et f... le camp (Prends tes hardes et va-t-en).
bambiller, v., pendre, traîner; secouer, agiter. S'emploie transiti-
vement et intransitivement. Un cheval échappé traîne sa longe
qui bambille; la corde d'une cloche qui vient de sonner, bam-
bille; on bambille ses bras, ses jambes quand on est assis, etc. :
Eune lâche pas bambiller comme çai les ribans de tai cale (Ne
laisse pas voltiger ainsi les rubans de ton bonnet). — Voir bam-
boler } dandoler etgringoler. — Degambillerf de gandiller, tour-
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PATOIS DE LA FORÊT DB CLAIRVAUX 75
ner, échapper, xn e au xv* siècle ? — Brambiller, se balancer,
Thév.
^ bambo (ou bambeau?), ri., personne déhanchée qui se bambole, se
balancé en marchant, démène ses bras ses jambes : Tu ne peux
don pas t'tenin meux que çai, grand bambô ? (Tu ne peux donc pas
te tenir mieux que cela... ?)
bamboche, n., babouche, pantoufle. Festin, repas où Ion se grise,
ribote : Çai n'ai point de pain et çai fait des bamboches tous les
lundU — prononcez lundAi (Ça n'a point de pain et ça fait des
riboles tous les lundis).
bambocher, y. , faire des bamboches, boire beaucoup, fréquenter les
cafés ou les cabarets.
bambochoub, n., qui fait des ribotes, ivrogne, homme de cabaret,
débauché, viveur.
Jx bamboler, v. act. et pronom., a la môme signification générale que
bambiller» mais s'applique plus particulièrement au corps, aux
membres : Eune bambou pas tes braîs, tes jambes comme çai (Ne
balance pas, n'agite pas ainsi tes bras, etc.) Quand il s'agit du ba-
lancement du corps entier, on dit plutôt dandoler : ï se dandole
en marchant (voir ce mot). De bambola, ital., poupée? ou dondo-
lare? — Voir aussi vamber; mais bamboler marque une action
plus prolongée, plus habituelle : on vambe ses brais un moment,
sous le coup de la surexcitation, on les bambole d'habitude.
banc, n., amas de nuages à l'horizon : l'ai ein gros banc ai soleil
couché (Il y a de gros nuages à soleil couchant).
bandige (tenin en), tenir en suspens : Euje Vaittends, ï ne vient
pas, ï me tient en bandige; ï mai tenun en bandige toute lai mai»
tingnée, c'est-à-dire il me tient en suspens, il me fait croquer le
marmot, etc.
bandrouillérb, n., bandoulière : en bandrouillére (en bandoulière)-
-" b&re et borne, adj., borgne, qui a perdu un œil : Ein chevau ban».
(Un cheval borgne).
babbô (ou babbeau?) n., brouillon, pâté d'encre que font les enfants
sur leurs cahiers : /' fait pus de barbas que de lettes (11 fait plus
de brouillons, de pâtés, que de lettres). — Baba, brouillon, Gros.
barbocher, v., faire des barbas, écrire à la hâte, illisiblement, mal-
proprement : l'ai barboché sai page, qu'ein chaît en ferot autant
aiveu ses griffes (II a griffonné sa page, comme un chat, etc.) —
Babocher, écrire malproprement, Gros.
babbotiot (ou barbotibau?) n., émouchette, sorte de filet dont on
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76 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX
caparaçonne les chevaux pour les émoueher. Par méprK les
effilés que portent les femmes à leurs vêtements : Eull' ai des
bar bot lots tout ailentour de sai robe ou de ses cotillons (Elle a des
effilés tout autour de..., etc.)
bardé, part, passé, couvert, rempli et comme enduit, crépi : Eul
bas de ses cueulottes tast bardé de boue (Le bas de sa culotte est
couvert, enduit de boue). — Voir rembardé.
bardée, n. t jet, fusée; se dit d'une certaine quantité de matière
semi-liquide, de boue par exemple, qui jaillit ou qu'on fait jail-
lir, qu'on lance exprès sur quelqu'un ou sur quelque chose : J'ai
jitié (ou j'tié) eunne grosse piarre au moitian de lai boue, et i'en
ai reçu eunne bonne bardée! (J'ai jeté une grosse pierre au milieu
de la boue, et il en a reçu un bon jet, une large éclaboussure. —
De bard, civière ?
barder, v., enduire, couvrir de boue ou d'une matière semi-liquide
quelconque. On dit aussi que les roues d'une charrette bardent,
quand elles s'enfoncent dans le sol humide, de manière à se rem-
plir de terre entre les rais, ou encore lorsque au lieu de rouler,
elles patinent, glissent, sur un sol dur ou gelé. — Voir rembarder.
barogre (ou p a roche?) n., espèce, sorte, catégorie. S'emploie le
plus souvent avec une nuance de mépris : J'en ai vu des bêtes ai
lai foire! l'y en aivot de toutes les baroches (.... il y en avait de
toute espèce). — De parodie, pour paroisse?
bas (en du), loc. adv., du côté du bas, du côté du val, en bas;
ai bas, à terre, par terre : ïai cheu ai bas; tast ai bas (Il est
tombé à terre; il est par terre).
basainne, n., basane; avec mépris, peau : Euje li crèveras lai ba-
sainne (Je lui crèverais la peau du ventre).
bastringue, n., tumulte, bruit, vacarme : An fait ein bastringue
dans c't'ècole4ai, bailleurs*.... (On fait un vacarme dans cette
école-là, à vrai dire!...). — Sans doute de bastringue, bal de
guinguette, ordinairement bruyant?
bâte, interj., bah!
1 Une singulière signification du mot d'ailleurs, assez difficile à
exprimer.... On dira : l'en ai cheu de lai pieue, aujd'heu, i'en ai
cheu d'ailleurs! (11 en est tombé de la pluie aujourd'hui; il en est
tombé.... une quantité]) Ne serait-ce pas qu'on sous-entend un
membre de phrase comme par exemple : .... d'ailleurs tant qu'il me
serait impossible de vous dire combien?
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX 77
battage, n., machine à battre.
bauche, n., bauge, gîte : Eunne bauche de sainguier (Une bauge de
sanglier). Avec mépris, en parlant d'un homme : l'ast enco dans
sai bauche, pardi, cul lâche t (H est encore dans son lit, bien sûr,
le paresseux, le fainéant !
bè, ad., pour bin, bien, dans be lun (bien loin). Cependant on dit
aussi bin lun.
beaume, n. ; on nomme ainsi plusieurs plantes de la famille des la-
biées, particulièrement l'origan.
bèbb, n., un mot du vocabulaire des enfants, pour désigner ce
qu'on nomme ailleurs caca.
beg-bôe, n., terme de mépris pour désigner un individu embarrassé
de lui-même, désoeuvré, qui ne sait que faire, qui attend ou
semble attendre : Aivance donc, grand bec-bôe (Marche-donc, etc.)
l' se tient lai comme ein bec-bôe (Il reste là comme, etc.) Ce mot a
dû désigner d'abord le pic, qu'on nomme aujourd'hui picard,
picard vert, picard rouge... Cela parait d'autant plus probable
qu'on emploie presque toujours bec-bôe comme terme de compa-
raison. — Grosley dit : toque bois, pivert.
bèclade, n. adj., femme bavarde, jacasse, tatillonne: Eulles n'en
finiront pas, vai, de causer, ces deux bèclades-lai I
becnellb (ou bèquenelle ?), n., femme bavarde, coureuse, tatil-
lonne, qui perd son temps à voisiner. — Voir bèclade, leuve-nez,
etc.
becqdbr [se), v., se rencontrer bec à bec, se heurter presque. —
Voir se bocquer.
bedon, n., bourdon, espèce de mouche. Au fig., homme court, ven-
tru, lourd : Eurmue-le don vor ein poicho. gros b'donf (Remue-toi
donc un peu, gros lourdaud I)
bée et bieau, adj., beau.
bèe, onomat., pour imiter le cri de la brebis. Interj. du vocabu-
laire enfantin marquant le dégoût : Oht ne touche pas çail Fi,
bèel—Debèbè?
beguer. v., bégayer : T bègue (Il bégaie).
bel, adj., s'emploie parfois pour beau : Çast des bels hommes. '
bel et bin, expression qui signifie beaucoup, un peu trop, immodé-
rément : Euje \i aivôs permins de mainger des ceréges su mon
ceréger, mas ïen ai maingé bel et bin...., c'est-à-dire un peu trop,
immodérément.
belle (aivoir lai), expression qui signifie avoir grandement le temps
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78 PATOIS DB LA FORÊT DE CLAIRVACX
nécessaire, l'occasion, la facilité, etc., de faire quelque chose :
Tons lai belle de fini note champ devant medli*, c'est-à-dire nous
gagnerons la belle heure, nous finirons facilement notre champ
avant midi. JTai belle ou lai belle de te raittraiper sans courre (Je
te rattraperai aisément sans courir), dit un père à son enfant
qui fuit pour échapper au châtiment, c'est-à-dire : je n'ai pas
besoin de courir après toi, je te retrouverai toujours ce soir ou
demain. — On dit quelquefois : J'ai lai belle heure de faire mon
champ aujd'heu, ce qui indiquerait que le mot heure est toujours
sous-entendu. — Avoir belle, avoir le temps, Thév.
belle (en saivoir de). Voir saivoir.
belle en vai, loc. prépos., grâce à..., si ce n'eût été..., heureuse-
ment que, etc. : Si i'ai réussi, belle en vai moi (S'il a réussi, c'est
grâce à moi). Belle en vai lui, t'airôs cheu, c'est-à-dire si ce n'eût
été lui, tu serais tombé.
bénin, adj., bénit; ne s'emploie guère que dans ces deux expres-
sions : du pain b'nin ou m'nin, de Veau b'nintiea (du pain bénit,
de l'eau bénite) ; dans les autres cas, on dit généralement bénit.
benner (bin-né), n., voiturier qui conduit, ou plutôt qui conduisait
autrefois les bennes de charbon : Les benners sont passés pus tiôt
que les aûtes jous. Nor comme ein benner (Noir comme un voitu-
rier à charbon).
berger, ou bairger? (se), v., se ployer, en parlant d'un fond de
tonneau, de cuve, etc., se tordre, se gondoler, se déjeler, se bom-
ber : Eul bois du fond de cYeurcueilloue4ai tètot vart, % s'ast
berge. (Le bois du fond de cette jale était vert, et il s'est bombé.)
berne, n., fossé le long d'une route. — Berme?
bête au bon Dieu, n., une espèce de punaise rouge qu'on trouve
fréquemment dans les fentes des portes des églises.
bêtige, n., bêtise; polissonnerie, grivoiserie : Y dit déjà des bitiges
aux gâchottes, eul petit mâtin !
bêtotte, n., diminut., petite bête.
4 On cite aux enfants, comme exemple à ne pas suivre, ces mots
d'un paresseux qui disait à son père le matin : Oh! ne nous dépêchons
(dans quelques villages, dèpoïcfions) pas tant, vai, popa, j'ons lai
belle de faire note champ aujd'heu ! Puis, comme faute de s'être
pressé, il restait beaucoup à faire après midi, il changeait de langage
et disait : Oh l vai, popa, ce n'ast pas laipoinne de nous tant dépê-
cher, je ne le ferons tovjous pus!
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX 79
bkuchb, n., bûche. Beûche.
beuchotte, n., bûchette, petite bûche, copeau provenant de l'équar-
rissage des arbres, de la fabrication du merrain, des cercles, etc.;
- éclisse : Tirer ai lai beuchotte, tirer à la courte paille.
Se bbuiller et builler(ou beuyer et buyer?), v., regarder à la dé-
robée par un trou, par une porte entrebaillée, etc. : T beuille
pa V larmier de sai caive, pou vor euce qui se passe dans mai cour
(Il regarde par le soupirail de sa cave pour voir, etc.) — BeuiU
1er, regarder à travers un trou ou une fente, Gros. ; beuyer, re-
garder en se dissimulant, Thév. — Du vieux français beuiller,
regarder de tout près?
V beuillot et buillot, ou beuyot et butot? (faire coucou), expression
qui signifie montrer sa tête par intervalles, dans une ouverture
étroite, une porte entrebaillée, une fenêtre, entre deux rideaux,
etc , puis la retirer vivement pour jouer avec un petit enfant, en
criant : coucou I coucou I On dit aussi par ironie : Tu m'èpiôs, tu
fsàjâs coucou beuillot pa tai croisée, c'est-à-dire tu m'épiais, tu pas-
sais de temps en temps la tête par ta croisée). — Pie, pie I Thév.
bbuue, n., bouillie de farine et de lait : Ç'ast faire de lai beûliepou
les chatts (c'est faire de la bouillie pour les chats), c'est-à-dire :
c'est de la peine perdue, c'est jeter, des perles aux pourceaux,
etc. Gnai guère de beùlie dessus vos galettes (Il n'y a guère de
bouillie sur vos tartes). J'en seûs lassé comme de beùlie en heule
(J'en suis fatigué comme de bouillie en huile). Marie beulie....,
espèce d'épithète ridicule, de sobriquet, qu'on attache au nom de
Marie, sans doute à cause de la consonnance. Du reste, on trouve
de ces dictons rimaillés à plusieurs noms de baptême : Henri,
Vpot bout-ï ? Coulas des pois, du lard parfois; Henriette, leuve
lai paitte, etc. 4
beunnetron, n., cage à poulets en osier, poussinière : Eulle loche
quate enfants enco tout petiots, qu'an mettrot tous les quate desous
ein beunn'tron (Elle laisse quatre enfants encore tout petits, qu'on
mettrait, etc.). — De benneton ou hanneton ?
beurbe, n., bourbe, boue épaisse.
beurbis, n., brebis. En frappant sur une branche de saule, afin
d'en détacher l'écorce pour en faire un sifflet, les enfants de mon
temps chantaient ce refrain moitié français, moitié patois : Tourne,
< Nous ne donnons que la première partie de ces dictons, qui
finissent en général par quelque inepte grossièreté.
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80 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIBVADX
tourne, sauce; su lai côte de Bar-sur-Aube, j'ai rencontré eunne
beurbis fouirouse, j' \i ai tiré les vers du c, pou faire eunne
bonne salade en verjus : Pou gui? Pou qui? Pou qui ? — Et ils
nommaient alors celui d'entre eux qu'ils voulaient taquiner, ait-
tratper.... C'était encore une espèce d'aittraipotte (voir ce mot).
Beurbis qui bêle perd sai goulée (voir gueurlette). — Prebis, P. T.;
berbis, au xiu e siècle.
bburdacher, v., mal travailler, à la hâte, gâcher la besogne soit par
manque de goût, soit en trop se pressant. — De beurdi-beurdâ?
beurdi-bburda et beurdi beurdo, loc. adv., bredi-breda, à tort et à
travers, sans faire attention, précipitamment, comme une cor-
neille qui abat des noix : Y s dépêche, beurdi-beurdô, et peut
ç'ast de lai prope ouvraige! (Il se dépèche, etc., et puis c'est de
la belle besogne !) On dit dans le même sens vlin vlan, pin pan,
etc. Quand il s'agit de la marche, on emploie plutôt beurlic-beur-
loque (voir ce mot).
bburdôo et bburdoub, interj., onomatopée, pour désigner et repro-
duire le bruit d'un corps qui tombe, l'écho d'un coup de fusil
dans le bois, etc. : T ai vlu prenre eul nind, et gnètot pa enco
au moitian de iâbreque, beurdôot le v'iai ai bas (Il a voulu
prendre le nid, et il n'était pas encore au milieu de l'arbre
quand, etc.) On met d'autant plus d'dque l'écho est plus long.
Quelques personnes prononcent peurdâô.
beurdonner, v., murmurer, bourdonner, grogner, grommeler, bou-
gonner. Voir raboter, catonner, etc.
beurdonnoub et beurdo nnier., n., celui qui beurdonne par habitude.
bbubdouille, n., gros ventre, bedondaine : Que beurdouille qui* ai,
çtuUai ! (Ouel ventre il a, celui-là !/
beurdouiller, v., parler en bégayant, ou d'une manière confuse,
hésiter en parlant; à la fois bredouiller et barbouiller.
beurlan, n , bruit, tapage ; An fait ein beurlan ai l'école, qu'an ne
s entend pas (On fait un vacarme, etc.). Que beurlan if ait aiveu
ses gros mastots de saibots t (Quel tapage il fait avec ses gros sa-
bots!) — De brelan?
bburlauder, v., s'occuper à des riens, perdre son temps à des dé-
tails, à de la besogne inutile, qui ne rapporte rien, par paresse,
nonchalance, étroilesse d'esprit.. Si un cultivateur nettoie son
jardin, sa cour, sa grange, emmanche un outil, etc., par un beau
temps, au lieu d'aller aux champs, à une besogne importante
qui presse, on dit qu'il beurlaude, beurlute, baicute, tacote, bri*
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX 81
cole, tanvge, etc. Beurlauder est an des pi as énergiques. On peut
baicnter, bricoler et tacoter à propos quelquefois, beurlauder ja-
mais. Signifie encore parler pour ne rien dire, radoter. — Voir bot-
tekr, catonner, etc. — Berlauder, beurlauder, s'agiter et ne rien
faire, Thév. ; brelauder, Gros.
becrlàuderie, n., besogne de nulle valeur, riens auxquels on donne
à tort de l'importance; radotage, discours sans suite : Tu perds
ton temps ai des beurlauderies ; tu feras meux de dormin ( tu
ferais mieux de dormir.) — Ber ou beurlauderie 9 Thév.
beublaudieh et beurlaudoue, n., celui qui beurlaude souvent, par
habitude, par goût; mauvais ouvrier; radoteur, qui ne sait ce
qu'il dit. — Voir raivaudier et raivauderie.
BEURLic-BEURLOQUE, loc. adv., bre lie- breloque. S'emploie à peu près
comme beurdi-beurdâ, mais exclusivement pour peindre une
marche irrégulière, la marche saccadée d'un estropié, d'un homme
qui ne voit pas bien clair, et qui fait du bruit en buttant : /' s'en
vai beurlic beurloque f... des coups de pieds ai toutes les piarres
(Il s'en va clopin-clopant, etc.)
beubloque (baitte lai), expression qui signifie perdre la tête, avoir
l'esprit troublé, avoir le délire, déraisonner, etc.
beurloquer, v., branler, remuer, et comme se disloquer avec bruit,
plus rarement sans bruit : Tai voitiure n'ast don pas solide,
queulle beurloque comme çai ? Eul moinge de mai pioche beur-
loque b\n : an voit qui' fait so (Le manche de ma pioche branle
bien : on voit qu'il fait sec). On dit d'une horloge qu'elle « bait
lai beurloque » quand elle va mal ou qu'elle sonne onze heures à
midi; de même d'une personne, quand elle perd la mémoire ou
que sa tête déménage. — Voir baitte.
beurlu, adj., myope, qui a la vue faible, qui regarde de tout près
les objets pour les voir; quelquefois, plus rarement, louche. —
Voir cannoyot et caliborgnot. — Beurlu, louche, Gros.; berlu,
louche, Thév. — De èbeurlu, ébloui ?
beurlue (aivoir lai), expression qui signifie avoir la berlue, avoir
mauvaise vue, voir mal, être myope, à demi-aveugle : Comment,
tu ne peux pas vor ç't'ougelot-lai, su lai nwutte de terre? Taies
don lai beurlue? (Comment, tu ne peux pas voir cet oiseau-là,
sur la motte de terre? Tu es donc, etc.)
beurluter et son diminutif beurlutotter, v. ; à peu près le même
sens que beurlauder; en particulier, perdre son temps dans les
minuties, les détails, le perfectionnement de riens : Qu'astre que
T. EUX 6
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82 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VA II
tu beurlutes don ? Allons don vitiexx / Quand tu serties zeue toute
tai jonnée pou pieummer ein œu, çai ne serait toujous quein œu
pieummél (Qu'est-ce que ta raffines donc? Allons donc vite!
Quand tu auras été toute ta journée pour peler, enlever la coque
d'un œuf, ce ne sera toujours qu'un œuf épluché, sans coque!)
Beurlutotter fait supposer un travail moindre encore et plus de
lenteur dans l'exécution. — De beurlu, beurlue? c'est à-dire tâ-
tonner lentement, comme un homme qui ne voit goutte.
beurluterie, n., occupation peu sérieuse, besogne de peu de
valeur, qui rapporte peu. — Voir beurlauderie, beurluter, etc.
bburlutier, n., celui qui beurlute.
beurnacler, v., construire, emmancher, emmêler, entortiller, etc.;
se prend toujours en mauvaise part : Tai fait eunne cabane dans
mai vingne; j'ai beurnaquié çai en deux jous, c'est-à-dire j'ai
construit à la hâte, à la grosse mordienne.... On dit aussi dans ce
sens, bâcler (bâcler). Comment don que t'aies frommé lai pote,
que t'axes aittaiché lai vaiche, comment don que t'aies beurnaquié
çai, que je ne peux pas Vouvri, pas le défaire? etc., etc. — Voir
dèbeurnader.
beurnique, interj., bernique.
beurziller, v., hacher menu, écraser, briser, brésiller : L'àbre, en
cheujant, li ai beurzillé le pied (L'arbre, en tombant, lui a mis le
pied en capilotade). Euje te beurzillerôs t dit une mère en colère
à son gamin. — De brésiller?
beurteler, v., marcher par saccades en se heurtant aux cailloux,
chanceler, trébucher : Euje beurteulle tout de long le chemin aiveu
mes saibots dèbridiés (Je fais des faux pas tout le long du chemin
avec mes sabots débridés). Se dit aussi d'une roue qui tourne
par sauts, excenlriquement : Çai beurteulle. — De beurtiotf —
Voir beurlique-beur loque.
beurtelle, n., bretelle. L. Coûtant et Tarbé disent ipsalle, ptalle,
etc. ; ce sont des contractions de ce mot : beurtelle, b'telle, ou
p' telle, p'talle, etc.
beurtiot (ou BEURTiEAu ?), n., blutoir ou bluteau d'un moulin; sas
mécanique pour séparer la farine du son. C'est le mouvement
saccadé de cet instrument qui, avec le mécanisme de la trémie,
produit le tic-tac du petit moulin.
bi, ou bis? (faire), expression du vocabulaire enfantin qui signifie
embrasser, baiser : Allons, faisbi, fais bibi, c'est-à-dire embrasse,
donne un baiser. Certaines mères plus raffinées, ou plus mi-
gnardes,disent : Fais ba 9 fais bicot, fais bicotte, etc. — Voir biser.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX 83
bîbie, n., joujou d'enfant, et eu particulier tesson de vaisselle avec
lequel jouent les enfants des campagnes : Casse lai soupière, lai
terringne, mon gachenot, pou te faire des bibies (Casse la sou-
pière, la terrine, mon enfant, pour te faire des joujoux). — De
bibusl
bichonner (se), v., s'attifer, s'amignonner, se parer avec recherche»
passer trop de temps à sa toilette : Ylai deux heures qu'eulie se
bichonne (Voilà deux heures qu'elle met à s'atiiïer).
bicri, ou biqueri (bois), n., le chèvre-feuille xylosteon, lonicera xy*
losteum. On dit aussi bois de bicri, ou simplement bicri.
bigonb, n., bigorne; espèce de clef en s, pour ouvrir du dehors une
porte fermée au dedans par un verrou.
bignoux, adj. et n., chassieux : raie* les œux bignoux (Tu as les
yeux chassieux). Ç'ast ein peut bignoux (C'est un vilain chas-
sieux). — De bigle ?
bigot, n., pioche à deux dents. Bigot, adj., gourd, engourdi par le
froid : J'ai les dogts bigots (J'ai les doigts gourds, engourdis
par le froid).
buottb, n., nom d'une espèce de champignon comestible qui pousse
en abondance dans les plantations de marsault, vers le mois d'oc-
tobre. On dit aussi grijotte. — De bis, gris-brun?
billard, adj., qui a les jambes torses, de travers : C( enfant lai,
an l f ai fait marcher trop tiôt, et iast bi-iard (Cet enfant là, on
l'a fait marcher trop jeune, et il a les jambes de travers).
billarder, v., avoir les jambes torses, marcher de travers. Terme
de manège passé dans le patois?
billaudiot?, n. , crochet de fer pour tisonner, espèce de tire-marrons.
billon, n., cep de vigne, l'ensemble de la souche et du sarment, et
même des fruits dans la saison : Enco ein bi-ion et mon pner serai
pieun, c'est-à-dire encore un cep et mon panier sera plein; rondin
préparé, prêt à être fendu pour faire des paisseaux : J'ai des biU
Ions pou faire cent jaivelles de pâchés, dans mai part & arpent.
Quand les billons sont petits, c'est-à-dire qu'ils proviennent du
taillis et non de modernes, le nom de l'espèce est billotte : Tai
de lai billotte, etc. — De «Me?
billotte, n. Voir billon.
bot, adv., bien, beaucoup; bintiôt, bientôt; très bin, beaucoup :
Des rasins, ou ragins, dans mai vingne, oh, gny en ai pas très bin
(Des raisins dans ma vigne, oh, il n'y en a pas beaucoup). On
dit plutôt cependant : Oh, gn'y en ai pas tout pieun I On emploie
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84 PATOIS DE LA FORÊT DB CLAIRVAUX
bè pour bin dans bè'lun ou bellun, bien loin. — Bé et ben 9 trébé,
beaucoup, benajey, bien aisé, L. C; très bé, beaucoup, G. etR.;
bé, bien, P. T. ; trèe ben, beaucoup, Thév.
binette, n., rosse, cheval maigre, mal nourri : Tu liô (ou \Ô) bulle
don ai mainger des meuds, ai tes binettes, hè? que les codes (so*
fluieu) liô sont restés dans le vente (Tu leur donnes donc à manger
des muids, à tes rosses, hé? que les cercles leur sont restés, etc).
S'emploie par mépris pour désigner môme un bon cheval : Dé-
tonne tai binette, gahpint (Détourne ton cheval...) — On emploie
dans le même sens le mot carcan.
^J! bingne, n., coup auivi de bosse, taloche, particulièrement sur la
tête; bigne : /' s'ast toqué le front dans lai pote, tai reçu eunne
bonne bingne (Il s'est cogné le front contre la porte, il a reçu, etc.)
— Beigne, coup avec excoriation, Gros.
bique, n., espèce de trépied en bois fait d'une cime fourchue, d'une
grosse branche à trois rameaux, qu'on emploie pour tenir les
charrettes en équilibre; espèce de tréteau en croix, aussi à trois
pieds, qui supporte le cuveau à lessive. Jouer ai lai bique, jouer
à un jeu assez semblable à celui du bouchon ou du palet, mais
où le but à atteindre est une petite bique, ou trépied, et où les
palets sont remplacés par des bâtons.
biques, n., espèces de brûlures, de taches aux jambes des femmes,
occasionnées par l'usage immodéré de la chaufferette, du couvet.
— Bicque, Gros; bique, Thév.
biquot, n., chevreau, petit de la bique; chevreuil, par plaisanterie:
Je nous pas vu de liéve en chaisse, masfons tiué deux biquots.
Terme d amitié dont on se sert avec les enfants : mon biquot, mai
biquotte. On dit de même : mai poulotte, mai chaitotte, mai rai-
totte, etc. ; souvent, tous les animaux y passent.
/ biquotte, n., diminut., petite bique, dans les divers sens de ce mot.
biquetier, n., chévrier, gardien de biques; injure, comme vaicher,
poucher, etc. (vacher, porcher, etc.)
bisailles, n., espèce de pois mêlés à une autre plante fourragère.
— De bis ? ou de pisum f
biscambille, n,, estropié, déhanché, qui a les jambes torses, qui
boite, qui traîne les pieds, qui jette les jambes de travers en
marchant, etc. ; terme général exprimant à la fois les idées de
billard, gambin, boitioux, etc. — Voir ces mots.
biscarié, part, p., troublé par des malaises divers, contrarié par
des infirmités, des souffrances, des ennuis physiques ou moraux,
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX 85
mais plus particulièrement physiques : Euje seûs souvent biscarié
depeûs quéque temps; quand ce riast pas eunne cheuse, çen ast
eunn' aute (Je suis souvent souffrant depuis, etc.) — Le verbe
Vest guère employé.
biser et biger, v., baiser, embrasser : Bise-le (Embrasse-le). —
Voir M, faire bi. — Bije, bise, P. T. ; bâfra, baisera, ch. de n.
Encore un exemple du peu d'exactitude des travaux sur le patois
riceton !
bissô (ou bisseau?), n., le second fils, le cadet, dans beaucoup de
villages, à Cunfin par exemple. — De bisser, répéter, ou de
besson, jumeau? — Beucelot, enfant jumeau, Gros.; besselot ou
beusselot, Thév.
blafe, adj., pâle, gris pâle : Tai piauté des pois biafes (J'ai planté
des haricots pâles, gris clair). Nous n'avons jamais entendu em-
ployer ce mot que dans cette expression, c'est-à-dire avec le mot
pois ou haricot. — Blaff, blême, Gros. — Pour blafard ?
blainchi, part. pas. et inf., blanchi, blanchir; en particulier, blan- x'
chir le linge : Euje les biainchis et je les recouds (Je blanchis
leur linge et je le raccommode).
blainchot, adj., pâlot : Eulle l ast einpoichot biainchotte (Elle est
un peu pâle, maladive).
blanc, adj., blanc : Du pain bianc; fém. biainche : Eulle ai mins
sai robe biainche (Elle a mis sa robe blanche). Ailler mainger
du pain bianc, aller en justice, plaider : Euje te ferai mainger
du pain bianc (Je te ferai assigner, je t'attaquerai en justice);
parce qu'on allait plaider à la ville, et qu'on déjeûnait à l'au-
berge, où l'on mangeait du pain de boulanger. Ts sont zeûs
mainger du pain bianc (Ils sont allés devant le juge de paix). Je
ne te vois pas bianc, c'est-à-dire te voilà dans une belle situa-
tion, tu n'as qu'à te bien tenir ! Faire comme les servantes de
curés, mainger son pain bianc l'prommer, c'est-à-dire commencer
par le plus facile, avoir une vie plus belle au commencement
qu'à la fin, etc. Mette du nor su du bianc, écrire.
blé, n., blé : Mainger son biéen harbe (Manger son blé, etc.)
blette, n., betterave. Pronon. : Blette, Mette.
bleu, adj., bleu : T n'y ai vu que du bieu (Il n'y a vu que du bleu).
Y ai toujous pour qui* ne noge bieu (Il a toujours peur qu'il ne
neige bleu), c'est-à-dire peur de ce qui ne peut arriver.
blis (ou belin?), n., bélier : Tête de blin (Tête de bélier),
buqub-bloqub, ou duc-bloc ? (s'en ailler), s'en aller à pas lourds,
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86 PATOIS DE LA FORÊT DE CL AIR VAUX
bruyants et lents : V s'en vai blique-bloque aiveu ses gros saibots,
comme ein bœutier (Il s'en va lourdement, etc.)
bloche, n., prune : Pâté en bloches (Tarte en prunes). — Blosse,
Thév.
blocheb, n., prunier. — Pné, prunier, P. T.; blossier, Thév.
blonde, adj. n., bonne amie, maîtresse, fiancée : Faire eunne
bionde (Commencer à fréquenter, faire la cour à une fille). Çast
sai bionde (C'est sa bonne amie, son amoureuse, sa promise).
blossi, v. infinitif, blossir, et part, passé, blossi.
blot (ou blos?), fém. : bhsse] adj., blet, blette : Çai ne coûte pas
des poirottes biosses t (Cela ne coûte pas des poirottes blettes !),
c'est-à-dire cela coûte cher, ce n'est pas à bon marché.
blouque, n., boucle : Eune fais pas ein non } fais eunne biouque
(Ne fais pas un nœud, fais une boucle). Popa, ï me dit des noms?
Rèponds-li des biotiques t (Espèce de jeu de mots sur non, nœud,
et nom, employé pour faux-nom, sobriquet). On dit : eunne
biouque de beurtelle, une boucle de bretelle, et eunne bougue
d 'oreille, une boucle d'oreille.
bôchebon, n., bûcheron. Bois de bâcheron, les copeaux, les petits
troncs que font les bûcherons en coupant le taillis, le collet des
branches. — Voir recoupes.
boedtieb, n., bouvier, homme qui conduit des bœufs. Au fig., gros,
sier, lourdaud, endormi, balourd.
boicher, v., labourer avec le vessou ou mègle exclusivement : Boi-
cher aux vingnes (Labourer aux vignes, — pour les vignes, ou dans
les vignes). Boicher les pommes de terre (Labourer les pommes de
terre, avec le vessou). — Voir vessou. — De bêcher ?
boige, boge, boget, bouot, etc., noms de différents tissus, laine et
fil, fabriqués autrefois par les tisserands des campagnes, et ser-
vant à confectionner des vêtements grossiers et solides : Meux
vaut cul de boige que cul de drap ai crédit t c'est-à-dire mieux vaut
s'habiller de boige que de drap à crédit! — Voir droguet et M-
conte. — De beige ou bège, gris?
boigevot, ou boigeveau? (ai), loc. adv., en sens opposés, pieds
contre têtes; se dira d'une gerbe dont les épis ne sont pas tournés
tous dans le même sens, d'un fagot dont les ramilles sont bout-ci
bout-là, etc. : Tu mets taijaivelle ai boigevot su lai mienne, c'est-
à-dire tu la croises de manière que les épis de la tienne corres-
pondent aux pieds de la mienne. Se coucher ai boigevot, se mettre
la tête au pied du lit. — De beschevat, manière de se placer au
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PATOIS DE LA FORÊT DE CUIR VAUX 87
lit en sorte que les pieds de Tan soient tournés vers la tète de
l'autre, Gros. — De à bis chevet, à double chevet?
boin, adj., bon; boinne, bonne.
boibger, n., berger : Çast aussi râle que de lai siueur de boirger
(C'est aussi rare que de la sueur de berger).
boite, n., boisson, second vin obtenu au moyen d'eau jetée sur le
marc. La boite diffère du râpé en ce qu'on la retire de la cuve
après la fermentation, absolument comme on fait pour le vin, et
qu'on la met en fût séparément, tandis que le râpé, laissé avec le
marc, n'est tiré qu'à fur et à mesure des besoins. Souvent môme
on fait ce qu'on appelle la lessive, c'est-à-dire qu'on remet une
cruchée d'eau sur le marc à chaque cruchée de râpé qu'on tire.
Dans un sens général, boisson : Euje mêle du vin d'aiveu du râpé,
et ç'ai fait eunne bonne boite (Je mêle du vin avec du râpé, et ça
fait une bonne boisson). — Boette, boitte, L. C; boete, P. T. ;
boitte, Thév.
boite, n., ce que l'on consomme de boisson dans l'année : J'ai du
vin pou mai boite (J'ai du vin pour ma consommation).
boitioux, adj., boiteux.
bon (en de), loc. adv., sérieusement : Oh mas, paye me : j'onsjoué
en de bon (Oh mais, paie-moi : nous avons joué sérieusement,
c'est-à-dire ce n'était pas pour la frime, pour rire, pour plaisan-
ter). Çast-ï en de bon que tu dis çai? (Est-ce sérieusement que
tu dis cela?)
bonbons, n., fruits secs, raisins, pruneaux, cerises, etc., qu'on
donne aux enfants en guise de dragées. — Voir guingnottes.
bône, n., borne, grosse pierre qui marque les limites de deux pro-
priétés : Sens va \ c'te bône-lai, eulle sent l'heule (Sens voir, cette
borne-là sent l'huile). Une douce plaisanterie qui consiste à
pousser contre la borne le nez des naïfs qui se baissent pour sen-
tir. — Bosne, Gros.
bonnes (été dans ses), être bien disposé, de bonne humeur : T m'ai
bin reçu, i'ast dans ses bonnes auj'd'heu (11 m'a bien reçu, il est
de bonne humeur aujourd'hui, il s'est bien levé). S'emploie sur-
tout en parlant d'une personne fantasque.
boqueb, v., toucher, heurter : Boque-le, i' dort, c'est-à-dire louche-
le, secoue-le pour l'éveiller. Boque-le vor t (Tâche d'y toucher !)
Se boquer, se heurter en se rencontrant, passer tout près l'un de
4 On dit aussi : Sens vor.
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88 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVÀUX
l'autre : ï sait boqué dans moi (Il m'a heurté) ; F s se sont boqués
sans se paler (Ils se sont frôlés en passant sans se parler). — Voir
se becquer. — Bocquer, heurter, Gros. ; bocquer, id., Thév.
borde (feu de), grand feu, feu de corps de garde.
' bdt, n., crapaud. : Tast enfié comme ein bot (Il est enflé comme un
crapaud). Parole plus dédaigneuse qu'injurieuse qu'on adresse à
un gamin, à un homme court de taille : Méchant bot, eust-ce* que
tu v'rôs — ou vourôs — essayer de me faire cheur f (Méchant ga-
min, est-ce que tu voudrais, oserais, essayer de me faire tom-
ber, de me renverser?) Méchant est employé dédaigneusement
aussi, dans ce cas et dans les cas semblables, pour pauvre, chétif,
etc., deux fois gamin. — Bote, P. T.; bote, G. et R.
boteret, n., petit bot, petit crapaud. S'emploie comme bot. — Bo»
teret, G. et R.
botte d'ècureu, n., nid d'écureuil; désigne également le nid de
mousse que l'écureuil se construit entre deux branches d'arbre,
et les petits écureuils qui y sont nés : J'ai vu eunne botte d'ècu-
reu. J'ai prins lai botte d'ècureu et peûs lai mère.
botteler, v., bougonner, grommeler, gronder entre ses dents, se
plaindre : Gnast jaimmas content, t' botteulle toujous (Il n'est
jamais content, il se plaint, il bougonne toujours). — Voir coton»
ner, raboter, etc.
/ boucheau (ou bouchô?), couvercle de pot, de soupière, etc.; toute
espèce de couvercle et bouchon : Ein boucheau de caisse rôle.
Boucheau de four, la porte du four; etc. On dira à quelqu'un qui
gêne, qui masque la fenêtre : Eurtire*te* dt lai, boucheau! fées
trop épais pou faire eunne croisée (Retire-toi de là , lu es trop
épais pour, etc.)
bouchblot, n. diminutif, petit boucher, boucher de carême, qui
1 Dans les interrogations, avec le pronom ce, ast se change ordi-
nairement en eus t. Cependant on dit : Diâbe ast-çu que çai? (Diable
est-ce cela?) N'astce que çail (N'est-ce que cela?) D'ailleurs est-ce
bien le verbe interrogatif, cet eust-cef Ne serait-ce pas plutôt la syl-
labe euphonique eu jointe au pronom démonstratif? Souvent on ne
prononce que le ce : S'que tu vrôs me faire cheur f (Est-ce que tu
voudrais, etc.?)
* Quelques personnes prononcent : Ertlre-te, i'ertient, ïernonce,
etc., comme s'il y avait airtire, iair tient, iairnonce, etc. (Retire-toi,
il retient, il renonce, etc.)
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX 89
rend peu. On donne aussi quelquefois ce nom aux enfants, aux
fils du boucher.
boucheton (ai), loc. adv,, couché sur le ventre, soit à plat, soit ap-
puyé sur les mains; couché la bouche sur l'oreiller; à croupe-
tons : Mets-te ai boucheton, je monterai sur ton dos. Mettre un
pot, une jale, un vase quelconque ai boucheton, c'est le placer
sur son ouverture, le fond en l'air. — Abouchetons, Gros. ; à
boucheton, Thév. — Voir ai miaou.
bouche-trous, d., maçon.
bouchie, n., bouchée : Eunne bouchie de pain. Gn'ai pas sitiôt lai
bouchie déhiors de lai bouche qu'ï s'endort, c'est-à-dire sa der-
nière bouchée n'est pas avalée qu'il s'endort. Lai bouchie de lai
reine, se dit d'une bonne bouchée, de la meilleure, qu'on garde
pour la dernière.
bouchon et bouchot, n. f buisson, bocqueteau; quelques cépées de
bois isolées; remise à gibier : Ein bouchon d'èpingnes (Un buis-
son d'épines). Les pèdrix sont dans les bouchots (Les perdrix
sont dans les remises). — Bouchon, Gros. ; bouchon, G. et R.
bouchon de chanve, n., poignée de chanvre, espèce de gerbot, ou
petite gerbe. Dans ce sens on dit aussi bouchot.
bouchot, n. Voir boùchotte et bouchon.
boùchotte, n., jeu d'enfant dans lequel l'un des joueurs, que le
hasard désigne la première fois, et qui est alors le bouchot, cherche
les autres joueurs cachés et court après eux. Le premier qu'il
peut découvrir et toucher devient bouchot à son tour. Quand les
joueurs se cachent, c'est la boùchotte caichante; quand ils se con-
tentent de s'éloigner à une certaine distance du bouchot et de le
provoquer à la course, c'est la boùchotte courante.
boude, n., nombril, ombilic : Si f'aie* mau au vente, tirc-te lai
boude I — Boude, Gros, et Thév.
BOUDERi, n., petit morceau de lard coupé autour du nombril du
porc, à l'anus, etc., et qui sert ordinairement à graisser les scies.
boudon, n., bondon, et quelquefois la bonde d'un tonneau, c'est-à-
dire l'ouverture et le bouchon. Cependant on dit plus souvent
pour désigner l'ouverture : Eul trou du boudon.
boudonner, t., bondonner, fermer un tonneau avec le bondon.
boue, n , humeur, pus qui se forme dans un bobo, une plaie, un
abcès : J'ai ein mau dans le dogt qui vient ai boue; çai m'ai ta-
boulé Unité lai neut (J'ai un mal dans le doigt qui vient à suppu-
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90 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVÀUX
ration, où se forme du pus; j'y ai ressenti des élancements toute
la nuit.) — Voir tabouler.
bouffe-lai-balle, n., personne grosse, grasse, qui a l'air de ne
plus pouvoir respirer.
bouillant, adj., pressé, actif, qui grille d'être à la besogne»
impatient de travail. S'emploie plutôt avec la négation : Oh, gn'ast
pas trop bouillant t (Oh, il ne se presse pas, il n'est pas ardent à
.- ' '": la besogne !) Il est le plus souvent ironique.
f^-vJ*-*- bouille, n., ampoule, cloche qui vient à la suite d'une brûlure,
d'une meurtrissure, d'un frottement prolongé : Mon souMer m
t sarre; j'ai eunne bouille darré le tailon (Mon soulier me serre,
j'ai une ampoule derrière le talon). On dit aussi grillot. Quand
l'ampoule provient d'un pincement, d'un écrasement de la peau,
elle prend le nom àepinckon. — De bouille, marque?
bouillot, n., grand panier à anse que portent les ânes, en double,
comme une besace, de chaque côté des flancs. Par analogie,
quand une bête est bien pleine, on dit qu'elle a deux bouillots.
— Bouillot, G. et R.
bouillu, part. pas. du verbe boûre (bouillir).
bouis, n., buis.
bouju, adj., qui a du bouge; ventru, par analogie avec un tonneau.
^ boula, n. On nomme ainsi une espèce de champignon sec, dur et
compact, assez semblable au liège, qui croît sur les bois morts ou
malades, sur les vieux troncs d'arbres. So comme boula, très-sec :
Note foin, i'ast so comme boula (Notre foin est très sec). — Voir
grillot.
boule au bâton (mener lai), expression qui signifie mener très vite,
abuser, prodiguer sans ménagement : V meunne sai femme lai
boule au bâton, c'est-à-dire il la fait marcher, il la malmène.
/' meunne son bien lai boule au bâton, c'est-à-dire il dépense trop,
il prodigue, il se ruine, etc.
boulin, n., bouleau : Ein bailai de boulin (Un balai de bouleau).
Ein rain de boulin (Un brin, une ramille de bouleau).
boulivar, n., chapeau à larges bords. S'applique plus particulière-
ment aux chapeaux de paille.
boulot, n. diminut., petit bout, petit morceau : ein boulot de bou-
din. Ç'ast lu qui ai copé le pain, et ï ne m'en ai bo\llè quein tout
petiot boulot (C'est lui qui a coupé le pain, et il ne m'en a donné
qu'un tout petit bout). Ein boulot d'homme, un bout d'homme,
un petit homme.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX 91
boulotte, n. dimin., petite boule, boulette. Boulotte d'œu, jaune
d'œuf.
boulotée, n., grande quantité, troupe en mouvement, fourmilière :
Eunne bouloyée de monde ai lai foire; eunne bouloyée d'enfants
qui sotent de l'école. Y y ai des vers pieun nos jambons, V y en
ai des bouhyèes (Il y a des vers plein nos jambons, il y en a des
quantités). — Bouleyée, troupe confuse, Gros. ; bouleyée, Thév.
bouloyeb, v., s'agiter, se remuer en grand nombre, fourmiller,
grouiller : T y en ai (prononcez : ian ai) du monde su laipiaice;
çai bouloye 1 (Il y en a du monde sur la place; il en grouille !)
F ai des poux, c't'enfant4ai, t" en ai, i' en bouloye t (Prononcez :
boulo-ille). Par analogie, simplement abonder : Fax des chadons
dans note champ, i 1 en bouloye (Il y a des chardons, etc.) — Bou-
léyer, Gros., Thév. — De l'italien brulicare't
bouquet, n., fleur, en général : J'aipianté des bouquets (J'ai planté
des fleurs). Bouquet de bois, bosquet, boqueteau, petit bois. —
Voir bouchon.
bouquin, n., bouc : V pue comme ein bouquin, comme eul bouquin
de chez le boirger (Il pue comme un bouc, comme le bouc du
berger). Bouquin de Chaicenay, espèce d'injure.
boura, n., sorte de grosse toile faite avec la partie la moins fine de
la filasse, le pied du chanvre. En certains villages téla. — Bour-
ras, xv e siècle.
bouraissot, n., lange de coton ou de laine qui sert à emmaillotter
les enfants, l'enveloppe extérieure du maillot. — De bourras ?
bourbotte et beurbotte, nom d'une espèce de plante qui vient
dans les endroits humide^ bourbeux, le coqueret alkekange. —
De bourbe?
bourb, v., bouillir. Fut. boûrai; cond. boûrôs.
bourlie, n., bourrelier, avec dédain. — Voir colleron.
bourre, n., nom d'une espèce de jeu de cartes : Jouer ai lai bourre.
bourre-lai-miche, n., gros mangeur, enfant affamé qui mange
beaucoup, qui court toujours à la miche : Que bourre-lai-miche
quec'i enfant lait (Quel mangeur, quel affamé que cet enfant
là!)
bourrrlotte, n., fagot de menues branchages, botte de ramillons :
Eulle breûle quate bourrelottes pou chauffer son four. — Dimi-
nutif de bourrée, fagot.
bourrer, v., poursuivre quelqu'un, lui donner la chasse, courir
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92 PATOIS DE LA FOBÊT DE CLAIRVAUX
après : J* se sauve, bourre-le I c'est-à-dire, poursuis-le I — De
bourrer, terme de chasse?
bourribr, n., bourrelier. — On dit aussi colleron et bourlie.
bourrique (faire tonner en), faire tourner en bourrique, ennuyer,
persécuter, obséder, faire perdre la tête. On fait tonner en bour*
rique quelqu'un à qui on monte une scie fatigante.
bousée, n., bouse de vache : l'ai tripe dans lai bousée; ïy ai des
bousées tout de long le chemin (Il a marché dans la bouse ; il y a
des bouses tout le long du chemin).
bousin, n., bruit, vacarme, boucan : V s font ein bousin dudiâbe
(Ils font un bruit, un vacarme du diable). Mauvais lieu.
boustifaille, n., mangeaille, victuaille, par plaisanterie, ou en
mauvaise part.
boustifailler, v., manger, bâfrer, festiner.
bout du monde (ç'ast tout le), express, qui signifie tout au plus, à
grande peine, c'est tout jusle, etc. : Si je trouve pou faire eunne
cheminge lai-dedans, çai serai tout le bout du monde, c'est-à-dire :
je trouverai à grand peine là-dedans — dans ce bout de toile —
de quoi faire une chemise. Quand ï traivoille deux heures dans
sai jonnée, ç'ast tout le bout du monde (Quand il travaille deui
heures dans sa journée, c'est tout au plus, à grand peine...). —
Tout le bout du monde, Thév.
boutenrrb, n., boutonnière; par analogie, entaille, coupure pro-
fonde : Eul charron s'ast fait aiveu le néron de sai haiche eunne
s.... bont'nére dans le genon. Oh, gué bout'nérel (Le charron
s'est fait avec l'angle de sa hache une profonde coupure au
genou, etc.)
bouteille, n , bulle qui se forme sur l'eau, quand il pleut en abon-
• J dance : T pieut, i'pieut, que ç'ai fait des bouteilles su les pa-
touillets. Bulle de savon : T s'aimuge ai souffier des bouteilles
aiveu ein poi d'ètrain (Il s'amuse à souffler des bulles avec un
brin de paille). On dit aussi boutoille et bouteillotte.
boutoille, n., bouteille, avec mépris : Qu'ast-ce que tu veux que je
fsige de tai boutoille veud'ieu.? — F... lai ai bas\ (Qu'est-ce que
t tu veux que je fasse de ta bouteille vide?— Jette-là à terre I )
t | jx, x bouté (ou bouter? ou bouille?), n., trou laissé dans un mur par
1 J les soliveaux de l'échafaudage, quand ils sont enlevés : r n'ai
pas fait rocher son mur, V n'ai pas seulement fait boucher les
bouyés (Il n'a pas fait crépir son mur, il n'a pas seulement bit
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX 93
boucher les trous...) Les moingneaux, % s ont fait Us ninds dans
les bouilles de note mur (Les moineaux onl fait leurs nids, etc.)
bototte, n., petite ouverture faite à dessein ou autrement, par
hasard, par vétusté, etc., dans un mur, un toit, une cloison;
espèce de juda : Eul chaît, i'ast passé pa lai boi-iotte (Le
chat est passé par le trou). En otant eunne piarre, eunne teule,
j'ai fait eunne boyottepou vor dans lai cour, — La boyotte désigne
depuis la lucarne jusqu'au trou à passer un moineau Le
bouyé fait une boyotte; on beuille, ou buille pa lai boyotte. —
Bouillote, petite ouverture du poulailler où passent les volailles,
Thév. — De l'ital. abbaino?
braigb, n., braise : Çast chaud comme brûge (C'est chaud comme
braise).
braiger, n., brasier : Vlai du bois qui fait ein bon brsager (Voilà
du bois qui fait un bon brasier).
brainchb, n., branche. Y s'en faut de cent fagots qui* s ne saint
de lai même brainche, c'est-à-dire ils ne sont pas parents, il
s'en faut de beaucoup qu'ils ne soient parents....
BRAiNCHÎs, n., taillis. Voir parchîs, même sens.
braissb-corps (prenre ai) } prendre à bras-le-corps.
braissie, n., brassée. Gaingner de l'argent ai lai braissie, gagner
beaucoup d'argent, autant qu'on en veut...
brament et bramont, adv., bien comme il faut, convenablement;
beaucoup; par ironie joliment, justement : traivoille brament,
travaille comme il faut, bien, convenablement. l'y ai brament
des bloches su vote blocher (Il y a beaucoup de prunes sur votre
prunier). ïast-ïvenun t'aidier? Brament t (Est-il venu t'aiderî
Joliment! Pas du tout!) Marche bramont dans lai houe, mon
gachenott (Marche justement, exprès dans la boue, etc.) — Bra-
man, L. C; branmant, vraiment oui, P. T.; bramant, G. et R.;
brament, vraiment, Thév. — De bravement?
bran (ou bren), n., vieux mot, matière fécale. S'emploie dans cette
expression : je n'ai vu ni /"..., ni bran; je n'ai trouvé, ni, etc.,
c'est-à-dire, avec humeur: je n'ai rien trouvé, rien vu, rien ren-
contré,etc, de ce que je cherchais, de ce que vous me disiez, etc.
brandi, part, pass., préparé, disposé, avec ironie : Le v'iai tout
brandi. — De brand, enseigne, en roman ?
braque, adj., brusque, emporté, violent, capricieux, fantasque: An
n'ouserot li paler, i'ast si braque l (On n'oserait lui parler, il est si
colère, si brusque !)
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94 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX
braqué,, part, pas., apprêté, préparer. S'emploie ordinairement
avec la négation : Gn'astjaimmas braqué, gnaijaimmas fini ses
quinze tours (Il n'est jamais prêt, il n'a jamais fini, etc.) Le verbe
n'est guère employé. — Voir rebraquer.
bréb, n., berceau, ordinairement en osier: Note petiot, tast couché
dans son brée. On emploie aussi dans le même sens le mot balle
ou ballotte : Y vai faire dôdô dans sai balle.
bbeuler, v., brûler. En vouloir comme terre breîdée, en vouloir
beaucoup, porter beaucoup de haine : /' m en veut comme terre
breûlée, c'est-à-dire il me déteste. Breûler lai cueuche, brûler la
cuisse ; se dit de quelque chose qu'on a et qu'on ne saurait garder,
qui tente violemment la gourmandise : Quand ï ai des dragées,
eulles li breûlent lai cueuche, c'est-à-dire il ne saurait les garder,
il grille de les manger, etc. Ordinairement, les choses qui breûlent
lai cueuche ainsi sont dans la poche, sur la cuisse.
breulot, n., brûlot, espèce de punch à l'eau-de-vie; mauvais ma-
réchal. Dans ce dernier sens on dit aussi : breûle-fer, brûle-fer.
bricole, n., au prop. et au fig., chose de peu de valeur, menus
objets, riens; ennui, embarras, embrouillamini, etc. S'emploie
dans une foule de cas, toujours en mauvaise part : Pou n$ {
méchante bricole comme çai, t'aies baillé dix sous t (Tu as donné
dix sous pour cette niaiserie, cet objet de nulle valeur ! ) Que de
bricoles qui s font don t c'est-à-dire quels embarras, quel train,
que d'allées et venues, etc. V y en ai t-ï de lai bricole dans ce
procès-lai ! etc. Quand on veut faire entendre à une personne
que ses explications ne satisfont pas, sont inutiles, ou ne sont
pas franches, on dit encore : Çai> c'ast de lai bricole l(Ç est cela,
etc.)
bricoler, v. travailler à des choses futiles, tourner autour de la be-
sogne; s'y prendre mal, perdre son temps en allées et venues
inutiles; faire un petit commerce, un commerce douteux, inter-
lope, etc. : Oh, je ne fais pas grand cheuse, euje bricole, euje tue
le temps. QuasUce que tu bricoles don ? marche don Mené sais
pas ce qui' bricole, mas i' ne gaingne guère î — Absolument, char-
rier pour le public avec un mauvais attelage. À aussi le sens
à'arriokr. — Voir baicuter, tacoter, tanuger, etc.
bricolier et bricoloue, n., celui qui a l'habitude de bricoler, homme
qui perd son temps à des riens; brocanteur, revendeur, etc.
(Prononcez : brico-ier). — Voir bricoler.
1 Contraction de pou eunne, pour une.
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PATOIS DE LA FORÂT DB CLAIRVAUX 95
i
bringue, n. ; se dit d'une femme négligée dans ses vêtements, de
mauvaise tournure, dégingandée, sans grâce, étourdie, d'allure
insouciante. Ce mot est ordinairement précédé de l'adject. grande,
et ne s'applique guère qu'à une femme d'une taille élevée : Eune
te scueille don pas tant; tu vas pède tes cotillons, grand' bringue I
(Ne te secoue donc pas tant; tu vas perdre tes jupons, grande
étourdie !) Eulle l ast-ï belle f Non; çast eunne grande bringue
qui tonne les paittes... (Est-elle belle? Non; c'est qui tourne
: les pieds....). — Bringue, grande fille sans grâce, Thév. — Ce
mot d'ailleurs s'emploie par toute la France.
brinquin, n., cheval; se prend le plus souvent en mauvaise part,
rosse : T ai deux brinquins au an pouterot su eunn hotte ! (Il a
deux rosses qu'on porterait sur une hotte). On dit cependant par
antiphrase : Ein bon petit brinquin (Un bon petit cheval). —
Voir binette.
brique, n., morceau : T prend eunne grosse brique de pain, c'est-à-
dire un gros morceau de pain. Tu fais des briques? (Tu viens de
casser quelque chose?) Objets de toilette, vêtements : Rainge tes
briques, c'est-à-dire range, place tes affaires, les objets qui l'ap-
partiennent. /' n'ai * point de soin de ses briques, ï les lâche traî-
ner tout patout (Il n'a point soin de ses vêtements, de ses affaires,
il les laisse traîner partout). — Brique, reste, miette, Gros.
briquotte, n., diminutif de brique dans le sens de morceau : Eunne
petiote briquotle de pain.
brisac et brijac (ou BRI saque, etc. ?), n. et adj., homme, enfant qui
use beaucoup, qui brise : Oh, que brisac t \ euserot bin eunne
cueulotte par semainne (Quel brise-tout ! il userait une culottes
par semaine). Que enfant brisac I V me casse des saibots tous les
jous. — Brisac, maladroit, qui brise tout, Thév.
brisaqubr, v., faire acte de brisac, user, briser, mettre en menus
morceaux, déchirer en lambeaux : /' ai hrisaqué sai cale (Il a
mis sa casquette en lambeaux). Euje li aivôs aicheté eunne tou-
toute ai lai foire, ï Vai brisaquée en revenant (Je lui avais acheté
une trompette, une flûte à la foire, et il l'a mise en pièces en
revenant).
1 On prononce également ï n'ai et gn'ai; nous ne reviendrons
plus là dessus.
2 Dans ce cas, le mot par garde son r.
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96 PATOIS DE LA FORÊT DE CL AIR VAUX
bhocailles, n., pierrailles où poussent les épines; mauvais champs,
friches pleines de pierres et d'épines.
broche et breuchb, n., fausset, brochette qui bouche le trou d'un
tonneau. Les breuches sont cassées, c'est-à-dire on ne tirera plus
de vin, les tonneaux sont vides, les vignes sont gelées... Broche»
chaude, n., tige de fer pointue qui, rougie au feu, sert à percer
des trous dans du bois.
brocher, v. v couler, jaillir. Ne s'emploie que dans cette expression :
r ai broché le sang, ou le sang ï ai broché T m! ai /".... ein
coup de poing su le nez, que le sang ï ai broché, ou que j'ai
broché le sang (Il m'a flanqué un tel coup de poing sur le nez
que le sang a jailli). On dit donc également : Le chevreu blessé
brochot le sang, ou le sang ï ai broché ai mon coup. — Voir jigler
et drisser. — De brocher, percer?
brochotte et breuchotte, n. diminut., petite broche, brochette.
S'emploie dans un sens obscène.
Tj / ' ^ brondi et vbondi, inf. et part, pass.; se dit du sifflement, du bruit
r " [ 7 que fait une pierre lancée qui fend rapidement l'air, un bâton
. /uv C ! qu'on fait tourner avec vitesse, etc. : r jittieu. bin les piarres,
/, , / ; eulles brondichent. V fait, vrondi son bâton ailentour de lu (Il
^ / '/ f J jette bien les pierres, elles sifflent. Il fait siffler son bâton autour
V' i mi A,f / A. >t de lui). Çai me brondit dans les airoilles, c'est-à-dire mes oreilles
/ cornent, sifflent.
BRONoicHEifBNT et VRONDiCHEMENT, n., bourdonnement : T entends
des brondichements dans les airoilles (J'entends des bourdonne-
ments dans les oreilles).
broque, n., dent; brèche, dent à un outil : F ai de bonnes braques
(Il a de bonnes dents).
broque-èpingne, n., nom d'un arbrisseau, le rhamnus cathar tiens.
broquette, n., petit clou à souliers.
broquigner et broqoinoner, v., grignotter, manger du bout des
dents; manger délicatement ; I'ast lai qui broquingne son pain,
qui ne sait pas s'ï veut aivailer, si veut lever les dents. (Il est là
qui grignotte son pain, etc.)
bboquotte, n., petite dent, terme enfantin : r ai bobô, f fait ses
broquottes (Il a mal, il fait ses dents). Montre-me tes petites ira-
quoltes, mon gaichenot. — Voir broque et naquette.
brou, n., plante parasite, le gui, viscum,
brouillon, n., pâté, tache d'encre. — Voir barbô.
brousse, n., brosse.
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.-V
PATOIS DE LA FORÊT DB CLAIRVACX 97
brousse (faire), expression qui signifie échapper, passer devant le
nez : V croyot héritier de lai majon, mas gai li ai fait brousse,
c'est-à-dire il croyait hériter la maison, mais il a été déçu....
broussbr, t., brosser; tourner, s'altérer, en parlant du lait qu'on
fait chauffer : Euje n'ai point fait de beulie, mon lait i' ai brousse
(Je n'ai point fait de bouillie, mon lait a tourné).
brout (poi). Voir poi brout.
brodtbné (ou BROUTJŒR?), n., églantier sauvage. Au figuré, homme
difficile à vivre, de mauvaise humeur, de mauvais caractère :
Ç'ast comme ein broutné, an ne sait pa que bout Vpenre (C'est
comme un églantier, on ne sait par quel bout le prendre). On dit
dans le même sens : Ç'ast comme ein bâton m Réponds don
meus que çai, peut broutné ! (Réponds donc mieux que cela,
vilain églantier !)
brouton, n., le bourgeon, la jeune pousse des taillis, des haies que
broutent les chèvres : -Ts ont cueilli tous les broutons de mai hae
pou lô bique (Ils ont cueilli tous les bourgeons de ma haie pour
leur bique). — Ne serait-ce pas de ce mot que viendrait le pré-
cédent, les chèvre 3 étant assez friandes des pousses de l'églantier?
brouvée et brodée (dans quelques villages buvée), n., mélange de
grains, de racines, d'herbages, de tourteau, etc., que l'on fait
cuire dans une chaudière pour la nourriture des bestiaux, et
particulièrement des vaches qu'on engraisse ou qui viennent de
vêler : Pousse ai vaut le feu desous lai brouvée. Lai vtùche, eulle
nai pas bin mainge sai brouèe (Attise le feu sous la... chaudière.
La vache, etc.) — De broet, jus, sauce, du xii e au xiv e ? ou de
boire, buoée? — Amble, Gros.
brouvottb et brouottb, n., brouette.
brotbb, n., pilée, la quantité déterminée de graines oléagineuses
qu'on met sous la presse et qu'on broie d'une fois pour faire de
l'huile. On dit également : J'ons récolté eunne méchant' * bro-iée de
naivette, eifonsfait eunne petiote bro-iée d'heule (Nous avons ré-
colté, etc.)
brotottb, n., brayette, fente pratiquée aux jupons des femmes, soit
par devant, soit sur le côté (bro»iotte). — Pouillère f ouverture,
fente dans le vêtement des femmes, Gros.; pouillére, Thév.
bru, n., blé carié, charbonné; désigne la maladie en général, nielle,
carie, et l'épi malade en particulier : T y ai du bru pieun mon
4 Méchante dans le sens de pauvre, maigre, petite.
t. xux 7
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98 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX
champ. Tlai ein épi de bru. Eul bru s'y ast mins. Ç'ast eunn
an-née de bru (Il y a du blé charbonné plein mon champ. Voilà
un épi de blé carié. La carie s'y est mise, etc.) — Les beaux
parleurs disent 6ru»?
bruillbr et breuili.br (ou bruyer, etc.?), v. ; se dit du raugisse-
ment de la vache, et particulièrement du cri plaintif qu'elle
pousse dans certaines circonstances, par exemple quand on lui a
enlevé son veau : t Quast~ce qu eulle l ai don, lai vùche ? Eulle
bruille bin (Qu'est-ce qu'elle a donc, la vache? elle meugle bien).
brunchbr, v., remuer, bouger, répliquer, faire acte de protestation :
Eune brunche pas î dira une mère à son enfant qu'elle menace en
levant la main; tiens, si tu brunchest.., c'est-à-dire si tu bouges,
si tu protestes, si tu dis seulement un mot, si tu souffles!,., sous-
entendu, je tape. — De broncher? — Voir moter, renoncer, etc.
brut, n., bruit. — Bru, L. G.
bryant, n., bruyant, crécelle, l'instrument dont on se sert pour
sonner les offices pendant la semaine sainte. — Bruant, tanne-
velle, Gros. ; bruant, Thév.
bûcher et beucher, v., travailler beaucoup, n'importe à quoi : Ein
bon ouvrer, qui bûche du maitin au sor (Un bon ouvrier, qui tra-
vaille ferme du matin au soir). Frapper, cogner quelqu'un, corri-
ger durement : Tape dessus, bûche~le t Mesurer avec un brin de
paille ou une beûchotte, la distance entre les palets, les sous des
joueurs 4 : Çast moi le pus prées a . — Non t ç'ast moi. — Eh bin,
beuchons t (C'est moi le plus près. Non! c'est moi. Eh bien, mesu-
rons !) — Bûcher, mesurer avec un brin de paille, Gros.
buer, v., lessiver, faire la lessive, hlanchir le linge : Eulle le bue
et eulle le raie mode (Elle le blanchit, lave son linge et le raccom-
mode).
Ai lai Saint-Thomas,
Bue tes draps,
Dans trois jous Noël t'airas.
— Vieux mot.
buie, n., lessive : Faire lai buie (Faire la lessive). — De buer. —
Buais, G. et R.
4 Voir galline, midri.
1 Prononcez prée.
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PATOIS DB LA FORÊT DE CLAIRVAUI 99
bujon, n., buson, base; bête, idiot, stapide : Que bujon que tu faisl
c'est-à-dire que tu es sot, bête !
BtJBETON et beureton, n., vase à huile, petite buire, diminutif de
burotte : Veudleu. ton beur'ton et n'toe-le, c'est-à-dire vide, verse
ta burette et nettoie-la.
burotte et beurottb, n., vase à huile, buire : Prends lai burotte et
remplis le burton.
butter, v., viser, prendre pour but, pour cible : F... .4% eunne
piarre et Wrieu-fe bin (Jette-lui une pierre et vise-le bien). Bû-
tieu c't'ougelot-lai et ne le manque pas t (Vise cet oiseau-là, etc.)
bdvailler et BEuvAiLLEB, v., boire souvent et sans soif, buvotter,
s'amuser à boire, godailler. — Voir clienrler.
buvoub, n., buveur, ivrogne : Çast ein buvoue et ein fumoue (C'est
un buveur et un fumeur).
caboche, n.; outre la signification qu'il a en français, ce mot dé-
signe particulièrement un clou à ferrer, vieux ou neuf, entier ou
dont il ne reste plus que la tête : Raimasse çte (eu-steu) caboche»
lai pou clouter (quiouter) tes saibots (Ramasse ce clou, cette tète de
clou, pour mettre sous tes sabots).
cabri, n., biquet, le petit de la chèvre. Cabris d'avril, les grésil-
lades, les giboulées subites qui tombent en avril.
caca, n., noix : Euje vas aibaitte des cacâs (Je vais abattre, gauler
des noix). J'ai les mains teutes nores d'aivoir èchallé des cacâs,
c'est-à-dire toutes noires d'avoir enlevé le brou des noix. —
Cacas, noix, terme d'enfant, Gros.; cacas, L. G.; cacas, P. T.;
cacas, G. et R.
cacatier, n., noyer.
cadabrb, n., cadavre; s'emploie pour corps : Que grand cadâbret
(Quel grand corps, quel homme grand I) Ein drôle de caddbre,
c'est-à-dire un drôle d'homme, un drôle de corps.
CABÉiiiBS (faire des), expression qui signifie faire du train, des em-
barras, du genre, des grimaces, des minauderies, etc., au propre
et au fig. ; faire des difficultés avec ostentation pour accepter ou
pour donner quelque chose : Pas tant de cadémies I Tu n'en veux
point? Je le gade (Pas tant de train, d'explications, d'embarras !
Tu n'en veux point? Je le garde). Une femme se grime, s'attife,
singe le beau langage, etc. : Elle fait des cadémies.
cadrille (ou quadrille?), il., étoffe de coton quadrillée.
caffres, n. plur., débris de pierres de maçonnerie, restes de mur
en ruines : F ai fini sai majon, ai c't'heure ï vai oter les caffres
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/
100 PATOIS DE LA FORÊT DB CLAIRVAUI
(Il a fini sa maison, maintenant il va enlever les débris de ma-
çonnerie). Teut le tas de piarres, ïast gelé; ce riast pus que des
caffres. — Voir pt'uns. — Caffre, tuf, Gros.
/£ ? £& h gagé et cagiau (ou cagio?), n., caillette, membrane de l'estomac
'•' c du veau, le ventricule des animaux ruminants qui contient la
présure : Pou faire de lai bonne peursure, an prend le câgé et les
aimmottes.... Qu'entend-on par ce dernier mot? Je n'ai jamais pu
le savoir.... les aimoureltes, peuWtre? — Voir aimourettes. —
De caseum?
cagnou, n. chien de peu de valeur, propre à rien, laid, sale; chien,
avec mépris : Veux-tu t'en ailler ; cagnou t Ein bieau cagnou,
pour payer six francs t Faire eut cagnou, faire le timide, le pi-
teux, baisser la tète par crainte, etc. On dira à un enfant qui
rentre humblement, après avoir désobéi : Taies bieau faire eul
cagnou, t'aimes tai frottée, c'est-à-dire tu as beau faire l'humble,
le gentil, tu seras puni. — Voir se cagnouser. On dit quelque-
fois dans le môme sens : Faire le miquelot, le mignadon, etc. —
— Voir ces mots.
cagnouser (se), v., faire le cagnou, le câlin; se faire humble, flat-
teur, affectueux, dans un but intéressé. — Voir cagnou.
caibais, n., cabas, corbeille.
caibille (ou quaibille?), n., (les beaux parleurs disent escabille?),
ramille, petite brindille détachée d'une branche, les débris qui
traînent, qui restent dans un endroit où Ton a déposé, remué des
fagots : Prends eunne caibille pou aillun-mer lai lampe (Prends une
brindille, un ramillon, etc.) Raimasse les caibilles pa lai cour,pa
Vjadin. On dit aussi raibille.
caibillotte, n„ diminutif de caibille, petite caibille. On dit aussi
raibillottt.
caichotte, n., cachette, provision cachée : J'ai eunne bonne que"
chotte de noujôtles (J'ai une bonne provision de noisettes cachées).
— Voir moinjotte.
caichottoue, n., cachottier.
caimmerolle, n., espèce de champignon; par ironie, chapeau à
larges bords : Ole don tai caimmerolle, qu'an te voye (wi-ieu)
l'nez (Ote donc ton chapeau, etc.)
caingne, n., repas qu'on fait en réjouissance d'un travail important
terminé : J'ons fait hier note caingne de moiclwn, de venainge, etc.
S'emploie aussi pour faire entendre que le travail s'achève, est
achevé : Eue' te voitiure-lai de foin, ç'ast lai caingne, c'est-à-dire
LC t
PATOIS DB LA FORÊT DE CLAIRVAUX 101
c'est la dernière, les foins sont terminés. Te vêlai au bout de ton
champ ? — Oui, et peûs ç'ast lai caingne (Te voilà au bout de ton
champ? — Oui, et puis c'est le reste, c'est le dernier, j'ai fini).
— Dans quelques pays on dit chien. — De cagna, chienne?
caincnets, ou CAiNGNAis, ou QuiNGNBTS, etc. ? (aivoir les), ressentir
une fatigue très douloureuse aux bras, aux jambes, aux reins,
par suite d'un travail soutenu dans une position forcée, difficile;
espèce de courbature : Eul prommerjou qu'an fauche, an ai 6....
les caingnets Vsor (Le premier jour qu'on fauche, on est b....
courbaturé le soir). — Les queignats, lassitude, courbature,
Gros. ; quignats ou quingnats, Thév.
CAiPÊet caipelan, n., mauvais chapeau; chapeau, avec mépris.
caissottb, n., vieille casserole, vieux poêlon, vieil ustensile de cui-
sine. Ne s'emploie qu'avec une nuance de mépris, et est le plus
souvent précédé du mot veille (vieille) : An aitlaiche eunne veille
caissotte ai lai quoue iïein chien (On attache une vieille casserole
à la queue d'un chien). Eul chaudronnia raic'môde les caissottes.
— Voir caissottier.
caissotter, v., remuer des casseroles, des ustensiles de cuisine; se
mêler des travaux qui regardent plus particulièrement la femme
dans le ménage, cuisiner, rincer les verres, tâter les poules, parler
linge, etc. S'emploie avec plus de mépris que baissotter et bais-
sicolter. On dit aussi à quelqu'un qui perd son temps à un tra-
vail de peu de valeur, ou qui le fait trop minutieusement :
Quast-ce que tu caissottes don? — Voir beurluter, tacoter, tanu-
ger, fonnoiller, etc.
caissottier et caissotte, n., celui qui caissotte, qui s'occupe des
travaux qui sont du ressort de la femme dans le ménage, etc.
On dit aussi baissottier et tâte-poules.
caitaiplaisse, n., cataplasme : An Yai mins ein caitaipiaisse de
miotte de pain (On lui a posé un cataplasme de mie de pain).
cale, n., outre les significations françaises, toute coiffure d'homme
ou de femme, casquette, bonnet, etc., excepté le chapeau; dé-
signe spécialement le bonnet d'indienne que portent les femmes
de la campagne. Briller, ou /"... su lai cale, frapper sur la tête,
frapper en général, donner une taloche. On dit à une jeune fille
d'un caractère difficile : Si tu te mairies, tu raimasser&ies souvent
tai cale, c'est-à-dire ton mari la fera souvent tomher d'un souf-
flet, d'une taloche. — Cale, L. G. — Cale, calotte, au xiv 6 siècle.
calé, part, passé, coiffé; riche, aisé : Tast calé (Il est riche). —
Voir maucalé et recalé.
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102 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX j^
calendot, il., homme de peu de valeur, risque-tout.
caler (se), v., mettre sa cal», se coiffer. Une femme dira : Je n'ai
pas zeue le temps de me caler auj'd'heu, c'est-à-dire de me pei-
gner, de me coiffer.
CALtRORGNOT, n, myope, bigle, louche, etc.; en général, qui a de
mauvais yeux, qui regarde de travers, de tout près. — De
calorgne^ ou de quasi borgne ? — Caliborgne, louche ou borgne,
Thév.
calorgne, n., louche, bigle, etc. ; même signification que calibor-
gnot. Vieux mot français.
calot, n. diminutif, petite cale; en particulier, le petit bonnet de
lustrine noire que les vieilles femmes du peuple mettent ou met-
taient sous leur bonnet.
cambuse, n., masure, cassine, vilaine maison. S'emploie avec mé-
pris pour une maison quelconque : J'riy f.Araipus les paittes
dans tai cambuse! c'est-à-dire, je n'y entrerai plus, chez toi ! —
Cambuse, pauvre chaumière, Thév.
campagne (été en), être en voyage : Fast en campagne, i'ast pati en
campagne (Il est parti en voyage). On dit aussi ailler en campagne,
pour aller en voyage.
campe, n., pose, attitude, manière de se tenir au chantier : T ai
eunne belle campe, c'est-à-dire il se lient bien, il a bonne façon
en travaillant. S'emploie le plus souvent ironiquement : Vlai
eunne belle campe ! (Voilà une belle pose, la pose d'un fameux
ouvrier !)
camper (s*), se mettre en chantier pour travailler, commencer à
travailler : Vlai que j'me campe, ou je viens de me camper,
c'est à dire je viens de me mettre au travail à l'instant. Euse
camper ai jouer, ai boire, se mettre à jouer, à boire. Vous ne
vous camperas don pas auj'd'heu ? (Vous n'essairez donc pas de
vous mettre à la besogne aujourd'hui?) F s ne se sont pas campés
de lai jonnée (Ils n'ont pas touché à leurs outils de la journée). —
Campey (s'), L. C; s' camper, se mettre à l'ouvrage, G. et R.
cane, n., couenne : Euje mainge eul lard, mas je naimmepas lai
«r r ;" j / ^ t */< ]oane (Je mange le lard, mais je n'aime pas la couenne). Cane,
- 'adj., louche, bigle : Fast cane (11 est louche). On dit aussi canoyot.
1 ^ ' caner, v., loucher : F cane (Il louche). On dit mieux canoyer.
\ ? • k iLt Caner i v., hésiter, reculer par crainte, céder, caler : Tu v'iôs te
f t - baitte d'aiveu lu, et peûs tu canes ? (Tu voulais te battre avec lui,
9 f\ * ^ ? et puis ta recules, tu cèdes, tu cales?) On dit aussi ctisser. — De
coter?
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gk PATOIS DE LA FOUET DE CLAIRVAUX 103
gani, o., petit canard.
caniches (cheveux), adj., crêpas, frisée: Son petiot, % ai les cheveux
tout caniches, c'est-à-dire tout frisés, tout crêpas. On dit avec
mépris : Dupoi caniche, pour des cheveux crépus, frisés. « Voyez
son gros nez, son petit poi caniche, elc. » (vieille chanson). — De
caniche, barbet : comme le poil d'un chien canichel
canoter (ou cannotbr?), v., loucher, avoir les yeux de travers :
r canoye (prononcez cano-i\\e) de totes parts, c'est-à-dire il n f[ z . ^c"^>< Uv ' M, J
louche affreusement : Se dit de ceux qui olera spectant, lardum * '" *
tollunt. — De l'ital. cannocchiale, longue-vue? (^ ^ ^ ^/ - Cx
canotot (ou cannotot?), adj., celui qui louche : I'ast canoyot f ai-
veuguiot, bignou, etc. (Il est louche, myope, chassieux, etc.)
canuche, n., souche, tronc plus ou moins difforme : Vlai eunne
canuche quan ne serot piaicer dans le feu, c'est-à-dire voilà un
tronc, une racine qu'on ne saurait, qu'on ne peut pas arranger,
faire tenir sur les chenets...
carabin, n., espèce d'injure que les gamins crient de loin au tau-
reau : Carabin, lu, lu, tiâ f
carbon, n., clou, abcès, furoncle : /' tn'ast venun ein carbon desous
le brats (Il m'est venu un clou sous le bras). — De carboncle?
carêmes (les), n., trémois, orges, avoines; semailles de mars.
çarger, v., charger.
carne et carnaige, n., mauvaise viande, chair gâtée; cadavres
d'animaux en décomposition, charogne; mauvais cheval, rosse :
Ein chevau, cai ? Ein bieau carnaige I c'est-à-dire un cheval, cela?
Une belle rosse !
carquelin, n., écbaudé. — De craquelin?
carre , n., coin, angle, corne : Ai lai carre d'ein bois (À la corne,
à l'angle d'un bois). Ailler de carre, aller de travers. De carre
en coin, de biais, diagonalement : V vai de carre en coin, c'est-
à-dire il ne suit pas son chemin droit, il va en zigzag. — Carre,
angle saillant; de carre en coin, diagonalement, Thév.
carré, part, pass., vêtu, vêtu avec recherche, avec soin, avec luxe,
attifé : Mas, f aies trop bin carré, trop bieau, mon gaichenot; qui
ast-çu 1 qui te meunnerai ai lai messe ? (Mais tu es trop bien vêtu,
trop beau, mon enfant; qui est-ce qui te mènera à la messe?)
Oh, eulle l ast bin carrée! c'est-à-dire elle est bien vêtue, avec
goût, des pieds à la tête, il n'y a rien à redire. Ç'ast lai sacris-
1 Ç u pour ce. On prononce aussi : tiaçu.
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104 PATOIS DE LA FOUET DE CLAIRVAUX
tingne qui ai carré V autel (C'est la sacristine qui a orné, habillé
l'autel, mis la nappe).
cabrer (se), t., s'habiller avec coquetterie, avec recherche : Ts sont
trop bin carrés, ïs se carrent trop bin, ces proûves-lai pou quej'lô*
fange lai charité (Ils s'habillent trop bien, ces pauvres-là, etc.)
Comme ïs se carrent! c'est-à-dire comme ils s'habillent avec
luxe !
carron, n., coin du feu, de la cheminée : Rainge-te dans le carron.
Lâche eul carron ai ton père (Range-toi dans le coin du feu.
Laisse le coin du feu à ton père). Carron, petite pièce, petit
morceau de terre, petite enclave : J'ai aicheté ein petiot carron
pou me mette des pommes de terre, c'est-à-dire un petit coin de
terre, une petite pièce. — Couron, coin, encoignure, xiv* siècle.
cartelaige, n., morceau de bois de sciage carré, de la grosseur
d'un chevron environ; soliveau : Tai fait débiter mes âbres : an
m'ai fait des cartelaiges et des piainches (J'ai fait débiter mes
arbres : on m'a fait des soliveaux et des planches). On dit aussi
faire du catelaige, pour scier, débiter en morceaux carrés. —
De écarteler, scier en quatre ?
cartron, n., carton.
cas (été dans le cas de...), expression qui signifie être capable de...,
être susceptible de..., être en étal de..., etc. : I'ast dans le cas
de tiuer son chevau, dans sai colère (Il est capable de tuer, etc.
F vai pieuve : i'ast dans le cas d'été mouillé, c'est-à-dire il va
pleuvoir : il pourrait bien arriver qu'il fût mouillé.
casque, n., crâne : ï sast fendu le casque en cheujant du tôt (Il
s'est fendu le crâne en tombant dû toit).
1/ £^ <t/ casse, ad., dur, durci, tenace. S'emploie dans celte expression :
• - *^ Terre casse, c'est-à-dire une terre que la pluie et la sécheresse
ont rendue à la fois grasse, tenace et dure.
casse-dos, n. Voir bâche-dos.
castafour, n., pauvre maison, étroite, obscure; cassine, masure :
r demoure dans* nne * méchant* castafour qui vai cheur (Il de-
meure dans une pauvre masure qui menace de s'ébouler). — De
chambre à four, case à four ? — Voir cambuse et turne.
castonnade, n., cassonade.
1 Prononcez à peu près giô.
' Pour dans eunne. Prononcez dan n' méchant.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX 105
catholique (mouche), n., cantbaride, mouche cantbaride.
catichisse, n., catéchisme.
catonner, y., murmurer, radoter, bougonner, grommeler : Je seûs
d'aiveu des vies pas âgés, qui calonnent toujous (Je demeure avec
des vieux pas aisés, qui bougonnent toujours). — Voir beurdon-
ner, raigonner, raimonner, etc. — Catonner donne plutôt l'idée
de reproches que de plaintes.
cause (d'ai), expression interrogative, à cause, pourquoi : D'ai
cause que tu nées pas venun ? (Pourquoi n'es-tu pas venu?)
causoub, n., causeur, babillard. Causoue ai jonnce, babillard, qui
cause du matin au soir, comme si on le payait à la journée pour
cela.
caval, ou cavale? (ai), exprès, adv., à cheval, à califourchon,
jambe deçà, jamb3 delà : T monte ai caval su son chien, su Vlimon
de lai voitiure, c'est-à-dire il monte à cheval, à califourchon, etc.
cavalier, n., s'emploie pour gendarme. On dit aux enfants : Sauve!
v'iai les cavaliers (cava-iés) qui vont te penret J' te ferai penre
pa les cavaliers.
cbcue, n., cigûe : Eune cope pas, n' mêle pas les scues d'aiveu l'harbe
(Ne coupe pas, ne môle pas les cigiies avec l'herbe).
cendré, n., les cendres après qu'elles ont servi à la lessive, la
charrée : Ole eul cendré de dessus le tenol (Ole la charrée de des-
sus le cuveau, de dessus la lessive).
cbrège, n., cerise.
ceréger, n., cerisier.
cèrimonnie, n., cérémonie..
cesse (ni fin, ni), exp. adv., sans discontinuer, toujours, en sous-
entendant il crie, il demande, il se plaint, etc. : Griai ni fin ni
cesse qu'an »' l' ot 4 bùllé ce qui' demande, c'est-à-dire il criera,
il se plaindra toujours, tant qu'on ne lui aura pas donné ce qu'il
demande; on n'aura pas de repos tant que, etc.
ceummetère et CEUMETÉRE, n. fém. 9 cimetière : Euje v'rôs été dans
lai ceum'tére aussi aivant que /' quiocher %'ast haut (Je voudrais
être dans le cimetière aussi avant que le clocher est haut).
cbumté et ceumtiot, adj. et n., lourd, endormi, engourdi, pares-
seux: Gros ceumté, r'mue te don! (Gros lourdaud, remue-toi
donc!) F dort comme ein ceumté.
♦ Prononce! : qu'an nio.
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106 PATOIS DE LA FORÊT DE CUIR VAUX
chachouillbr, y., chuchotter, parler bas à l'oreille; parler entre
ses dents.
chadon et chadion, n., chardon, particulièrement \ecirsium arvense.
Chadon l'âne, le cirsium lanceolatum et le cirsium $riophorum\
chadion roulant, Yeryngium campestre.
chadronnet, n., chardonneret, oiseau.
chaprongnbb, v., faire le mécontent, le dégoûté; accepter, recevoir
de mauvaise grâce quelque chose, particulièrement en nourri-
ture : Quast-ce que tu chafrongnes don? Prends ou tu n'atraie*
rin, dit une mère à son enfant qui parait mécontent de ce qu'elle
lui donne. On prononce aussi chaifrongner.
b-i t^ CHAPRONONOux, adj. et n., difficile à nourrir, délicat, qui se dégoûte
l /t '/ facilement, à qui un rien inspire de la répugnance... : Mainge,
chaifrongnoux, tu ne sais pas qui çast qui te maingerai î c'est-à-
dire mange..., tu ne sais pas qui te mangera I — Voir nâchoux.
chagna, n. adj., malingre, chétif, délicat; désigne plutôt une cer-
taine faiblesse d'estomac qui fait qu'on mange peu, qu'on est
difficile à nourrir : Je ne sais que li briller ai mainger ai cte
chagnâ-lai; % ne veut rin (Je ne sais que lui donner, etc.) —
Voir jaidrou, aiquais, aitrâ, etc. Du reste, tous ces mots s'em-
ploient les uns pour les autres; il nous semble impossible d'éta-
blir des nuances certaines entre eux.
chaicun, pron., fait au fém. chaicun-ne et chûcungne.
chaipé et chaipieau, n., chapeau. — Voir caipelan.
chaipon, n., chapon; brin de sarment sur un peu de souche ou de
vieux bois, qu'on plante en guise de chevelée, de plant à racines.
chaire, n., chaise. On prononce chère.
chairotte, n, diminutif, chaise basse, petite chaise d'enfant (ché-
rotte).
ghaissoue, n., chasseur; outil de tonnelier : chassoir. — Chas-
sons, outil de tonnelier, Gros.; chassou, outil de tonnelier,
G. et R.
chait, n., chat. Chatt d'âtre, chat qui, au lieu de faire la chasse
aux souris, garde le coin du feu, chat maladif; enfant délicat,
faible, qui ne peut quitter le feu. — Chat d'âtre, enfant maigre,
mal nourri, Gros. — Voir couve-cendre. — Dans quelques pays
on dit âtroux.
chaitterie, n., chatterie, friandise; caresse.
chaitotte, n. diminut., petite chatte; petit mot d'amitié qu'on em-
ploie avec les enfants : Mainge bin tai soupe, mai chaitotte
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FATOIS DE LA FORÊT DB CLAIRVAUX 107
(Mange bien ta soupe, mon petit chat). — \o\r poulotte et rai-
totte.
chaitrb (été en), être en chartre, dépérir, avoir le carreau; se dit
d'un enfant malndif, qui ne grandit, n'amende point : l'ast en
chaître, son petiot; ïast comme VAncension^ ï n'aivance ni ne
recueule (Il est en chartre, son petit; il est comme l'Ascension, il
n'avance ni ne recule).
chalande et ch alan te, n., charançon, insecte qui ronge le blé,
calandre.
challéb, n., sentier de fauve dans les bois, la coulée y la trace que
laisse le gibier en passant dans l'herbe et dans les buissons : I' y
ai du gibier par ici, ïai des châtiées pieun (Il y a du gibier par
ici, il y a beaucoup de traces).
chambiére, n., espèce de guéridon grossier qui supporte la lampe
le soir, dans la veillée; ustensile de cuisine qui s'accroche à la
crémaillère pour supporter la poêle; boucle de ruban, de tresse,
pour tenir la quenouille à l'épaule. — De chambrière ?
chambrottb, n. diminut., chambrette, petite chambre.
chan de lard, n., lardon; petit morceau de lard pour faire une
omelette, pour larder une daube, etc.; petit morceau de lard
grillé, barde : Je naimme pas les chaos de lard dans les pois. —
De chaon, viande grillée, xiv e siècle?
chand'urr, n., chandelier. Prononcez chandié.
crâne, n., chêne. (Châne).
chanelle, n., nom d'une espèce de champignons qui pousse le plus
souvent au pied d'un chêne. Dans quelques villages, tripes de
chêne et fraise de veau. (Chanelle).
CRANLAiTTE, n., chéneau, particulièrement le conduit de tôle en
forme d'auge, qui reçoit les eaux de la gouttière : Eul vent, ï ai
emporté lai chanlaitte. Çai piche comme eunne chanlaitte (Le vent
a emporté le chéneau. Ça coule comme, etc.) — De chanlatte,
par une confusion de mots.
CHANLuicè (ou chanlumet, ou CHANLUMAi?), n., chalumeau, fétu de
paille, tige de graminée, de plante fîstuleuse, etc., dont on se sert
pour boire en aspirant à une fontaine, dans un tonneau, etc :
Y ai veudié ein meud pa le boudon, d'aiveu ein chanlumet, c'te
soûlant-lai t (Il a vidé un muid par la bonde, avec un chalu-
meau, etc.)
chanot, n., diminut., petit chêne. (Chânot).
cHANTiRAU, n., chanteau, petite pièce de bois chantournée qui ter-
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108 PATOIS DE LA FOBÊT DE CLAIBYAUX
mine le fond du tonneau dans le sens de la largeur des autres
pièces, c'est-à-dire qui forme un segment de fond dans le sens
du Gl du bois. Partie d'un pain bénit qu'on donne comme aver-
tissement à la personne qui doit offrir le pain bénit le dimanche
suivant. De là le dicton : Aivoir eul chantieau, bailler le chantieau,
qui s'emploie dans une foule de cas pour indiquer la succession.
Par exemple, on vient d'enterrer une personne, et une autre
tombe malade sérieusement... on dit alors que la première a
bûllé le chantieau à la seconde, c'est-à-dire appelé la seconde à
la suivre, et si celle-ci meurt, on dira qu'elle a eu le chantieau.
chantre, n., jante, partie d'une roue de voiture. — Au xiv* siècle,
chante.
chauve, n., chanvre.
chanvoux, adj., chanvreux, filandreux, ligneux.
chapelet de buie, n., iris. On nomme ainsi cette plante, sans doute
parce qu'on se sert de sa racine séchéc, découpée et disposée en
chapelet, pour parfumer la lessive.
chaquigner et chaquingner, v., taquiner, harceler, contrarier :
Momman t mon frère me chaquigne; ï me tire les cheveux, i' me
dit des noms... — On dit aussi argvAgner et arguingner.
char, n., chair, viande. — Char, xiv e siècle.
CHARB0UILLBR, ENCHARBOUILLER, CHABOUILLER et ENCHABOUILLER, V.,
emmêler, brouiller, enchevêtrer : Lai nuée, eulle ai charbouillé
les biés; i*s ne seront pas âgés ai faucher. Y faut que je cope mon
èchevotte — ou èjevotte, — eulle l ast toute charbouillée. Eune t'en*
charbouillé pas les cheveux en te graittant (La nuée a couché, em-
mêlé les blés; ils ne seront pas aisés à faucher. Il faut que je
coupe mon écheveau: il est tout embrouillé. Ne t'emmêle pas les
cheveux en te grattant). — On dit aussi que le temps se char-
bouille, pour dire que le ciel devient nuageux. On dit encore dans
ce dernier sens : le temps se chamaille. — Echarbouiller, Gros.
charcher et çarcher, v., chercher.
charchoue et çarchoue de pain, n., mendiant.
charcueulot, n., culot, le dernier né des enfants ou des animaux;
enfant chétif, délicat, qui ne vient pas vite, qui reste station-
naire : Que méchant charcueulot, % naimende point t Se dit dans
le même sens des petits animaux et même des plantes qui
viennent mal. Terme de dédain, comme aiquais, aitrâ, etc. : Toi,
pouter c'te hottée-lai, méchant charcueulot! (Toi, porter cette
hottée-là, etc.) — Charculot, Gros; charculot, Thôv.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVACX 109
charcutier, v., découper, tailler, taillader du bois par distraction,
avec un canif, un couteau, etc. ; travailler le bois avec un outil
qui coupe mal : Tu vas briger ton canif, en charcutiant comme
çai d'aiveu. I'ast lai aicheté dans le carron qui prend des rains
de fagot et peûs qui les charcut\eu. V charcut'ieu son crayon, ï nie
teille pas (Tu vas briser ton canif en coupotant ainsi avec. Il est là
assis au coin du feu, etc.) Faire une opération chirurgicale : Eul
médecin l'ai charcutié. — Voir charonger.
chargeoue et çargeoue, n., chargeoir, l'instrument sur lequel le
vigneron pose sa hotte pour avoir plus facile de la reprendre
quand elle est remplie, plus facile de se charger.
'^ chari, n., le corps humain, avec mépris ou pitié : Je ne bailleras
pas ein sou de son chari. Euje n f ai rin prins, rin mins dans mon
chari , ou dans mon praûve chari, de lai jonnée (Je ne donnerais
pas un sou de sa carcasse. Je n'ai rien pris, rien mis dans mon
corps, etc.)
charonger, v., couper avec les dents, avec un mauvais outil, mal
trancher, ronger comme feraient les dents : Eune te charongepas
les ongmens. Tu ne le copes pas, le bois, tu le charonges ! Qui don
qui ai copé ce jambon4ai ? i'ast tout charongé (Ne te ronge pas les
ongles. Tu ne le coupes pas, le bois, tu le brises, tu le déchires,
tu le martyrises, etc.) — Voir charcutier. — Jaqueingner, cou-
per maladroitement, Thév.
/charpier, v., meure en charpie, dilacérer, dilanier; brésiller, mettro
en menus morceaux : I' ai tiré dans sai cale : eulle l ast charpiée
(Il a tiré dans sa casquette : cllo est en charpie). E.tce coprol-lai
charpie ou charongé lai char (Ce couperet-là hache, brise la chair,
la viande). — Du vieux mot charpis.
charpingne, n., espèce de grand panier de viorne ou d'osier, de
forme ovale ou hémisphérique, servant à transporter les copeaux,
les fruits, les menues pailles, etc.; mannequin, banne.
charpingnée, n., le contenu d'une charpingne : J'ai raimassé eunne
charpingnée de noujotles (J'ai ramassé, cueilli un grand panier,
une banne de noisettes).
charrier, v., posséder, tenir sous sa puissance, tourmenter; être
sous le coup de... : An dirot que ç'ast le diâbe qui le charrie ces
jous-ci, comme i'ast malin ! Je ne me poute pas bin, j'ai quéque*
cheuse qui me charrie (On dirait que c'est le diable qui le tour*
mente, qui le pousse, tant il est méchant ces jours-ci ! Je ne me
porte pas bien, j'ai quelque chose qui me tracasse, qui me me*
nace). — Emprunté au langage de la fauconnerie?
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110 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVALT
chasiére, n., châssis à fromages, espèce de panier à plusieurs com-
partiments. — Chazière, Gros.
chaté et chatieau, n., château. Châiè s'emploie avec une nuance
de mépris. — Chat ai, L. C. ; chatel, P, T. ; chatai, G. et R.
chatre-bique, n., mauvais couteau, qui ne coupe pas; couteau, avec
mépris : Fromme ton châtre-bique (Ferme ton couteau).
chatrure, n., reprise mal faite, rentraiture, cousue comme on re-
coud la plaie d'un cochon châtré.
ghaucoter (ou chaucolier?), n., le troène, qu'on appelle aussi
bois puant.
chaudére, n., chaudière.
chaubot (ou chaudeau?), n., endroit chaud, particulièrement dans
un lit : Mon frère, ï se couche euV prommer, ï me fait ein chau-
dot, c'est-à-dire il m'échauffe ma place.
CHAUDnÉE, n., le contenu d'une chaudière, plein une chaudière :
Eunne chaudrée de lochu, c'est-à-dire une pleine chaudière d'eau
de lessive.
chaudronnia, n., chaudronnier, avec mépris, rétameur: V pale
comme les chaudrongnas (Il parle comme les chaudronniers, c'est-
à-dire avec l'accent auvergnat). Chaudrongna matou, qui met lai
pièce au long du trou (Chaudronnier matou, qui met la pièce à
côté du trou), espèce de refrain dont les enfants poursuivaient les
chaudronniers ambulants.
chaudrotte, n. diminutif, petite chaudière de fonte. Ne pas con-
fondre avec chaudron, qui désigne exclusivement la petite chau-
dière de cuivre.
chausses, n. pi., bas, avec une nuance de mépris : Ote tes chausses
et vai te coucher (Ote tes bas et va te coucher). Raie mode tes
chausses ! çai vaurait meux que de te biclwnner (Raccomode tes
bas ! ça vaudra mieux que de t'atlifer, de passer tant de temps à
ta toilette).
chelingne et CHENiNGNE, n., chenille : V m'en veut comme si je li
aivôs mins des chelingnes dans sai soupe (Il m'en veut comme si
je lui avais mis des chenilles dans sa soupe). .
cheminge, n., chemise : Vast sale comme eunne cheminge de quinze
jous, c'est-à-dire comme une chemise qu'on a gardée quinze
jours. Tast dans sai cheminge, qui passe aux deux bouts, réponse
qu'on fait souvent aux enfants curieux : c Où est donc un tel?
— Il est dans sa chemise, etc. •
cheneveuille, n., chenevotte, tige de chanvre dépouillée de son
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PATOIS DE LA FOBÊT DE CLA1RVAUX ili
écorce : I'ast solide comme ein pont de cheneveuilles et le feu desous,
c'est-à-dire il n'est pas plus solide qu'un pont de chenevottes, etc.
On dit aussi comme ein pont de paille.
chenevous, n., chenevis, graine de chanvre. Autrefois cheneveux.
cheni et chenin, n., petite ordure, grain de poussière; amas de
choses de peu de valeur; reste d'une marchandise dont on a en-
levé le choix, etc. : J'ai ein cheni dans Vœu (J'ai une ordure
dans l'œil), l'ai cheu des chenis dans mai soupe (Il est tombé de
la poussière, des ordures dans ma soupe). V ai prins teus les
bieaux cacâs; ï n'ai lâché que V cheni (11 a pris toutes les belles
noix; il n'a laissé que le rebut). En parlant de gens de peu de
valeur, on dit : Ç'ast du cheni. On dit également, dans ce cas :
Ç'ast de lai ripopette, de lai raivauderie, de lai petite bière, de lai
fripouille, etc.
chenissb, n., cendre chaude, légère, neigeuse, qui voltige sur les
tisons incandescents : rai voulé, ou ïai cheu, ein poicho de che»
nisse su mai grillade (Il a volé, ou il est tombé un peu de cendre,
etc.) — Cenise, cendre chaude, Gros. — Ce mot paraît avoir
une origine commune avec le précédent.
chérugien, n., chirurgien.
cheur, v., choir, tomber : Lai pieue cheurt (La pluie tombe). Eul
petiot, ï ai cheu (Le petit est tombé).
cheurler, v., boire beaucoup; boire souvent, buvotter, godailler:
Y cheurle du maitin au sor (Il godaille du matin au soir). S'em-
ploie comme gobelolter et godailler; cependant cheurler indique
une plus forte passion pour la boisson. — Chuler, boire d'un
seul trait, Gros. ; cheurler, G. et R.
cheurlot, n., enfant qui aime à boire, qui montre une passion pour
le vin : Ah, petit cheurlot, tu vas été gris!
cheurlooe, n., buveur, godailleur, qui aime à cheurler.
cheurtien, n. et adj., chrétien. (Prononcez cueurtien.)
cheurtienneté, n., chrétienté. (Prononcez cueurtienneté.)
cheuse, n., chose; quiquecheuse, quelque chose : Je vas te dire
eunni cheuse, quiquecheuse (Je vais te dire une chose, quelque
chose). Tote cheuse quairrive..., c'est-à-dire quoiqu'il advienne,
qu'il en soit..,) — Choose, L. C.
chevet de vingne, n., rebord de terre au bout le plus élevé de la
vigne, quand la vigne est en pente, ou l'extrémité par laquelle
on achève le labour, quand le terrain est plan. Ce rebord sert à
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112 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX
garantir la propriété et à fournir de la terre pour remplir Yen-
taille finale. — Voir entaille.
chbvbbu, n., chevreuil.
chez, prép., s'emploie souvent avec de pour marquer la possession
au génitif : Eut champ de chez..., lai vingne de chez... On veut
indiquer ainsi que la vigne, que le champ, etc, appartiennent
à toute la famille, à toute la maison.
chiaisse, n., excrément d'insecte, chiure : Eunne chiaisse de mouche,
de puche, une chiure de mouche, de puce, elc. Eunne belle
chiaisse, un beau rien, particulièrement en victuailles : Euje
t'aivôs demandé du pain, du fricot, du fron-maige, etc., tu m'en
aie* brillé eunne belle chiaisse (Je t'avais demandé..., tu m'en as
donné une belle miette, une belle lèche, un beau rien). Ç'ast de
lai chiaisse, c'est une mauvaise plaisanterie, c'est de la niaiserie,
ce n'est rien. — Chiasse, rebut, Gros.
chîcbotte (ou chie cuoTTE?), n., homme chiche, ladre, avare, qui
pousse la lésinerie jusqu'à se priver du nécessaire. On dit dans
le même sens : cul savré (cul serré).
CHIENQUEUE, CHIENQOUE, CHINQUBUE, CHINQUOUE, CtC, n., le mélam-
pyre des champs et des prés, melampyrum arvense et pratense.
chincre, adj., maigre, étique, en parlant du grain : Çai greunne
aissez, mas le grain i' ast chincre : tout le champ tétot versé (Cela
graine assez, mais le grain est étique : toute la récolte était cou-
chée). — Chincre, Thév.
CHioTTE, n., privé, latrines.
chipette ign'en ai pas), expression qui signifie il n'y en a pas trace,
reste, miette : A\es-tu enco trouvé des cerèges su l'cerégcrf —
Gnen ai pas chipette : les moingneaux i's ont tout maingé (As-tu
encore trouvé des cerises sur le cerisier? — 11 n'y en a pas trace
d'une : les moineaux ont tout mangé). — Voir fistule et talipe, qui
s'emploient de môme. — Pour tripette ?
chipie, n., femme avare, qui chiche tout, qui rapine sur tout,
pingre; femme à idées étroites, etc., etc. Se prend aussi dans
les acceptions françaises.
chocheresse et socheresse, n., sécheresse.
chochi et sochi, v., part, et infinitif, sécher, séché: Tées mou?
fais-te chochi (Tu es mouillé? fais-toi sécher). Note foin, ï ai bin
sochi auj'd % heu (Notre foin a bien séché aujourd'hui). De même,
dessécher tait dèchochi, ou dèssochi — Seuchey, P. T.
CHoeno, n., soulier en mauvais état, éculé, savate; soulier, avec
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tATOIS DB LA FORÊT DE CLAIR VAUX 113
mépris ou colère : Ote tes chochos, que tu salis lai majon t (Ote
tes souliers, car ta salis la maison!) — Traine<hochos h , traîne-
savates, déguenillé. — Voir galocher et landrou. — Ckochos, sou-
liers d'enfant, Gros.
chogi, v. inf. et part., choisir, choisi : Tu peux chôgi (Tu peux
choisir). Taies chôgi le pus bieau (Tu as choisi le plus beau). —
Chogi, L. C. ; chogi, P. T. ; cliaugi ou cheugi, G. et R.
choître, n., chevôtre, espèce de licou pour le cheval. ' ' *' c
chômer, t., se dit des noisettes qui ne viennent pas à bien, qui
restent vides : l'ai fait des méchants temps pou les noujottes, euiles
sont chômées tourteutes, c'est-à-dire il a fait de mauvais temps
pour les noisettes, elles sont toutes vides.
choquer, t., trinquer, toaster : I's choquent ai chaique cueup qu'ïs
buvent (Ils trinquent à chaque coup qu'ils boivent). — Coquer,
heurter, xiv« siècle?
chou, interj., mot dont on se sert pour appeler un chien : Chou,
chou, tiens f — CJwu, Thév. — On dit aussi tou. — Voir toutou.
chouche, n., souche, tronc d'arbre, grosse racine; chouche de
Noël, grosse bûche, gros tronc qu'on met au foyer le soir de Noél,
aGn de trouver, en rentrant de la messe de minuit, du feu pour
faire le révoillon, qu'on appelle collation. — Voir souchotte. —
Coque de Noél, Gros.
choue, n., chouette, orfraie. Chove connotte, c'est-à-dire chouette
cornue, à cornes, le scop ou petit duc.
CHOUINARD, CHOUIGNARD, CHOUINGNARD, CHOUINOUR, GHOUINGNOUE ,
couinoue et couinard, n., celui qui chouine, grogneur, pleurni-
cheur. — Voir chouiner.
CHOUIHBR, CHOUINGNER, COU1NGNBR, COU1GNER et COUINER, T., pleurer,
pleurer en mauvaise part; pleurnicher, crier de la gorge; crier
de douleur ou faire semblant : Qu'ast-cequï chouine don, ce na-
cou-lai ? A i t tends f je vas te faire cliouingner pou quiquecheuse, moi
(Qu'est-ce qu'il pleure donc, ce morveux-là? Attends, je vais te
faire pleurnicher pour quelque chose, moi). Taies don tiué ein
1 On prononce tréne. Désormais nous n'indiquerons plus dans le
texte, en caractères différents, la prononciation exacte de cette voyelle
composée ai, qui revient trop souvent. Le lecteur devra se reporter,
pour les temps des verbes à la conjugaison, page 41, et pour les
autres mots à ces mots eux-mêmes, à leur ordre.
t. sue t
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{'ils
114 FATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX
lapin? Je l'ai entendu couingner. Toutes ces formes du même mot
se confondent dans l'usage. — Couiner, crier comme le cochon,
Gros. ; couiner, pleurnicher, Thévenol. — Voir rècouiner.
cii'ti, adj., chétif; de peu de valeur; maigre, malade, souffreteux.
ch'tiveté, n., qualité de ce qui est chétif.
cignellr, n., le petit fruit rouge de l'aubépine et du houx, senelle
ou cenelle : Eune maingepas des agnelles, çai fait venin des poux
(Ne mange pas decenelles, ça fait venir des poux).
; i t £ cimer (ou simer?), v., suinter, transsuder. Se dit d'un vase, en
, particulier d'un tonneau qui laisse fuir imperceptiblement le
&. * ^ liquide par un joint, une fente, un nœud : Çai n'en vai pas, çai
/ -. , ^ cime ein poiclwt (Ça ne fuit pas, ça ne coule pas, ça suinte, ça
t^x l :/ '? ^ transsude un peu). On emploie aussi cimotter, qui dit encore
moins. — Simer, suinter, Gros.
cingler, v., cingler; fouetter, corriger : Euje te cingleras, moi, en
lai piaice de ton père, c'est-à-dire je te corrigerais, etc. (Cinguier).
cirer (ou siber?), v., effeuiller, égrener une plante, un rameau, en
faisant glisser sa main serrée tout le long de la tige : En passant
y > / au long de note champ, ï ai ciré eunne grante poingnien dïaivoine
(En passant près, le long de notre champ, il a... éraflé, peigné,
effioléV*... une grande poignée d'avoine).
r ; f ; /(•' cirbsse, n., trait, raie, trace, que laisse un objet pointu ou tran-
é ~~ chant sur un corps, sur un autre objet qu'il frôle, sur lequel il
glisse, contre lequel il frotte, etc. : Euje me seûs entraipè dans
les aironces a qui m'ont fait des tiresses pi-un les jambes (Je me
suis embarrassé dans les ronces qui mont fait des égralignures,
des éraflures plein les jambes). An ai traîné V 3 parche dans
le chemin : an voit lai dresse (On a traîné une perche dans le
chemin : on en voit la trace).
asÉ et cigé, n., ciseau. — On dit aussi cisieau et cigieau. — De
cisel?
citrb, n., cidre. — Cistre au xiv° siècle.
1 Nous ne connaissons pas de mot français qui exprime exactement
cette action.
2 On dit généralement les aironces, sans doute à cause du singu-
lier lai ronce. Cependant, quelque* personnes prononcent ronce :
Ein champ de ronces.
9 Contraction de eunne.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRTADI 115
cive, n.y ciboule, espèce d'échalotte, une liliacée comestible. —
Cive, Gros.
clair 1 , ad]., clair; clair-seraé : Vlai ein bié qui ast trop quiair
(Voilà un blé qui est trop clair-semé). On dit aussi : qui ri ast pas
fondé. Voir fondé. — De clerement, ei> petit nombre, xiv # siècle?
— Cliey, L. C.;cliey, P. T.
clairbr, t., flamber, donner de la flamme, en parlant du feu.
Faire quiairer le feu, le faire flamber : Soufflen Vfeu pou qu'i 9
quiaire. (Souille le feu afin qu'il flambe).
claque, n., claque, soufflet : Euje \i ai f... 'ri bonne quiaque(Je
lui ai f... un bon soufflet). Penre ses cliques et ses ciaques et /...
son camp, c'est-à-dire prendre ce qui appartient, ramasser ses ou-
tils, faire ses paquets, etc., et s'en aller.
claqub-en-bec, n., f ro m âge maigre et mou, sans doute à cause du
bruit que font avec la bouche certaines personnes en le mangeant.
(Quiaque-en-bec). — Claquembet, Gros.
claquer, v., claquer. (Quiaquer).
claquotter, y., dimin. de claquer. Se dit du feu qui pétille, ou de
bruits ressemblant à de petits coups de fouet : J'ai entendu quia-
quotter l'âbre du peursoi et j'ai dit : ï vai casser (lu entendu
gémir, se plaindre, l'arbre du pressoir, etc.) La grêle quiaquotte
dans le bois. On dit aussi, par antiphrase, quand il tonne fort :
Çai quiaquotte bin lai -haut, quast-ce qu'i' vai don cheurf
(Ça fait bien du bruit là-haut, qu'est-ce qu'il va donc tomber?)
claue, n., claie. (Quiaue). — Cloie, xiv e siècle.
clée (ou claie?), n., petite porte à claire-voie qui se tient habituel-
lement fermée quand la porte principale est ouverte, pour empê-
cher les enfants de sortir, les volailles et les chiens d'entrer, etc. :
Fromme eul quiée (Ferme le clayon). — Les beaux diseurs pro-
noncent claie sans mouiller /. — Cleyon, Gros. — De claie,
clayon? — Clayel, clôture, au xiv« siècle.
clef, n., clef. (Quié).
clenchotte, n., espèce de loquet de porte, verrou. (Quiainchotte*.
— De clenche, verrou, xiv e siècle.
4 La lettre / de ce mot est mouillée et serait en italique si les pe-
tites capitales avaient des italiques,... 11 en est de même des mots sui-
vants ciairer, claque, etc., jusqu'à cloyotte exclusivement.
3 Dans beaucoup de villages, cet o bref et ouvert se change en eu :
quiaincheutt*, quieucheutte, (clochette), etc.
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116 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX
cuve, n., crible. Prononcez clive, cest-â-dire q-Wive. — Clive, Gros.
cuver, v., cribler. (CUver). — Cliver, Gros.
clivurb, n., criblure. (CHvure).
clo (sonner le), expression qui signiûe sonner le cassé, rendre un
son qui indique une fêlure : Ton saibot sonne eul quio : tu l'aies
cassé, hein? (Ton sabot sonne le fêlé, etc.). Quelques personnes
ne mouillent pas 17 et prononcent clo. — De clox, clos, boiteux,
ou de dot, trou, fosse, du xn° au xv* siècle?
cloche et cleuche, n.. cloche : An ai seûné les trois quioclies (On a
sonné les trois cloches). — Quieuclie, L. C, P. T., G. et R.
clocher et cleuchbr, n., clocher : Yast fier, xast aussi haut que
Vquiocher (II est fier, il est aussi haut que le clocher). — Quieu-
chie, P. T.; quieuche, G. et R.
clochotte, n. diminutif, petite cloche; campanule, fleur. [Quio-
chotte).
cloquer, y., glousser à la manière d'une poule qui mène ses pou-
lets : Vlai 'ri poule qui quioque, eulle vourot couver (Voilà une
poule qui glousse, elle voudrait couver).
clou et cleu, n., clou : Y se tient drot comme ein quiou (Il se lient
droit comme un clou).
clourb, v., clore. (Quioûre). De môme dèchûre, déclore. On dit
aussi clos, clos, et endos, enclos.
clototte, n. diminutif de claue (mais au se change en o bref, et l
ne se mouille pas, probablement pour éviter deux sons io succes-
sifs), petite claie sur laquelle on fait sécher des fruits au four,
prunes, cerises, raisins : Eul feu ï ai prins dans mai cloyotte, et
mes blockes eulles sont pèdues (Le feu a pris dans ma... petite
claie, et mes prunes sont perdues).
c'neuchance et cueuneuchance, n., connaissance; quelquefois mai-
tresse : Y ai fait 'ri queneuchance pa lai, et peùs, i ai fini pa
se mairier d'aiveu (Il a fait une maîtresse par là, et puis il a fini
par se marier avec).
c'neute et cueuneute, v., connaître : Y ne m'ai pas qu'nu. Je ne le
quneuchôs pas t ou j'rieul* queneuelws pas (Il ne m'a pas connu.
Je ne le connaissais pas). — Queneu, P. T.; connu, P. T.
coche, n., truie, truie châtrée. — Coche, Gros.
çocle, n., cercle : Su tous mes meuds x ai des soqukus de cassés (Sur
tous mes muids il y a des cercles cassés).
çoclier, n., cerclier : Y ai deux gaichons; l'un xast soquier, l'aûte,
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i
PATOIS DE LA FORÊT DB CLAIRVAUX 117
marronnier (Il a deux garçons: l'un est cerclier, l'autre fait du
merrain).
coco, n., mol du vocabulaire enfantin pour désigner un œuf: Tai-
raies ein petit coco pou ton goûter, mon enfant (Tu auras un petit
œuf pour ton dîner, etc.) — Caquin, P. T. ; coquin, Thév.
cocu, n., la fleur de la renoncule; la baie de l'églantier. — Cocu,
primevère, Gros. ; cocu t baie de l'églantier, Thév. — Voir bais*
singnot, cul-de-chien, graitte-cul.
code, n., corde : 1* ne vaut pas lai code pou le pende (Il ne vaut
pas la corde pour le prendre). Enfant de loup, ton père fait des
quious, tai mère les vai vende, pou aicheter V code pou te pende...
que lai code casse, et que Vdiâbe te raimasse : Une des formules
qu'on emploie pour trouver le premier bouchot. — Voir boûchotte.
codelottb, n. diminutif, cordelette, ficelle : I's voulent mon chanve
pou se faire des codelottes (Ils volent mon chanvre poar se faire
des ficelles).
coi (ou quouet?), coite au fém., adj., animal qui n'a plus de queue,
diffamé en terme de blason. D'où ce jeu de mots, celte réponse
qu'on fait à la question quoi : Quoi? Çast ein chaît qui n'ai pus
de quoue. — Coi, Gros. / '
coppe, n., coque et cosse: Eunne coffe d'Ϟ; eunne coffe de pois 7L/- '^R f J
(Une coque d'œuf ; une cosse de pois).
coftier (ou coffetibr?), n., coquetier, ustensile de table. — Coffe,
sorte de vase, xiv 6 siècle.
coingner, n., cognassier. ^ s ^ /|U ^
coingner, v., mettre un coin à une pièce de charpente, à un instru- /^ v ^/ ^ \
ment, etc., particulièrement à un manche d'outil pour le conso- u. ^c ,fj
lider : Tai poutiant bin coingnè mon martieau, et i' se dèmoinge ^g
toujous, c'est-à-dire j'ai pourtant mis un bon coin à mon mar-
teau, et il se démanche toujours.
coingneïï, n., petit pain façonné ordinairement en espèce de sta-
tuette, en figure humaine, que les parrains et les marraines
donnaient autrefois à leurs filleuls et filleules, au premier de l'an
ou à Noél : Taies enco zeû parrain? En v'iai des coingneux que
d'aies ai bailler aux ètreunnest c'est-à-dire, tu as encore été par-
rain? En voilà des petits pains que tu as à donner aux étrennes t
— Cognot, Gros. ; cogneux ou cognot, Thév. — De cuignet, sorte
de gâteau, xiv« siècle?
coinnb, n., corne: Que maingeou de char! F aivailerot 'n* vaiche
d'aiveu ses coinnes (Quel mangeur de viande! II avalerait une
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118 PATOIS DB LA FORÊT DE CLAIRVAUX
vache arec ses cornes). On dit aussi cône et conne, mais eoinne
est plus énergique : Tasl maigre ai User V bique entre les cônes
(11 est maigre à embrasser une bique entre les cornes). Cône,
tonne, instrument à vent quelconque : Entends-tu lai cône du vai-
cher 7 c'est-à-dire la cornemuse du vacher? /' en ai, dans cte
musique-lai, des cannes et des connottes! (Il y en a, dans cette fan-
fare, des instruments petits et grands I) — Voir toûtotte.
coucher, coifBR et conner, v., frapper des cornes : V s'ast lâché
coinner pa sai vaiche (Il s'est laissé corner, frapper des cornes par
sa vache); corner, souffler dans un instrument à vent quel-
conque, pins particulièrement la corne et la trompe de chasse :
Eunne belle musique t An dirot qui 9 s tonnent dans des saibots.
Coner quelqu'un, lui faire un charivari. — Voir toûler. — Cor-
ner, onner de la trompe, Th.
corn (o x quoubttb?), n., nuque : Y bdclie lai coite, c'est-à-dire il
baisa la tête, au prop. et au fig. F...-U ein bon cop su lai coite
(F.. .-lai un bon coup sur la nuque). — Coite, Gros. ; coite, Thév.
— Voir fôssolte et crotot. — De quouette, petite queue, à cause
des cheveux qui se redressent parfois au bas du cervelet en queue
de eanardJ — De coueigne, coupet chignon, partie de derrière
du cou, xiv* siècle?
col, n., cravate : Fais V biouque 4 ai ton col (Fais une boucle à ta
cravate). /* fait trop chaud pou mette ein col (Il fait trop chaud
pour mettre une cravate).
golidor, n., corridor.
collation, n., repas supplémentaire, le soir, après la veillée; ré-
veillon (Vieux français).
collée, n., toute charge qui se porte sur les épaules : Eunne collée
de bois mort (Une charge de bois mort) ; Eunne collée éCouséres
(Une charge d'osiers) ; Charge en général, fardeau ; sac de grain
représentant à peu près le poids qu'un homme peut porter. En
aivoi sai collée, en avoir autant qu'on en peut porter, sa charge :
V ai v'iu me pouter, mas i'en aivot sai collée (Il a voulu me
porter, mais il en avait sa charge).
collbron, n., bourrelier. — Voir bourrier et bourlie.
combler, avec l mouillée, combier, v., combler.
cômer, v., avoir l'air malade, abattu, triste. On came particulière-
1 Les beaux parleurs disent biouque. L'iotacisme semble donc en-
core ici dû à H mouillée.
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PATOIS DE LA FORÊT , DE CLAIRVAU1 119
ment les jours qui précèdent une maladie. Les volailles cornent^ .O £>m<^'£. / i //,/
quand elles rentrent leur cou entre leurs ailes, etc. : Lai fiéve / ^-^ ^
eulle l ast dèquiarée : ï cômot dépens deuxjous (La fièvre est dé-
clarée : il était souffant depuis deux jours). S'emploie aussi acti-
vement avec la môme signification : Corner eunne mailaidie,
c'est-à-dire être dans la période d'incubation d'une maladie.
Lâcher corner, laisser cuire doucement, lentement, à petit feu,
mijoter : /' faut faire meure tes choux vit\e\x; çai ne demande
pas ai corner dans le pot, les choux, c'est-à-dire il faut faire cuire
tes choux vite, à grands bouillons; les choux ne demandent pas
à rester longtemps au pot.
comme tout et COMME te ut, terme de comparaison qui équivaut à un
superlatif, très, beaucoup, etc. : F ast bieau comme teut, c'est-à-
dire comme tout ce qu'il y a de plus beau, très beau. ,
commelle, n., vallon étroit, petit repli de terrain; petite combe.
compreunnotte et compeurnottb, entendement, intelligence, faculté
de comprendre : ïai de lai comprun-notte, c'est-à-dire il com-
prend bien ce qu'on lui dit, il saisit vite, il est intelligent. Ce mot
a souvent un sens plaisant ou ironique.
compter, v., s'emploie pour croire, penser : Euje compte bin qui* ast
mort (Je crois bien qu'il est mort). Euje compte qu'ï vai pieuve
(Je crois qu'il va pleuvoir). Comptes-tu me faire pour? (Penses-tu
me faire peur?)
comptoue, n., compteur: Çast ein bon comptoû 9 c'est-à-dire un bon
compteur, un bon calculateur. Voir contoue.
coneler et conneler, n., cornouiller, cornus mas.
coneule et conneule, n., cornouille, fruit du cornouiller.
congri, part, pass., formé spontanément, engendré sans cause ap-
parente. — Voir se congri.
congri (se), v., se former spontanément, s'engendrer sans cause ap-
parente : ï y ai des vers pi-un mon jambon : çai se congrit pou-
tant lai-dedans, car euje l'aivôs bin enveloppé... (Il y a des vers
plein mon jambon : ça se forme pourtant spontanément là-dedans,
car je l'avais biea enveloppé...). — De se congrier t xu e au xv e
siècle?
conot et connot, n., chaque sac de la besace : Les deux conots de
note besaice sont p'chés (Les deux poches de notre besace sont per-
cées); cornet d'écorce que font les enfants pour rapporter les
fraises du bois : J'ai fait ein grand connot de malsauce, etpeusje
l'ai empli de fraijottes (J'ai fait un grand cornet? de marsault, et
puis je l'ai empli de fraises).
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120 PATOIS Bl LA FORÊT DE CLAIftTAUX
coifOTTE et coknotte, n. diminut., petite corne, petite trompe de
chasse; extrémité d'une corne disposée comme une écritoire,
fermée d'un fond fixeau gros bout, d'un liège mobile à l'autre
bout, et qui sert aux Vignerons pour emporter du sel. — Voir
choue.
conoille et connoillb, n., corneille, corbeau : Eulle l ast nore
comme eunne conoille (Elle est noire comme un corbeau).
conte, abréviation de contraire : Bin au conte t c'est-à-dire bien au
contraire, joliment! je vous en moque ! — Voir moquer.
contour, n., conteur : Ein contoû de menteries, c'est-à-dire un con-
teur de bourdes, un menteur.
conventer (ou convanter?), v., offrir, proposer. Ne s'emploie que
dans celte expression : conventer sai marchandige, c'est-à-dire
offrir sa marchandise, la proposer aux chalands. — Conventer,
faire une convention, xiv e siècle.
çop, n., cep : Gn'ai rin aiprées les çops, c'est-à-dire il n'y a point
de raisin après les ceps. On dit aussi billon.
copblot, n., copeau, bûchette; plus particulièrement le copeau qui
provient de l'abattage des arbres, et qu'on appelle aussi écaille.
coper, v., couper : Qu'ï faïïle, qu'ï cope, qui' renoue, lache-le
tranquille, c'est-à-dire qu'il fasse ce qu'il voudra, ne t'en occupe
pas.
copesse, copasse et copure, n., coupure.
copouE. n., coupeur : Ein copoû au bois, c'est-à-dire un coupeur au
bois, un bûcheron.
copiot, n., couperet.
coque, n., espèce de copeau, bois de bûcheron; le collet des bran-
ches, des cépées de taillis; souche, tronc; On dit : Gelé comme
eunne coque, pour fortement gelé, congelé, durci.
con, n., petit tube de bois ou de for qui tient lieu de robinet dans
une cuve, et qu'on ferme avec des balles de chanvre : J'ai vendu
mon vin au cor de lai cuve, c'est-à-dire à livrer au sortir du cor
de la cuve, avant de le mettre en fûts; tuyau de descente qui con-
duit l'eau d'un chéneau sur le sol; tuyau, tube en général.
CORBEU.LOTTE, n., petite corbeille; la cupule du gland.
corniot (ou cornieau?), n., corneau, chien mâtiné destiné à la
chasse; tout chien qui n'est pas de race pure, et spécialement le
petit chien de braconnier, tenant du chien courant et du chien
d'agrément, aux oreilles étroites, à la queue en trompette.
cornolé, part, pass.; ne s'emploie que dans celte expression : saibot
tf
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PATOIS PB LA FOEÊT DE CLAIAVAUX 121
cornolé, pour désigner des sabots fumés communs, portant des
dessins en blanc, nyures, zébrures, fleurs, etc., obtenus en re-
couvrant do bandelettes d'écorce les endroits que la fumée ne doit
pas jaunir. Le verbe est peu ou point employé.
connus, n., espèce de fourche qui, appuyée sur l'extrémité d'arrière
du limon d'une charrette, et attachée à la ridelle, se dressait à la
hauteur de la petite échelle (voir èckellotte) d'avant, pour main-
tenir les charges volumineuses telles que celles de paille, de
gerbes, de foin, etc. Aujourd'hui la cornue rustique primitive est
généralement remplacée par un rancher à double tige.
cossoNitiBR et cosson, n., coquetier, marchand d œufs, de beurre,
de volailles, etc. — Cossonnier, cosson, Gros; cossonnier, cosson,
cocassier, Thév.
costiérb, n., la pièce principale du châssis d'une claie, c'est-à-dire
chacun des deux côtés, des deux montants percés de trous où
sont fixés les traverses ou fuseaux. — Costiére, côté, P. T.
côtb, n., coteau, colline, montagne, raidillon, toute éminence de
terrain. — Voir coup de cul et grippo.
côtib, n., côte de porc, frais ou salé : Toi mins ein bon côtie dans
note pot (Taiveu du riz (J'ai mis une bonne côte de porc, etc.).
coton, n., tige de plante montée en graine, fistuleuse ou non : Ein
coton d'oisille, ein coton d'èpiniard (Une tige d'oseille, etc.).
couamb, adj., capon, honteux, pantois, interdit : Gn'ai rin répondu
ai fait; oh t xétot bin couâme, binpeneul (Il n'a rien répondu du
tout; oh, il était bien capon!) — Aivoir l'air couâme, avoir l'air
doucereux, dissimulé, hypocrite, pince-sans-rire.
coucrb, n., laps de temps : I'ast uu pati V bonne couche (Il a été
parti longtemps, un bon laps de temps).
couchknot, n. diminut., petit cochon,
coucbbbi, n. diminut., petit coq, jeune coq : Dans mes poulets, x y
ai cinq poulottes et trois coucheris (Dans mes poulets, il y a cinq
poulettes et trois petits coqs).
couchon, n., cochon. Couchon iéloupe, petit rouleau d'étoupe, de
filasse, etc., préparé pour être fixé, attaché à la quenouille.
Couchon de saint Antoine, cloporte. — Cochon d'étoupe, Gros.
coucou, n. ; ce nom, outre l'oiseau bien connu, désigne une plante,
la primevère officinale. — Cocu, primevère, Gros.
coudelbr, y., cordeler, faire de la ficelle à la main : Euce petiot-lai,
x coudeule daji bin : i ai fait eunne envargille tout seul (Ce petit
là cordèle déjà bien : il a fait une... voir envargille— tout seul).
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122 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIHTAUX
coudelon et coudé, n. f un des brins, des fils, etc., tordus qui cons-
tituent la corde ou la ficelle : /' coudeule ai deux, ai trois coude-
Ions (Il cordèle à deux, à trois fils). Coudé désigne plutôt un des
trois ou quatre faisceaux de ramillons do bouleau qui forment le
balai.
coudrou, n., dindon, coq d'Inde. Probablement à cause de son
cri : onomatopée.
coué, n., outil du faucheur, corne, ou petit vase de fer blanc co-
nique destiné à contenir, avec de l'eau, la pierre à aiguiser la f aulx.
— Voir cousse.
coulaisson, n., petite lessive : Euje n'ai pas bué toutes mes hades;
je n'ai fait quein petiot coulaisson, c'est-à-dire je n'ai pas lessivé
toutes mes hardes; je n'ai fait qu'une petite lessive. — Coulot,
petite lessive, Gros. — De couler?
couleuvb, n., couleuvre. Escargot de couleûve, le petit colimaçon
bariolé des haies.
COULIGNER, COULINGNER, COULINER et COULEVINGNER (se), V., SC COUler,
se glisser avec précaution en se baissant ou en rampant; se fau-
filer doucement entre des objets qui masquent, de manière à
n être ni vu ni entendu; s'échapper en s' effaçant : V s'ast couli-
gné entre les torchées, de long de lai hae, et peus t" ai tiré (Il s'est
faufilé entre les cépées, etc.) /' s'ast coulevingné pa l'harbe, et je
Vaipèdu de vue (Il s'est dérobé en rampant dans l'herbe, etc.)
— Ce mot est employé particulièrement par les chasseurs. — Se
couleviner, Thév. — Voir miaou.
coulisse, n., traînée de paille, de balles, de fumier, de marc de
raisins, etc., sur la neige, pour attirer les petits oiseaux : Tai
tiué dix moingneaux d'ein coup su mai coulisse; espèce de ché-
neau, d'entonnoir, de conduit formé de planches, dont on se sert,
dans certains cas, pour décharger les raisins, pour les faire glis-
ser, les conduire de la baingnoure ou cuveau dans la cuve. —
Coulisse, claie, Thév.
coup de cul, cop de cul et cueup de cul, n., petite montée, raidillon
où le cheval e3t obligé d'allonger la croupe, de donner un coup
de collier.
coupeau (ou coupau?), n., bardane, lappa; l'involucre de la fleur,
qui, muni de bractées très pointues, s'attache facilement aux vê-
tements, aux cheveux, etc. : /' mai jitié des coupeaux (Taiprées
les cheveux (11 m'a jeté, etc.) — Coupaux, Gros.
coupotte, n., sébile, ce que Grosley appelle sibilU ou subille. Les
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PATOIS DE LA FORÊT DB CLAIBVAUX 123
vignerons se servent souvent de cette espèce d'écuelle non fragile
pour faire tremper leur pain dur, quand ils prennent leur repas
dans les vignes. — Voir trempée.
coubaillbr, v., courir dune manière inégale, mal à propos; rôder,
courir la prétentaine; faire des courses hasardeuses: Quast*
ce tu courailles don tout de long le chemin, pou te lasser, mon
gachenot ? Çai couraille totes les neuts (Qu'est-ce que lu, etc. Ça
court la prétentaine toutes les nuits).
coubcibot, n., homme gros, court, trapu, obèse; enfant gros et
court.
courdibàu (ou courdiot?), n. f petite corde; cordeau servant de
guide pour conduire les chevaux à la charruo : Tire ai dia, tire
eul courdiot (Tire les chevaux à dia, tire le cordeau). — De cor-
deau ou de cordeleltoJ — Ne pas confondre avec codelotte.
coure, n., coudre, coudrier, noisetier. (Coure).
couréb et coréb, n., petite perche de noisetier, baguette de coudre:
Tai levé des couréespou faire ein p'ner. — Voir èclicher. — Cou*
ré y tige do vigne à treille, Gros. ; courai f racine de vigne, P. T.;
couret, racine de vigne, G. et R.
coubre, v., courir. Ailler courre, aller se promener, flâner, voisi-
ner : r faiWot (fé-iot) traivoiller enpiaice (Tailler courre (Il fallait
travailler au lieu de flâner, d'aller te promener). Venez don courre
chez nous, c'est-à-dire venez donc travailler près de moi, causer,
me visiter.
cousiNONB, n., cousine; bocal de fruits à l'eau-de-vie : Aippoute lai
cousingne de ceréges (Apporte le bocal de cerises).
goussb (ou cous?), n., pierre à aiguiser les faulx; au figuré, niais,
bêla, godiche. — Cœur, Gros. — Voir coué. — Couz, xiv e siècle.
coutainnes (ou couTENNBS?), n., champ très court, ordinairement
de forme triangulaire, placé au sommet de l'angle de deux che-
mins qui se croisent : Tai rabouré des coutainnes et je seûs lassé;
% faut faire pi-un des r' tonnes (J'ai labouré des et je suis
fatigué; il faut faire beaucoup de retournes). — Voir retonne et
point'ieu.
coutance et coutangb, n., coût, dépense, prix : firôs bin ai Pairis,
mas çai coûte cher... Et peus, ce n'ast pas encopou lai coutance,
mas je n ai pas le temps (J'irais bien à Paris, mais ça coûte cher...
Et puis ce n'est pas encore pour la dépense, mais, etc.) S'emploie
surtout ainsi, quand on veut indiquer que la dépense n'est pas la
principal obstacle, n'est que secondaire. — Coutange, Gros. ; eou-
tance, Thév.
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124 PATOIS DE LA FORÊT DE CLÀIHVACT
coûté, n., côté. Ai conté, à côté.
coûté, n., couteau. Ou dit aussi coutieau (voir co mot). Dans
une espèce de jeu d'enfant, en môme temps qu'on mesure entre
ses doigts les lames des couteaux qu'on veut comparer, on pro-
nonce ces mots 1 : Coutieau, couli, conteste, rac\e-c..., racle /"...
Coûté marque souvent du dédain. Coutieau ai deux dos, mauvais
couteau, qui ne coupe pas plus du dos que du taillant. Au Gguré,
homme double, sur lequel on ne peut compter, qui fait fausse
épaule, qui est de l'avis de tout le monde; ganache. — Coutel,
coustelesse, couteau, coutelas, xiv* siècle.
coutelêe, n., ce que la faulx ou la faucille emporte d'un seul coup :
Çast ein bon moichenoû; V fait de bonnes coutelées, c'est-à-dire
c'est un bon moissonneur, il en enlève beaucoup, une bonne lar-
geur à chaque coup de faulx.
couteler, v., enlever, dëblaver d'un coup de faulx, ou de faucille,
une bonne largeur de terrain; aller vite : Tu fauches du bec, çai
ne couteule pas, çai nèpieule pas, et çai cope mal : fauche don du
tailon (Tu fauches du bec, ça n'en prend guère, ça n'abrège pas,
et ça coupe mal; fauche donc du talon). — Voir èpieuter.
coutelot, n. diminut., petit couteau; mauvais couteau. Dans ce
dernier sens, on dit plutôt châtre-bique et guiaudot. — Voir
g\audot.
coutieau, n., couteau. Coutieau de miée, rayon de miel. — Cou-
teau de miel, Thév. — Voir coûté.
coutre, n., coude : F me baille des cops de contre (Il me donne
des coups de coude).
coutumbré, n., espèce de culbute qui se fait en appuyant sa tète et
ses mains sur le sol, en levant ses jambes en l'air et en se laissant
retomber sur le dos. Faire le coutumeré, faire la culbute en pas-
sant ainsi ses pieds par dessus sa tète; au flg., se ruiner, tomber
du pouvoir, perdre sa situation, etc., le même sens enfin que
faire la culbute. — Tourneboile, culbute sur les mains, Gros.;
tournebouelle, culbute, faire un tour sur la tête, Thév.
4 On prend d'une main, entre l'index et le pouce, la lame du cou-
teau tout près du manche, en disant coutieau ; on place de même en
suivant sur la lame le pouce et l'index de l'autre main et on dit cou-
teste, et ainsi de suite alternativement. On attribue au couteau le
dernier nom qu'on prononce quand les doigts serrent l'extrémité de
la pointe.
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PATOIS DE LA FORÊT DE GLAIRVAUX 125
couva, n., couveuse, poule qui couve d'habitude, qui couve sou-
vent : J'ai V bonne couva. On dit aussi couvoure, mais dans
un sens moins général; couva indique plutôt l'état, et couvoure
l'action. On dit d'une femme difficile, prompte à se rebiffer :
Çast eunne vraie couva ; eulle l ast malingne comme eunne couva,
c'est-à-dire toujours prête à vous sauter à la figure, comme une
poule qui défend ses poussins.
couve-cendre, n., cendrillon, qui aime à garder le coin du feu, qui
se chauffe de trop près. S'applique aux gens comme aux b A ies :
ï en prenrai des raites, c'te chatt-lai, je m'en f...i Tast toujous
entre nos deux chiennets ; çast ein vrai couve-cendre (Il en pren-
dra des souris ce chat-là, je m'en moque! Il est toujours entre
nos deux chenets; c'est un vrai chat d'àtre). Que couve-cendre
que c'te femme lait An ne lai voit jain-mas dans les champs. —
Voir chaît d'âtre. — On dit aussi cuUcendron.
couverte, n., couverture do lit, courte-pointe. — Voir mante.
couvî, adj., gâté, couvé. Ne s'emploie guère que dans cette expres-
sion : œu couvî, œuf gâté, couvé. Nous avons cependant entendu
dire odeur couvie pour odeur de renfermé» odeur de relent.
couvot, n., couvet, pot de feu, chaufferette.
coyot (ai lai). Voir aicoyot. — Du latin cautusJ
crai bosse et cradossb, n., têtard de grenouille. Au fig., enfant
vive, espiègle : C'te petite craibosse lai, eulle l ast toujous pèdiue;
eulle nairrêle point (Cette petite espiègle-là est toujours perdue,
etc.)
craicher, v., cracher. (Crécher).
craichon, n., crachat; salive. (Créchon).
craichoue, n., cracheur, qui crache beaucoup, graillonneur. (CW-
choû).
CBAiNDiu, part. pass. du verbe craindiea, craindre.
crainte de, loc. prépos., de peur de : Y ne fait rin crainte de se
tromper, c'est-à-dire en plaisantant, il ne fait rien de peur de se
tromper.
craissoux, adj., crasseux, au propre et au figuré.
CRANCts (faire les), fairo semblant : ï fait les crances de crier (Il
fait semblant de pleurer). Dans quelques villages on prononce
cances. Faire crance, faire crédit, Gros. ; faire quence, faire sem-
blant, Thév.
cran.ner, v., faire des crans, des coches, des entailles : T s'aimuge
q% cran-ner lai table d'aiveu son coutieau, en piaice d'aipprenri
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*>
.,/«
126 PATOIS DB LA FORÊT DE CLAIBYAUX
son aileçon*. (Il s'amuse à faire des coches dans la table, au lieu
d'apprendre sa leçon). — On dit aussi encran-ner.
crate, n., crête : Eunne crâte de co (Une crête de coq).
- -j , -- - c rater, v., se dit de l'accouplement du coq et de la poule, de l'ac-
tion du coq sur la poule, cocher : Eul co de chez lai Tonton V ai
?* / crâlè nos poules. — Chaucher, Gros.
4 cràue, n., craie, blanc de Troyes; craue rouge, la sanguine.
creimmau, n., crémaillère; la partie de la cheminée qui avoisine la
crémaillère : Fast nor comme note crin-mau (Il est noir comme
notre crémaillère, ou comme notre cheminée).
crbjot (ou craiot?), n., terre légère sur les hauteurs; terre cal-
caire, pierreuse, de seconde ou de troisième qualité; terrain sec :
J'ai pus récolté et' année dans mes cré-iots que dans mes grosses
terres (J'ai plus récolté cette année dans mes terres légères, etc.)
— De craie ?
créiotie (ou craiotie?), n., espèce de créiot; créiot inférieur; créiot
en général ou terre qui s'en rapproche : Ce n'ast pas des bin bons
champs ;çast du cré-ioti (Ce n'est pas de bien bons champs, etc).
crêpé et crêpiau, n., espèce d'omelette économique à l'huile, dans
laquelle on mêle aux œufs de la farine délayée pour faire foison-
ner : J'o)is maingé venredi ein crêpé pou note goûter. — De crêpe?
creusot, n., creuset, petit vase de terre en tronc de cône, sans
queue ni oreilles.
creusoue et creujoue, n., creuseur, ouvrier qui creuse : Ein creu*
sou de puts (Un creuseur de puits).
creusures de saibots. On nomme ainsi en général les copeaux de
sabotier, et particulièrement les copeaux en escargots que cet ou-
vrier fait avec la cuillère.
creuve de faim, n., crève de faim, malheureux, indigent.
crevelot, n., espèce de prune hàlive.
crevôle et ècrevôle, n., laitcron, ou laceron qu'on mange en sa-
lade, un sonchus à fleur bleue, le sonchus oleraceus ou le sonchus
arvensisl
crier, v., s'emploie pour pleurer : Ai c't' enterrement-lai, tout le
monde criot (A cet enterrement-là, tout le monde pleurait).
1 On dit sai leçon et son aileçon, à cause de lai leçon. Nous avons
déjà fait remarquer ce transport fréquent du ai de l'article lai au
commencement des noms, et nous ne reviendrons plus sur cette ob-
sérvatioA,
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PATOIS DB LA FORÊT DE CLAIRVACX 127
crôlée, n. Voir enrôlée.
crôlir, v., trembler, remuer, branler : V fait crôler l'ormoire en
dansant su le piaincher, c'est-à-dire il fait mouvoir, re:i uer, il
ébranle l'armoire — qui menace de tomber — en dansant sur
le plancher. Çai vai cheur, çai croie (Ça va tomber, ça branle).
Ç'ast comme eunne queue de vaiche, çai croie, mas çai ne cheurt
pas. l'en vai cheur de lai pieueî Eul temps ïen croie, c'est-à-dire
le temps en est plein, en est ébranlé, il en tremble. Crôler, se-
couer : Croie eul blocher (Secoue le prunier). — De craller et
crosler, xii 6 , xiu, xiv* siècles? — Crosler, trembler, branler la
tête, Gros. ; crolay, secouer, trembler, P. T.
cROQUB-AivoiNNB, n., celui ou celle qui s'occupe de faire un mariage,
qui met les jeunes gens en relation; entremetteur, entremetteuse.
croqubnot, n., petit clou à souliers, à tête arrondie en segment de
sphère; espèce de broquette.
grorb, v., croire. Euje cros, euje cro-ios, euje crôerai, que je
cro-ieu, cro-iant. — Croi, L. C. ; croi, P. T.
crosse, n., béquille : T vai d'aiveu des crosses (Il marche avec des
béquilles). Vieux français.
crot, n., petit trou dans la terre, petite fosse, petit fossé; en parti-
culier, le trou qu'on fait pour planter une pomme de terre, des
haricots, etc. : Je mets V bonne poingnien de fien dans
chaique crot de pois (Je mets une bonne poignée de fumier dans
chaque trou, etc.) La trochée de haricots ou de pois en garde le
nom : Mes pois ne sont pas venuns; j'en ai raipouté pus de deux
cents crots su mai hotte (Mes haricots ne sont pas venus; j'en ai
rapporté plus de deux cents trochées sur ma hotte). On dit d'un
terrain mal uni, raboteux, inégal : Ce n'ast que crots et bosses.
Crô, trou, fosse, Gros.; crot, trou, G. etR.; crau, trou, terrier,
Thév. — Crot, creux, fossé, xiv e siècle. — Voir encrotter.
crotot, n., la petite fossette qui se trouve au bas du cervelet;
nuque. — Voir fôssotte et coite.
crototte, n. diminut., petite crotte; petite tache de boue.
crotot et croïoue, n., crédule, qui croit facilement tout ce qu'on
lui raconte, simple, naïf : V ne faut pas été si croijot que çai; ïs
se f... de toi ! (Il ne faut pas être si crédule que cela; il se moque
de toi !) — Creôle, Gros. ; croyaud, Thév.
cruchotte, n. diminut., petite cruche; son contenu : V ai bu sai
petite cruchotte, euce maitin, an voit çai (Il a bu sa petite cruchiê
ce matin, on s'en aperçoit).
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128 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUI
c'tâe-ci, c'tes-ci et c'tbl-ci 1 , pron. démons., celle-ci. — Cette-tif
c'tée-lai et c'te-l-lai, pron. dém., celle-là. — Cette4à? — Stulay,
stellai, ste, L. C. ; stulay, stilay, sti, stu; squi, ceci, P. T.
c'tu-ci, c'tus-ci 2 et c'tul-ci, pron. démons., celui-ci. — Cettuy<i.
c tu-lai et c'tul-lai (on fait sentir plus ou moins fortement /), pron.
démons, celui-là. — Cettui-là?
cueu, part, pass , cuit; fém. cueutieu.
cueuche, n., cuisse. — Queuche, Gros.
cueuchin, n., coussin.
cueulard, n., sorte d'esprit follet. — Voir foulletot.
cueulée, n., culée; tas, masse, quantité : V ai des cueulées de ra*>
sins (Taiprées les çops (Il y a des tas de raisins après les ceps).
cubglleron, n., lange d'enfant. Par mépris, mauvais linge, gue-
nillon, linge sale.
cueulïjbtonner, v., c'est proprement cueulotter en marchant, traîner
par derrière : Marche dont QuasUce que tu cueulletonnes? —
Voir cueulotter.
cueulletonnier et cueulleton, n., celui qui cueulletonne, qui ne
suit pas les autres en marchant, qui fait comme Creuse. — On
dit aussi cunneter.
cueulotte, n., culotte.
cueulotter, v., perdre son temps à des détails, et surtout lambi-
ner, traîner une besogne en longueur : Dèpêche-te don vor!
quasHe que tu cueulottes don? tu n'en finiraies pas. — Voir
beurlauder t beurluter, tanuger, etc. Les mots abondent pour ex-
primer cette idée avec toutes ses nuances. — Culotter, ne rien
faire en paraissant faire beaucoup, Gros. ; cuhtter, s'agiter et ne
rien faire, Thév.
cueulottier, n., celui qui cueulotte y qui traîne la besogne en lon-
gueur, paresseux, minutieux, lambin : Que cueulottier l T n'en
finirai pas! (Quel lambin, il n'en finira pas!); empâté, ventru,
4 Gomme on supprime complètement Ye muet dans la prononcia-
tion qui sonne ainsi : stèeci^ stessi, stelci % stelai, stellai, nous avons
jugé inutile de mettre les deux tl
* Ve muet de cetu, se trouvant élidé complètement dans la pro-
nonciation, nous avons cru devoir le remplacer par une apostrophe,
le c gardant bien entendu le son doux. On prononce tantôt êlûci,
tantôt, en appuyant sur 1'*, stuscL Costuif
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PATOIS DE LA FORÊT DB CLAIRYAUX 129
lourd, comme embarrassé dans sa calotte, lourdaud; traîne-ga-
loches : Lu, me raittraiper en courant, euce gros cueulottier-laif
c'est-à-dire lui, me rattrapper à la course, ce gros empâlèXil
curup et cop, n., coup.
cururchot, n., crochet : Ein cueurchot ai fien ou ai fun-mer (Un
crochet à fumier).
cuiurb, v., cuire. Part. prés, cueujant, part. pass. cueu, subj. prés.
cueuge.
cururson, n., cresson.
cuiuimiN. Voir cheurtien.
cuiutieu, n., cuite, fournée, l'ensemble des miches de pain qu'on
fait cuire d'une fois dans le four : Je nen ai guère peurti, eunne
toute petiote cueutieu; quate miches et ein michot (Je n'en ai guère
pétri, une toute petite fournée ; quatre miches et une michette).
On dit de même : Eunne cueutieu de chaux, eunne cueutien de
tuiles, etc.
cuoingne, n., cuisine : Eulle fait de lai bonne cugingne (Elle fait de
la bonne cuisine).
cul (été ai), être ruiné, réduit à la dernière extrémité : Le v'iai ai
cul; ce nast pas étonnant d'aiprées les dépenses qu'ï faijot (Le
voilà ruiné, ce n'est, etc.) Mette eunne toitiure ai cul, la mettre
de manière que le bout d'arrière des limons s'appuie sur le sol.
Cul su bout, sens dessus dessous, ai boigevot (voir ce mot); démoli,
tombé en ruines. Lever le cul, ginguer, ruer, en parlant des
chevaux : l'ast méchant, i' leuve eul cul.
cul d'anr, n. ; on nomme ainsi une espèce de mauvaise prune al-
longée, à demi-sauvage, la quetsche dégénérée....
cul db chien et ORAiTTB cul, n. , le fruit de l'églantier. — Voir cocu.
cul dr poule, n., moue, grimace des lèvres qui témoigne le mé-
contentement. — Voir pipion.
cul péché, n., cul percé, mal vêtu, malheureux en habit percé, en
guenilles, traînard, truand (cul pché). On dit aussi cul dépiiceti.
— Voir landrou.
cumr et cuiuur, n., écume 4 . On prononce aussi cun-me.
comrr et cummrr, v., écumer, dans le sens de faire, produire de
1 Lai cume pour l'écume, attendu que souvent IV se change en i
dans la prononciation, et vice-versâ.
t , xux
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,'<•
130 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX
l'écume : Y ètot si en colère qu'i' cun-mot (Il était si en colère
qu'il écumait). — Voir ècummer.
cunneter, v., (voir cueulletonner) . — De caneter?
CUNNETON, n., hanneton. (Cun-nton).
curer, v., en général, nettoyer; en particulier et absolument, enle-
ver le fumier d'une étable : Vai curer lai vaiche. J'ai curé nos
beurbis, c'est-à-dire va nettoyer l'étable de la vache, etc. On cure
les outils sales, tels que pioche, bêche, charrue, etc.
cunoT, n., mauvaise serpette usée dont les vignerons se servent or-
dinairement pour curer, ôler la terre qui tient à leurs outils : J'ai
pèdiu mon curot et j'en ai fait un { d'aiveu ein bout de pâché. —
^ Voir curer.
curotte, n., curoir, curon, petit instrument de fer en forme de ci-
seau de menuisier, muni d'un long manche, qui sert à curer la
charrue.
cdssbr, v., reculer, se dédire, caler, caponner, revenir sur sa pa-
role, manquer de hardiesse : Saute don ai l'aivaillée, hein ? tu
n'ouserôs (ou nousoûrôs), tu eusses! (Saute donc..., tu n'oserais,
tu caponnes!) — Voir caner, fouiner et renifler.
cuvelot, n. diminut., petit cuveau.
da, inlerj., tiens 1 vraiment! aht Exprime presque toujours un
doute, un regret, de l'ironie : Euje n'ai pas pu fini le champ, dit
le domestique, — Dâl répond le patron, c'est-à-dire est-ce bien
vrai? ça m'étonne; c'est que tu n'as pas bien travaillé, etc.
dada, n., femme ou fille niaise, maladroite, qui se laisse attraper
facilement; ignorante, qui rit à propos de tout, nigaude. On fait
ordinairement précéder ce mot de l'adjectif grante : Ris don bra-
ment, grant' dada t Taies cru çai, grant' dadâ ? (Ris donc bien,
grande dinde! Tu as cru cela, grande sotte?)— Dadet, niais,
nigaud, Gros. — De dadais ?
A v . dadoure, n., clifoire, espèce de seringue de sureau servant de jouet
aux enfants. — Eglisse, Gros.
dabourée, n., le contenu de la dadoure, le jet de liquide qu'elle
lance : T mai f..., envoyé V dadourée d'ègout de f un-mer.
dagonne, n., mauvaise vache; vache avec mépris. — Voir godelle.
— De dagorne?
* On prononcera ici un et non ein, parce que cet article n'est suivi
d'aucun nom, d'aucun mot auquel il se rapporte. On dirait, au con-
traire, j'en ai fait ein aûte, j'en ai fait ein bon, etc.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIBYAUX 131
daguer, y., se dit de l'action du chien qui tire la langue, quand il
a chaud. Par analogie, être essouflô, ahaner. — Daguer, être
essouflé, Grosl. ; daguer, Thév. — De dague? La langue du chien
sort comme une dague du fourreau...
d'ailleurs, ad v., s'emploie dans un sens particulier, différent du
français : D'ailleurs, i* me fait langui; (tailleurs, euje vourôs
(au v'rôs)ête mote (ou mo/ieu), c'est-à-dire à ne vous rien cacher,
pour être brève, en résumé, etc.
daimmb, n., dame. {Dain-me).
daivantaigb, adv., davantage.
daji, adv., déjà; s'emploie fréquemment pour d'abord : Cmen-
çons daji pa çai (Commençons d'abord par cela). On emploie aussi
ce mot comme en français, dans un sens assez difficile à préciser,
à peu près le sens de (Tailleurs : Euce riast daji pas si bieaut
(Ce n'est déjà pas si beau !)
dandainnes, tantainnes et pantainnks, n., racontars de peu de
valeur; conversations galantes, grivoiseries; contes à dormir
debout, fariboles, niaiseries, mensonges : Oht v'iai des belles dan-
dainnes! (Oh, voilà de beaux contes à dormir debout, de belles
sornettes!) Aiguge tes pâchés putiôt que de conter des dandainnes
aux femmes. Çai, ç'ast des dandainnes, c'est-à-dire aiguise tes
paisseaux plutôt que de conter fleurette aux femmes, que dédire
des gaudrioles. Ce que tu dis là ce sont des bêtises, des men-
songes. — • Voir narrées et nivelles. Ce mot ne- s'emploie guère
qu'au pluriel. — Dadées, contes sans suite, Gros.; dadées, plai-
santeries et rires bêtes, Thév.
dandan, n., terme du vocabulaire enfantin qui désigne l'église, le
clocher; onomatopée tirée sans doute du son des cloches : Euje
vons-t-ï ailler au dandan, mon gaichenot ? c'est-à-dire allons-nous
aller à la messe, à l'église, mon enfant? Écoute cul dandan (Écoute
les cloches). Vois-tu V dandan? (Vois-tu le clocher, l'église?) On
chante aux enfants, en guise de berceuse, cette espèce de refrain,
en imitant le carillon des cloches :
f Dinn, dinn, dan, don,
Les quate carillons,
Les filles de Chûtillon
ICont point de cotillon;
Les charpentiers d f Essayes
Lia zen feront de bois! »
dandine, n., punition corporelle, frottée, fessée, coups; désigne
surtout les corrections appliquées aux enfants : l'ai ui eunns
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132 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIE VAUX
bonne dandine et % sast zeû couché sans souper (Il a eu une bonne
correction, une bonne fessée, et il a été se coucher sans souper).
— Voir rodée, triquée, tournée, frôlée, dégelée, rincée, etc. —
De dan dan, dine dine, onomatopée qui exprime les coups redou-
blés, le son d'un corps qu'on frappe? Voir dandan.
dandoler (se), v., se bercer en marchant. Voir bamboler. Généra-
lement, on bambole quelquo chose, ses bras, ses jambes, etc., et
on se dandole ; mais les deux mots s'emploient l'un pour l'autre.
— De l'ital. dondolare? ou de dandan, le mouvement des cloches?
dame, adj., qui a le tournis: aingnié dane, beurbis dane; par ana-
logie, qui a des éblouissements, des étourdissements : Tout tonne
ailentour de moi, je sens dane d'aivoi viré (Tout tourne autour de
moi, je suis étourdi d'avoir tourné). Au figuré, brusque, étourdi;
écervelé, toqué, un peu fou. — Darne, étourdi, ébloui, Gros.;
darne ou derne, G. et R.; derne, dame, Thév.
darnoyer(oudarnoiller?), v., aller tout de travers, butter, comme
un aveugle ou un homme ivre : Taivôs si mau ai lai tête que je
ne voyôs pus clair; eu je darnoyôs (J'avais si mal à la tête que je
ne voyais plus clair : jo trébuchais). Tourner autour de quel-
qu'un, comme pour vouloir aider, mais en réalité embarrasser,
ennuyer, troubler : Quast-ce que tu darnoilles don? aisseute-te,
tu m'embêtes, c'est-à-dire qu'est-ce que tu tournailles donc ainsi
autour de moi? asseois-toi, etc. S'emploie aussi dans le sens de
rôder, flâner, beurluter, tacoter, etc. (voir ces derniers mots), et
pour épier, espionner. — Dognoier ou donoier, s'amuser, s'é-
battre, du xn e au xv° siècle. — Darneyer, être darne, Gros.;
derneyer, tourner sur soi-même, Thév.
darnoyot, n., celui qui darnoille ou darno-ye, dans tous les sens de
ce verbe. — Darneyot } Gros.
darré (ou darrer?), n., derrière: Tonne eul darré en devant
(Tourne le derrière en avant); prép., derrière : Tast toujouspa
darré (Il est toujours par derrière). Eude que coûté qu'an se tonne,
an ai toujous les fesses darré (De quel côté qu'on se tourne, on a
toujours les fesses derrière), c'est-à-dire on n'échappe pas aux
misères, aux ennuis de la vie, quelques précautions qu'on prenne.
— Darrié, Gros.; darrié, L. C; daret, P. T.; dâré, G. et R.
darré (ou darrer?), adj., dernier : Ce nast pas V darré venun qui
me ferai lai loi (Ce n'est pas le dernier venu, etc.) Eulle l ast
toujous lai darrére ai Vècole (Elle est toujours la dernière à l'é-
cole). — Darrire, P. T.
das, prép., dès : Dos le maitin (Dès le matin).
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVACX 133
daubée, n., volée de coups, raclée; grande averse de plaie. — Voir
dôlée.
davidb, n., outil de tonnelier, davier.
DÊBARLiFicoTER, v., défaire quelque chose qui est embarlificoié :
Dèbarlificote-don vô çai,je ny cneus gouttieu, c'est-à-dire défais,
dénoue, délie, démôle, etc. — Voir embarlificoter.
dèbeurber, v., débourber, ôter la bourbe (beurbe), la terre des
chaussures; décrotter, nettoyer quelque chose de très crotté :
Débeurbe tai cueulotte (Décrotte ta culotte). On dit aussi absolu-
ment se dèbeurber. — Voir dèpâter.
dêbeurbure, n., bourbe, terre, boue enlevée des chaussures, et
quelquefois des vêtements. — Voir dèpâture.
dèbeurnacler, v., défaire, démolir, démêler, découdre, dénouer,
détacher : Je ne peux pus pouter mai hotte; eulle l ast toute dé'
beurnaquiée (Je ne peux plus porter ma hotte; elle est toute dé-
molie), r y ùivot des bieaux reposois, mas quand ï ai piu an ai
tout dèbeurnaquié (Il y avait de beaux rcposoirs, mais quand il
a plu on a tout défait, tout démoli). Comment don que (aies aittai-
ché çai ? Je ne peux pas l'dèbeurnaquier, c'est-à-dire comment
donc que tu as attaché cela? Je ne peux pas le défaire, le dénouer,
le détacher. Les beaux parleurs disent dèbeurnacler sans mouil-
ler L — Voir beurnacler.
dèbigxoussr, v., ôter la chassie des yeux : Se dèbignouser les ceux.
— Voir bignoux.
dèbiller, v., déshabiller. Se dèbiller, se déshabiller.
dèbitiuer, v., déshabituer. Se dèbitiuer, se déshabituer.
dèbouder, v., poindre, apparaître, sortir de : I' dèboude du bois,
c'est-à-dire il débûche, il apparaît, il sort du bois. — De débor-
der, sortir du bord?
débouler, v., défaire, ébouler, démolir, déconstruire, renverser :
I' ai déboulé mes tas de fain; t déboule mai cabane (Il a éboulé
mes las de foin; il démolit, etc.)— On dit qu'un lièvre se dé*
boule, pour signifier qu'il se lève, c'est-à-dire qu'il cesse d'être
en boule. — Uéboulei\ démêler les cheveux, Gros.
dêboutbnbr, v., déboutonner. (Prononcez dèboutner).
dêbri.nguer (se), v., se déshabiller avec trop de laisser aller, se mettre
trop à l'aise quant aux vêtements, en lieu ou temps inopportun :
Qu'ast-ce que tu te dèbringues don comme çai, devant le monde? pa
ce frod-lai? etc., c'est-à-dire pourquoi te déshabilles-tu donc
ainsi devant le monde? par ce froid-là? etc. Se prend toujours
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134 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX
en mauvaise part. On dira d'une femme négligée dans sa mise,
dont les vêtements n'ont pas l'air de tenir ensemble, dépenaillée,
décolletée, etc., qu'elle est toute dèbringuée. — Se débringuer^ se
déshabiller, Thév. — Voir se décarcasser.
décaler, v., décoiffer, enlever la cale; se décaler, se décoiffer :
Dècale-te (découvre-toi).
décarcasser (se) t v., se débrailler. S'applique plus particulièrement
au débraillé du cou et de la poitrine. — Voir se dèbringuer.
dêcesser, v., cesser; ne s'emploie qu'avec la négation, et ne se
prend guère qu'en mauvaise part : ï ne décesse pas de faire des
sottises, c'est-à-dire il fait, il dit continuellement des sottises. —
Décesser, cesser, finir, Gros.
dèchaippe, adj., échappé à..., quitte de..., débarrassé, guéri,
sauvé, etc. : Le vlai dèchaippe enco ce cueup<i t mas ï ai vu le
leup, c'est-à-dire le voilà échappé à la maladie, guéri, sauvé en-
core cette fois, mais il a vu le loup, il a été bien malade. Été
dèchaippe (ou d'èchaippe?) t être quitte de..., guéri, sauvé, etc. :
Tast dèchaippe; t' ai raimené ein bon liméro, c'est-à-dire il est
quitte du sort; il a ramené un bon numéro. — Voir dètraipe.
décharpier, v., mettre en lambeaux, en pièces, en charpie : Eul
petit chien, ï ai dècharpié mai cale en jouant d'aiveu (Le petit
chien a mis en lambeaux, etc.) On dit aussi demicer. — • Demicer,
Gros.
dèclaquer (se) de rire, expression qui signifie rire à gorge déployée,
à se démancher les mâchoires : rosi en feûlie; ï crie etpeùs ï se
dèquiaque de rire aussitiôt, c'est-à-dire il est en folie, il est fou;
il pleure, et puis il rit àgorge déployée immédiatement après.
dégraisse a, v., décrasser;** dècraisser, se décrasser, se laver;
faire sa toilette : J'nairaipas le temps de me dècraisser pou ailler
ai lai messe.
décrotture, n., boue, terre enlevée aux chaussures, aux habits,
etc. — Voir dèbeurbure et dé pâture.
dée, n., doigtée, la quantité de chanvre que le doigt peut contenir
en teillant.
dèfàitieu, n., maladie des yeux, caractérisée par un picotement
douloureux, comme d'un gravier qui roule. Quelques femmes
prétendent la guérir avec une prière : Eulle m* ai guéri lai dèfài-
tieu.
\ dépwaiqbr, v., changer de fi nage; dépayser afin de changer les habi-
tudes : Je n'en seraîns venin ai bout de c't enfant4ai; t' faurai
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVACX 135
F mette ai l'école ailleurs (ai-ieur) pou l'dèfinaiger ein poicho (Nous
n'en pouvons venir à bout de cet enfant-là; il faudra le mettre à
l'école ailleurs pour le dépayser, le changer un peu). Mon chien
ne veut pas chaisser dans ce pays-ci; ïast tout dèfinaigé. — Voir
dèlrainger.
dèfleuter, v., défaire, arracher quelque chose qui est engaîné,
emmanché à la façon d'une flûte (fleûte), tel que glume, roseau,
etc. Ou dèfiente un tuyau d'un tuyau plus grand, un parapluie
de son fourreau, une canne à pêcher, un brin de paille, etc.
dèporci, v., éclaircir, rendre moins fort, moins dru; enlever, arra-
cher d'un champ, d'une planche de jardinage, les plantes en ex-
cédant; dèforci, part, pass., éclairci, etc. On dit aussi dèpaissi.
dêfrichîs, n., friche nouvellement en culture.
dêfrochurer, v., arracher la fressure (frochure), éventrer : Si je
ne m'étôs pas retenun, je l'airôs de frochure (Si je ne m'étais pas
retenu, je l'aurais éventré).
dégarni et dêgarnin, v., dégarnir, en particulier déharnacher;
part. pass. dégarni et dêgarnin, déharnaché.
dégelée, n., coups de bâton, de canne, ou autres, donnés en cor-
rection, raclée, frottée, volée, etc. : Si c'ètot d'-t-ai moi ce ca*
gnou-laiyfli foutrôs eunne «... dégelée {Si c'était de moi ce chien-
là, je lui donnerais une fameuse correction). — Voir dandine.
dèjaiveler, v., désassembler à la manière d'une javelle qui se
déforme. Se dit des objets composés de plusieurs pièces ajustées :
un tonneau désa juste et dont les pièces se disjoignent, un livre
débroché, etc., sont dêjaivelés* — Voir dèsoquier.
dellurbb, v., former, dégourdir, déniaiser, donner de l'entregent :
J'ons mins notegachenot en ville (vi-\\e) pou le dellurer (Nous avons
mis notre gamin en ville pour le dégourdir). Au part. pass. on
emploie plus souvent ailluré. Voir ce mot, qui a le même sens,
bien que dellurer semble signifier le contraire de aillurer... Sans
doute, il y a des sous-entendus, par exemple : dellurer des mau-
vaises manières (allures) pour en donner de bonnes....
dèloter (ou DÉLoïsR?), v., délier.
demicer, v., mettre en pièces, en menus morceaux, en tranches
minces, en lanières fines. S'emploie particulièrement en parlant
cuisine : Demicer de lai char, c'est-à-dire mettre la chair en
morceaux petits, minces, la diviser comme fibre à fibre. — Voir
dècharpier qui s'applique d'une manière plus générale. — Demi-
cer. Gros.
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136 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX
demmeke (ou dàimmerer?), il., espèce de cep de vigne, de raisin.
dèmoinger, v., démancher : Tu vas dèmoinger ton martieau, tai
pioche (Tu vas démancher, etc.)
demourer, v., habiter, demeurer : F demoure ai Troyes. T demoure
dans sai majon (Il demeure à Troyes, etc.)
DÈMDRAiLLER, v., démolir un mur. (Dèmurè-ier).
dèpachrler, v., dépaisseler, arracher les paisseaux pour les mettre
en tas avant l'hiver, le contraire de pâcheler. On dit aussi dépi-
quer les pochés.
dèpàissi, v., rendre moins épais; dèpaissi, part, pass., rendu moins
épais. — Voir dèforci.
dèpatbr, v., enlever les em pâtures : Dèpâter ses sou\iers, ou abso-
lument, se dèpâter. — Voir s'empâter et empâture. — On dit
aussi dèbeurber.
dèpatore, n., ce qui se détache de terre d'après les chaussures,
quand on a marché dans les terrains gras, humides : T ai dépâté
ses saibots ici; v'iai les dèpâtures (Il a décrotté, nettoyé ses sabots
ici; voilà, etc.) S'emploie le plus souvent au pluriel, ainsi que
ses synonymes dèbeurbure et dècrotture. — Voir empâture.
dépecer (se), v., se dépêcher outre mesure, se remuer beaucoup,
6e multiplier : N'te dèpeuce pas tant, vai, poxt nous recevoir ;j'ons
le temps de teut faire t — De se dépecer, se mettre en pièce*? ou
de se dépêcher ?
dèpibauter, v., dépouiller : Dèpieaute eul lapin (Dépouille le lapin).
— Dépiauter, dépouiller, Thév.
dèpiécrtê, part, pass., déchiré, en loques, en guenilles : Cueidotl*
dèpiécetée (culotte en guenilles). Cul dèpiéceté, enfant déguenillé,
mal vêtu. — Voir cul péché.
dèpiver, v. — Voir piver.
dèplagi, n., déplaisir. (Dèpiagi).
deraingé, part. pass. de dèrainger (déranger), dérangé, qui a la
diarrhée, le dévoiement : Euje seûs ein poicho deraingé, c'est-à-
dire j'ai un peu de diarrhée. Au moral, fou, toqué : Eune fais
pas aiUention; i'ast deraingé, ï perd lai tète (Ne fais pas atten-
tion, il est toqué, il perd la tête).
dèrainger, infin., déranger. Voir deraingé.
de rbvî de rêvai, ou deurvî deurvai (ailler), expression qui signi6e
aller de côté et d'autre, ne pas marcher droit, aller de travers; à
peu près la signification de beurlic beurloque, mais sans l'idée de
bruit; aller sans but fixe, au hasard, à l'étourdie.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX 1 37
dérocher, v., décrépir, le contraire de rocher : Eune déroché pas
lai muraille (Ne dégrade pas le mur). — Voir rocher.
dèboi (ou derroi?), ii., dommage, dégât, préjudice, dérangement,
trouble : Vos poules ïs ont fait (ïs pour eulles) bin du dèroi dans
notejadin (Vos poules ont fait bien du dégât dans notre jardin).
— Desroi, du xn e au xv* siècle.
dérouter, v., pour désenrouter, tirer d'embarras un charretier
embourbé, arrêté dans de mauvais chemins. (Voir enrouter). Au
figuré, tirer d'un embarras quelconque. — Ce mot a aussi la si-
gnification qu'il a en français. — Déhotter, débourber, Gros.
deshainché, adj., déhanché. (Dèzainché).
dèsoquier (ou dèsogler?), t., (les beaux parleurs disent désocler),
mener un objet formé de plusieurs pièces, un vase de bois, un
outil, un instrument, etc., de façon à en désajuster les parties, à
le déconsolider : Y dèzoqueulle sai brouvotte en courant pa les
cailloux. Y ai dèzoquié son meud en le roulant, c'est-à-dire il a
disjoint, déconsolidé sa brouette, son muid, etc. — Voir dèjaive-
1er. Dèsoquier dit moins; la ruine, la déformation n'est pas
aussi complète. — Ne pas confondre avec dèçoc\er y décercler :
Mon quartaut ïast tout dèçoquié (Mon quartaut est tout décerclé),
bien que les deux mots aient peut-être la mémo origine. — De
dessocler, détacher de sa base, de son socle? ou de décercler?
desous, adv., dessous, sous : N'ailonge pas tant tes gunnevelles
desous lai tab\e (N'allonge pas tant tes jambes sous, etc.).
deteindb et DÈTOiNDE, v., déteindre : Mai blaude eulle se ditoint
(Ma blouse se déteint). Part. pass. dèteindu et détoindu.
dètrainger, v., détranger; déshabituer, former à d'autres cou-
tumes; détruire, changer, déclimater : Ç'ast ein ouvrer qui vient
des pays chauds; i'ast tout dètraingé par ici, c'est-à-dire c'est un
ouvrier qui vient des pays chauds; il est tout changé, tout dépaysé,
tout dérouté par ici; il n'est accoutumé à rien. Euje vons mette
note gaichotte en pension pou lai dètrainger einpokho, c'est-à-dire
pour changer un peu ses manières, la former à d'autres... T y
aivot bin de lai chienqoue dans ce champ-lai; je seûs poutant par-
venun ai lai dètrainger, c'est-à-dire à la détruire, à la faire chan-
ger de lieu en quelque sorte... — Voir dèfinaiger. — Détranger,
détruire, Gros. ; détranger, détruire, Thév.
detraipe, n., débarras : Belle dètraipet (Bon débarras!); adj.,
débarrassé, tiré d'affaire : Le vlai detraipe, c'est-à-dire le voilà
débarrassé, tiré d'un mauvais pas, sauvé, échappé, indemne....
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138 PATOIS DE LA FORÊT DB CLAIRYAUX
Quand l'embarras, la situation est grave, surtout quand il s'agit
de maladie, on emploie plutôt dèchaippe (voir ce mot). — Détrape,
contraire à'entrape, Gros. — Voir dètraiper.
dètraiper, v., défaire la courroie, la corde qui entraipe un cheval.
(Voir entraiper). Au fig., tirer d'embarras, — Détraper, débar-
rasser, Gros.
détrempé, part, pass., détrempé, mouillé jusqu'aux os par la pluie:
Euje seûs revenun tout détrempé (Je suis revenu mouillé jus-
qu'aux os).
dètriqub, n., le rebut, ce qui reste quand on a dètriquéles meilleurs
objets d'une quantité. — "Voir dètriquer.
dètriquer, v., choisir, démêler parmi plusieurs animaux, objets, etc.
les meilleurs, trier : Tai aicheté vingt beurbis ai chogi dans lai
troupe\ euje les ai dètriquées ce maitin, c'est-à-dire je les ai triées,
démêlées ce matin. F ai des pommes peuries dans le tas; dètrique-
Us (Il y a des pommes pourries dans le tas; démêle-les). —
On dit aussi triquer. — Triquer, dètriquer ', choisir, démêler, G.
et R.; dètriquer, trier, démêler, Thév.
deuillot, adj., sensible, douloureux : Tai zeû ein panaris et j'ai
enco le dogt deuillot (J'ai eu un panaris et j'ai encore le doigt
sensible). Signifie aussi douillet. — Voir deurlot.
deurlot, adj., douillet; qui aime à être dorloté, câlin : Pou ein
méchant mau de tète, t' ne traivoille pus... ; tait si deurlot t (Pour
un petit mal de tête, il ne travaille plus... ; il est si douillet!) —
Voir deuillot, miquelot et mignadon* — De deurloterJ
deurloter, v., dorloter.
devant, prép., s'emploie pour avant : Je sens venun devant lu (Je
suis arrivé avant lui).
devante (ou de vanter?), n., devantier, tablier. On dit aussi tablier
(tabier).
devbnin, v., devenir. Fait au subj. que je devingne, et au part,
pass. devemn. S'emploie souvent pour venir : J'en deviens, pour
j'en viens. — Devenir, pour venir, Gros.
dévers (en), expression qui signifie en pente, en déclivité. — Tieux
français.
DÉVEUDiBR, v., dévider : Euje dèveudieu eunne ègevotte (Je dévide
un écheveau).
déveudiot, n., dévidoir. Grand dèveudiot se dit d'une personne
sèche, anguleuse, longue, qui fait beaucoup de gestes, de mou-
vements, en parlant ou en marchant.
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PATOIS DE LA FORÊT DB CLAIBTAUX 139
dbviller, v., défaire, dérouler ce qui est envillé. — Voir enviller.
dbtingnotte (ou devinniotte?), il., devinette, espèce d'énigme ou
de charade populaire. Excmp. : Quast-cequi tegreingne les dents
quand tu rentres chez vous ? — R. Çast note crin-mau. — Devi-
gnotte, devinette, Gros.
DiviROLEB, v., dérouler, défaire ce qui est envirolé (voir ce mot).
On dèvirole du filé d'ailentour d'eunne bobingne, une tige de hari-
cots d'aiprées lai raim-me, etc. Dans ce dernier cas on dit plutôt
dèviller.
dêvoirer, v., dévorer, déchirer; absolument, se dêvoirer, se déchi-
rer les mains, les vêtements, etc. : Euje me seûs dèvoiré pa les
èpingnes, c'est-à-dire je me suis déchiré les mains, le visage,
etc., dans les épines. Déchirer, user ses habits à force de se traî-
ner, de jouer, etc. : V me dèvoire eunne blaude tous les jeudis. A
aussi les autres significations du verbe français dévorer.
dia (tirer ai), expression qui signifie commencer de labourer un
champ en tournant autour, de manière S jeter la première raie
sur les voisins et à partager la pièce en deux; c'est le contraire
d'aidosser, faire ein aidos. Cette expression vient de ce qu'on tire
les chevaux à gauche, à dia. — Dans le sens opposé on àitpousser
ai hue, c'est-à-dire pousser le cheval à droite.
DUBï, n., diable. Diâbe minge (ou mainge% espèce de juron.
diadia, n., mot du dict. enfantin qui veut dire cheval, dada : Veux-
tu monter su Vdiadia, mon gaichenol f (Veux-tu monter sur le
cheval, le dada, mon enfant?)
dijollb et dicimille, (ou dix-mille?) adj. qu'on emploie avec gros
ou grand pour signifier énorme, immense, etc., pour former une
espèce de superlatif : Que gros dimiWe chien! (Quel énorme chien I)
Euje l'ai baillé ein gros dicimitte chou, eul pus gros dujadin (Je lui
ai donné un énorme chou, le plus gros du jardin). Marque quel-
quefois le mépris : Que gros dicimiWes saibots t
dindrlle, n., petite cloche; la plus petite cloche du clocher : Ce
n'ast pas lai grosse quieuche qu'an seûne pou les gamins, çast lai
dindelle (Ce n'est pas la grosse cloche qu'on sonne pour les en-
fants, c'est la toute petite). — De din dinl
DiKCNE, adj., digne.
\ diwgne, n., tige, brin de chanvre, particulièrement quand le chanvre
est arraché et roui : Euje n'en tillerôs pas V dingne de ton
chante t (Je n'en teillerais pas un brin de ton chanvre 1) — Voir
tUler. — Digne, Thév.
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140 PATOIS DE LA FOBÉT DE CLAIRVAUX
dîngner, v., dîner; en général manger : Je n'ai point dîaippétlit, je
ne dingne point (Je n'ai point d'appétit, je ne mange point).
dio d'ceus et guio d'oeus, expression qui correspond à chiche d'œufs,
espèce de défi. On crie dio d 'œus f en même temps qu'on tend
le dos à une personne qui tient ou qui porte des œufs, pour la
provoquer, pour la défier de les jeter.
dirib, n. fera., cancan, bavardage, faux rapport, dires, explications
oiseuses, etc. : Ç'ast des diries ai n'en pus fini (Ce sont des bavar-
dages, des explications à n'en plus finir). Çast ein mentoù;
d'aiveu ses diries % ferot baitte deux montaingnes.
dis don, expression qui signifie écoute voir, écoute donc, hein, et
qu'on adresse à une personne pour appeler son attention : Dis
don, tu t'en vas bin tardi c'est-à-dire tu t'en vas bien tard, hein?
dôdinb (faire ou faire lai), faire dodo, faire faire dodo, dodinetle,
endormir en chantant, en caressant, en berçant. — Voir dôdiner.
dôdinbr, v., faire faire dodo t endormir en chantant, en berçant sur
ses genoux, en caressant; par analogie, caresser, mignarder. —
Dodiner, caresser, mignarder, Gros.
dogt et dàgt, n., doigt. On amuse les petits enfants en leur dési-
gnant ainsi les doigts, à partir du pouce : Y lai lepopa, vlai lai
momman, v'iai le frérot, vlai lai sœurette, vlai le petit, gri gri
gri. (Voir gri gri).
doodbr, v., s'associer entre camarades, aller de paire en travaillant
un jour pour l'un, un jour pour l'autre : Glande et Coulas doguent
depeûs huitjous, c'est-à-dire depuis huit jours Claude et Nicolas
travaillent ensemble, un jour au chantier de l'un, un jour au
chantier de l'autre. On dit aussi avec ironie : Ailler dogue pou
lâche, c'est-à-dire lourdaud, pour paresseux, fainéants ensemble.
doguin, n. et adj., gros, gras, court, indolent. Se dit des gens et
des botes : Çast ein gros doguin (C'est un gros lourdaud). On dit
aussi dogue.
dôlée, n., volée de coups sur le dos, frottée, raclée, dégelée... Par
analogie, grande averse essuyée : ï ai reçu eunne bonne dôlée de
pieue. On dit de môme eunne dôlée de sottises, une bordée d'in-
jures. — Taulée, troupe, kyrielle, Gros.? — De doler? ou de dos?
— Voir daubée.
dondaixne, n., michette, petit pain qu'on tire du four pour les
enfants, avant le reste de la cuite, soit en pâte ordinaire, soit en
pâte contenant un peu de beurre ou de saindoux et de sel {dour-
don) : J'ai maingé de lai dondainne breùlante. — Voir dourdon
et michot.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX 141
dormin, y., infin et part., dormir et dormi.
dosses (oq doces?), n., on nomme ainsi les bourriers, les grains de
blé encore enveloppés dans les balles, ou menues-pailles, et qui
remontent à la surface du van quand on vanne : Y ne faut pas
bailler les doces ai les poules; an les rbaitttai (Il ne faut pas don-
ner les bourriers aux poules; on les rebattra). Ce sont ces grains
de blé qui forment en majeure partie les houtons (voir ce mot).
— De dosse, planche de rebut, par analogie? — Dosse, gousse
d'ail, et grain de froment dans sa balle, Gros.
doublée, n., correction, châtiments, volée de coups. — Voir dége-
lée, raclée, tripotée, etc.
dourdon, n., pain mal levé, avec mépris; mauvais gâteau lourd et
mal cuit... En particulier, espèce de gâteau rustique fait de fa-
rine et de saindoux. — Voir dondainne.
dousse (ou douce?), n., douche : J'ai reçu V bonne douce de pieue,
c'est-à-dire une bonne douche de pluie. Voir aiccueulée, dôlée,
etc. Dousse d'ail, gousse d'ail. — Dosse d'ail, Gros.
doutance et doutangk (aivoir), avoir doute, se douter un peu,
craindre : J'en aivôs doutance f c'est-à-dire j'en avais le pressen-
timent, je m'en doutais un peu, je le redoutais. — De dotance,
du xn e au xv e siècle?
doyau (ou dogliô?), n., dé pour coudre.
doyot, n., doiglier. — Voir peuçot. — Doyot, doigtier, Gros.
dragsr, t., sourdre, jaillir; se dit particulièrement du sang qui
sort d'une blessure, d'une piqûre : Oh mas, i'ast bin copéf Eul
sang drageol (Oh ! mais, il est coupé beaucoup ! Le sang jaillis-
sait). — Voir gigler.
draipelot, n., lange d'enfant, couche, drapelet.
drbusse-debout, n., espèce de dressoir ou d'étagère sans fond, où
les assiettes, rangées une à une sur les rayons, sont dressées
debout et garnissent le mur.
drbusser, v., dresser; dreusser lai soupe, verser le bouillon sur le
pain et servir sur la table. On dit de môme dreusser les choux,
etc., les tirer du pot et les mettre sur un plat.
drille, n., drille, guenille, lambeau, chiffon de toile : Gn'ai pas
eunne drille de cueulotte ai mette, c'est-à-dire il n'a pas un lam-
beau, un reste, un soupçon de culotte à mettre. Drille de couloi
ou couloû, le morceau de toile qui forme le fond du couloir, et
à travers lequel dire le lait. Drilles de coq, les testicules du coq
et une espèce de raisin.-*- Drilles, les testicules du coq, Gros,
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142 PATOIS DB LA FORÊT DE CLAIRVAUX
drimer, v., trimer, marcher bon train; courir d'an endroit à un
autre; travailler fort, (voir bûcher). Faire drimer quelqu'un, le
faire aller, ne pas lui laisser de repos, etc. — Voir droguer.
droguer, v., attendre en perdant son temps, se morfondre; aller en
courses vaines; faire un travail inutile, sans nécessité, etc. Faire
droguer quelqu'un, le faire attendre, lui faire perdre son temps
à des choses futiles, lui faire des promesses qui ne se réalisent
pas, etc. — Voir drimer.
drot et drbt, adj., droit : Vai tout drot (Va tout droit). Au drot,
vis-à-vis : Au drot de chez nous, c'est-à-dire vis-à-vis chez nous.
De même les dérivés : Mets tai veste ai l'endrot ou ai Vaidrot
(Mets ta veste à l'endroit). I'ast bin aidrot (Il est bien adroit).
D rot-vent, droit vent, le vent de l'ouest et du sud-ouest :
Soulaire (le vent du midi)
Met lai pieue en Vair,
Et drot-vent
Lai répand.
— Dret-vent, vent d'ouest, Gros. ; drai, droit, L. C; dret, P. T.
dbotiurb et drbture, n., droiture, justice, honorabilité.
dugin, n., petit torchon de paille qu'on met en guise de robinet dans
le trou percé au fond du cuveau à lessive, et à travers lequel le
lochu (voir ce mot) coule goutte à goutte : Mon dugin gn'ast pas
aissez gros : % ne remplit pas bin le trou } et mai buie vai trop
vîtïea (Mon dugin n'est pas assez gros; il ne remplit pas bien le
trou, et ma lessive coule trop vite). — De duzil, douzil, au
moyen-âge, cheville de tonneau, robinet, canal, fontaine, comme
fragin de fraisil... « Puis à bouillons fumeux le faisaient doisil-
1er » (ou doosiller), Remy Belleau, les Vendangeurs. — Du latin
ducere f
d'u vient? expression interrogative, pourquoi : fia vient que tu
fiées pas venun? (Pourquoi n'es -tu pas venu?) Et la réponse se
fait souvent en répétant la même expression : D'il vient çai (A
cause de cela), quand on n'a pas d'autre réponse à donner ou
qu'on n'en veut pas donner une. On répond aussi dans le même
cas : Ai cause de çai (A cause de cela). — De d'où vient.
*bait, n., ébat, plaisir, divertissement : r prend us èbaits ai lai
sourdingne (Il prend ses ébats à la sourdine, en cachette).
toÉCHEB. v., donner la becquée, nourrir un jeune oiseau.
&BEURLU, adj. et part, pass., ébloui par le soleil, par une lumière
vive, aveuglé : J'aivôs Vsero dans les aux, je ne voyôs pus
quiair, j'itos èbeurlu (J'avais le soleil dans les yeux, je ne voyais
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l
PATOIS DK LA FORÊT DE CLÀIHVÀUI 143
plus clair, j'étais ébloui, aveuglé). — Ebeurlui, ébloui, aveuglé,
Thév.
èbkurlurb, v., éblouir, aveugler en projetant un reflet de lumière
sur les yeux. — Voir èbeurlu.
èblonder, v., couper les branches inutiles d'un arbre ou d'un
arbrisseau, élaguer, émonder; couper l'extrémité, la cime des
rami lions d'un fagot pour l'ajuster; tondre. On èbionde un balai,
une haie vive ou morte, un arbre, une perche, une baguette,
etc. — Eblonder, ou élaver, élaguer un arbre, Gros. — De bion,
tige, scion dans quelques pays?
ébouler (s'), v., accoucher : Eulle vai bintôt s'ébouler; eulle l ast
éboulée (Elle va bientôt accoucher; elle est accouchée). — Voir
débouler.
èbrannbr et s'èbranxkr, v., se branler, se balancer à la balançoire,
à la bascule ou branloire, à l'escarpolette, etc. : Èbranne-me,
c'est-à-dire pousse la balançoire. Une des manières les plus
simples de s'èbranner deux ensemble consiste à placer une planche
en travers sur un limon de charrette, sur une lisse de clôture,
etc., et à s'asseoir chacun d'un bout en imprimant un mouvement
contraire : quand l'un monte l'autre descend. On se sert aussi
d'une voiture dont on abaisse et relève alternativement les limons;
cela s'appelle en particulier sauter aux limons.
(La suite au volume suivant).
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MÉMOIRES
r w
SOCIETE ACADEMIQUE
D'AGRICULTURE
DES SCIENCES, ARTS ET BELLES -LETTRES
DU DÉPARTEMENT DE L'AUBE
TOME L DE LA COLLECTION
TOME X XIV. — TROISIÈME SÉRIE
ANNÉE 1886
TROYES
LIBRAIRIE LÉOPOLD LACROIX
83, ftUB KOTRC-DAMB
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GKLOSSA.IRE 1
DU
PATOIS DI LA FORÊT DE CLAIRVACX
fa m
M. ALPHONSE BAUDOUIN
MIMBftE ASSOCIÉ DE LA SOCIÉTÉ ACADÉMIQUE DC l'àUBI
êbrànnot, n., tout ce qni sert pour s'èbranner, balançoire, bran-
loire, escarpolette : Viens don, je vous faire ein èbrannut, c'est-
à-dire nous allons construire une balançoire, une bascule, etc.
tBHiQUER, v., écorner, enlever un morceau, une brique (voir ce
mot), d'un objet fragile quelconque, outil, pierre, etc., en parti-
culier d'un vase de terre, d'une assiette, etc. : fai èbriqué mai
terringne en lai laivant, c'est-à-dire j'ai écorné, cassé ma ter-
rine, etc. Eune tape pas su les piarres d'aiveu ton piochot, tu fa-
briqueras (Ne frappe pas sur les pierres avec ton piochot, lu y
ferais des dents, tu l'ébrècherais). Quand il s'agit d'un tranchant,
on dit plutôt èbroquer. — Voir èbroquer et escat % moucher.
àBROQué, part. pass. qui se prend nominat., brèche-dents : Tast
èbroqué, c'est-à-dire il est brèche-dents, il lui manque des dents.
Oh, le peut èbroqué t (Oh, le vilain brèche-dents I).
èbroquer, v., ébrécher : Prends gade d' èbroquer mon rasoi (Prends
garde d'ébrécher, de faire des dents à mon rasoir). — Voir èbrU
quer.
écaille, n., copeau. — Voir copeloL
1 Voir le volume précédent des Mémoires, pages 5-143.
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8 PATOIS DE LA FORÊT DE CLA1RVAUX
ècalbr, t., écosser, décortiquer : Ècaler des pois (Ecosser des hari-
cots). — Vieux français. Ne pas confondre avec èchaller.
ècalot, n., cosse de pois, de haricots, coque de noix, de noisettes,
d'oeuf, etc. : Eune breùle pas les ècalots d'œus : çai pue trop (Ne
brûle pas les coquilles d'oeufs : ça pue trop). — Ecalat, écalot,
noix dépouillée de son brou, Thév. — Dans quelques villages,
les coques d'œufs et de noix s'appellent ècraches : Les cacas ïs
srmt bons et' an-née : an voit les cueuches au traivers des ècraches
(Les noix sont bonnes celte année : on voit les cuisses à travers
les coques), c'est-à-dire les coquilles sont minces, les noix ne sont
pas angleuses. — Ecrache. coquille d'oeuf, Gros. ; ècrage, co-
quille d'oeuf, de noix, Thév.
kcciômô, n., ecce homo; s'applique à une personne qui reste immo-
bile quand elle devrait travailler, s'occuper, remuer; homme
embarrassé de lui-même, stupide, idiot.
èchadre, n., écharde, éclat de bois pointu qui pénètre comme une
épine dans la chair : Airraiche^ne vor et' èchâdre-lai (Arrache-
moi voir cette écharde-là). — Du vieux français escharde.
êchaippe (été d'). Voir dèchaippe.
èchaller, t., ôter le brou des noix vertes : Je vas aibaitte nos cacâs
et tu les èclialleraies, c'est-à-dire je vais abattre nos noix et tu
en ôteras le brou. Voir ècaler. — Déchallé, part, pass., amaigri,
Thév.
èchallures, n., le brou des noix, quand il est séparé du fruit :
Jitt'ieu les èchallures su le fumer (Jette les débris de brou sur le
fumier).
èchellotte, n. dimin., petite échelle; en particulier espèce d'échelle
plus large à la base qu'au sommet, qui forme le devant d'une
charrette à moisson, et à laquelle s'accroche la perche : Je nons
pas b'sun £ èchellotte : gnai pas dix jarbes en teutl c'est-à-dire
nous n'avons pas besoin de cet accessoire, car nous n'aurons pas
une grosse voiture.... — Voir parche.
êchevotte et êgevotte, n., écheveau : Tai fi\é (fi-ie) vingt èchevottes
euç't hiver (J'ai ûlé vingt écheveaux cet hiver).
Tic, tic t tac, prends,
Les pus belles ègevottes ç'ust pou laisser and.
(Tic, tic, tac, prends, les plus beaux écheveaux, etc.)
icHOGNE, n., ennui, tourment, tracas, embarras. — Voir attaine et
aria, plus employés. — De essoine?
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tATOIS DE LA FORÊT DE CLAlfcVAGX
ècholle, n., sonnaille, clairan, clarine, espèce de sonnette on de
grelot qu'on attache au cou des animaux pâturant dans la forêt,
afin qu'ils ne puissent s'égarer : Ten aies b'sun comme les leups
ïs ont b'sun d'écholle y c'est-à-dire tu n'as pas plus besoin de cela
que les loups n'ont besoin de sonnaille pour se retrouver dans les
bois. — Du vieux français esquelle, esquille, sonnette?
èclabi, v. inf. et part. pass. — Voir aiquiari*.
èclicher, v., fendre en lattes minces; enlever, sur une branche de
noisetier, des lamelles pour faire un panier, une hotte : F ècliche
des parchottes pou li faire eunri hotte, c'est-à-dire il fendille des
perches pour lui faire une hotte. — Voir aussi lever. — De esclis-
ser, esclicier et esclicher, diviser, séparer, briser, du xn e au xvi 6
siècle?
ècloure, v. inf., éclore : Ce n'ast pas de quinze jous que les ougelots
gn'èclougent (gn'èquiougent), c'est-à-dire il s'écoulera au moins
quinze jours avant que les oiseaux éclosent.
èclous, part, pass., éclos : V y ai trois ougelots d'èquious dans le
nind (Il y a trois oiseaux d' éclos dans le nid). — Voir ècloure.
ècceur (bailler), dégoûter, révolter l'estomac, provoquer la nausée :
la vue d'un objet dégoûtant, d'un habit crasseux, etc., baille
ècœur. — Ecamr, dégoût, répugnance, Gros. — Ne s'emploie
guère au figuré.
écœurer, v., provoquer la nausée, dégoûter, au propre et au figu-
ré, bailler ècœur.
ÈCŒURjou, adj. et n., petit, chétif, etc. (voir aiquais, aitrâ, chagnâ,
etc.); ajoute presque toujours à la signification générale de ces
1 Nous croyons devoir revenir une dernière fois sur cette / mouillée
et compléter ce que nous avons dît pages 21, 25, 51, 59, 66, 115.
Nous avons écrit aiquiari à son ordre pour nous conformer à la
prononciation ordinaire, mais nous pensons qu'on doit orthographier
ainsi : aicXari ou ècXari. En effet, la plupart des syllabes commençant
par bl, cl. fl, gl, etc., ont deux prononciations, une commune et une
à l'usage de ceux qui font de la mêlée. Là où le vulgaire introduit
généralement le son de l't, bianc, biouque, biufe f quiou, aiqulari,
saquiot, raquiotté, fieûte, fiée, fiunge, guieunne, guinndon^ giguier,
etc , les raffinés rétablissent 17, et disent : blanc, biouque, blafe,
clou, saclot, raclotte, èclari, flûte, fiée, flonge, gleunne, glandon,
gigler, etc.; ce qui nous fait croire que ce son i vient d'une l mouillée
aussi bien dans les mots d'origine douteuse, èclari, gigler, etc., que
dans les autres.
t. l 2
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10 PATOIS DB U FORÊT DE CLAIRVAUl
différentes épithètes l'idée de dégoût, et se prend d'ordinaire eu
mauvaise part, tandis que les autres ne sont soavent qu'iro-
niques, et marquent plutôt la pitié que la colère ou le mépris.
Mais il est impossible de préciser la nuance exacte de tous ces mots
qui se confondent souvent dans l'usage. Ècœurjou s'emploie aussi
quelquefois, dans un sens opposé, pour nâchon, qui se dégoûte
facilement. — Voir nâchoux et chafrongnoux.
êcoinsdn, n., gousset; s'emploie pour morceau, corne; petit mor-
ceau en gousset, en coin, en triangle, d'un vêtement, d'une pièce
de menuiserie, etc. : On remet ein ècoinson à une épaule de che-
mise, à une pièce qui n'est pas assez large, etc. ; on enlève ein
ècoinson à un vêtement qu'on déchire, à un vase qu'on écorne,
etc.
ècoler, v., instruire, donner de l'éducation : Ç'ai coûte cher, ein
enfant I i' faut l'neurri, Ventretenin, le faire ècoler, etc., c'est-à-
dire cela coûte cher un enfant! il faut le nourrir, l'entretenir (le
vêtir), le faire instruire, l'envoyer à l'école, etc. — Êcoler, acco-
ler, Gros.
ècornifler, v., écorner. {Ècornifler). — Voir èbriquer, èbroquer,
escarmoucher, etc.
ècorniflure, n., entaille, éclat, écornure; s'applique au morceau
enlevé et au vide qui reste. V ècorniflure est plus petite que l'i-
coinçon ou le modon. — Voir èbriquer, èbroquer, escarmoucher, etc.
ècôter, v., arracher une branche à un arbre en la tirant de haut
en bas, de manière à faire une longue déchirure. — Voir ècueu-
cher.
ècouer (ou aiccouer?), v., attacher à la queue, attacher un cheval
à la queue d'un autre pour qu'il suive, et pour n'avoir ainsi que
le premier à conduire : Ècoue don tes chevaux, t'airaies pus âgé
de les mener, c'est-à-dire attache tes chevaux à la queue les uns
des autres, etc. — Escoer, couper la queue, xn% xm% xiv 6
siècles? accouer, attacher l'un à l'autre, xm e et xiv e siècles?
ècourcher, v., écorcher, dépouiller.
âcourchesse, n., écorchure.
êcourchon, n. dimin., petite écorchure, petite excoriation de la peau.
êcourchoue, n., équarrisseur; écorcheur, au propre et au Gguré.
écouter, v., s'emploie pour obéir : ï ne m écoute point toui-ai-
fait, et* enfant-lai, c'est-à-dire il ne m'obéit point du tout, cet
enfant-là.
écouter, v., accoter. — Voir aicouter.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRTAUX il
êcoutot, n., celui qui écoule aux portés; une espèce de coléoplère
de la grosseur d'un hanneton, qu'on rencontre souvent dans les
allées des jardins, et qui s'arrête à chaque instant comme pour
écouter...., dans quelques villages, couturier.
ècrache, n. Voir ècalot. — Vieux franc, écruche.
écrivain, n., insecte parasite do la vigne qui laisse sur le grain de
raisin des traces ressemblant à de l'écriture. — Ecrivain, eumolpe
de la vigne, G. et R.
ècrôlée et cnôLÉE, n., grande averse, trombe d'eau : T y en ai
cheu eunn ècrôlée ai teut casser, c'est-à-dire il en est tombé une
averse, etc. ; quantité de fruits qui tombent d'un arbre quand on
le secoue : ï ai fait cheur eunn* ècrôlée de bloches (Il a fait tom-
ber une grande quantité de prunes, une averse). On dit aussi
aiccueulée. — De s'écrouler?
ècrôler (s), v., tomber, en parlafft do la pluie : Que nuée! enlle
vai s' ècrôler par ici (Quelle nuée! elle va tomber, s'écraser par
ici). S'ècrôler, s'écrouler, tomber en général : An dirot quel* temps
vai s'ècrôler, cheur... Lai majon s'ast ècrôlée (On dirait que le
temps, le ciel va tomber... La maison s'est écroulée). — Voir
crôler.
ècrôlis, n., amas de choses éboulées, éboulis, ruines; carrière, ter-
rain, etc., miné, écroulé.
ÈcnocTENKR (ou AiCRouTBNER?). Voir aitailener, môme sens.
ècubllottb, ÊTiELLOTTE et ÉTiuELLOTTE, n. dimin., petite écuelle,
petite tasse, petit creuset.
ècueucher, v., écuisser, arracher une branche d'un arbre, un ra-
millon d'une branche, une fleur de sa tige, etc., en les écartant
violemment, en les tirant de haut en bas, de manière à faire une
longue déchirure. Ou dit aussi ècôter. — Ecueàcher, écuisser,
Gros. — De cueuche, cuisse.
ècoiioure, n., écumoirc.
êctjreu, n., écureuil. Botte iècureu, nid d'écureuil.
èdane, n., taloche, coup violent, principalement à la tête; coup
reçu par mégarde plutôt qu'autrement : En m'eurlevant je me
seûi baillé V • bonne èdane dans le mantieau de lai chemingnée
(En me relevant je me suis donné une bonne taloche dans le
manteau de la cheminée). — Edarne ou éderne, coup de poing»
Gros. ; édarne, éderne, coup de poing, Thév.
f Beillé n' bonne pour eunne bonne.
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12 PATOIS DE LA FORÊT DE CUIR VAUX
êdàni, y. infinit, et part, pass., donner une èdane, rendre dane
d'une taloche, d'un coup; étourdir, assommer; étourdi, assommé :
Èdanis-le don d'ein coup de poing. Tu ne pouyôs pas Vèdani, Vè-
tourdi ! V mai aittraipée d'aiveu son bâton, ï m'ai èdanie, aillez t
fat cheu et je me seus èdani (Assomme-le donc d'un coup de
poing. Tu ne pouvais pas l'assommer, l'étourdir? Il m'a attrapée
avec son bâton, il m'a étourdie, allez! Je suis tombé et je me suis
assommé). — Voir dane.
ègland (ou aigland?), n., gland. (Èguian). — De lai glande
èglioe, n., église. (Èg-\ige). — Eglige, P. T.; églije, ch. de n.
ègouer (**), v., s'engouer, s'étouffer en mangeant trop vite ou en
mangeant sans boire; on est ègoué, on s'ègoue quand la bouchée
semble s'arrêter dans la gorge, ou descendre à grand peine. Ne
pas confondre avec s'ètraingler (s'étrangler), avaler de travers,
avaler par la trachée. — Vieux français agoué, dégoûté.
ègoutter et êgouttier (lâcher), express, qui signifie laisser finir,
passer, achever complètement; attendre même un peu après le
dernier coup sonné, par exemple, la dernière goutte tombée :
Lâche du moins ègoutter meidli, devant que de goûter, c'est-à-dire
attends du moins que les derniers coups de midi soient sonnés
avant de goûter.
êgouttîs, n. fém., égouttures, les dernières gouttes qui tombent de
quelque chose qu'on presse, qu'on fait ègoutter; endroit maréca-
geux d'un champ où l'eau s'égoutte. — Voir rnouillére.
ègoutton, n., les dernières gouttes de liquide d'un vase, et en par-
ticulier le vin resté au fond d'une cruche, d'un verrre, etc. :
Gnai pus quein ègoutton dans lai cruche. Bois don ct'èrjout ton-lai
pou qui ne sot pas pèdu (Il n'y a plus que quelques gouttes dans
la cruche. Bois donc ce reste là, afin qu'il ne soit pas perdu).
Ne pas confondre avec êgouttîs.
ègrumer et ègrummer, v., égrener des raisins, détacher les gmmes
ou grains de la rafle.
ein, art., un. Nous avons dit ailleurs pourquoi nous adoptions cette
orthographe. L'adjectif numéral se prononce bien un, et il n'y a
que l'article qui sonne in. — Eing, in, oinl P. T.
eincher et einger, v., communiquer, produire, créer, contaminer.
On dit qu'une maladie s'einche, c'est-à-dire se communique, est
contagieuse; que le fumier einche de mauvaises herbes dans un
champ, etc. — Enger, communiquer. Gros. ; enger, donner de
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX 13
l'engeance, Thév. — Voir congri. — De aenger, enger, multi-
plier, croître? ou de enge, race? vieux français.
bin peu prêks, loc. adv., pour ai peu pries, à peu près.
elgi (ou aillegi?), t., iof. et part, pass., alléger, allégé : Ote don
quéques piarres de dessus ton caimmion, pou l'elgi. J'ai rongné
l'moinge de mai pioche, çai l'ai ein poicho elgie (Ote donc quelques
pierres de dessus ton camion, pour l'alléger. J'ai rogné le manche
de ma pioche, ça l'a rendue un peu moins lourde). — Elgir,
alléger, Gros.
éloquence et loquencb, n. Voir loquence.
EMBARBouiLLÉ, adj. et part, pass., barbouillé, sale, souillé; enfant
qui a la figure malpropre : Vai te laiver, peut embarbouillé t
c'est-à-dire va te laver, vilain salel
embarbouiller, v., barbouiller, salir. Embarbouiller une affaire,
l'embrouiller.
embaruficoter, v., emmêler, embrouiller. Se dit particulièrement
de cordes, de ficelles, de fils : Je ne peux pas défaire euce paquet-
lai : comment que çast don embarlificolé? (Je ne peux pas défaire
ce paquet-là : comment est-ce donc attaché, noué, emmêlé, etc.?)
— Emberlificoter, même sens, Thév. — Voir charbouiller.
embarras {cen'ast pas l\ ou ce nast pas lai /*), expression qui veut
dire: après tout, peut-être, vous pourriez bien avoir raison, toute
réflexion faite, etc. : Sifaillains faucher aufd'heu? — F vaurot
peut-éte meux ailler aux vingnesf... — Ce n'ast pas l'embarras,
çai presse bin éteut, les vingnes, c'est-à-dire si nous allions faucher
aujourd'hui? — Il vaudrait peut-être mieux aller aux vignes?
— Je crois que vous avez raison, les vignes pressent beaucoup
aussi.
embarrasser une fille, la rendre enceinte.
bmbeurber, v., embourber; s'embeurber, se crotter, se fourrer dans
la bourbe; amasser des bottes à ses chaussures. — Voir s'empâ-
ter. Embeurber se dit plutôt d'une boue liquide.
embburbure, n., boue amassée au pantalon ou aux chaussures.
Voir embeurber et empâture.
emblave, n , emblavure : l'y ai des belles emblaves dans ces pays-ci
c't'année, c'est-à-dire les champs sont bien emblavés, les récoltes
sont belles, promettent.
embouchure, n., la partie de la circonférence d'une miche de pain
qui a touché une autre miche dans le four, baisure.
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14 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX
EMBROuiLLis et BRouTLLis, il., chose embrouillée, embrouillement,
brouillamini. — Vieux franc, broillis.
èmier, v., mettre en miettes, émietter, écraser : Èmier du pain
dans du lait, c'est-à-dire émietter du pain, etc. — Voir èmioler.
— De esmier, vieux français.
èmioler et èmiotter, v. dimin., émietter; en particulier, émietter
du pain, très fin, dans du vin ou dans du lait, pour faire ce
qu'on appelle une miolée. — Èmier, mettre en miettes; èmiotter,
mettre en miettes plus fines; et èmioler, en miettes plus fines
encore
BMMARGOULOTTBR (OU ENMARGOCLOTTER?) et «'eMMARGOULOTTER, V.,
entortiller, s'entortiller le cou, les oreilles, le menton, avec un
mouchoir, un foulard, un cache-nez en frileuse, en fanchon,
s'emmitoufler la loto : Eulle l ast toujous emmargoulottée comme
t'ï faijol cent pieds de gelée (Elle est toujours emmaillotée, emmi-
touflée, etc.). — Voir margouloite.
emmarrer (*'), se mettre en train, se mettre à une besogne, la com-
mencer : Nous vlai emmarrés, çai vai bin ailler, c'est-à-dire nous
voici en chemin, en train, en bonne voie, le plus difficile est fait,
etc. Je gaingnerai mon procès, Vaiffaire s'emmarre bin (Je gagne-
rai mon procès, l'affaire débute, commence, se présente bien).
emmoinger, v., emmancher. — Voir dèmoinger et moinge.
êmoochotte, n., chasse-mouche, tout ce qui sert à émnucher; pro-
prement, une queue de cheval emmanchée qui sert à émoucher
les chevaux pendant qu'on les ferre. — Voir barbotiot.
èmoutteler, v., émotter, briser les moites. — Voir moût te.
emparcher, v., cartayer, faire suivre aux roues d'une charrette,
dans les mauvais chemins, une ligne parallèle à l'ornière, pour
donner moins de tirage aux chevaux : L'ornière eulle l ast trop
creuse, emparche, c'est-à-dire l'ornière est trop creuse, mets à
côté, cartaie.
\ empâter («'), v., s'embourber dans des terres grasses qui tiennent
aux chaussures en formant des espèces de patins, des bottes (em-
pâtures) : Quand an ast empâté, eh bin, an se dèpâte, si an ne veut
pas se tode les paittes (Quand on est embourbé, eh bien, on se
débourbe, si on ne veut pas se tordre les pieds). — Voir embeur*
ber.
empature, n., môme signification que dèpâture, avec cette différence
que Y empature tient encore aux chaussures, tandis que la dèpâ-
ture est ôtée, séparée.
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PATOIS DE LA FORÊT DB CLAIR VAUX 15
empiété (cul), n. corn p., cul de jatte, probablement parce que ces
sortes d'estropiés se traînent sur une espèce d'escabeau qui forme
pied.
bmpiger et bmpiéoer, v. Voir entraiper, même signification. — De
piège? ou du vieux français empiger, enduire de poix?
emplâtre, n., emplâtre, emplâtre. (Empiâtre).
empli, v., inf. et part., emplir, empli; de même les dérivés. (Em-
pAî). Au subj. : que \empliche, etc. Dans ces verbes, on prononce
quelquefois l'r final de l'infinitif, ce qui est une exception.
empoîcher, v., empêcher. De même dèpoîcher, dépêcher.
KMPouiLLER (s'), taller, se garnir; se dit des emblavures en général :
Ein blé (bié) bin empouillé, c'est-à-dire bien dru, qui couvre son
terrain). Mon treufegnèlot pas aissez fort, mas ï cmence ai s'em-
pouiller (Mon trèfle n'était pas assez épais, assez dru, mais il
commence à taller, à garnir son terrain). On dit de même que le
champ s empouillé, qu'il est bien empouillé. — Empouillé, pré
bien garni d'herbe, Gros. — Vieux français empoillier, empouil-
lé, même sens.
emputer, v., empuantir, répandre une mauvaise odeur; s'emputer,
se corrompre, se gâter. On dit plutôt encarner et s'encarner.
bnaigri (s'), v., s'aigrir : Note vin % s'asl en-aigri (Notre vin s'est
aigri). — De enegrir, même sens, vieux français.
encarner et s'encarner, v., empuantir, répandre une mauvaise
odeur; se corrompre, s'empuantir. Se dit plus particulièrement
de la viande : V lai de lai char encarnée qui encarne lai majon
(Voilà de la viande empuantie qui empeste la maison). Cependant
on dit aussi : Ole don ces soti\iers4ai, ïs encarnent, c'est-à-dire
ils puent, ils empestent.
bncharbouillbr (s), v. Voir charbouilUr (se), même sens.
bncharcouer (s 9 ), v., se dit d'un chien et d'une chienne qui se
lient : Les vlai qui s'encharcouent ; ¥ s sont encharcoués.
bnchargrr (*') et s'ençarger, v., se charger : Euje m'encharge de
lu (Je me charge de lui). J' m'en ençarge de li /'.... sai pile,
c'est-à-dire je m'en charge de, etc.
bnchateler, v., grouper par rangs les objets, les uns sur les autres,
comme un château de cartes; remplir par dessus les bords en
empilant : l'ai comblé lai mesure de pommes de terre, i' les ai
enchâtelées, c'est-à-dire il a comblé la mesure de pommes de
terre, il les a empilées par dessus bords. On dit aussi enfraîtier.
bnghouer, v., chauler : J'ai enchoué mon bié ce maitin d'aiveu du
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16 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRTAUX
vitriol. J'ai prins du vitriol euç't'an- née pou enchouer, c'est-à-
dire j'ai chaulé mon blé ce malin, etc.
inclime et enclibumme, n., enclume. (Enc-\ime).
inclos, n., enclos. (EnquiS).
engo, adv., encore.
bncrotter, v., synonyme dépréciatif de enterrer. On encrotte un
chien.
endêvé (éle endêvé pou....), expression qui signifie être enclin à, fort
pour, etc. : Tast endêvé pou ailler pieds dèchaus, tête nûn, c'est-
à-dire enragé pour aller pieds nus, tête nue. Absolument, été
endêvé, être vif, remuant, éveillé, endiablé : T chante, % boit, ï
fait rire, i'ast endêvé à ï ailleurs l
endormin, v., inf. et part, pass., endormir, endormi; s'endormin,
s'endormir. Aivoi lai jambe endormin, avoir la jambe engourdie
(voir aivoi les frommins). De Veau endormin, de l'eau entre
froide et tiède, presque tiède.
endormoub, n., enjôleur, endormeur, flatteur, habile à persuader,
finaud qui s'y prend adroitement pour arriver à ses fins. — Voir
enjôloue.
enfilée, n., enfilade, rangée, longue suite de choses, mots, apparte-
ments, arbres, maisons, etc. (Enfi-iéé).
bnfraîtibr et renfraîtier, v., combler, en mettre par dessus les
bords, en empiler de manière à former comme un faite. (Enfreî-
tié). — Voir enchâteler.
BNGiGoiNNBR ET BNGiGoiNGNER, v., emmêler, entortiller, mettre à
l'envers; arranger, disposer, agencer maladroitement. S'em-
ploie comme embarlificoter, mais d'une manière plus générale :
Comment don que (aies engigoinné les traits de lai charrue, que je
ne peux pas les défaire? c'est-à-dire comment as-lu donc disposé,
emmêlé, arrangé, etc.? Une mère dira à sa petite fille : Comme
fengigoinnes don tai fille, vai! Tu n'aies potUiant pas Vaidreusse
de l'haibiller! (Comme tu fagottes donc ta poupée, va! Tu n'as
pourtant pas l'adresse de l'habiller!) — Engigorné, embrouillé,
intrigué, Gros. ; engigorner, enrouler, entortiller, Thév. — De
engin, ingeniumï
engimellb, n., se dit avec mépris d'un instrument, d'une machine
peu commode, inconnue, compliquée, ou dont on ne sait pas se
servir : Des sécateurs pou tailler ? Eunne belle engimelle ! J'aimme
enco meux mai sarpotte (Des sécateurs pour tailler? Un bel
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX 17
outil? J'aime encore mieux ma serpette).— De enginî — Voir
manique.
knglauder, v., séduire, persuader à laide de belles paroles, de
promesses : /' mai enguiaudé; euje \i ai vendu mai vingne moins
qu'eulle ne vaut. Séduire une femme (voir engueuser); mais en-
g\auder est moins dur et implique plus de finesse que de vraie
fausseté. — Tromper comme on trompe un Claudel
engoler et engouler, v., avaler gloutonnement, d'un trait, sans
mâcher : ï ne Us mainge pas, les cerèges, i' les engoule, ï les boit
(Il ne les mange pas les cerises, etc.). — Angouler, avaler d'une
bouchée, Gros. — Vieux français.
ENGUBUSBR, v., séduire, tromper par de belles paroles, des promesses
menteuses. Ne se prend qu'en mauvaise part, et se dit particuliè-
rement de l'action de séduire une femme : F l'ai engueusée, et
petits t" Vai lâchée lai, c'est-à-dire il l'a séduite, puis abandonnée.
On dit aussi eng\auder. — Engueuser, enjôler, pateliner, ama-
douer, Gros.
bnjôloue, n., enjôleur, séducteur.
nufACHBR, v., lier le chanvre en bottes (mâches) pour le mettre
rouir. — Vieux franc, emmaser, mettre ensemble?
isiiENRi et renmbnri, v., inf. et part, pass., devenir plus maigre,
de moins bonne mine, plus affaibli : ï en-menrit, c'est-à-dire il
devient plus maigro, plus faible, il diminue de force, d'embon-
point, il dépérit : Y ast ren-menri 9 c'est-à-dire il est devenu plus
faible, etc. — Voir menre.
ennater et RiwAiTER, v., exciter deux rivaux l'un contre l'autre,
pousser à la lutte, dresser contre; semer la dissension. On en-note
un chien contre un chien, un homme contre un homme, pour
les amener à se quereller, à se battre : Mon homme i' m'ai baiU
tue; c'ast sai mère qui l'en -note d'aiprées moi, c'est-à-dire c'est sa
mère qui l'excite contre moi.
EimiXAuvER, ou engneauvbr (*'), ▼., s'emplir d'eau, d'humidité, à
la façon d'une éponge; en parlant des fruits, des légumes, devenir
aqueux par suite de l'humidité de l'année : Tu lâches ton bois ai
rhus, % sennieauve, ï se peurit, c'est-à-dire tu laisses ton bois
dehors, à découvert — à la porte — il s'humecte, prend l'eau,
se pourrit. Les pommes de terre ne vauront rin; i* ai trop plu
(ptu), l'année eulle l ast zeue trop moulle, tout ast engneauvé (Les
pommes de terre ne vaudront rien; il a trop plu, l'année a été
trop molle, tout est plein d'eau). — Du mot eau?
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18 PATOIS DE LA FORÊT DE GLA1RVAUX
ennutoub, n., celai qui ennuie d'habitude : Têts ein ennuyoù,
c'est-à-dire ta es un ennuyeur, an fâcheux. Ici le féminin est
ennuyoure.
ênnuyoux, adj., ennuyeux : Vlai eunn' ai ff aire bin ennuyouse,
c'est-à-dire une affaire bien ennuyeuse.
enréde (ou enraide?), adj., tôtu, opiniâtre, cabochard : Tast enréde
pou lai poinne, têtu comme ein chaît borne, c'est-à-dire ii est tôtu
pour la peine, tôtu comme un chat borgne. — Vieux franc, en-
réde, errede, enrederie, enrestie.
\ enrédi (ou enràidi?), t., inf. et part., s'obstiner, s'entêter, soute-
nir avec trop de persistance : Oh, si ï enrédit, ce n'ast pas lai
poinne d'essayer de le vainque, c'est-à-dire oh, s'il s'entête, ce n'est
pas la peine d'essayer de le convaincre, de lutter.... V m ai en-
rédi çai, c'est-à-dire il m'a soutenu cela, etc.
enrédige (ou enraidigb?), n., entêtement, obstination : V ai teut
pèdiu pa son enrédige, en piaidiant (Il a tout perdu par son obs-
tination, en plaidant). — Les beaux parleurs prononcent enrè-
dise. — Vieux français enrederie ?
enrouter, v., être arrêté en route par un obstacle. Au propre, un
charretier enroute, est enroulé, quand sa voiture est arrêtée,
immobilisée par les difficultés du chemin, embourbée : Eul che-
min i'ast bin méchant, prends gade d enrouler (Le chemin est bien
mauvais, prends garde de t'embourber, d'être arrêté, enrayé).
Par analogie, on dit à un enfant qui s'arrête en lisant devant un
mot difficile : Te vlai daji enrouté? Tenroutes daji? c'est-à-dird
te voilà déjà arrêté par les difficultés? Tu t'arrêtes déjà? — Par
opposition à être arrouté, sarroutert ou par corruption et mau-
vais emploi de ce vieux mot? — Enhotter, embourber, Gros.;
enrotté, G. et R.; enhotter, embourber, Thév.
ekroybr, v., enrayer, tracer les deux premières raies d'un champ.
entaille, n. ; outre le sens français, ce mot désigne à proprement
parler la ligne, la raie, le petit fossé, V entaille enfin qui sépare,
dans une vigne, un champ, etc., qu'on est en train de cultiver,
la partie déjà labourée de celle qui reste à labourer : V ne faut
pas faire eunne si large enteille. Quand on cultive avec la bêche,
Xenteille se nomme jauge. Entaille, en général, chantier :
J'eurtonne ai mon enteille, c'est-à-dire je retourne à mon chantier,
ou plus exactement, je retourne à l'endroit juste où je dois re-
prendre mon travail, à la raie de séparation. Entaille, coupure :
/' s'ast fait V bonne enteille, eunne bonne bout'nére (boutonnière),
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX 19
c'est-à-dire une large coupure. — Anteille, L. C; entaille, taille
de la vigne!!! P. T. : entaille, G. et R.
bntaincher, v., étancher : Y ai entainché lai fontainne, c'est-à-dire
il l'a étanchée, empêchée de couler. Euje saingnôs au nez qu'an
ne pouyot pas entaincher le sang, c'est-à-dire je saignais du nez
tellement qu'en ne pouvait pas étancher le sang.
bntbsser, v. entasser, presser : Enteusse bin les vagins dans lai
hotte pou qui* en tienne daivantaige (Entasse bien les raisins dans » - ^ ,. ^ £_ M\*
la hotto pour qu'il en tienne davantage). Absolument, arranger ' ; j " ^
en meule, dans la grange, les gerbes au fur et à mesure qu'on /. ^
les rentre : J'ai ent'sé les deux voitiures tout de suite (Le* beaux
parleurs disent entisser). J'ai ent'sé tote lai jonnée, c'est-à-dire
j'ai entassé, mis des gerbes en recule, toute la journée. Entesçer,
placer, disposer le lingo dans le cuvier (tenot)> avant de couler
la lessive : J'ai ent'sé mai buie hier au sor. — Ennontrer, arran-
ger la lessive dans le teno, Gros; encontrer, même sens, Thév. —
— Voir tisse et poule e.
enteummer, v., entamer : Entun-me lai miche (Entame la miche).
enteummon, n., entame, entamure; premier morceau de pain coupé
en segment à la miche : Mets l'entun-mon de lai miclie dans lai
besaice, c'est-à-dire mets l'entame, etc.
entômi, adj. et part, pass., endormi, lourd, peu alerte, la tête dans
les épaules : Lu, courre aussi fort que moi? Mas ç'ast ein gros
entômi! (Lui, courir aussi fort que moi? Mais c'est un gros
lourdaud, un endormi!) Aivoi ein braîs, eunne jambe entômie,
avoir un bras, une jambe engourdie, endolorie. Dans ce dernier
sens, quelques-uns disent entumi. — Anthumi, engourdi, Gros.;
eniemi, engourdi, endolori, Thév. — Vieux français entômi.
entômi (s'), v., s'engourdir, rester immobile, etc. — Voir entômi,
part. pass.
entraipb, personne inutile qui gêne, emplâtre; embarras, obstacle,
particulièrement ce qui peut faire trébucher ou tomber en embar-
rassant les jambes. On dit à un enfant qui vous barre le chemin :
Ote-te don de lai, entraipet — Voir s entraiper. — Entrape, em-
barras, Gros. ; entrape, personne peu agile, Thév.
entraiper (**), v., s'embarrasser les jambes dans une branche, une
corde, une ronce : Euje me seûs entraipé dans eunn aironce et
j'ai cheu, c'est-à-dire je me suis embarrassé dans une ronce, et je
suis tombé. Entraiper ein chevau, lui attacher le bout de son li-
col, de sa longe, à une jambe de derrière, pour qu'il ne puisse
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20 PATOIS DE LA FOBÊT DE CLAIR VAUX
s'enfuir, l'enheurder. On dit aussi empiger. — Entraper, embar-
rasser, Gros. — Du vieux français sentrailter, se prendre dans
ses traits?
entreprknre (V) d'aiveu quéqu'un, expression qui veut dire se me-
surer avec quelqu'un, se disputer, se quereller, lutter, au propre
et au figuré : N't' entreprends pas d'aiveu moi, tu ne seras pas l'puê
fort, c'est-à-dire n'essaie pas de te mesurer avec moi, etc.
bnvacheler, v. 9 mettre dans des tonneaux, dans des vaisseaux. Se
dit particulièrement et presque exclusivement du vin. — Vieux
français envaisseler.
envalkr (^), v., s'embraser, s'enflammer, devenir rouge de cha-
leur. On dit dans un incendie que le toit s'envâle, quand la flamme
commence à le dévorer; que V temps ïast envâlé, quand il est
rouge, enflammé; qu'une plaie s'envâle, quand elle s'enflamme, etc.
bnvambée, n., élan pour sauter : Penre son envambëe (Prendre
son élan). — Voir senvamber.
bnvamber (s'), v., s'élancer pour sauter plus loin, pour franchir un
obstacle, prendre du champ : SatUerôs-ta bin ce foussé-lai sans
fenvamber? c'est-à-dire sauterais-tu bien ce fossé-là sans prendre
du champ, sans te reculer pour mieux t'élancer? — Envamber
ses braîs en marchant, les balancer, les faire mouvoir comme un
pendule. F m'ai envambé son bâton, c'est-à-dire il a fait mine de
vouloir me donner nn coup de bâton, il m'a menacé de son bâton.
Dans ces deux derniers cas, on dit plutôt vamber.
knvargbr, v., se dit de l'action de l'ivraie du seigle, varge, sur
ceux qui en mangent : T y ai du seigle (seigu'ieiï) qui envarge;
an ast comme si an èlôt gris ou dane; je sens zeû envargé eunne
fois, c'est-à-dire il y a du seiglo qui.... envarge*! on est tout comme
si on était gris, comme si on avait le vertige; j'ai été envargé une
fois. — Enverger, môme sens, Gros. — C'est peut-être l'effet de
l'ergot qu'on attribue à l'ivraie?
bnvargillb, n., petit bout de ficelle à nœuds serrés qui se met à
l'extrémité d'un fouet, d'une verge (varge) : Tai fait sauter mon
envargille en claquant (quiaquant) trop fort. — Envergée, ficelle
chargée de nœuds qui termine un fouet, Gros. ; envargie, même
sens, Thév.
envelimer et BNVELiMMBR, t., envenimer : Mai copure s'emelime
(Ma coupure s'envenime). Eune bois pas, gai envelin^merot tai
p\aie {piaie). — Vieux franc, envelimer.
enviller (s*), v., s'entortiller ; se dit particulièrement de l'action
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAtJX 21
de certaines plantes dont les filets, vrilles, cirres, tiges, etc., se
roulent autour d'un tuteur : les haricots, le houblon, la bryone,
etc., senvillent d'aiprées les rames, les épines des haies, etc.
envillures, n., spirales des vrilles, tiges, cirres, etc., de tout ce
qui est envillé ou s'enville. On dit aussi villures. — Enveuilles,
tenons de la vigne, etc., Gros.
bnvirolbr et en virer, v., r ou 1er quelque chose de flexible autour
d'un centre, d'un cylindre; rouler en spirale : An envirole du fi\é
(fi-ié) ailentour d'eunne bobingne ou d'aiprées V bobingne, c'est-
à-dire du fil autour d'une bobine, après une bobine. An envire.
envirole eunri ousère ailentour d'eunne brainche d'âbre cassée pou
lai raittaicher, c'est-à dire un osier autour d'une branche d'arbre
cassée pour la rattacher. Les pois senvirolent ailentour de lai
raimme (Les haricots se roulent autour de la rame). Dans ce
dernier cas, on dit plutôt senvillent. — Voir s'enviller.
envoche, n., poignée de paille dont on enveloppe l'extrémité (cime)
d'un lien de bois pour en faciliter la torsion, quand on lie de la
paille, du blé, etc.
f enyot, n., orvet. — Voir anvot.
s bnvouléb, n., envolée, compagnie, couvée : Eunn' envoûtée de pi-
drix (Une compagnie de perdrix). Eunn 9 envoulée d'ougelots,
c'est-à-dire toute la bande d'oiseaux qui s'envolent d'un coup.
envouler (s'), v., s'envoler. — Vieux français.
èpakter, v., épouvanter, faire peur : ï èpante tant %'ast peut, c'est-
à-dire il épouvante tant il est laid. JP èpante d'aiveu son chien (Il
fait peur avec son chien). Ailler jusque lai ai paitte, çai m èpante
(Aller jusque-là à pied, ça m'épouvante). Sèpanler, s'épouvan-
ter : J'm èpante lai neut (Je m'épouvante la nuit), — Epanter f
épouvanter, Gros.; épanter, effrayer, Thév. — Espanter du xu e
au xvi e siècle.
èpantot, n., épouvantai!, espèce de mannequin, bâtons en croix
garnis de haillons destinés à épouvanter les oiseaux et à les em-
pêcher de s'approcher des fruits ou des grains qu'ils pillent. Par
analogie, on donne ce nom à une personne lourde, difforme, sans
grâce, taciturne, mal habillée, etc. : Ç'ast ein vrai èpantot; çai
ne dit rin ai nun (C'est un vrai mannequin; ça ne parle à per-
sonne). Qiïast-ce que tu restes don lai debout ', peut èpantot ? c'est-
à-dire debout comme un èpantot, au lieu de travailler, d'aller à
tes affaires? — Épointeau, épouvantai) d'oiseau, Gros.; èpantot,
môme sens, Thév.
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22 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAÎRVAUI
êpatter, v M couper, rogner jusqu'au collet les racines, les pieds du
chanvre arranhé, avant de les mettre rouir : Vlai ein bouchon,
ein meunnevé de chanve qugnast pas èpatté (Voilà une poignée de
chanvre qui n'est pas rognée). — De patte?
êpattures, n., les rognures du chanvre, les racines coupées; les
menus brins de chanvre avorté mêlés aux mauvaises herbes de
la cheneviôre : Bouche eul tas d'chanve d'aiveu les èpattures, c'est-
à-dire recouvre le las de chanvre avec, etc.
èpenouillkr, v., secouer, dans le sens de réprimander, faire des
reproches : Ah, tu fais enraiger mon chien, aittends, je vas t'èpe-
nouiller, c'est-à-dîro je vais le secouer, t'arranger. S'épenouiller,
se vêtir, s'apprêter, faire sa toilette; ne s'emploiequ'en mauvaise
part : Aies-tu bintôt fini de t'èpenouiller? J* t'en faut du temps,
dâ, mâtin t (As-tu bientôt fini de t'apprêler? Il t'en faut, etc.).
— Voir bichonner.
èpichon, n., petit ramillon d'osier détaché de la tige principale :
Cope des èpichom d'aiprées les ousères pou lo'ier les poingniens de
pois (Coupe des brindilles après les osiers pour lier les poignées
de haricots). — De épisser, lier, entrelacer : épichon pour épissonf
êpibr, v., s'emploie pour hésiter, rester incertain, réfléchir trop
longtemps quand on devrait agir : Mas, qu'ast-ce que l'épies?
fouS'li don 'n claque (quiaque) (Mais, qu'est-ce que tu hésites?
flanque-\ui donc un soulllet). On dit aussi èpiloguer, dans le
même sens.
êpleuter, v., abréger en travaillant, sans avoir l'air de se presser
plus qu'un autre; aller vite tout en faisant bien, expédier sa be-
sogne : Ylai des fauchons qui ép\euteut (èpieutent) tout piun %
c'est-à-dire voilà des faucheurs qui vont très vite, qui gagnent du
temps sur leurs compagnons, etc. — Eplèter, aller vite en be-
sogne, Gros.; épléter, G. et R.; épletter, Thév. — Du vieux
français espleiter, se hâter?
èpiloguer, v., s'emploie pour hésiter, réfléchir trop longtemps (voir
épier); épier dans le sens du français, 'surveiller, espionner,
tâcher de surprendre uno conversation. — Voir airoiller.
èpingne, n., épine. Èpingne blainche (biainche), épine blanche, au-
bépine.
èpingnotte, n. dimin., petite épine; petit buisson d'épine.
èpingue, n., épingle.
èpoulot (ou êpoulo?), n., petite bobine de fil, petite fusée : Euje
n'ai pas filé ein èpoulot dans toute mon hiver, c'est-à-dire je n'ai
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PATOIS DE LA FORÊT DB CLAIRVAl'I 23
pas filé la moindre fusée, je n'ai pas filé du tout. — Do Citai.
spola, navette?
èpreunne (ou èperonne?), n., pièce de bois de l'avant-lrain d'une
charrue, d'une herse, etc., à chaque bout de laquelle on attache,
on fixe les traits; espèce de palonnier. — Vieux franc, esperonne,
peronne, peronnete.
èprou, n. Voir aiprou.
èprouer, n. Voir aiprouer.
èquarrî (ou ècarrî?), n., angle extérieur d'un mur : Y s'ast cassé
lai tête contre V èquarrî (Il s'est cassé la tête contre l'angle du
mur). Ai l' èquarrî de lai majon, de lai mureille du ceumtère. —
Ecarts, L. C; écarts^ coin, écart!!! P. T.
êqueucher, v. Voir ècueucher.
escargoter, v., broyer, briser, mettre en pièces un ôtre animé :
Que je seûs don en colère d'aiprées cte chien-lai t (Tailleurs si je
le tenôs, je Vescargoterôs, c'est-à-dire je le briserais. — Comme
on traite un escargot sur lequel on marche? ou du vieux fran-
çais escharbotter, tisonner, ou escarbouiller, écraser?
escarmouciier et ècarmoucher, v., écorner. On escarmouche une
assiette, un plat, quand on en enlève un petit morceau par ma-
ladresse, d'un coup, d'un choc, etc. : Gnai que des aissiettes
ècarmouchées (Il n'y a que des assiettes cassées, écornées). — Ne
serait-ce pas plutôt ècarnoucher, de carne, angle? — Voir èbri-
quer, èbroquer, ècornifler.
esclipe, n., éclipse : F y ai zeû eunn' esclipe de lungne aivant-z-
hier, c'est-à-dire il y a eu une éclipse de lune avant-hier.
escouer, v., secouer : Ah, lu vas te faire escouerpa tai mérel c'est-
à-dire tu vas te faire secouer, gronder, etc.
kscousse, n., secousse.
escueuiller, secouer. — Voir escouer et scueiller.
espacieux, adj., spacieux; s'emploie pour grand, gros, fort, mais
plutôt avec la négation et par ironie souvent, quand il y a doute :
l'ast si fort que çai, et' homme-lai ? ï nast poutant pas bin espa-
cieux! c'est-à-dire il n'est pourtant pas bien gros, grand, etc.,
enfin, il ne me parait pas si terrible à moi.
bspadron, n., espadon, sabre.
bsquelette et esqlette, n., squelette 1 .
4 La plupart des mots commençant par une s suivie d'une autre
consonne, changent ainsi s en es, ou plutôt ont gardé leur ancienne
orthographe.
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24 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX
esquinter, v., éreinter. S'esquinter, se fatiguer, s'éreinter. On s'es-
quinte en travaillant trop, en faisant nne besogne difficile, etc. :
ï' m'ai esquinté d'ein coup de bâton, c'est-à-dire il m'a éreinté,
cassé les reins, etc. Euje m'esquinte ai traivoiller pou lu. Euje
m esquinte ai li causer, i' ne me répond pas seulement (Je m'éreinte
à travailler pour lui. Je m'époumonne, etc.). — Mot du patois
général.
bssarmenter, v., ramasser dans une vigne les sarments taillés. —
Vieux français essermenter.
essayon, n., échantillon; se dit exclusivement de la poignée de
chanvre que le propriétaire d'une rage envoie, après un certain
temps de rouissage, au dépositaire, pour que ce dernier ait à ju-
ger si l'opération est terminée et si l'on doit retirer les mâches
de l'eau. — De essayer, sans doute? — On dit aussi rouichon. —
Essayon, essai, tentative, Gros.
essuer et s'essuer, commencer à sécher, à se sécher : Devant de
mette chochi tai cueuktte au long de note feu, poute4ai daji essuer
ou s'essuer su lai hae de notejadin, c'est-à-dire avant de mettre
sécher ta culotte près de notre feu, porte-la d'abord s'égoutter,
s'essorer, se sécher un peu sur la haie de notre jardin. — De s'es-
suyer?
estoc (ce n'ast pas de ton) 9 ce n'est pas dû à ta science, à ton
adresse, à ton mérite, à ta valeur, etc. On dit d'un homme que
les circonstances, les intrigues ou les hasards seuls ont favorisé :
I'ast riche, i'ast zeû décoré, i'ast, etc., mas ce n'ast pas de son
estoc! c'est-à-dire il n'a pas le mérite d'être pour quoi que ce soit
dans ses succès; il doit cela à la chance, à la faveur, etc. On
dit même, contrairement à la signification de ce vieux mot : Si
i'ast riche, belle en vai son père, ce n'ast pas de son estoc, c'est-à-
dire s'il est riche, c'est grâce à son père, ça ne vient pas de son
adresse, de son travail personnel, etc.
estragot, n., escargot : Estragot, viragot, pitagot, tire tes cônes,
etc., obscures et menaçantes paroles que les enfants chantent à
l'escargot qui leur tombe sous la main, dans l'intention de l'obli-
ger à montrer les cornes, à sortir de sa coquille.
estropique et ètropique, adj., hydropique. — Vieux franc, ytropice.
estropisie, n., bydropisie.
été bin, être bien; en particulier, être à son aise sous le rapport de
la fortune, être dans une bonne médiocrité: Gnast pas riche.
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PATOIS DB LA FOBÊT DE CLAIBVACX 25
riche, mas i'ast bin, quoi! c'est-à-dire il n'est pas très riche, mais
il est à son aise.
èteindb et ètoinde, v., éteindre. Part, pass., èteindu et èioindu;
part, prés., èteindant et èloindant.
êtènb, n. Voir aitaine.
èteut, êtout et ètot, adv., aussi : J'y seul zeû èteut (J'y suis allé
aussi). Eulle l ast mot\e\x ètot (Elle est morte aussi). — Itou,
aussi, P. T.; itou, aussi, Thév.
en (ou AiT-f?), espèce de réponse qu'on fait à un appel, à un ordre,
soit pour dire me voici, soit pour prier de répéter. — Abrévia-
tion de plaît-il^
ÊTivER, v., étuver, laver légèrement, nettoyer doucement un mal,
une plaie.
ètouffûtte, n., étouffoir, éteignoir : rai le nez comme eunn* ètouf-
fotte ai cierges, c'est-à-dire il a le nez comme un éteignoir à
éteindre les cierges.
étourdi, èteurdi et ètordi, v., inGn. et part, pass., assommer et
assommé : Euje Vétourdirôs d'ein coup de saibot (Je l'assommerais
d'un coup de sabot). Étourdi, demi-sec, demi-fané : Note foin ï
vai été bintôt so, i'ast daji étourdi, c'est-à-dire notre foin sera
bientôt sec, il est déjà fané, demi-sec.
ètrain, n., paille, litière : Eunne poingnien d'ètrain (Une poignée de
paille). 1 couche su Vètrain (Il couôhe sur la paille, sur la litière).
— Vieux français eslrain, du latin stramen, paille, chaume.
ètbaingb, n., étranger, qui n'est pris de la famille : J'aimme meux
demander ai des pairents quai des ètrainges, c'est-à-dire qu'à des
étrangers à la famille. — Etringè, étranger, P. T.
ètraingler, v., étrangler : Tu vas mètraing\er (ètrainguier) en me
sarrant tant que çai, c'est-à-dire tu vas m'étrangler en me serrant
tant que cela.
iTRODDLE, n., éteule, chaume, esteuble, estouble, étouble, le bout
inférieur des glumes, le tronc de paille qui reste dans la terre
quand le blé, l'avoine, l'orge, sont moissonnés. Désigne aussi les
champs couverts d'éteule: Les beurbis vont dans les ètroubles
(ètroubieu), c'est-à-dire les brebis vont dans les champs moisson-
nés. Les sombres et fe.« ètroubles, c'est-à-dire les jachères et les
champs couverts d'éteule, d'où l'on a enluvô la moisson.... —
Ètoule et ètouliire, Thév. — Du vieux français estroble, estouble,
esteule.
t. l 3
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26 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIHVACX
ètdellk et ètiuelle, il., écuelle, tasse.
ètuyer, t., enlever les talles gourmandes an pied des ceps de vigne.
— Étaller, supprimer sur les ceps les pousses inutiles, 6. et R.
bu, syllabe euphonique qui se place dans certains cas devant diffé-
rents mots. — Voir page 30.
eul (ou el, ou eu l'?), art. simple le. Dans certains villages, au lieu
de eul on dit lu et lou, comme dans le patois du ç'ost.
bulle, pron. f elle; le aile du patois riceton. — Al, aile, L. C; ol,
elle, P. T.; aile, G. et R.
eunne, art. indéf. et adj. num., fém. de ein et de un, une. On pro-
nonce un -ne : nous n'avons ajouté un e que pour forcer à cette
prononciation. Eunne par eunne, une à une : Eunne par eunne,
allons! criait le jeune soldat aux guêpes qu'il était allé provo-
quer, et qu'il voulait pourfendre avec sa latte. — lue. L* C;
ine, eine, P. T.
euriobe et oriore, interj. qu'on emploie pour faire reculer un che-
val : Euriore, ho, euriorel dit le charretier en repoussant le che-
val par la bride. — De arrière? — Vieux franc, arrérer, reculer.
euser, v., user, détériorer : Keuse pas tai cueulotte aigraivi d'ai-
prées les âbres, c'est-à-dire n'use pas ta culotte à grimper aux
arbres.
eusse, n., esse, cheville de fer qui empêche la roue d'une voiture de
sortir de l'essieu. — Vieux français eusse, heusse.
eutil, n., outil; objet quelconque, avec dédain : Et t'aies aicheté ce
chaipé-lai? Ein bel eutil, ma fit c'est-à-dire tu as acheté ce cha-
peau là? Un bel objet, ma foi !
êvoiller, v., éveiller; de même rèvoiller, rèvoil, etc., réveiller,
réveil, etc.
fàchelle, n., faisselle, vase de fer blanc cylindrique, percé de
trous, où Ton fait le fromage; moule, forme à fromages.
fâches (les), n., la partie nue du tonneau qui s'étend de la bonde
aux premiers cerceaux, quand le tonneau n'est pas habillé à
plein, c'est-à-dire n'est pas entièrement recouvert de cercles : Eul
meud i* en vai dans les fâches, le tonneau fuit, etc.
fachoux, adj., fâcheux, regrettable. S'emploie souvent ironique-
ment: Ç'ost bin fâchouxt c'est-à-dire c'est bien fâcheux, tant pis,
mais c'est comme celai etc.
fafiots, n., menus copeaux dont on se sert pour allumer le feu. —
Voir feurluche.
n
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Patois de la forêt de clairvaux &1
faiche, n., hêtre. (Prononcez feiche). On dit aussi foyard. — De
fagus. — Vieux français : failhard. — Fayte, fouteau, arbre f
Gros.
faîchotte, n. dim., petite feiche.
faiçon, n., façon.
fauoue, n. adj., faiseur, fabricant. S'emploie par périphrase pour
désigner, à l'aide des noms de choses, toutes les professions peu
connues à la campagne : Ein faijoû de journal; ein faijoû de
livres; ein faijoû de dragées, etc., c'est-à-dire un journaliste, un
écrivain, un confiseur, etc.
fàimingue, n., famine : F crie toujous faimingue, c'est-à-dire il se
plaint toujours qu'il n'a pas assez, qu'il est pauvre, que les ré-
coltes vont mal, etc.
fainniant (ou faingniant ?), adj., fainéant.
fainniantige (ou faingnantige?), n., fainéantise.
faire, y., s'emploie au jeu de cartes pour donner, en sous-enten-
dant sans doute le mot jeux : Ç'ast ai toi ai faire, c'est à toi à
faire les jeux, à donner les cartes.
faire (bin), expression qui signifie proprement faire l'aumône. On
dit à un mendiant : Je n pouions (pou-ions) pas vous bin faire,
pour : nous ne pouvons rien vous donner; et autrefois on ajou-
tait : Que V bon Dieu vous V niche I
fairingne, n., farine : F rit bianc comme f air ingne. (Il rit blanc
comme farine), c'est-à-dire il est content, il a réussi, il est sa-
tisfait... Implique d'ordinaire que la personne qui rit a réussi
par habileté, par ruse, aux dépens d'un autre.
fait (aivoi), avoir fini . Mas, tu ne traivoilles don pus? — F ai fait;
c'est- à dire j'ai fini mon travail, ma besogne. — Avoir fait, avoir
fini, Thév.
faite (été au), pour être au fait, c'est-à-dire ôtre habitué, accou-
tumé : Je seâs au faite ai traivoiller (Je suis habitué à travailler).
/' m'ai dit des sottiges, mas çai m'ast bin égal, j'y seûs au faitïeu.
— Fait ou faite? En tout cas, on appuie fortement sur le t
quand on ne le mouille pas.
faite, (faitieu) part, pass fém. de fait, faite; n., au jeu de cartes,
tour de donner les cartes, action de les donner : T'aies passé tai
faitieu, c'est-à-dire tu as passé ton tour de faire, de donner les
cartes.
faloter, v., flamber, passer sur une flamme légère : /' ai manqué
d'été falote; eul feu prenot dans sai barbe (Il a failli être grillé,
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28 PATOIS DB LA FORÊT DE CLAIRVAUX
flambé; le feu prenait dans sa barbe). — De falot? — Voir
frilltr.
fandaisse, n., fente, gerçure. Les raffinés disent fandasse. —
Vieux franc, fandace.
t / , • fanée, n., farine folle qui s'échappe et se répand partout dans les
moulins. Les tisserands s'en servaient pour faire leur colle. —
/ A * Voir pairou.
far, n., fer.
farauder, v., faire le faraud, le pimpant, le coquet, l'élégant, le
casseur, etc. : T met son chaipé su son oroille, % faraude; c'est-à-
dire il met son chapeau sur l'oreille, etc.
farbonna et farbana, n., falbala; feston, guipure, volant, etc. :
Eulle l ai des farbonnas pieun d'aiprèes lé, c'est-à-dire elle a des
falbalas plein autour d'elle, après su robe.
faucher, n , le manche de la faulx. — Hante de faulx, Gro3 —
tient d'épéc, poignée d'épée au xin e siècle.
fadchot, n., nom général des rapaces, buses, milans, éperviers, etc.:
J'ai vu ein fauchot vouler au dessus de nos coudrous, c'est-à-dire
j'ai vu un oiseau de proie voler, planer au-dessus de nos din-
dons. — De ce que ces oiseaux font de longs traits sans agiter les
ailes, comme s'ils fauchaient?
fauchoue, n., faucheur; espèce d'araignée à longues pattes, fau-
cheux.
factre, n., feutre.
fenaisse et fenassb, n., grande herbe sèche des haies, des buissons,
des friches : Y s'ast levé ein Méve ai coûté de moi dans lai fe-
naisse, c'est-à-dire il s'est levé un lièvre à côté de moi, dans
l'herbe fanée.
fené, adj. et part, pass., fané, flétri, sec : De Vharbe fnée, c'est-
à-dire de l'herbe fanée, sèche. Mon bouquet s'ast fné, ma fleur
s'est flétrie.
fenbr, v., faner, faire du foin : F'ner de lai luzarne, c'est-à-dire
faner de la luzerne, en faire du foin. Ailler fener t aller faire
du foin. Se fener, se faner, se flétrir, se dessécher : Tout se
feunnerai, si ce temps lai dure (Tout se fanera, etc.). — Voir
flâtri.
feu d'enfer et d'enfar, n. compos., coquelicot (papaver rhœas).
feuillot, n., feuillet : Tonne eut feuillot, c'est-à-dire tourne le
feuillet.
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PATOIS DB LA FORÊT DE CLAIRVAUI 29
feuiixots et FEuiLLOTTES, n. dimin., petites feuilles, spécialement
les jeunes pousses de navette qu'on mange au printemps en guise
de choux : J'ai mins des feuillots (ou des feuillotles) dans note
pot, c'est-à-dire j*ai mis des feuilles de navette, etc.
feulie, n , folie : /' ast dans ses feûlies, ou ses feûlies le tiennent,
c'est-à-dire il est dans ses folies, dans ses jours de caprices, d'ex-
travagances. Eunne chienne en feulie, une chienne en chaleur.
feulaine, (ou feulinne ?) n , feu do paille, de chenevottes, de
menu hois, qu'on allumait autrefois à l'un des bouts du vil-
lage, ou sur la place publique, le premier dimanche de carême,
pour brûler Carnaval. — Feuline, feu de réjouissance, Gros.
feu nomène, n. composé, phénomène. Eul temps i'ast teut rouge,
çast ein feu nomènne.
feurcin, n., farcin, sorte de gale.
feurcingner et se FEuaciNGNER, v., se gratter, se frotter le dos con-
tre sa chaise, faire des mouvements forcés pour que les habits
frottent la peau où cela démange : Qu'ast-ce que tu feurcingnes,
ou te feurcingnes, don ? Eust-ce que Vaies des poux dans tai che-
minge? c'est-à-dire qu'est-ce que tu te remues, que tu te frottes
donc ainsi, etc. — De feurcin ?
feurdailler, v., jeter, lancer un objet, particulièrement un bâton,
de biais, en fauchant, au travers de quelque chose qui laisse
passer tout en offrant une certaine résistance, et en faisant gé-
néralement dévier... N'ayant pas de synonyme en français, ce
mot est très difficile à définir... On feurdaille ein bâton, eunne
poingnien de piarrottes, etc., au traivers d'eunri hâe, d' eunne
chenevêre, pa les paittes d'ein chien; on feurdaille ein bout de
charbonnette pa les brainches d'ein châne, etc. Par analogie, on
dit que la pluie, la grôle feurdaillent pa les vingnes, les bois, d'ai-
prèes les vitres, etc., peut-être à cause de la répétition de l'ac-
tion. On confond quelquefois feurdailler avec veurdailler. Ces
vocables d'ailleurs paraissent avoir un radical commun. — Feur-
dailler, L. C. — Feurdailley, percer, casser (!!!) P. T.
feurgon, n., fourgon, instrument pour attiser le feu dans le four :
/' ast nor comme ein feurgon, c'est-à-dire il est noir comme... Se
dit par analogie d'une femme malpropre, qui s'agite beaucoup,
qui se fourre partout, qui n'a pas le temps de faire sa toilette :
Que feurgon !
feurgon.ner, v., fourgonner; exciter, tracasser, aiguillonner; fouil-
ler maladroitement dans quelque chose. S'emploie particulière-
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30 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVACX
ment quand il s'agit du feu : Eune feurgonne pas note feu (Ne
tisonne pas...) — Voir feurguger, feurguillei; fonnoiller, etc.
— Vieux franc, furger.
feurgonnoue, n. adj., celui qui feurgonne. On dit de même/ipur-
gujoû, feurguilloû, feurguignou, etc.
FEURGUGER, FEURGU1LLER, FEURGUIGNER, FBURGUINGNER, V., aiguil-
lonner, fouiller, tâtonner. Ces mots s'emploient dans le môme
sens général que feurgonnerei fonnoiller, mais avec des nuances
différentes. On dira par exemple à un boucher lent à trouver
l'endroit où il doit saigner un porc : Eune feurguge ou feurguille
don pas tant d'aiveu ton coutieau; enfonce dont — Ferguignier,
exciter, tracasser le feu, Gros.
feurluche et fanfeurluche, n., fanfreluche ; en général ruban,
colifichet, falbala : Eune mets pas tant de feurluckes ou de fan-
feurluches d'aiprêes tai robe, d'aiprées tai cale. (Ne mets pas tant
de falbalas après ta robe, de rubans après ton bonnet). Feurlu-
ches s'emploie en particulier pour désigner les copeaux de me-
nuisier, faits à la varlope, qu'on appelle aussi frisons et fafiots :
F me faurot des feurluches pou aillummer mon feu, c'est-à-dire il
me faudrait des menus copeaux pour, etc. Du vieux français /an-
feluche.
feurluquet, n., freluquet.
feurtbr, v., peigner le chanvre; frotter, user en frottant, en re-
muant, rendre comme du chanvre peigné : Reste tranquille su
tai chaire et ne feurte pas le fond de tai cueulotte (Reste tran-
quille sur ta chaise et n'use pas le fond de ta culotte). Dors et ne
feurte pas les draps.
feurtiller et feurtouiller, v., se remuer, s'agiter, principale-
ment dans un endroit où l'on agile'en même temps quelque chose
autour de soi. On feurtille ou feurtouille dans un lit, dans un
buisson, un taillis ; un lézard feurtouille dans l'herbe. — Feur-
tiller s'emploie aussi quelquefois, pour feurguiller, feurgonner.
— De frétiller ou de feurter? Ces mots ont d'ailleurs une foule
de nuances et d'emplois différents.
feurtoub, n., chanvier, peigneur de chanvre, celui qui feurte le
chanvre.
feusé et fbusieau, n., fuseau : Je lâche cheur mon feusê bin sou-
vent, j'ai envie dedormin (Je laisse tomber mon fuseau, etc.).
— Vieux franc, fusciau.
fbusée, n., fusée, ce qu'il tient de fil autour d'un fuseau : /' faut
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PATOIS DE LA FORÊT DE GLAULYAUX 31
six boinnes feusées pou faire eunn' ègevotte, c'est-à-dire il faut
six bonnes fusées pour faire un écheveau.
fbuselottb, n. dimin., petite fusée : Euje n'ai fi\é queunne mé-
chant' feuselotte dans niai voillée, c'est-à-dire je n'ai filé qu'une
pauvre petite fusée dans ma veillée. — Voir èpoulot.
fbusi (bois), n., fusain, arbrisseau. — Feusi de fusain, et par un
altération contraire, fragin de fraisil, dugin de douzil?
feusil, n. f fusil.
fiantbr et fiainter (ou fienter?), v., rendre les gros excréments,
cacare. Se dit particulièrement des animaux, chevaux et vaches.
— Vieux français.
fiatte et fiaitte, n., mot qui s'emploie seulement dans cette
phrase : Gn'ai pas de fiatte ai aivoir, ou gn'ai pas grand' fiaitte
ai aivoir en lu, c'est-a-dire il ne faut pas s'y fier, il n'y a pas
grande confiance à avoir en lui. — Fiate, confiance, Thév. —
Du vieux franc, affiat, promesse, assurance?
Ficnè, n., chevillon d'une échelle, d'une chaise. — Du vieux fran-
çais fusciau, fuseau ?
fié et fi (mai), sorte d'interj., ma foi. Parmaifié, parmaifi (par
mai fié, par ma fi), espèce de jurement, par ma foi.
fiembrer, v., fumer, épandre du fien sur une terre pour l'engrais-
ser. On dit plutôt /wmrotfr.
fien, n., fumier. On dit également fien (fiain) et fumer ou fummer
(fun-mé); mais fien est plus relevé, plus délicat. —Vieux fran-
çais, fiens, fient, fumier, ordure. — Fiant, fumier à demi-con-
sommé, Gros.
fier, adj., s'emploie pour vain, orgueilleux, hautain, et se prend
toujours en mauvaise part : T ast-i'-fiert T ne dit pa seulement
bonjou, c'est-à-dire est-il hautain, etc. Fier, acide, sûr; on dit
que Yoisille (oseille) ast fiére. — Fier, acide, en parlant des fruits,
Thév. — Fierté se prend dans le même sens de vanité, de hau-
teur, de pose.
filé, n., fil : Eunn' aiguille de fi\è (fi-ie), c'est-à-dire une aiguillée
de fil ; part. pas. du verbe filer. — Quelques-uns disent fil
(/î-ieu).
filer, v., (fi-ier), filer, faire du fil : Etdle file (/î-ieu) daji, tai
gakhotte ? — Oh, V belle filoure t (fi-ioure) Pou faire des gâtres
ai note col (Elle file déjà ta fillette? — Oh, une belle fileuse!
Elle file pour faire des guêtres à notre coq !) On prononce de
même faufiler (faufi-ler) et les autres dérivés.
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32 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUI
fille, n., s'emploie pour poupée : Aimuge-te d'aiveu lai fille,
c'est-à-dire amuse-toi avec ta poupée,
fillette, n., fût, feuillette, la moitié d'un muid. — S'emploie aussi
comme nom propre de femme.
filleu, n., filleul. (Fi-ieu). — Vieux français.
fin (postant que d'eunne), expression qui signifie pas tant que cela,
moins que vous ne croyez, moins qu'on ne suppose... : De l'ar-
gent ? Oh, gnen ai pas tant que d'eunne fin! An le crot pus riche
que i'ast (De l'argent! Oh, il n'en a pas tant que cola! On le
croit plus riche qu'il n'est). Eune te dépêche pas trop ai mainger
les pommes : Je nen ons pas récolté tant que d'eunne fin, c'est-à-
dire nous en avons récolté moins que tu ne penses, moins que tu
as l'air de croire.
fin- fond, n., le tréfond, l'extrême fond d'une chose profonde : Au
fin fond du bois, très avant dans le bois ; au fin fond du puts,
jusqu'au fond du puits supposé profond; au fin fond d'une con-
trée, d'un lieu-dit, à l'extrémité de la contrée déjà éloignée ou
vaste, etc.
fingnb, adj., féminin de fin, fine.
fion et RBFiox (bailler le coup de), donner le dernier coup, mettre
la dernière main à un travail ; finir, limer, polir, parfaire : J'ai
fini, je n'ai pus quai bailler le coup de fion, ou le coup de r'fion
(d'eurfion), c'est-à-dire je n'ai plus qu'à polir, qu'à donner le
dernier coup à mon travail.
FisoNOMiE, n., physionomie. — Vieux français.
fistule et fisture, n., miette, trace, atome; s'emploie surtout dans
cette expression : Gnen ai pas fistule, c'est-à-dire il n'y en a pas
trace, il n'y en a pas du tout. — Voir chipette et talipe. — Fu-
ture on fistule, parcelle, miette, Gros.
flache, adj., courbé, tordu, fléchi, déjeté, en parlant du bois en
grume ou travaillé On dit qu'une poutre, une solive, une plan-
che, etc., sont f\âches (fidehes), quand elles se sont courbées,
qu'elles ont travaillé, gondolé, etc. — Voir se berger. — Flâché,
lâche, énervé, Gros. — Est-ce flache, détourné de son sens fran-
çais, et employé pour flacheux ?
flaimmb et flamme, n , (fiainme et fiante), flamme.
flaimmeron, fleummeron et flammeron, n., tison enflammé; tison
dont on se sert pour transporter le feu d'un endroit dans un au-
tre : Fai prins ein flaimmeron. (fiainmeron) dans note feu et
i'ai ailleummé Vharbe soche de lai hâe (Il a pris un tison en-
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX 33
flammé, etc.). — Flammeron, charbon à demi-cuit, Gros. —
Flammeron, flammèche, Thév. — Vieux franc, flameron.
FLAiMMOiciiK et FLAMMoicHE, il., (fiain-moiche et flamoiche), flam-
mèche.
flatri, part, pas., flétri : tai rose, eulle l ast (latrie (fiâtrie). Les
autres temps ne sont guère employés; on se sert plutôt de fener.
flaubb, n., mensonge, fable, conte à dormir debout : Tu nous rai-
contes des flâubes, euje cros (on prononce rarement fizube); conte
tes flâubes ai d'autes (Tu nous racontes dos fables, dos men-
songes, etc.). — Voir dandainnes, narrée, nivelle, mois qui s'em-
ploient les uns pour les autres, bien qu'ils aient des nuances dif-
férentes. Ainsi, l'idée de bâtise domine dans dandainnes, et celle
de mensonge dans flâube. On dit aussi : Conter des flâubes aux
filles. — Flove, conte bleu >ans vraisemblance, Gros. — De fa-
bula? fiaba?
flaubbe (ou flobéb?), n., volée de coups. — Voir frôlée.
flée, n., fléau abattre le grain : J'ai cassé lai baitte de mon fiée
(J'ai cassé la batte de mon fléau). Baitte ai deux fiées (battre à
deux fléaux), avoir les pieds dans deux camps, soutenir deux
opinions différentes. — Fiés ou fiais, fléau de grange, Gros.
Fié, fléau à battre en grange, Thév. — Vieux franc, flael.
fleume. n., flegme, lourdeur, paresse. — Vieux franc, fleume.
fleur, n., (fieur), fleur.
fleuré (ou fleurer?), n., (fleuré), charrier, drap de toile grossière
sur lequel on place les cendres dans le euvier. — Voir tapin. —
Fleurier, treillis qui porte les cendres de lessive, Gros,
fleurer, v., saupoudrer de farine la corbeille avant d'y déposer
la pâte : J'ai fleuré mes caibais devant de peurti, c'est-à-dire j'ai
enfariné mes corbeilles avant de pétrir. Fleurer, flairer, sentir :
Fieure vor cte meud-lai, si gn'ai pas ein goût; c'est-à-dire flaire
voir, sens voir ce muid-là, afin de savoir s'il n'a pas de mauvais
goût. On dit aussi dans ce dernier sens, avec un peu d ironie ou
de mépris, renifler (renifler).
fleute, n., (fieûte), flûte, flageolet, etc., tout ce qui sert à fleûter.
fleuter, v., (fieûter), flûter, souffler dans un instrument à vent
quelconque, rendant des sons aigus, clairs, tel que llûte, fla-
geolet, hautbois, fifre, etc — Voir toûter et coinner. Fleûter,
boire avec excès, par gourmandise : F fieûte enco meux dans ein
baril que dans son fieûtot. — Flûter, boire, siffler avec la bou-
che, Gros.
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34 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVÀUX
fleutot et fleutotte, n., dimin., petite flûte. Le fieûtot est entre
la fieûte et la fieûtotte, et emporte le plus souvent une nuance de
dédain. — Flutot, sifflet, flageolet de berger, Gros.
flociiot, n., nœud de ruban, cocarde, trocbet de fleurs, de fruits,
etc. : Eulle met trop de flochots d'aiprées sai cale pou V vin-
gneronne, c'est-à-dire elle met trop de nœuds de ruban après son
N bonnet, pour une vigneronne. Ein fiochot de cacas, de noujottes
^<jL , j-" Ui '/- r ^ (Un trochet de noix, de noiseltes). Les beaux parleurs disent flo-
chet. — Vieux franc, floche, floichet, flocon. — De flosculus ?
flunge, adj., mince, pâle, grêle; mince, faible, fistuleux, en par-
lant des plantes : Des dogts flunges, c'est-à-dire des doigts mai-
gres, longs, décharnés ; du bié fiunge, de l'harbe fiunge, du blé
qui ne peut se soutenir, qui verse (voir ce mot), de l'herbe grêle,
fistuleuse, qui se couche, elc. — Flonger, enfoncer, plier, Gros.
flungeot, adj. n., jeune homme délicat, mince, frêle : Ç'ast ein
grand fiungeot qui plôerot comme eunne roJieu, c'est-à-dire un
grand mince, frêle, qui ploierait comme un hart, comme un
osier. — Voir flunge.
foce et foche (ou fosse?), n. , petite perche, gaule, longue baguette :
/ *t, /' ne t' écoute pas ton gaichenot; prends don V foce, eunn hous-
singne, et tape dessus (Il ne t'obéit pas, ton gamin ; prends donc
une baguette, une houssine, etc.). Vlai eunne* belle fosse qui
ferot bin deux çoc\es de quartaut, c'est-à-dire une belle petite
perche qui ferait bien deux cerceaux, etc. — Vo de ce mot est
très bref.
foche. foice et foiche, n., force : Euje n ai pus lai foiche de trai-
voilier (Je n'ai plus la force, etc.). Ai foche de, à force de : Ai
foche d'ailler ai Veau, lai cruche eulle casse t c'est-a-dire tant va
la cruche, etc.
foice et foiche {été bin), être bien force, expression qui s'emploie
pour falloir, être nécessaire, être forcé : Vous li aîtes baillé vote
chien ? — Fast zeû bin foiche, je ne pouillôs (pou-iô) pu le neurri,
c'est-à-dire il a bien fallu que je le lui donne, j'ai été bien obligé
de le lui donner, etc.
* foinde, v., feindre, hésiter, craindre, redouter, céder : /' ne faut
pas foind'ieu, marche! (Il ne faut pas hésiter...). Tu ne foins pas
de me faire de lai poinne (Tu ne crains pas de me faire de la
1 Eu général, on ne contracte pas le mot eunne quand on veut ap-
peler, d'une manière particulière, l'attention sur le nom suivant.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX 35
peine). F ne foint rin, c'est-à-dire il ne redoute rien, il va tout
au travers, il ne recule devant aucune sottise, aucune dépense,
etc. jP faurot peuJt-ète que je foind'wu, ou foindie, moi, sai mère?
(Il faudrait peut-être que je cédasse, moi, sa mère?). — Foindre,
mollir, se laisser emporter??? Gros.
fointb, n., feinte; faux mouvement, glissade, faux pas: F ai fait
V fointieu, et peûs i'ai loche cheureucequ'ïpoutot, c'est-à-dire il
a fait un faux mouvement, et puis il a laissé tomber ce qu'il por-
tait.
foncé, n. adj., mangeur à qui la nourriture ne profite pas; affamé
qui a comme la boulimie : Ein gros foncé qui mainge Me lai
jonnéet c'esl-à dire un gros plein de soupe qui mange toute la
journée. F mainge comme ein foncé.
fondé, adj. ou part, pass , dru, épais, fourni, serré, en parlant
d'un blé, d'une prairie artificielle, d'une emblavure quelconque:
Mon treufe gnast pas grand, mas tast bin fondé, c'est-à-dire mon
trèfle n'est pas grand, mais il est dru, bien implanté, bien pris.
fondoub et fondioue, n., fondeur.
fonnagb, n., fournaise. (Fonnâgé).
fonné et fournieau, n., fourneau. Fonné ai chaux, fourneau à
chaux. Piaice ai fonné, la place où Ton a fait du charbon dans
les forêts. Ne s'emploie guère pour four, bien qu'on dise fonnée
(fournée), et enfonner.
fonnée, n., fournée. — Voir cueutieu.
fonnoiller, v., farfouiller, fouiller maladroitement, curieusement, % ffry^ • ( "? /
en cachette; chercher, fureter; déranger : Ç'ast toi qui ai fon-
noillé (fon-no-ié) dans note ormoire pendant que j'ètains patis au
bois? (C'est loi qui as farfouillé, etc ). Nos couchons fonnoillent
là lotière (Nos cochons fouillent, rerouent leur litière). J'entendôs
fonnoiller pa les bouchons; cèlot ein Méve (J'entendais remuer,
dans les buissons, etc.). Dans ce dernier sens, voir feurtiller et /
frouster. — Fonnoiller le feu, tisonner mal à propos, trop remuer
le feu. S'emploie aussi pour feurgonner, feurguger, etc.
fonnoilloue, adj. n., celui qui aime à fonnoiller, à farfouiller. —
Voir raivâtier.
fontaine, n., s'emploie pour lavoir.
fortungne, n., fortune, richesse.
fôssotte, n. dimin., fossette, petite fosse, petit trou. Absolument,
la fossette qui se trouve au bas du cervelet, sur la nuque. On dit
aussi crotot.
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36 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX
foucade, n., caprice, coup de tôle, lubie, accès de cottre : /' li prend
souvent des foucades, c'est-à-dire il a souvent des caprices, des
lubies, eic. La foucade s'étend du simple caprice à l'accès de folie.
fouillis et feuillis, n.. ramassis, balayures bonnes à, brûler, menu
bois, débris de fagots, de copeaux, brindilles, tiges sèches de
places, etc, : Mets ces fouillis-lai su le feu pou faire bourre lai
chaudére, c'est-à-dire mets ces débris-là, ces ramassis, etc. —
Fouillis, menu bois, balayures, Gros. ; fouillis, ramassis de menu
bois, Thév.
fouillon et feuillon, n., groin, le museau du cochon; terme de
mépris pour désigner le nez, la ligure d'une personne : Laive ton
feuillon, c'est-à-dire lave ta figure.
fouillouse, n., poche : Mets çai dans tai fouillouse (Mets ça dans
ta poche). Espèce d'argot qui vient sans doute de fouiller. —
Vieux franc, fouillouse, môme sens.
Fûuitf, n., fouine : Eul fouin i' ai maingè nos poules, c'est-à-dire la
fouine a mangé, etc.
fouiner, fouigner et foingxer, reculer, caler, caponner, saiguer du
nez au figuré. — Voir cusser. — Fouiner, se dérober, s'échapper,
Gros.
fouire, n., foire, diarrhée.
fouirer, v., foirer,
fouiroux, adj. n., foireux; trembleur. S'emploie aussi dans le sens
A'aiquais, ècœurjou, etc.
fouleme (ou foulére?) n., bon feu flambant de menu bois, co-
peaux légers, sarment ou fagot, qui s'allume vite et s'éteint de
môme. Quand on est un peu mouillé en été on fait V bonne
foulére, c'est-à-dire une bonne flambée. On dit aussi gâudelle. —
Ne pas confondre avec feulaine, feu public.
fouler, v., aggraver, par un travail trop prompt ou trop soutenu,
l'inflammation, l'enflure d'un membre déjà malade ou blessé :
/' aivot ein c\ou dans le braîs, i'ai v'iu ailler aux vingnes trop
tiôt et i' l'ai foulé; i'ai ein brais comme ein sieaul
foulle, adj. féminin de fou, folle.
foullbtot, n., espèce de feu follet; esprit méchant qui se prome-
nait la nuit, avec une lanterne, au bord des rivières et des pré-
cipices pour y attirer les voyageurs égarés, et qui riait aux éclats
quand il entendait la chute de ses victimes : Tu ris comme Foul-
letot, toi, quand ïairrive du mau aux aides. On dit aussi cueu-
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l
PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX 37
lard. — Culart, feu follet, Gros. — Vieux franc, follot, espèce
de follet.
foulure, n., inflammation, enflure survenue après avoir fatigué
imprudemment un membre blessé. — Voir fouler.
fournichoub, n., fournisseur. — Fournir, v., se dit fourni et four-
hin.
fous le camp et fous ton camp, locul. interject. du langage popu-
laire général, va-t-en ! hors d'ici !... — On dit quelquefois : Prends
saint Foulcan pou ton paitron.
foussé, n., fossé.
foutant, adj. verb., fichant, décourageant, vexant, ennuyeux, dé-
sagréable : Comme t pleut t Ç'ast-Ï foutant, aillez, de ne pas
pouvoi soti de laijonnéet c'est-à-dire comme il pleut! Est-ce con-
trariant, allez, de ne pas pouvoir sortir, etc..
foyard, n., voir Faîche. — Du vieux franc, failhard.
fragin, n., fraisil, braise ou charbon brisé mêlé de terre brûlée;
fond de fourneau.
FRAiJOTTE, n., fraise, particulièrement la fraise des bois : J'ai
cueilli des freijottes pieun ein connot (J'ai cueilli des fraises plein
un cornet. — Voir connot). Çai li monte gros, ein œût Comme
eunne freijolte dans lai gueule d'ein leup, c'est-à-dire comme une
fraise dans la gueule d'un loup.
fraîte, n., faîte : Note chaît, t ast au freiïieu du tôt, c'est-à-dire
notre chat est au faîte du toit.
fraîtiére, n., faîtière, tuilée. (Frêtiére).
frappouille (en), en miettes, écrasé, brisé, pulvérisé : fai lâché
cheur mai pioche su mon saibot; eulle l'ai mins en frappouille,
c'esl-à-dire elle l'a écrasé, brisé, mis en capilotade. J'ai tiré mai
caille de trop prêes : eulle l ast en frappouille, c'est-à-dire hachée,
en pièces, en miettes.
fras, frasse et frasque, adj., friable, cassant, qui se rompt faci-
lement, en parlant du bois : Vlai de Vousére qui ast frasse comme
du pommer, c'est-à-dire voilà de l'osier qui est cassant, qui se
rompt comme du pommier. Des cacas frasses, des noix friables
dont l'amande se brise quand on veut l'arracher de la coque;
des noix angleuses. — Du vieux franc, frai, rompu, brisé, fraire,
rompre, briser?
frayon et proyox (aivoir le on aivoir les). Voir aicueu. — Vieux
franc, froion, coup. — De frayer ?
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38 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVACX
fricaissie, n., fricassée; d'une manière absolue, omelette: Faire
lai fricaissie (Faire une omelette). On dit que la linotte chante :
Vingneron, vingneron qui ch..
Pou qu'an Vaippoute lai fricaissie.
Le plus souvent, c'est d'une omelette que les vignerons font leur
repas de midi. — Fricaissie, ch. de n.
frille-cul, n., serre-fesse, Jean gelé, qui se resserre à cause du
iroid, frileux outré. On dit aussi frodiurot.
frillkr (ou fribr?) v., passer quelque chose de velu sur une
flamme vive et légère, pour en brûler les poils, les duvets, etc.,
flamber. On frille une volaille, quand elle est plumée; on frille
ses mains, ses bras, etc. On dit aussi que la gelée a frille les
vignes, quand elle a légèrement endommagé les feuilles des
jeunes pousses au printemps. — Voir faloter.
friloux (fri-iou), adj., frileux, sensible au froid; dit moin9 que
frille-cul et frodiurot, et ne s'emploie qu'en bonne part.
frio et frioul (faire), expression qui signifie tenter, exciter la
gourmandise ou la sensualité, allécher, faire envie : /' voyotroti
le jambon, et çai li faijot frio, c'est-à-dire il voyait griller le
jambon et ça lui chatouillait le palais.
friouler, verbe de môme origine, et qui s'emploie dans le môme
sens : Lai gueule li frioule, c'est-à-dire sa gourmandise est gran-
dement excitée, l'eau lui en vient à la bouche... On dit de môme
lai gueule li tape, li tiaffe ou // c\aque (quiaque) (La gueule lui
tape, lui claque, etc.) — Voir tiaffer.
fripouille, n., menues choses de peu de valeur; rebuts : An ai
maingé teutes les belles noujottes, et i' ne reste pus que lai fri-
pouille su l'aissiette, c'est-à-dire il ne reste plus que les petites,
les mauvaises, le rebut. Appliqué aux personnes, signifie ra-
caille, lie du peuple, canaille. Ne pas confondre ce mot popu-
laire employé un peu partout avec frappouille. — Voir peurtin*
taille.
frochure, n., fressure; le cœur, la rate, le foie et les poumons
d'un animal, en particulier du porc; corôe.
frod, n. et adj., froid. L'adjectif fait au fém. frode (frodïexx.)
faobiure, n., froidure, froid. On prononce ce mot, ainsi que le
suivant, en mêlant intimement les lettres i et u.
frodiurot, n., trop frileux, trop sensible au froid : Tu te chauffes
pa ce bieau temps-lai, frodiurot! — Voir fri\oux et frille-cul.
frôlée, n., volée de coups, correction corporelle : F...-U V frôlée
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Qbo<
PATOIS DE LA FORÂT DE CLAIRVAUX 39
(Donne lai une volée). On dit aussi dégelée, dandine, raclée, pile,
filée, etc.
frommaige, n., fromage. (Fron-mége).
frommaigeot, n., la petite mauve (malva rotundifolia). — À cause
du fruit qui ressemble à un petit fromage? 2
frommentelle, n., espèce de graminée à épi roussâlre, qui pousse v • £ ^ » v £ '- ? '
en abondance dans les vignes, un panicum, croyons-nous. (Fron- K u /,'£, ci s J^
ment elle). ;. /.^^
FROMMEa, v., fermer. De même enfrommer et renfrommer (fron-
mé). — Froumer, G. et R.
FHOMMiÊRB, n. f fourmilière. (Fron-miére).
frommin, n., fourmi. Aivoir les frommins (/ron-mm) dans les jam-
bes, les brais, avoir les jambes, les bras engourdis, endormis.
fronce, n., ride. — Vieux français.
frondoille, n., espèce de fronde que se fabriquent les gamins pour
lancer des pierres. (Fronrfo-ieu).
frongner et refrongner, v., faire le grognon, le maussade, pren-
dre un air mécontent en recevant un ordre, obéir avec dépit,
regret; rechigner, faire des mouvements d'épaule comme pour
se gratter, etc. : Quast-ce que tu frongnes don ? Ce nastpas dif-
ficile poutiant de faire çai (Qu'est-ce que tu rechigne donc? etc ).
/' l'ai fait, mas en r frongnant, c'est-à-dire de mauvaise grâce,
en faisant la grimace. — Frongner s'emploie dans quelques vil-
lages pour frôler, toucher, frotter : /' m'ai fivngné en passant.
— Voir froyer.
FRO.vnoT (ou frontieau?) n., espèce de toque, de bourrelet, dont
on coiffe les petits enfants qui commencent à marcher, afin de
leur préserver le front des chutes. — Vieux franc, fronteau,
ornement du front.
froques, n., habits en général, avec une nuance de mépris, nippes,
frusques, frusquin; Raimasse tes froques et vai-t'en, c'est-à dire
ramasse tes nippes, prends ton saint-frusquin, etc. — Voir claque.
— De défroque?
frotte, n., frette, lien de fer autour du moyeu d'une roue, petite
rondelle. — Frotte, bourrelet de paille qui se met sur la tête. . .
Grosl.
frouste, interj., mimologisme peignant l'action, imitant le brait
d'un animal qui sort brusquement d'un buisson, d'un oiseau qui
s'envole tout à coup, etc., et, par analogie, d'une personne qui
s'échappe, qui disparait vite, au moment où l'on no s'y attend
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40 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRYAUX
pas : Y vient, et peûs, frouste, le v'iai patit (Il vient, et puis.. .
le voilà parti !) Frouste, n., peur : Aivoi lai frouste, c'est-à-dire
avoir peur, avoir la suée, trembler; quelquefois avoir la diar-
rhée, la courante.
frouster, verbe de même origine que le nom précédent et qui ne
s'emploie guère qu'à l'infinitif; se dit du bruit que fait un ani-
mal, particulièrement le gibier, en se levant dans le bois ou dans
un buisson et en s'échappant : J'ai entendu frouster dans lai tor-
chée de pignajot, mas je n'ai rin vu, c'est-à-dire j'ai entendu un
froufrou dans la cépée do nerprun, etc.
FROYEn, v., frayer; frôler, friser, effleurer : J'ai froyé V chemin
(J'ai frayé le chemin). /' me froijot et ï ri me r'cueuneuchot pas
(Il me frôlait et il ne me reconnaissait pas). Si mai piarre ne
l'aittraipe pas, eulle le froyerait (Si ma pierre ne le louche pas,
elle le frisera). Absolument, marclu r en serrant les jambes, de
manière à user, par le frottement, le bas de la jambière du pan-
talon : /' y ai toujous des fraimjes d'aiprées lai jambe de sai
cueulotte, % froye (/ro- ieu), c'est-à-dire il marche en frottant les
jambes l'une contre l'autre. — Vieux franc, affroyer, frôler. —
Défrayer?
froyoue, n., perche qu'on tient serrée, à l'aide d'une corde, contre
la roue d'une charrette, en guise de frein, de mécanique. On dit
aussi braloue. Froyoue, celui qui frotte, en marchant, les jambes
l'une contre l'autre, et qui use ainsi le bas intérieur de la jambe
du pantalon. — Oefroyer, frayer.
frut, n., fruit.
fumard, fummard, foumoue et fummoue, n. adj., fumeur, celui qui
fume; boudeur. Fumard et fun-mard s'appliquent plutôt au
boudeur, et fumoue, fun-moue, au fumeur de tabac. Dans les
deux sens, on dit quelquefois, en faisant un mauvais calembour g,
fumer et fummer (fumier).
Fumelle et fummelle, n., femelle; femme avec mépris.
fumer et fummer, n., fumier : Ein tas de fummer (fun-mé). Quand
on veut y mettre plus de délicatesse, on dit fien, et quelquefois
putif.
fumer et fummer, v., bouder : Ç'ast ein grand défaut, aillez, de
fummer (fun-mé), et i" fummerot d'où trois * mois, p't'-étepus, si je
ri lipalôspas (C'est un grand défaut, allez de bouder, et il bou-
* D'où trois, contraction de deux ou trois.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX 41
derait deux ou trois mois, peut être plus, etc.). — Fumer, bou-
der, Grosl. — Voir mingne, mené, pipion.
fumeron et fummeron, n. Oq nomme ainsi les petits tas de fumier
déchargés d'une voiture et espacés à intervalles égaux dans le
champ à fumer : J'ai zeû vingt fummerons (fun j meron) dans mai
voitiure, c'est-à-dire j'ai eu vingt tas, etc.
fummer, v., fumer, engraisser de fumier. (Fun-me).
fummure, n., fumure. (Fun-mure).
6ACHBMÉRB, n., garçonnière, petite fille qui fréquente les petits
garçons, injure entre enfants : Eulle l ast toujous d'aiveu les ga-
mins, cte gacheniére-iai.
gachenot et gaichenot, n. dimin , petit garçon, gamin; mot de
tendresse qui s'applique aux plus grands enfants, môme aux
adultes : J'ai rencontré nos gaichenot* qui s'en vont ensemble (en*
sembïeu) ai l'école, c'est-à-dire j'ai rencontré nos gamins, nos en-
fants, etc. — Je viens de vor mon prâuve gachenot qui ast bin mai-
laide, dira une mère en parlant d'un fils de trente ou quarante ans.
gachbnotte et gaichenotte, n. dimin., second fém. ie gachenot,
gamine, fillette. Ne s'applique guère qu'aux petites fillettes et
emporte très souvent une nuance de mépris.
gachon et gaichon, n., garçon, fils : J'ai deux gâchons et eunne fille
(J'ai deux garçons, deux fils et une fille). Ç'ast ein bon gaichon
(C'est un bon garçon). — Gachon, L. C. ; gachon, gaichon, P. T.;
gachon, G. et R.
gachottb et GAicHOTTE, n., fém. de gachon et de gachenot, fille, fil-
lette : Eulle l ast aiccouchée d'eunne gachotte, c'est-à-dire d'une
petite fille. S'emploie souvent avec une nuance de tendresse :
Eune crie pas mai gaichotte (Ne pleure pas ma fille, ma chérie).
Lai belle gachotte t c'est-à-dire la belle fille!
gade (gade et nadieu), n , garde : Eul gadleu te ferai ein rapport,
c'est-à-dire le garde te fera un procès.
GADBR, GAIDKR et GADIBR, Y., garder.
gai don et ga don. Voiraja don. — Cette interjection s'emploie quel-
quefois ironiquement pour répondre à une plaisanterie risquée,
à un compliment exagéré, à une affirmation saugrenue, etc. :
Ga dont gai dont aga dont c'est-à-dire ah bah! Tiens! Vrai-
ment! Pas possible! etc.
oaige, n., gage : Baille-me ein gaige (guêgé), c'est-à-dire donne-moi
un gage.
T. I. h
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42 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX
GAI6ER, v., goger, parier. (Guêgé) t
gailefeurtier, n., vaurien, polisson; mendiant, voyou, truand,
traîneur de routes, etc. Quel rapport entre ce mot et gaile-terre et
gailer? Ne semblerait-il pas plutôt de môme origine que qui-
1er?...
fç oailbr, v., labourer légèrement, racler, gratter la terre; labourer
par un mauvais temps, mal cultiver, labourer en général avec
A c ; = t <~ u - dédain ou pitié.
gaile-terre, n. comp., pauvre laboureur qui a de mauvais champs,
de mauvais chevaux, qui est mal outillé; laboureur en général,
avec pitié ou mépris : Ein méchant gaile-terre qui ne rècorte pas
seulement pou vivet (Un mauvais laboureur qui ne récolte pas
seulement pour vivre!) Oh, les prâuves gaile-terre, i's ne sont
guère heuroux pa ces méchants temps-lait (Oh, les pauvres culti-
vateurs, gratte-terre, ils ne sont guère heureux, etc. — Voir
gailer.
gailvauder, v., s'emploie pour marauder, picorer, flâner dans un
but de maraude; gaspiller, perdre, prodiguer; vendre à trop bas
prix : /' vai tous les jous gailvauder pa le bois, pa les vingnes,
c'est-à-dire il va tous les jours cherchant à marauder, etc. I'gail-
vaudeson bien, c'est-à-dire il gaspille, dissipe, mange, etc.
gaîlvaudier et gailvaudioue, n., celui qui gailvaude; rôdeur, ma-
raudeur, prodigue, gâte-métier, etc.
gain-gain, n., terme enfantin pour dire pois et haricots * : /' veut-i'
des gains-gains, mon gachenot? c'est-à-dire veut-il des haricots,
des pois, mon enfant? — De grain? — Gain-gain, pois, P. T.
gaingne-pain, n., petit outil de bois, en forme d'épée, qui sert aux
maçons pour décrotter leur truelle. — Vieux franc, gaignepain,
sorte d'épéc.
gaingner, v., gagner. Ceux qui raffinent prononcent gangner. De
môme regaingner.
gaisser, aigaisser, guiaisser (ou GUAissEB, etc.?), v., laver légè-
rement, passer à l'eau du linge qui n'est guère sale, ou en re-
passer qui s'est un peu sali en séchant, guéer» aiguayer. Gaisser,
laver mal, à la hâte, etc.; voir dans ce sens gassouiller. Gaisser
dans Veau, voir gargouiller, patouiller, etc.
« On confond dans le langage les haricots avec les pois, ou plutôt
les haricots se disent pois tout court, et les pois, pois roulots.
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V'-
PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIftVAUl 43
galafrb, d. adj., glouton, gros mangeur. Yoir gouliaf. — Galafe,
goulafe, qui mange gloutonnement, Thév.
; i galabme, n., galeme, vent du nord-ouest; Borée, l'aquilon.— Ga-
^ lêne, P. T.; galeme (ce mot est français), G. et R.
galatib, n., champ où l'on ne trouve pas assez de terre pour la- / c
bourer, champ maigre et de mauvaise qualité. On dit aussi ga-
lette. Galati n'est peut-être qu'un augmentatif de ee dernier
mot? — Voir gayette et crèiotie.
GALLiNE, n., bouchon qui sert au jeu de ce nom. Quand l'enjeu se
compose de ferrailles au lieu de sous, le bouchon est remplacé - ;
par une pierre conique beaucoup plus grosse qui se nomme ro*-
dri. — Galline, jeu de bouchon, Thév.
qalocher et GALOCH1ER, n., mal chaussé, pauvre homme plus ou , }
moins négligé dans sa mise, particulièrement la chaussure, dé- , >,
guenille. Au fig., misérable, traînard, truand, mendiant. — Voir ' /
traîne-galoches, vâchou, landrou, etc. — Vieux franc galocher,
rustre, grossier.
qalocher, v., traîner des galoches, aller mal chaussé, etc. — Voir
galocher, nom.
galoches (traîne), n. cornp., mal chaussé, qui a ses chaussures en
mauvais état, qui manque de tenue; mendiant, déguenillé, traî-
neur de grande route; au fig., lambin, négligent, traînard :
Eurleuve-don tes chausses, treine-galoches (Relève- donc tes bas*
nonchalant). Je ne veux pas lâcher entrer ein vie treine~galoches
comme çai chez nous (Je ne veux pas laisser entrer un vieux
mendiant, truand, etc.). Gnast jaimmas pi % ôt, euce trein&galo*
ches4ai(l\ n'est jamais prêt, ce lambin-là). — Gai loches, guêtres
sans boutonnière, Gros. — Voir galocher.
galopée (ai lai), locut. adv., à la hâte, encourant. Faire ai lai
galopée, une chose quelconque, la faire à la hàle, soit parce qu'on
est pressé, soit parce qu'on ne veut pas y mettre le temps et le
soin nécessaires.
galoux et gailoux, n. adj., qui a la gale, galeux, au prop. et au 6g.
gaxbin, n. et adj., boiteux, bancal : Y boitien et sai femme eulle l
ast gambingne, çai fait lai paire, c'est-à-dire il boite et sa femme
aussi, etc. — Gambin, boiteux, G. et R. — Vieux franc, gambe,
jambe.
gambingnbr, v., boiter, tirer la jambe en marchant.
gamingnb, n., gamine. — Voir gâchenotte et ganelle.
ganellb, n., gamine; se prend le plus souvent en mauvaise part m
.(V
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44 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX
Çai v'rot daji se passer de sai mère, eunne méchant' ganelle comme
çait c'est-à-dire ça voudrait déjà se passer de sa mère une ga-
mine, une morveuse, comme ça! — Ne pas confondre avec ga-
chotte qui se prend au contraire presque toujours en bonnj part.
oangan, mot qui ne s'emploie qu'avec l'adjectif veille (vieil e), et
désigne alors une vieille, vieille femme, caduque, au chef bran-
lant... Est le plus souvent dépéciatif : Eulle vourot se r'mairicr
c'te veille gangan-lai? c'est-à-dire elle voudrait se remarier, cette
vieille.... sorcière-là?
garde, n., carde, outil à peigner la laine.
garb-louvoir, inlerj., gare à vous, gare dessous, sauve qui peut!
S'emploie d'ordinaire plaisamment, pour signaler l'approche d'un
danger peu sérieux; par exemple on jette en l'air, au-dessus de
votre tête une poignée de terre, de sable, un chiffon sale, etc.,
et on vous crie : Gare louvoirt — De loup voir?
gabgan, n., espèce d'injure, nom que l'on donne au coq, lorsqu'on
est irrité par le chant répété ou par l'effronterie de cet animal :
Veux-tu te sauver, grand gargan ! Euce grand gargan-lai, i' bait
nos chaipons.
gabgari, n. (Voir garguillot). — Vieux franc, garyaite, gosier.
gargouiller, v., patauger dans une eau bourbeuse, agiter l'eau
d'une flaque, ou d'un ruisseau, avec ses pieds, ses mains, un bâ-
ton, etc. On dit à un enfant qui fait des fontaines : Tu vas t'en-
rheummer ai gargouiller lai dedans (Tu vas l'enrhumer à pa-
tauger, etc.). — V oir patouiller, tatouiller, gaisser. Gargouiller a
une signification plus générale et s'emploie surtout quand l'eau
est bourbcus*e. Gargouiller, se dit eucore de certain bruit que
font parfois les intestins quand le ventre est relâché : Çai me
gargouille dans le vente. — \ r oir grouiller. — De gargouille?
gargouillis, n., mauvaise cuisine, à grande sauce; flaque d'eau
bourbeuse. — Voir dans ce dernier sens margouillait.
garguillot, n., la trachée artère d'un animal mort en boucherie :
J'ai maingé du garguillot de vieau. Pour désigner la trachée d'un
être humain ou d'un animal vivant, on dit plutôt gargari; mais
ces deux mots se confondent souvent. On les emploie tous deux
aussi, indifféremment, pour trachée et pour œsophage: Note vai-
che, eulle vai crever; eulle l ai aivaillé V pomme de terre qui
li ast restée dans le gargari, ou dans le garguillot, ou même dans
le goulot. — Vieux franc, gargaite, gave, gosier.
6ARiu, y., inf. et part, pass., garnir et garni, harnacher et barna-
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIBYAUX 45
ché : r faut garni lai jiment (Il faut garnir la jument). On dit
aussi gamin à l'inf. et au part, passé : J'ai gamin, vai gamin
lai jiment, c'est-à-dire j'ai garni, etc.
gassouiller et gaissouiller, verbe de même origine que gaisser,
mais qui s'emploie surtout dans le sens de laver mal, à la hâte,
ou dans de l'eau sale : Eulle ne laive pas, eulle gassouille ses
haies dans de Veau • teuie nore, c'est-à-dire elle ne lave pas, elle
trempe, elle agile ses hardes dans de l'eau toute noire. Tri-
poter dans l'eau : Voir en ce sens gargouiller, patouiller, etc.
gatâ, n., gâteau, le plus souvent avec une nuance de mépris: Ç'ast
du gâté de St-Miché, — Qu gnai 3 ni beurre, ni sè\ — Gâtai, gâ-
teau, P. T. — Du vieux franc. Gastel? — Voir gâtieau.
oatieau, n., gâteau. S'emploie plus généralement que gâté.
GATOUILLER, GRATOUILLER, GA1TOUILLER et GRAITOU1LLER , V., cha-
touiller, titiller, gratter, pincer légèrement; taquiner : Ç'ast lu
qui méfait rire, t me gatouille (C'est lui qui me fait rire, il me
chatouille). — Voir arguigner et chaquigner. — Gratouiller, cha-
touiller, Gros.; Gratouiller, gratter légèrement, Tliév. — Dimi-
nutif de gratter?
gaudelle, n., bonne flambée de menu-bois. — Voir fouleire. Ne pas
confondre avec godelle. — De gaudere f
gauviottb, n., carotte sauvage (daucus carota); bourse, porte-
monnaie, réserve, cachette d'argent : Gnai pus rin dans mai
gauviotte (Il n'y a plus rien dans ma bourse). J'ai V bonne gau-
viotte decaichée, c'est-à-dire une bonne réserve, une bonne bourse
de cachée. — Goviotte, racine de carotte sauvage, Gros. — Voir
moinjotte.
gautis (ou gaulus, ou g5tis, ou gôillis?) n., choses qui tentent le
palais et ne sont point nourrissantes, crudités de digestion dif-
ficile, fruits verts, etc. Une mère dira à son enfant : T'aies mau
au vente d'aivoi maingé desgô*\is, c'est-à-dire tu as mal au ventre
d'avoir mangé des crudités, des choses indigestes, etc. Se prend
aussi pour ramonnances et pour fouillis, cheni : voir ces mots.
— Le singulier est rarement employé. — Goillis, ordure, mau-
vaise nourriture, Gros. ; goillis, mauvais aliment, Thév.
GATBTTB (ou GUÉTKTTE?) n., mauvaise vigne, maigre, mal implan-
tée, peu productive; vigne négligée, en friche : Eulle ne vaut
1 Prononcei cTieau.
* Qu'gn'ai pour qui n'ai, qui n'a.
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46 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX
pas lai poinne qu'an lai boiche, c'te gayette-lai (gué-iette), c'est-
à-dire elle ne vaut pas la peine qu'on la laboure, etc. — Gayette,
chèvre (?) P. T.; gayette, mauvaise vigne, 6. et R.
geae, n., geai, oiseau. (Jâ).
GBiNDB (pétfufieu), v., geindre, se plaindre.
geinmoue, n. adj., qui geint, qui se plaint de tout et toujours,
pleureur; malade imaginaire. S'emploie au propre et au fig. : Mas
gnai rinpèdiu, ç'ast ein geindioû (Mais il n'a rien perdu, c'est
un homme qui se plaint toujours). Gn'ast pas pu mailaide que
moi euce geindioû lai t
génie, n., s'emploie pour intelligence, jugement, compréhension,
etc. : Gnai point de génie c't' enfant-lai, ï ne comprend rin, i
n' devingne rin! c'est-à-dire pas d'intelligence, pas de réflexion;
il ne comprend rien, ne devine rien !
genon, n., genou : J'ai mau augenon (J'ai mal au genou). S' mette
ai gênons (Se mettre à genoux). — Vieux franc, genollon, genou.
gbnsaingne, n., gentiane, plante (jjentiana lutea).
gèvre, n., givre.
gibailler, v., jouer, badiner à chaque instant, avec persistance,
dune façon ennuyeuse, etc. — Voir gibet.
gibaillerib, n. dimin., action de gibailler.
giber, v., jouer, badiner, folâtrer; les enfants gibent, les jeunes
chiens gibent : En gibant ne vous faitïms pas mau, mes enfants
(En folâtrant, ne vous faites pas de mal . . .) Ce nast pas pou te mo-
rfiea, vai, ç'ast pou giber (Ce n'est pas pour te mordre, va, c'est
pour jouer). S'amuser parfois, comme le chat avec la souris : un
joueur, un rival quelconque gibe quand il épargne son adver-
saire d'abord, soit pour l'encourager, soit pour l'endormir, afin
de le battre ensuite plus complètement. — Jober, plaisanter,
Gros. ; jauper, sauter, G. et R. — Du vieux franc, jober, rail-
ler, plaisanter ? ou giber, se débattre, s'agiter, lutter?
gibbrie, n., action de giber, badinage, folàtrerie, jeu, plaisanterie :
Aies-tu fini tes giberiesf c'est-à-dire as-tu fini tes folàtreries? tes
badinages? tes gamineries? tes jeux de vilain? etc. — Joberie,
Gros.
gifflard, n. adj., joufflu, qui a de grosses joues, des joues pen-
dantes, des bajoues. Ne se dit qu'en mauvaise part : Ç'ast ein
grosgiff\ard (gifflard), c'est-à-dire un gros joufflu, un gros plein
de soupe. — Vieux franc, gifflard, joufflu.
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PATOIS DB LA FORÊT DE CLAIRVAUI 47
gifle (gifle), n., soufflet, gifle. Par analogie, sans doute, on ap-
pelle aussi gifles une inflammation des glandes salivaires qui fait
enfler les joues : Aivoir les gif -ieus.
gifler (gifler), v., souffleter, gifler.
gigance, n., morceau de viande, plutôt fraîche : Eulle sotot de lai
boucherie d'aiveu V bonne gigance de char (Elle sortait de la
boucherie avec un gros morceau de viande). Eulle l en tenoUÏ
eunne, hein, eunne gigance de vieau! c'est-à-dire en tenait-elle
une, etc. Ce mot emporte une idée de désir, d'envie. — De gigue,
c'est-à-dire de la forme et de la grosseur d'une gigue?
gigier, n., gésier; estomac avec mépris : l'en foume pleun son gi-
gier, c'est-à-dire plein son estomac, il s'emplit la panse. On dit
de même : pieun sonjaibot. — Voir jabot.
giglbr (ou jigler?), v., jaillir, sourdre : Veau gigle d'eunne rfa- ^\^/c - ? v ' L
doure, c'est-à-dire l'eau jaillit... (Voir dadoure). Eul sang li ai
giglé (giguiè) du nez. Dans ce dernier cas on dit plutôt drager.
Voir aussi tricer. — Richepin a employé gicler dans le môme
sens, Blasphèmes, Mort des dieux.
gignerée et GiNGNERÉE, n , ce que peut contenir le tablier ou le de-
vant de la jupe, ce qu'une femme peut porter dans son tablier
relevé, ou dans le giron de sa robe : l'ai cueilli dans note jadin
V grand' gignerée de pois. J'ai raippouté des vingnes eunne
gingnerée dharbe. — De gironnée ? — Vieux franc, géronnée.
gîtrb, n., gîte, demeure.
gla, n., espèce de roseau, très dur et très fistuleux, qui abonde
dans les eaux stagnantes, et dont les enfants autrefois se f lisaient
des moules à fondre des crayons de plomb : Eune cope pas des
g\âs (guiâs), tu cheurôs dans Veau (Ne coupe pas des roseaux,
tu tomberais, etc.). — Glas, glaïeul, Gros.
glaice, n. ; glace : Y ai gelé ai glaice (guiaice), c'est-à-dire il a gelé
à glace.
glaiçon, n., glaçon. (Guiaiçon).
glaire, n., glaire. (Guiaire).
glairer (glairer), n., glairer, baver, laisser échapper de la salive par
la bouche eu causant; parler mal à propos, médire, injurier :
Quast-ce tu glaires (guiaire) don? taise4e, c'est-à-dire qu'est-ce
que tu bavardes donc, etc. Dans ce dernier sens, on dit plutôt
baiver.
glairoux, n. et adj., glaireux, qui glaire, sale, morveux; se dit
au fig. d'un blanc-bec, d'un adversaire qu'on dédaigne, etc. :
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48 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVACX
Oh, je le crains bin, oui, ein bieau glairoux ! (guiairoux). S'em-
, ploie aussi pour baivoux, ècœurjou, etc.
glandon, n., brin d'avoine épiée; épi des graminées en général à
épis lâches : Oh, lai belle aivoine ! l'ai des g\andons (guiandons)
qui sont aussi hauts que moi. Les beaux parleurs prononcent
glandon, sans mouiller 17.
glaude, n. propre, Claude. (Guiaude).
glaudot, n. prop., diminutif de Glaude; mauvais couteau à man-
che de bois, sans ressort, mauvais couteau en général : Ein cou-
tieau çai? brament! çast einguiaudot! c'est-à-dire un couteau
cela? joliment! etc.
gleunne, n., glane. G\eunne (guieunne) d'ongnons, ognons attachés
en épi le long d'une tige, d'une baguette : J'ètains sarrés comme
eunne g\eunne d'ongnons, c'est-à-dire nous étions serrés comme
les ognons d'une glane. — Vieux franc, glaine et glenne, glane.
gleunner, v., glaner : Eulle l ai g\eunnè {guieunne) tote lai moi-
chon d'aiveu ses ganelles, c'est-à-dire elle a glané toute la moisson
avec ses petites filles.
glinguer, v., heurter des objets sonores, les secouer, faire du bruit
avec... On dit plutôt gringoler.
glorb, n., pour gloire, orgueil, recherche dans les vêtements,
vanité, coquetterie, luxe, pose : I's dépensent pus qu gnont *
veillant; ï ai trop de glore on g\ore (guiore) dans cte majon-
lai, c'est-à-dire ils dépensent plus qu'ils n'ont vaillant; il y a
trop de luxe, de représentation, etc., dans cette maison-là.
glorieux, adj., s'emploie pour coquet, vaniteux, luxueux : V n se
raimasserai rin, t ast trop glorieux, c'est-à-dire trop vaniteux,
il dépense trop pour paraître...
glousser, v., s'emploie pour désigner certain bruit que fait Peau
battue, comprimée... et particulièrement dans les chaussures :
/' ai pugé, çai glousse (guiousse) dans ses saibots. — Voir puger.
— Par analogie avec le cri de la poule qui appelle ses poussins?
(mais glousser se dit cloquer) ; ou le glouglou d'une bouteille?
glu, n., glui, botte de paille de seigle, quelquefois de blé, peignée,
ajustée de façon à ce que tous les épis se trouvent ensemble, qui
servait autrefois pour la couverture des maisons. Ne s'emploie
guère aujourd'hui que pour accoler la vigne. Se prononce g\u
4 Pour qu'fs n'ont.
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PATOIS DE LA FORÊT DB CLAIRVAUX 49
(guiu). — Vieux franc, jagleus, gluy, gluyon, botte de foin, de
paille, gerbe, etc.
gnogxottb, n., mot du langage populaire général, qui s'emploie
comme partout pour chose de peu d'importance, rien, niaiserie,
mauvaise raison» mauvaise excuse, etc. : Ç'ast de lai gnognotte I
? cnolle (ou niolle?) n., conte à dormir debout, mensonge, fable;
(voir narrée, nivelle); niaiserie, rien, chose de nulle valeur;
(confusion avec gnognotte?) personne sans caractère, sans fer-
meté, niaise, crédule : Tées V gnolle, c'est-à-dire un nigaud, un
badaud, un bêta, etc.
gobinot, n., espèce de petit pot à confiture en terre ou en faïence ;
petit vase à mettre le goûter des gens qui vont aux champs :
1' ai empouté de lai fricaissie pleun son gobinot (Il a emporté de
l'omelette plein son petit pot). — Voir poûtot. — Quand le vase
est en ferblanc il prend le nom de pot-de-camp. — De gobelet?
'/ godblle, n., mauvaise vache, maigre, vieille, qui donne peu de
lait; vache avec mépris : Détonne don vor tai godelle qui vai
canner les enfants; c'est-à-dire détourne donc voir ta vache, etc.
— Voir dagonne. — Du vieux franc, code, mauvaise brebis? ou
de godin? ou de codelle, codelotte, corde, vache à corde, qui se
fait traîner par la corde?... — Nous avons entendu dire : Tées
pus bête que tai vaicke, pus bête que sai code. . .
godot, n., godet, petit vase de terre, de ferblanc, etc., plus petit
encore que le gobinot.
gôdron, n., goudron. Saligôdron (voir ce mot à son ordre).
gôdronnbr, v., goudronner.
gogan, n., cheveu avec mépris : N'escoue — ou n'escueille — pas
tes gogans su note table, c'est-à-dire ne secoue pas tes crins sur
notre table. Le mot gogans désigne des cheveux plutôt longs...
— De catogan?
gogo (mailaide), adj. compos., malade pour rire, malade imagi-
naire; celui qui fait le malade pour ne pas travailler, pour être
mieux soigné, etc. : Ta, mailaide? Ein bieau mailaide gogot y
Vai-t'en don putiôt aux vingnest c'est-à-dire toi, malade? Un
beau malade pour rire! Va-t'en donc, etc. — y ^
> gôïon (ou gadillon?), n. adj., femme malpropre, qui gâche ce V 'y
qu'elle fait par trop de hâte ou trop peu de soin, souillon.— Voir
tatouille, toillon, tôt-tôt (Marie), etc.
- i gôné, part, pas., mal habillé, fagoté, habillé sans goût : Te v'iai
bin gênée, mai gaichottel (Te voilà bien fagotée, ma fille I) Ne
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50 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX
s'emploie qu'en mauvaise part, sans adverbe, ou avec bien, mal,
joliment, etc. — Du vieux franc, gonnelle, gonne, casaque, habit,
robe ou cotillon?
gôner (se), v., s'habiller sans goût, à la hâte, de travers, se fago-
ter : Comme eulle se gône don, cte veille intéressée-lai! c'est-à-
dire comme elle se fagote donc, comme elle s'habille donc pau-
vrement, ridiculement, cette vieille ladre-là î — Du vieux franc.
gonne, gonnelle ? — Voir gôné.
gorgette, n., gorgerette, collerette.
gormand, ad]., gourmand.
gorbiander, v., gourraander dans le sens de convoiter la portion des
autres, en prendre, en manger une partie... Un cheval gormande
ses camarades quand il mange plus que la part qui lui revient de
droit au râtelier commun. — Vieux français.
gormandige, n., gourmandise.
gouba, n., espèce de grosse cerise douce, de guigne. — De gober?
gouliaf et gouliafre, n. adj., qui mange avec excès, glouton,
goinfre, avale-tout-cru qu'on ne peut rassasier. On dit aussi ga-
lafre. — Goulafe, galafe, qui mange gloutonnement, Thév. —
Vieux franc, goulafre. — De goule, engouler?
goulot, n., s'emploie pour gosier, trachée, artère. — Voir gar~
guillot.
godrit, n., goret, petit cochon. Par analogie, enfant sale. — Vieux
franc, gorin, gorreau, petit cochon.
goûter, n., repas de midi. Le repas de quatre heures en été, s'ap-
pelle petit goûter.
goûter, v., manger pour la seconde fois vers midi; grand déjeuner,
ou dîner.
gotette (paitté), n. corn p., patte malade, pied non valide, pied
blessé On rencontre quelqu'un qui traîne la jambe :
Quast-ce que t'aies don trouvé? Là voù don que tu vas d'aiveu
tai paitte-goyette? c'est-à-dire qu'est-ce qu'il t'est donc arrivé?
Où donc vas-tu, en tirant ainsi la jambe?... Boiteux, invalide,
estropié d'une jambe : Ç'ast ein boitioux, eunne paitte-goyette.
Ce mot goyette ne s'emploie pas seul.
grabuche, n., grabuge. — Grabuche, L. C. ; grabuche, P. T.
grache, n., graisse; adj. grasse : /' ast mort de qrâche fondue (Il
est mort de graisse foudue). Eunne vaiche grache.
grageler, v., se dit des premiers balbutiements, des premiers sons
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX 51
articulés de l'enfant : An dirot qu't veut causer, ï grageule daji
(On dirait qu'il veut parler, il balbutie déjà. — Onomatopée?
graiffin, graiffignure et graiffingnure, n., égratignure, griffade.
— Du vieux franc, agrafineure, égratignure?
graiffigner et GRAiFFiNGNBR, v., égratigncr, griffer, déchirer avec
les ongles ou les griffes. — Du vieux franc, agraffyner, agrif-
fer? — Egrafigner, Gros.
grailler, v., s'emploie pour graillonner: cracher en tirant delà
gorge, avec bruit.
grainniot (ou graingniot?) n. dimin., petit grain : Ein graingniot
depoive, ein petiot graingniot de poive, c'est-à-dire un tout petit
grain de poivre; désigne en particulier la baie du troène (chau-
coyer ou bois puant) : Fs mettent des graingniots dans là vin pou
V couleurer, c'est-à-dire ils mettent des baies de troène, etc.
graippe, n., grappe, grappillon, raisin qui mûrit tardivement et
après les autres.
graippbr, v., grappiller, cueillir les grappes qui restent après la
vendange.
X graittb-cul, n., gratte-cul, baie de l'églantier. — De ce que la
graine de ce fruit, que mangent les enfants, est très hispide? —
Voir cocu.
graivandure et graivandiure, n., ouverture, fente, joint baillant,
entre deux pavés, deux ais de parquet, deux planches d'une ta-
ble, etc. : Mon aigutte (aigu-ieu), eulle l ai cheue dans lai grai-
vandure, c'est-à-dire mon aiguille est tombée dans la fente, dans
le déjoint. — Egravandure, fente, rainure, Gros. — Du vieux
franc, graveure, fente?
■ . gratve, n., rainure, entaille pratiquée dans la douve d'un tonneau,
d'une cuve, etc., pour y assujettir le fond. — Vieux franc, grève,
ligne, raie.
graiveucher, v., gravir un peu et redescendre pour remonter,
grimper en égratignant, en chatouillant, monter le long de quel-
que chose en s'y cramponnant comme avec des griffes : Quast-ce
que je sens don qui me graiveuche dans ou d'aiprèes les jambes,
eunne bête ? Non, ce n'ast quein poi d'harbe, c'est-à-dire qu'est-ce
que je sens donc qui m'égratigne, qui me grimpe le long des
jambes, une bête? Non, ce n'est qu'un brin d'herbe.
graivi, v., infin. et part, pas., gravir, grimper, et gravi, grimpé.
graivichot, n., grimpereau, petit oiseau grimpeur, qui s'attache
à l'écorce des arbres, qui gravit en spirale le long des troncs.
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52 PATOIS DE LA FORÊT DE ClAIRVAUX
graivichoue, n., enfant qui gravit bien, qui grimpe facilement aux
arhres et qui y déchire, y use ses pantalons : /' faut qui' grai-
viche, qui' dèvoire sai cueulotte, euce graivichoâ-lait c'est-à-dire
il faut qu'il grimpe, qu'il déchire, etc.
grand (ailler de), expression qui signifie aller vite, s'élancer brus-
quement, aller hardiment, sans précaution. Vous voulez repren-
dre un animal échappé qui vous fuit, et on vous crie : Mas, tu
li fais pour, t'y vas trop de grand, vai don piane piane, c'est-à-
dire tu lui fais peur, tu y vas trop brusquement, va donc douce-
ment. — S'emploie quelquefois au figuré.
grante, adj., grande, fém. de grand.
graou (pouter ai), porter quelqu'un sur son dos en le soutenant
sous les reins, tandis qu'il croise les bras autour du cou du por-
teur. On porte de cette façon les enfants surtout. On dit aussi pou-
ter ai graiou, ai graiou-mouton. ai graivou-mouton. — Graviau ou
grahau, cri des bouchers cherchant des veaux gras, Gros.; à
graos, loc. adv., porter quelqu'un sur le dos, Thév.
gré (faire), expression qui signifie faire de la p^ine, causer des
regrets : Çai m ai fait b in gré de le vor meuri (Cela m'a fait bien
de la peine de le voir mourir). Çai me fait gré de mainger çai
sans mes enfants, c'est-à-dire je souffre, je sens comme un re-
mords, de manger cela sans mes enfants. — Gré : cela me fait
gré, je le regrette, Gros. — De faire regret ?
grêlon (ou grailon?) n., le résidu des petits morceaux de panne
que l'on a coupés et fait fondre pour en tirer le saindoux : J'ai
fondu note panne, et j'ai fait un dourdon d'aiveu les grêlons,
c'est-à-dire une espèce de gâteau avec les résidus. (Voir dourdon).
Grêlon, lardon. Dans ce dernier sens, on dit plutôt chan de lard.
greunne, n., graine. (Grun-ne). On prononce de môme grun-netier,
grenetior, grainier.
gri gri gri, espèce d'interjection qu'on articule en même temps
qu'on chatouille les enfants pour les exciter à rire. — Voir dogt.
griache (pie), n., pie grièche.
grigou, n., s'applique, à Clairvaux, spécialement aux prisonniers :
Vlai les grigous qui vingnent, c'est-à-dire les détenus qui vien-
nent.
GRUOTTB, n. Voir bijotte.
grilleboui, n., bonnet de colon simple que les vieilles femmes por-
tent en hiver sous la cale et le calot.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX 53
griller, v., sonner, résonner, crier; se dit du bruit que font les
grelots {grillots), et par analogie du son que rendent certains
objets, par exemple une chaîne qu'on secoue, de la monnaie dans
une bourse, des dragées dans un cornet, les feuilles sèches, le
papier, la soie qu'on froisse, etc.: Eh, çai grille dans tai bourse?
(Eh, ça sonne dans ta bourse?) Çai grille comme des pois dans
ein tambour; et par antiphrase, comme du boudin dans V besaice,
c'est-à-dire ça ne résonne pas du tout.
grillot et gueurlot, n., grelot, sonnaille : Anmet desgrillots — ou
des gueurlots — aux chevaux qui s'èpantent, c'est-à-dire on met
des grelots aux chevaux qui s'épouvantent, aux chevaux om-
brageux. La sonnaille proprement dite s'appelle ècholle.— Gril-
lot, n., grillon, insecte : Prins, grillot t (Pris, grillon).— Grillot,
n., le rhinantus crista galli, et le rhinantus major, plantes qui
se dessèchent très vite et qui grillent (voir griller) fortemeut dans
l'herbe des prés et dans le foin nouvellement fait qu'on remue;
d'où la comparaison : So comme grillot, c'est-à-dire sec comme...
— Grillot. n., pinçon, ampoule : J'ai des gr illots desous les pieds
d'aivoitrop marché, c'est-à-dire j'ai des ampoules, etc.
grilloter, v., griller avec un sens restreint, c'est-à-dire plus par-
ticulièrement à la façon des grillots plantes.
grimonner, v., se plaindre, bougonner, etc. — Voir cotonner etra-
boter, qui ont le môme sens et s'emploient plus fréquemment.
grimpe {été en), être en bras de chemise, sans vêtement de dessus,
avoir ôté sa blouse ou son paletot. S'mette en grimpe, se mettre
en bras de chemise. — En guimpe?
grincher les dents, grincer les dents. — Voir gringner.
grinchoux, adj., grinche, bourru, d'une humeur difficile, aca-
riâtre, revêche; mal disposé. — Y o'ir gritigne.
gringne, adj., a, à peu près, la même signification que le précédent,
avec cette différence que grinchoux se rapporte plutôt au carac-
tère général, et que gringne marque une disposition, un état ac-
cidentel : Quast-ce qu ï ai don? i ast-i' gringne euce maitint
c'est-à-dire est-il mal disposé ce matin! — Greingne, triste, qui a
de l'humeur, Gros.
gringne-dents, n. comp., qui rit de tout mal à propos; maigre à
montrer les dents, affaibli par la maladie; pauvre, souffreteux,
de peu de valeur en général : Ah, je te ferai rire, vai, grand
gringne-dents, c'est-à-dire mauvais ricaneur! Hein, monprâuve
gringne-dents, t'aies zeû étrillé? c'est-à-dire tu as été bien malade?
^t*»-
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54 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIE VAUX
Eulle s'ast r'mairiée d'aiveu ein méchant gringne-dents de St-
Usaige, c'est-à-dire elle s'est remariée avec un pauvre homme,
cbélif, de peu de considération, etc., de St-Usage.— Voir gringner.
gringner les dents, retirer les lèvres de manière à laisser voir, à
tendre les dents; faire avec les lèvres et les dents des grimaces
de dédain, de menace, de souffrance... Ne pas confondre ce
mot avec grincher, grincer, faire crier les dents en serrant les
mâchoires. — Grigner les dents, grincer, G. et R. — De l'italien
digr ignare? a Non vedi tu cK e digrignan li denti... » (Dante,
Inf.).
gringoler, v., remuer, agiter quelque chose de sonore, de bruyant :
gringoler V chaîne, c'est-à-dire agiter, secouer une chaîne. N'
gringole pas lai pincette contre lai toque. S'emploie aussi intran-
sitivement : Raittaiche don vô tai chaîne qui gringole darrè tai
voitiure, c'est-à-dire rattache donc voir ta chaîne qui pend et fait
du bruit derrière ta voiture.
grioler, v., grelolter, frissonner, trembler, trembloter : J'ai frod
quejegriole, d'ailleurs, c'est-à-dire j'ai si froid que je grelotte.
Eujegriolôs de pour (Je tremblais de peur). On dit que la gelée,
') la gélatine, etc., griolent, d'où griolotte (voir ce mot). — Grioler
J se dit des raisins qui commencent à mûrir, Gros.
griolotte, n., gelée, en particulier la gelée de la galantine ou du
fromage d'Italie. — De grioler, trembloter.
grippo (ou grippeau?), n., petit raidillon, coteau difficile à monter,
petit bout de chemin en pente rapide, qu'on appelle aussi coup de
cul, sans doute parce que le cheval est obligé d'allonger le train
de derrière?... — Grippo, tertre, colline, Gros.
gritiot, n., aiguillier, étui à aiguiller. — Garitieau, étui à aiguil-
les, Gros.
gritolé, adj. ou part, pas., grivelé, bigarré, tacheté de couleurs
où le gris domine.
grôche, adj., grosse, fcm. de gros.
grongner, v., grogner.
grongnoler, v., dimin. de grongner, murmurer, maugréer, grom-
meler, tout bas, d'une manière indistincte; se plaindre douce-
ment, pleurnicher. Les enfants grongnolent quand ils sont souf-
frants et disposés à pleurer sérieusement...
gros-pied, nom d'une espèce de champignon comestible de la forêt
de Clairvaux. (?)
grouiller, v., s'emploie pour causer, répliquer, faire mine de vou-
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PATOIS DE LA FORÊT DB CLAIRVÀLX 55
loir protester ou se défendre. Une mère dit à son enfant qu'elle
gronde ou qu'elle corrige et qui veut s'excuser : Tiens, n grouille
pas ou je te... c'est-à-dire pas un mot, n'ouvre pas la bouche ou
je... tape. Grouiller se dit encore du bruit sourd que font par-
fois les intestins : Mon vente, t grouille, c'est-à-dire mon ventre
gronde. — Voir gargouiller. — S'emploie aussi dans le sens fran-
çais.
grume et grbumme, n., grain de raisin : Je n mainge pas V 1 grume
de ragin en venaingeant (Je ne mange pas un grain de raisin en
vendangeant). — Grume, id., Gros.
grume et grkummé, n., noyau de fruit, cerise, prune, pèche, etc. :
En maingeant les ceréges, i aivaile les grun-més, c'est-à-dire en
mangeant les cerises, il avale les noyaux. Dans quelques villages
grumieau et greummieau. — Gremets, sorte de bouillie faite de
lait et de petits morceaux de pâte, Thév.
grumelot et greummelot, n., petit amas de farine en boule dans la
bouillie, la colle de pâte, etc. ; petite boule qui se forme dans une
farine qui s'échauffe et se gâte; petit amas faisant corps à part
dans une matière quelconque, en poudre ou demi-liquide, etc.
Diminutif de grume ou de grumeau? Ou dit aussi maton.
gruotte et gruiottb, n., fressure de grand gibier, chevreuil, san-
glier, etc., qu'on enlève du corps tout chaud et qu'on apprête
pour être mangée immédiatement : Tons tiué ein chevreu, et j'ons
maingé lai gruiotte (gru-iotte) pou note dèjeunné (dèjun-né). —
Vieux franc, grue, fraise de veau.
6UATRE, n.. guêtre, le plus souvent avec une nuance de mépris.
(Guâlre). Traine-guâtres (voir traîne -galoches).
gdè, n., abreuvoir, espèce de mare, réservoir d'eau où l'on mène
boire les bestiaux, guéyer les chevaux, etc. — De gué ?
guenilloux, n., enguenillé, qui porte des guenilles, des habits en
mauvais état, mendiant, truand; enfant qui use beaucoup et
qu'il est difficile de tenir propre. S'emploie comme galocher, lan-
drou, cul p'ché, etc.
ouenuchb, n., s'emploie pour guenipe, catin: femme de mœurs lé-
gères.
gueuleton, n. , rep*s abondant et qui, le plus souvent, ne coûte rien,
franche lippée; festin, ripaille, ribcte.
gueuletonner, v., faire un gueuleton; ripailler, riboter.
1 Contraction de pas eunne; prononcez pane.
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56 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVÀUX
gueulot, gueuleron et gueuleri, il., goulot d'une bouteille, col et
embouchure d'un vase, d'une buire, etc. : J'ai ècarmouché le
gueuleron de lai boutoille (J'ai ébréehé le goulot de la bou-
teille). — La trachée artère se dit goulot et non gueulot. — Voir
garguillot. — Gueulleri, goulot de bouteille, Gros.
gueurlette, n., mauvaise brebis, maigre ou vieille : I's ont maingé
du mouton, zeux? — Brament! Ç'ast de lai méchant' gueurlette
(ils ont mangé du mouton, eux? — Joliment ! C'est de la mauvaise
brebis). S'emploie pour mouton en général avec une idée de dé-
préciation : Les gueurlettes, eulles sont leues tôt pa note treufe,
c'est-à-dire les moutons sont allés tout au travers de notre trèfle.
— Grelette, vieille brebis maigre, Gros.; gueurlette, id., P. T.
gueurli, v., infin. et part, pas., griller, brûler, roussir, hâler,etc,
ou grillé, brûlé, roussi, hàl»' 1 , etc. : Notejadin, ï ast tout gueurli
pa le soleil, c'est-à-dire tout grillé, tout desséché. Maigue comme
ein chait gueurli (Maigre comme un chat rôti). Tu mets tes cho-
chos trop prées du feu, i's vont guerli (Tu mets tes souliers trop
près du feu, ils vont brûler). Pois gueurlis. pois qu'on a fait
griller comme des marrons, en les couvrant de charbons ardents.
— Groslir, grosli, faire griller, grillé, Gros. — Du vieux franc.
groler, rissoler?
gueurlu, adj., grelu, paresseux, gourmand, etc. : Eune li baillez
don rin ai ce prâuve-lai, ç'ast ein vie' gueurlu, c'est-à-dire ne lui
donnez donc rien à ce pauvre-là, c'est un vieux paresseux, gour-
mand, qui mendie pour sa gueule, etc.
gueurner, v., grainer, produire beaucoup de graines : Les b\és
(biés) vont gueurner et' année. De môme ègueurner, égrener.
gueurmer et graingnier, n., grenier.
gueurnon, n., gratin, espèce de croûte qui tient au fond de la cas-
sero'e où l'on fait une cuisine farineuse ou féculente, telle que
bouillie, purée de pomme de terre, etc. : Sauce eul fond du pot,
t'airaies V gueumon, c'est-à-dire tu auras le gratin. Racle don V
gueumon* (Racle donc le gratin). — Voir raigueurner et rai-
gueumon.
gueurnotte, n. dimin., petite graine en général; en particulier les
criblures du blé.
1 Cette syllabe gueur est généralement prononcée gre par tous
ceux qui raffinent : grenon, grenotte ou greunnotle, greselle, ra-
grener, etc.
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PATOIS DE LA FORÊT DB CLAIRVAUX 57
gueurnoutlle, n., grenouille. Penre les gueurnouilles pa lai quoue
(coue), prendre les grenouilles par la queue, faire l'impossible,
ferrer les cigales, etc. A un imbécile, ou un fainéant qui vante
son adresse, ses travaux, etc., on répond : Oh, oui, t'en prends
des gueurnouilles pa lai quoue t
goeurnouillis, n., masse gélatineuse qui surnage au printemps
dans les eaux stagnantes; espèce de cryptogame verdâtre, sem-
blable à de la gelée, qui couvre le sol en certains endroits hu-
mides, ou après des pluies abondantes.
gueurzblle, n., groseille. Gueurzelle piquante, groseille à maque-
reau.
gdeurzeller et gueurz'leb, n., groseillier.
GUBUBZiLLBR, v., intrans., grésiller, tomber du grésil ; gueurziller,
v. trans., se dit de l'action du grésil sur les récoltes : /' gueur-
zille, et çai vai gueurziller nos vingnes, c'est-à-dire il tombe du
grésil, et ça va grésiller nos vignes.
GuâTER, v., guéer : Euje vas faire guéyer (jguè-ie) on je vas guéyer
mon chevau (Je vais guéer mon cheval). Par analogie, entrer dans
l'eau jusqu'aux genoux : Je n' nous sons pas baingnés, je nous
sons seulement guéyés, c'est-à-dire nous ne nous sommes pas bai-
gnés, etc.
guibole, n., mot du langage populaire général, jambe. — Voir
gunnevelle.
gcignànder et guingnander, v., aller où l'on n'a que faire, perdre
son temps à flâner; courir la prétantaine, etc. Ne se prend qu'en
mauvaise part : /' ast pati guignander pa les rues (Il est parti
flâner par les rues). /' ast zeû guingnander ce maitin d'aiveu son
feusil, c'est-à-dire il a été flâner ce matin avec son fusil, perdre
son temps à braconner. /' guingnande tente lai neut (Il court la
prétentaine toute la nuit). — Guignander, demander bassement
et avec importunité, Gros.; guignander, courir le soir, Thév.
GUIGNANDIER, GUINGNANDIER, GUIGNANDIOUB, etc., n. et adj., Celui
qui guignande, coureur, flâneur, braconnier. — Guignandeux,
mendiant, Gros. ; guignandier, flâneur, Thév.
guimbardéb, n., grosse voiture, charretée élevée, branlante, de
foin, de fagots, de gerbes, etc. : Oh, que guimbardéet (Oh,
quelle charretée !) — De guimbarde, voiture*
guingne, n., fruit du guingnier, guigne, espèce de cerise douce.
guingner, v., guigner, loucher; regarder du coin de l'oeil. — Voir
oanoyer, plus employé*
T. L 5
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X
58 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX
guingnikr, n., espèce de cerisier à fruits dont, guignier.
guingnotte, n. dimin. Aeguingne, pruneau de cerise sécbée au four.
gunnevelle, n., jambe, avec mépris : R'tire tes gunnevelles (gun-
n'velle) de devant note feu, que je pouille passer) Retire tes jam-
bes de devant notre feu, afin que je puisse passer). On emploie
aussi dans le même sens le mot guibole, qui implique parfois
une difformité de ce membre. — Kennevelles, jambes, Gros.
habeur-sai et habrb-sai, n., havre-sac; besace, carnier, etc. S'em-
ploie le plus souvent avec une nuance de mépris : Moi, empouter
c't' hâbeur-sai-lai ? J' aimer ôs enco meux ein p'ner, c'est-à-dire
moi, emporter ce havre-sac, ce vilain carnier-là, etc. ? J'aimerais
encore mieux emporter un panier.
hac hag hac, interj. — (Voir acacac).
rachbler, v., mal travailler, gâcher la besogne. — Voir kachier.
On dit aussi poucheler.
hachier, n., mauvais ouvrier en général qui gâche la besogne,
sabrenas ; homme indécis, vendeur ou acheteur qui hésite, qui
marchande beaucoup, qui ne sait pas en finir; en particulior
mauvais cultivateur. Dans ce dernier sens on dit plutôt gaile-
terre. — Hachelier, laboureur mal attelé, Gros. ; hachelier ou
hachier, ouvrier qui travaille mal, G. et R. — De hache? qui
travaille à la hache, grossièrement?
*hades < , n. pi., hardes, linge, effets, vêtements : J'ai renv'ché mai
hottée d' hades, c'est-à-dire j'ai renversé ma hottée de hardes.
hadi, adj., hardi.
hab, n., haie : J'ai planté (pianté) eunn' hâe vive (J'ai planté une
haie vive). — Haille, P. T.
haibile, adj., habile : HaibAe (haibiAexx) ai mainger, haibûe ai
traivoiller (Habile à manger, habile à travailler; sous entendu :
celui qui est...) S'emploie souvent pour adroit.
# haiche, n., hache. (Êche).
haichotte, n. dim., hachette, petite hache. (Échotte). — Vieux
franc, aiscette, petite hache.
# hailles, n. pi., haillons, guenilles; linge, hardes, avec mépris :
Eu&t-ce que j'ai b'sun de ses hailles su note hâe ? c'est-à-dire
est-ce que j'ai besoin de ses guenilles, de son linge, sur notre
haie? Pourquoi les y étend-elle?
4 Nous marquerons ainsi d'un astérisque les mots ou Yh est le plus
louvent aspirée.
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PATOIS DB LA FORÊT DE CLAIRVADI 59
'hainche, n., hanche : J'ai mau ai lai hainche, c'est-à-dire j'ai mal
à la hanche.
*hairb (ou aire, ou ÈRE, etc.?), adj., sec, dur, rêche, sans suc,
âpre, raboteux. On dit que le pain est haire, quand il est mal
levé, mal cuit et desséché; que la terre est haire, quand le so-
leil l'a desséchée subitement après des pluies abondantes; qu'on
a les mains haires, quand on les a trempées dans du vin, des
acides, etc., ou qu'on a jardiné, et que la peau en est sèche, ra-
boteuse, etc, — Haire, sec, sans suc, sans moiteur, Gros.
haireng, n., hareng : Ein haireng, deux hairengs, trois hairengs,
piquet (Un hareng, deux harengs, etc.). C'est une de ces for-
mules bizarres dont on se sert pour faire le premier bouchot
(voir boûchotte), et dont nous avons parlé dans c le baron Cro-
quepoule. »
hallier (ou hailler?), n., espèce de hangar, bûcher: J'ons du
bois pieun note haMier (a-ié), c'est-à-dire nous avons du bois plein
notre bûcher.
1 hamm, interj., sorte d'onomatopée, son qu'on fait entendre en ou-
vrant la bouche grande pour exciter les petits enfants à man-
ger leur|soupe : Oh, comme ç'ast bon! Allons, hammt c'est-à-
dire, ouvre la bouche, avale !
harbe, n., herbe.
harbiére, n., œsophage des petits quadrupèdes qui vivent d'herbe,
en particulier du lièvre et du lapin : T'aies dèpieauté V liéve ;
aies-tu oté Vharbiére? c'est-à-dire tu as dépouillé le lièvre; as-tu
ôté, enlevé l'œsophage?
harbolisse, n., herboriste.
harcelier, n., mauvais charretier, qui conduit mal les chevaux.
(Ar-ce-ié). Peu employé.
harche, n., herse, instrument aratoire.
harcher, v., herser. — Erser, herser?! Gros.
harle, n., hàle. — Vieux français.
HARNicHERet harnucher, v., harnacher. On dit plus souvent garni
et gamin.
harper, v., s'emploie pour happer, saisir, prendre avidement :Euje
li baille du pain, et t m' harpe çai comme ein chien (Je lui donne
du pain, et il me happe cela comme un chien). Happer? ou har-
per, détourné de son sens?
hasard {ç'ast d' ), expression qui signifie c'est peu probable : Iraies-
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60 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRYABX
tu at Paris ? — Ç'ast d'hasard, c'est-à-dire c'est peu probable,
je n'irai probablement pas. Ç'ast d'hasard si... Il n'est pas pro-
bable que... ou il est probable que... selon que cette expression
est suivie ou non de la négation : Ç'ast d'hasard s' i' pleut (pieut)
aujd'heu (Il n'est pas probable qu'il pleuve aujourd'hui). Ç'ast
d'hasard s'i' ne pleut pas aujd'heu (Il est probable qu'il pleuvra
aujourd'hui). Ç'ast d'hasard si équivaut donc à : ce serait un
hasard, un bel hasard si...
hâte déterre, n., morceau, coin de terre; petite pièce de terre,
plutôt bonne que mauvaise, possédée par quelqu'un qui n'en a
guère. Un manouvrier, un vigneron dira : J'aiaicheté eunne hâte
de terre, eunne petite hâte, eunne méchant' hâte, quéques hâtes. . .
pou me mette des pommes de terre. On prononce tantôt aie, tantôt
hâte, avec h aspirée. — Hatter, franchir par enjambée, Gros. —
Du vieux franc, haste, mesure de terre. — On dit aussi loquette.
haut-lai-quoue, n. comp., homme orgueilleux, vain, qui prend
des airs de supériorité ridicules : Ç'ast ein haut-lai-quoue, un
haut-la-queue, c'est-à-dire un poseur, un faiseur d'embarras, etc.
• hauts, n. plur., s'emploie pour hauteurs, coteaux, collines, som-
mets. Pa hauts et pa chemins, par monts et par vaux : J' sens
toujous pa hauts et pa chemins, c'est-à-dire je suis toujours en
marche, par les coteaux et par les plaines, par monts et par vaux,
par les terres et par les ehemins.
*hbin don, interj., tiens donc, allons donc, encore un effort, etc. :
Hein don, aittraipet (Tiens, vl'an, attrape). Hein don, pousse,
tire, taipe, c'est-à-dire, allons donc, pousse, tire, tape, etc. —
Heingne donc, Thév.
heingner (ou heinnier?), v., hennir : Ç'ast don ein chevau entier*
qu'% heingne, comme çai? (C'est donc un cheval entier, qu'il
hennit comme cela?) Au part, pass., heingne.
HÊMORuiTBS H n., hémorroïdes.
heulb, n., huile. — Heul, L. C; heul, ch. de n. — Vieux franc.
oelle.
heure (aic'f), loc. adv., à cette heure, à présent, maintenant, tout
de suite : Aie' t'heure que j'ai fait mai vingne, j'vas t'aidter,
c'est-à-dire maintenant que j'ai fini ma vigne, je vais t'aider.
heurler, v., hurler.
hburoux, adj ., heureux. S'emploie souvent pour tranquille, à l'aise,
4 On prononce toujours IV dans ce mot, comme dans fier : entierr f
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i
PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX 61
etc. : Taies Un heuroux, tu n'aies pus tin ai faire de Vannée
(an-née), c'est-à-dire tu es bien tranquille, tu n'as plus rien à
faire de l'année. I's sont bin heuroux, i's ont du pain, du vin et
de l'argent.
heursé, adj. et part, pass., hérissé, mal peigné : Eunne grôche tête
heursée (Une grosse tête hérissée). Au fig. grinche, bourru, re-
vôche, irritable : Pale don vor meux que çai, peut heursé t c'est-
à-dire parle donc voir mieux que cela, vilain bourru, grinche.
hburseh (s*), v., se hérisser les cheveux, se peigner à rebours ; au
fig., se mettre de mauvaise humeur, s'irriter, se cabrer. — Voir
heursé.
hiche et hiche HiCHE hiche! interject., qui exprime la sensation du
froid, ou du frisson, au propre et au fig. : Qh, qu'f fait frod ce
tnaitin, hiche hiche hiche l (Oh, qu'il fait froid ce matin, brrr !)
Que coutieau, hiche t Çai fait frod dans le dos. — Hiche, même
sens, Thév.
himeur, n., humeur dans toutes ses acceptions. On fait ce mot mas-
culin.
hirsoh, n., hérisson, animal; roue d'une charrue; une espèce de
galium très commun dans les moissons, le galium aparine et ses
variétés.
hôlée, houléb et HULÉB (ou ôliSb, ouléb et uléb?), n., averse, la-
vasse : /' ai cheu V boinne hôlée de p)ene (pieue), c'est-à-dire il
est tombé une averse, une bonne averse de pluie. S'emploie aussi
au figuré, comme averse, pour gronderie subite, réprimande sé-
vère : l'en ai zeû eunn 9 hôlée du maite $ école t—Hulée, giboulée,
Gros.; hulée, averse, G. et R.
# hôlbr, v., s'emploie pour appeler en criant, se réclamer : T ètot / /
pèdiu, i' hôlot teut pa le bois (Il était perdu, il criait, appelait,
tout par le bois, c'est-à-dire tout au travers du bois, dans tous
les coins du bois. On trouve ollant pour hurlant, xm* siècle.
hongnard et hoingnard, n. adj., grognon, pleurnicheur; qui chan-
tonne entre ses dents; qui chante mal. — Voir hongner.
bongnbr et hoingner, v., chantonner enlre les dents ; mal chanter ;
fredonner, avec une idée de dépréciation : Lé, chanter? Eulle l
hongnet c'est-à-dire elle, chanter ? Elle chantonne, elle détonne,
elle dégoise ! S'emploie aussi pour grogner, geindre, pleurni-
cher : Quast<e que V hongnes don ? Taies mau aux dents ? —
De hogner? Hoingner, huigner, murmurer, gronder, xin* siècle.
— Hongner, pleurnicher, Thév.
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62 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX
hontable et HONTABE, adj., honteux, vergogneux, qui doit faire
honte, déshonorant, flétrissant : Çast hontable (hontâtteu), c'est-
à-dire cela fait honte. Dans le sens de timide, on dit hontoux.
hontoux, adj., honteux. — Voir hontable.
hoqueler, v., agiter, secouer, hocher, cahoter, ébranler, faire des
hoquelots : N hoqueulle pas tant tai brouvotte, tu vas renv'cher,
c'est-à-dire ne secoue, ne cahotte pas tant ta brouette, tu vas
renverser, sous entend, ce quelle contient. Hoqueler, intransilif,
être peu solide, remuer, branler : Tlai V piarre de lai mureille
qui hoqueulle et qui vai bintot cheur (Voilà une pierre du mur qui
branle, etc.). Tai V dent qui hoqueulle. Hoqueler, travailler
pour rire, gaspiller, perdre son temps à des minuties, à de la
besogne de peu de valeur (voir dans ce sens arrioler, beurlau-
der, etc.). Au fig. hésiter en affaire, marchandailler, n'y aller
que d'une jambe (voir épier, èpiloguer, etc.). Hoqueler, se prend
toujours en mauvaise part. Au propre et dans le premier sens, si
les secousses ne sont pas maladroites, si elles sont voulues, on
dira plutôt escouer ou scueiller * . — Hocler, remuer, secouer,
ébranler, Gros. ; hocler, secouer, cahoter, heurter à la porte,
Thév. — Du vieux franc, hocqueter, ébranler, secouer ? ou hoc-
queller, chicaner, quereller, disputer ?
hoquelle, n., vieille vache; vache avec une idée de dépréciation,
de mépris; s'accompagne ordinairement des adjectifs veille,
(vieille) ou méchante. On dit aussi godelle; mais hoquelleest plus
énergique. — Hocqudle, meuble usé, vieil outil, Gros. — De
hoqueler ?
hoquelot, n., secousse, cahot : Les hoquelots i's ont fait cheur les
jarbes de dessus lai voitiure (Les cahots ont fait tomber les gerbes
de dessus la voiture). Y ailler par hoquelots, c'est-à-dire en ho-
quetant, par secousses, irrégulièrement. On dit aussi sargot ou
sarcot.
hoqueton, n., homme, enfant, qui n'a pas la taille ordinaire, petit
court, mal venu, difforme, bout d'homme; se dit avec mépris :
Ein bel hoqueton pou penser ai se mairiert c'est-à-dire un beau
nain, un beau nabot, etc. S'emploie aussi quelquefois en parlant
des animaux. — Voir aiquais.
1 Hoqueler et dèsoquier ou dèshoqueler sont-ils de môme origine?
Nous n'avons pu déterminer les rapports exacts qu'il y a entre ces
mots, tant ils ont de significations et de prononciations diverses et
confuses.
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PATOIS DE LA FOBÊT DE CLAIRVAUX 63
hoqubullerie, n., besogne mal faite, travail inutile, minutie; tra-
casserie en affaire, etc. — Voir hoqueler.
hoquier (ou hoquelier?), n., mauvais ouvrier, qui travaille mal,
qui perd son temps (voir bricoUer et hachier); tracassier en af-
faires. — Voir hoqueler.
hosto (ou osto?), d., maison, domicile : Aujd'heu, je reste ai
thosto, c'est-à-dire aujourd'hui, je ne sors pas, je reste à la mai-
son. S'emploie plutôt en plaisantant. — Hotey, L. C; hoté, hotai,
P. T.; hotai, G. et R. — Du vieux franc, ost?
hotteret, n. dim., petite hotte; la hotte ordinaire, par opposition
avec la hotte à vendange beaucoup plus grande.
* hottitie, hottètèe et HOTTATA, interj., sorte de mimologisme, mot
qu'on prononce en même temps qu'on soulève un petit enfant
pour le prendre sur ses bras : Viens vas moi, mon gachenot,
viens, allons hottitie î c'est-à-dire, viens vers (\xmr près de) moi,
mon enfant, etc. On dit aussi : Viens faire hottitie t c'est-à-dire
viens entre mes bras, viens t'élancer, faire un effort, un houp t
hoddé et hodé (ou oudé et odé?) \ part, pass., fatigué, lassé, dé-
goûté, importuné : Toujous goder les petiots, j'en seâs houdée
(Toujours garder les enfants, j'en suis fatiguée, ennuyée, rebu-
tée). F p\eut tous les jous, an en ast odé, c'est-à-dire on en est
lassé, dégoûté. — Odé, las, fatigué, Gros. — Vieux franc, hodé,
lassitude.
houder et hoder (ou ouder et oder), v., fatiguer, lasser, ennuyer,
rebuter, excéder. S'emploie beaucoup plus rarement que le par-
ticipe passé. — Oder, fatiguer, Thév.
houle au bâton et boule au bâton, espèce de jeu d'enfants. — Me-
ner lai boule au bâton (voir boule).
houper, v., appeler quelqu'un en criant : hoûpet Ne pas confondre
ce mot avec hôler : hôler, c'est plutôt crier fort ; hoûper, c'est
pousser le seul son hoûpe répété et prolongé.— De houpper, terme
de vénerie, sans doute.
houspingner et houspailler, v., houspiller, secouer, gronder;
maltraiter, corriger corporellement.
* Dans la plupart de ces mots, haire, hôlée, hongner, hoqueler,
houder, etc., l'A, s'il existe, se fait rarement sentir... Cependant
quelquefois on prononce dé t hoquelots, dé hôlées, etc., et presque
toujours de houtons : c'est pourquoi nous avons cru devoir ortho-
graphier ainsi...
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64 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX
* housse, interj., arrière, fi, va4-en, f... le camp, loin de mo\,apage...
Housse t contient plus de mépris encore que tous ces mots en-
semble; c'est là manière la plus énergique, la plus grossière de
chasser quelqu'un : Allons, housse t c'est-à-dire f... le camp, dé-
busque! — De huis, porte, ou du vieux franc, hus, cri pour ar-
rêter un voleur?
houssinonb, n., houssine, baguette longue et flexible.
houtons, n. pi., grains dans leurs balles ou glumes (voir dosses) 9
bourriers, débris de paille et d'épis qui s'amassent à la surface
du van : Ç'ast mal baittu, t y ai p\eun des houtons, c'est-à-dire
c'est mal battu, il y a beaucoup de bourriers, de grains dans les
balles, etc. Ne pas confondre ce mot avec clivures, criblures :
dans les houtons, se trouvent quelquefois les plus beaux grains
de blé, les plus gros. Ceux qui raffinent disent hautons. — Hot-
tons, graine maigre qu'on sépare du blé en le nettoyant, Gros.—
Vieux franc, hauton, aulton.
rus (ai F ), loc. adv., à la porte, dehors : F... 4e ai F hus (Mets-le
à la porte). T pleut qu'an ne mettrot pas ein chien ai Vhus, c'est-
à-dire il pleut à ne pas mettre un chien dehors. — Hus, à Vhus,
huis, porte, Gros.; hû, porte, G. et R. — Du vieux franc, ius,
us, huis, uis, porte.
russieb, n., huissier.
i', pron. pers., il. Au pluriel, nous écrivons t$; mais on ne doit
jamais faire sentir 1'* en prononçant ce mot.
imprimoub, n., imprimeur.
ilai, adv., là : T ast ilai, c'est-à-dire il est là. — Du vieux franc.
ilec ?
incre (ou aincre?), adj., raide, tenace, têtu, rancunier, d'un ca-
ractère difficile : T ast bon gachon, mas ein poichot incre, c'est-
à-dire un peu susceptible, un peu difficile à convaincre... Le
sens de ce mot est assez vague.
inc'môde, ad., incommode.
indifférent (néte pas), être assez bien, assez bon, assez beau, pas
mauvais, etc., selon les cas : Eullel ast-ï belle, sai femme? —
Eulle n f ast pas indifférente. — Ton liéve forcé t ètot-i bon ? — /*
n*ètot pas indifférent, c'est-à-dire elle est passable, assez belle,
elle n'est pas laide; mon lièvre n'était pas trop mauvais.
indingnb, adj., indigne; remuant, insupportable. Se dit particu-
lièrement d'un enfant difficile à tenir, à garder, etc. : r ne peut
pas se tenin tranquille, ï ast indingne, euce petiot-lait
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PATOIS DE LA FORÊT DI CLAIRVAUX 65
nn>iOT, adj., idiot.
ivrogne et ivrongne, ii M pièce d'an pressoir, morceau de bois long
et étroit qui se place immédiatement sur le marc et supporte les
planches. Cette pièce, s" enfonçant entièrement dans le marc, est
censée boire plus que de raison.
jabe et jable, n., s'emploie pour désigner à la fois l'entaille, la rai- ~7*0'V~ ( J • n M y
nure du tonneau, et la partie extérieure des douves qui fait sail- J
lie autour du fond : Prends le meud pa V jâb\e. / J/^r &
iabi, part, pass., mal habillé, fagoté : Oh, mon gaichenot, comme te _ , — - A
vlaijâbxt c'est-à-dire comme te voilà fagoté, ficelé! Eulle last Ix'}^*)^'^'
binjâbie, ma fi, pou V mairiée t Se prend toujours en mauvaise / ' ± ( *JUIjC ' ]
part. * ^
jabi (s'), infin., se fagoter, s'habiller sans goût; s'habiller avec
dédain. Peu employé. — Voir gôné.
jabot et jaibot, n., estomac, avec une nuance de dépréciation plai-
sante : Ai c'Vheure que t'aies le jabot p\eun, mi traivoiller, c'est-
à-dire à présent que tu as la panse pleine, etc. Mets çai dans ton
jaibot, c'est-à-dire avale cela, mets-toi cela sur la conscience.
jachon et jAiGHOif, n., aiguillon, dard d'abeille, de guêpe, etc. ;
langue de couleuvre, de vipère : Eulle l ai loche son jachon dans
mon pence, lai mouche ai mxèe, c'est-à-dire l'abeille a laissé son
aiguillon dans mon pouce. Vlai V couleuve qui tire son jai-
chon*. Par analogie, voix piquante qui entre dans les oreilles
comme un dard : Taise-te, tu me fends-lai tète cTaiveu ton jachon,
c'est-à-dire avec ta voix criarde, ton babil incessant, etc. On' 1 (
nomme aassi jachons, jaichons, les lattes qui servent comme de
charpente dans une hotte, un mannequin, etc., et autour des
quelles se tresse l'osier, la partie d'un panier qu'on appelle co- J
lonnailles : Teus les jaichons de mai hotte i's sont cassés. — Jar-
son, langue ou dard de couleuvre, Gros.
jàcquedàlle et jacquedane, n., étourdi, évaporé, personne sans
jugement, qui agit brusquement sans réflexion; toqué. Jacques
danef — Voir dans.
jadin et jadiin, n., jardin. — Qiïtchin, G. et R. ; queutchin, P. T. _ / ^ /
JA1DRB (ou gêdre?), adjectif qui ne s'emploie qu'avec le nom œû % i s*rf-&t
(œuf) : œû gèdre, œuf qui n'a pas de coque, que la poule a pondu
* On croit encore assez généralement que les serpents piquent
avec leur langue, qu'on prend pour un dard.
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M-*
66 PATOIS DE LA FORÊT DIS CLAIRVAUX
prématurément. — Jadre (œuf) qui n'a qu'une pellicule pont
coque, Gros.
jaidrou, adj., maladif, malingre, rachitique, souffreteux. S'appli-
que plus particulièrement aux petit» enfants, avec une nuance de
pitié.— Pour chaitroux, c'est-à-dire en chaitre? (voir chaitre). —
Vieux franc, chestreux, chestron, malheureux, digne de pitié.
jaimmas, adj., jamais. (Jain-mâ).
jaimmée, n., la largeur de terrain qu'en labourant le vigneron
prend, mène dune fois, ce qu'il peut cultiver avec la pioche ou
le vessou, en allant droit devant lui, sans effort de côté, c'est-à-
dire à peu près la largeur de l'écartement des jambes : Tées
gêné, t'aies prins V jain-mée trop large (Tu es gêné, tu as pris,
etc.). — Du vieux mot jame, jambe?
jairle et jarle, n., jale, espèce de baquet; petit fût, qui n'a qu'un
fond et qui sert à transporter le vin du pressoir.— Gerle ou jarle,
Gros. ; gerle, jarle, petit cuvier, G, et R. ; jalois, seau, vase de
bois, P. T. — Vieux franc, jalle, jarle, jaille, jallaie, jalois,
mesure, seau.
jarbe (ougearbe?), n., gerbe. — Vieux franc, jarle, botte.
,, a V jargillerie, n., plante adventice, une, et même plusieurs espèces
7 / V /^ J \ de vesces, les vicia cracca, villosa, glabrescens.— Du vieux franc.
^ -*V jergerie, gergerie, mauvaise herbe?
jargotter, v., tousser, d'une toux nerveuse causée par une irrita-
tion des bronches, toussai lier; tousser, avec une nuance de dé-
pit : Je ne sens pas enrheummé et j'ai jargotté tente lai neut, c'est-
à-dire j'ai toussaillé. Diâbe qui te jargotté t Le diable qui te
^ " • v v tousse !
/ jaser, v., s'emploie pour hésiter en quoi que ce soit, être indécis,
incertain; dilayer : Quast-ce que tu jases don? Gnai point de
danger (Qu'est-ce que tu hésites donc? il n'y a pas de danger).
1 D'aiveu moi, % ne faut pas jaser, çast tout de suite ou point
(Avec moi, il ne faut pas tergiverser, etc.). — Voir épier, épilo-
guer. — De jaser, causer, c'est-à-dire bavarder au lieu d'agir?
jauge, n., désigne particulièrement Yentaille qu'on fait en culti-
vant avec la bêche. — Voir entaille. — Du vieux franc, gaugef
- ' jaunotte, n., espèce de champignon comestible, la chanterelle,
-'I r s L cantharellus cibarius.
jéionner (ou géionner?), v., jalonner.
JÉON et jéion (ou géon?), n., jalon.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX 67
jetion et nnotf, n., essaim, essaim d'abeilles : Ein ftion, ou ein
jition de mouches (Un essaim d'abeilles). —Jeton, essaim d'abeil-
beilles, Thév. — \oir jitier.
jeue et joe, n., joue : Menton rond, bouche d'argent, nez cancan,
jeue breûlée,jeue rôtie, petit œillot, gros œillot, toque maillot t
jiment, n., jument. — Giment, Gros.
jitier et j'tier, v., jeter : Jittieu bramont des piarres dans monja-
din ! (Jette bien des pierres dans mon jardin !) — Jitier-lai, jeter
dehors, rejeter, rebuter : Tu ne sais pas éplucher les mousserons,
t'en jittien-lai trop, c'est-à-dire tu en rejettes trop, tu en rebutes
trop. Jitier en parlant des abeilles, essaimer : /' fait chaud, nos
mouches jitt'iexiront pt-éte aujd'heu, c'est-à-dire essaimeront
peut-être aujourd'hui. — Jiquey, P. T.; jiquer, G. et R.; jiquier,
ch. de h. ; jeter, essaimer, Thév.
joinde (joindieu), v., joindre; obéir : D'aiveu moi, i' faut que les
enfants /otWieu 4 , ou joindiaint, c'est-à-dire avec moi, il faut
que les enfants joignent, plient, obéissent. Faire joindieix aux
bosses, faire obéir quand même, à la parole : Si jaivôs ton gai-
min, je le feras joind'ieu aux bosses, c'est-à-dire je le ferais obéir
vite et quand même.
joinbioub, n., outil de tonnelier qui sert à joindre les douves d'un
tonneau, jointeur. — Joindoux, pince avec laquelle on force le
dernier cerceau d'un tonneau, Gros. — Grosley a confondu cet
instrument avec le chien ou le davier, sans doute.
jointiéb, n., joinlée, ce que les deux mains jointes peuvent conte-
nir. — Vieux français.
jonné, jonnau et jonniau, n., journal, mesure de terre d'environ
trente-deux ares : Ce nast pas les grands chevaux qui font les
grands jonnaux, c'est-à-dire ce ne sont pas les plus apparents,
les plus forts, etc., qui font le plus de besogne.
jonnée, n., journée. Homme de jonnée, journalier, homme qu'on
loue a la journée : J'ons zeû 'n jonnée aujd'heu, c'est-à-dire nous
avons eu une personne de journée (homme ou femme) aujour-
d'hui. /' ne fait rin de lai sainte jonnée, il ne travaille pas de la
journée, de la grande journée, de toute la journée du bon Dieu.
jou, jeu et jo, n., jour : Tu le sentiraies meux que V point du jou
4 Nous sommes obligés de supprimer ici la marque du pluriel,
afin de pouvoir conserver à peu près la prononciation.
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68 PATOIS DE LA FORÊT DB ttAIRVAUX
(Ta le sentiras mieux que le point du jour). Euljou a lai neut.
r y ai pus de jous que de semaines»
jouaillon, jouasse et jouasson, n., joueur, avec une idée de dé-
préciation, joueur qui joue mal, ou qui joue trop... Dans le pre-
mier sens on dit aussi juotin.
jouchoue, n., juc, juchoir, perchoir, lieu ou les poules et autres
volailles juchent, perchent, se couchent. — Voir Jouquer.
jououe, n., joueur. Prononcez comme joueur, en changeant eur en
où. — Voir jouaillon.
jouquer, juquer et joucher, v., jucher, percher : Là vou dan qu'i'
vai se jouquer? (Où donc va-t-il se percher, se jucher?)— Vieux
franc, jouquer, même sens.
jousqub, prép., jusque.
joutte, n., bette-poirée, carde. (Beta vulgaris et delà).
jun, n., juin, nom de mois.
_ lâche, adj., s'emploie exclusivement pour paresseux, fainéant.
ci lâche, n., laisse ou lesse, glas funèbre, certaine liturgie en l'hon-
~V. neur des morts : Quand an seûne trois lâches, ç'ast ein homme,
deux, ç'ast V femme % c'est-à-dire quand on sonne trois lesses,
etc. — Laisse ou lesse, sonnerie pour les morts, Gros. — Du vieux
franc, lesse, air, chanson?
lâcher, v., laisser. — Lachey, L. C; lachey, P. T. — Ne pas con-
fondre ce mot, dont Y a est très bref, avec lâcher.
, - - ladon et lardon, n., espèce de champignon comestible dont la chair
. ) ressemble en quelque sorte à du lard. ?
lai, art. simp. fém., la : Lai majon (La maison).— Lai, la, P. T.
- / * lai, pron. pers. fém., la : Je lai demanderai en mairiaige (Je la
Y * c demanderai en mariage). S'emploie à l'accusatif.
' t \ fi\C lai, adv., là : Bulle l ast lai (Elle est là). — Voir lai vob.
I laiçot, n., lacet. Laiçot, nœud coulant pour prendre des oiseaux,
particulièrement les mères sur leurs nids.
lainoue (ou lingue?), n., languo : Tèes comme les estragtàs, tu
/ ,i \ l ^ n'aies que lai laingue de boinne, c'est-à-dire tu es comme les es-
* K ' * y 4 , t , , , ) cargots, tu n'as que la langue de bonne. — Vieux franc, laingue.
/,*'•'/ laitice, n., laite, laitance : J'ons maingé trois hairands (airan) 3
f deux laitices et ein œuvé, c'est-à-dire deux laites et un œuvé.
lai vou et la vou, adv., là où, et simplement où : Tte meunnerai
lai voit qu'f ast (Je te mènerai là où il est). Là voit que tu vas
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PATOIS DB LA FORÊT DE CLAIRVAUI 69
don? (Où donc vas-tu?) S'emploie quelquefois par ironie pour
comment, allons donc, etc., en réponse à des insinuations, des
menaces, qu'on dédaigne : Ah, tu riêet pas dèchaippe, mon ga-
chon d'aiveu moil — Lai voit? lai voû çaif (Àh, tu n'en es pas
quitte avec moi, mon garçon! — Comment ça? Je me moque bien
de toi !) Là voù que, loc. conjonc, an lieu qpe : Si tu riètos pas
venun, fairôs travoïllé, là voù que f ai pèdiu maijonnée (Si ta
n'étais pas venu j'aurais travaillé, au lieu que j'ai perdu ma
journée). — La vou que, au lieu que, Gros.; là vou, loc. adv.,
là où, quand, où, Thév.
lalas (ou lala?), n., terme enfantin, petit siège, petite chaise,
chairotte : Viens su ton laid, ou dans ton laid, mon enfant, c'est-
à-dire viens sur ta chaise, viens t'asseoir. — Faire lalas, s'as-
seoir : Fais laid, mon petiot.
lambingner, v. 9 lambiner.
lamper, v., s'emploie pour flamber, et se dit de la flamme du foyer
quand elle monte très haut dans la cheminée : Oh, comme çai
lampe I Eul feu vaipenre, si V feu peumot dans lai chemingnée,
c'est-à-dire comme ça flambe ! le feu va prendre, si le feu pre-
nait, etc. Quand la flamme est modérée on dit clairer.
lànceron, n., cochon vers l'âge de trois mois, quand il n'est plus
cochon de lait; cochon à engraisser : Tons aicheté deux lancerons
que je vons tâcher de grâcher pou Noël, c'est-à-dire nous avons
acheté deux jeunes porcs, etc.
lande, n., s'emploie pour désigner des terres de première qualité
situées dans les vallées, sur les bords d'une rivière.
lande (ou lendeÎ), n., traverse de clôture, pièce transversale qui
relie les autres pièce» d'une palissade, lisse. \ h , r)J/ /
landrou, n., traînard, truand, homme de peu de valeur; per- j Ai^,,*:/*
sonne sale, négligée, négligente : F boit d'aiveu le vrommer lan- \ ' \ t
/
!u*.
t A <
drou qui passe (Il boit avec le premier grelu, truand qui passe). /
Plaies don tes briques, landrou l c'est-à-dire place donc tes / ^ /,
affaires, négligent l — Dans le Châtillonnais, on dit gandrou. ^ n -*^ofe
lanterner, v., s'emploie pour bossuer, tordre, gondoler, spéciale- > " < fZ c J
ment en parlant d'une faulx : F lanterne sai faulx tentes les fois
qui' lai bait, c'est-à-dire il tord, il gondole, etc.
laper, v., s'emploie pour être poisseux, gluant : F ai maingé du - * < «<
miée, des ragins, des confitures, etc., et mes doigts lapent,
c'est-à-dire mes doigts sont poissés, gluants, se collent ensemble.
De happer? ou de ce que le bruit des mains, des doigts, en se
t V SX ; t f ^ A C
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70 PATOIS DI LA FOIÊT DE CLAIR VAUX
décollant, rappelle l'espèce de clappement que fait le chi6n qui
boit? — Lapper, être gluant, Gros.; lapper, coller, tenir aux
doigts, Thév.
lapingne, n., lapine, femelle da lapin.
largeotte, n., plante adventice, les lactuca et les sonchus à fleurs
jaunes en général.
larmier, n., s'emploie pour soupirail : Ein larmier de caive, c'est-
à-dire un soupirail de cave.
f lauche, n., laiche, mauvaise herbe qui vient dans certains prés
marécageux, diverses espèces de carex. (Loche).
K } /;- / /Lauder, v., se perdre dans des explications longues et inutiles,
/ * * -'" parler pour ne rien dire, raconter des fariboles, se répéter, etc.;
grommeler, se plaindre. — Voir nasiller, niveler, beurdonner,
renauder, etc. — Lauder, dire des riens, des futilités, Gros.,
Thév.
lavier et laivier, n., évier. On dit plutôt soiller.
lé, pron. pers. fera., elle, la. S'emploie à différents cas : Ç'ast de
t ai lé; ç'ast ai lé que je Vai dit; çast pou lé (c'est d'elle; c'est à
elle que je l'ai dit; c'est pour elle). A l'accus., avec le verbe être :
çai serot lé (ce serait elle) et non lai qui, à ce cas, s'emploie avec
les autres verbes. — Laye, elle, L. C; lé pour lie du verbe lier,
ch. de n.; lay, elle, P. T.
let, n., lit : Eulle l ast bin veille, eulle ne s rot pus faire son let,
c'est-à-dire elle ne saurait, elle ne peut plus faire son lit, —
Leyt, lit, P. T.
lette, n., lettre dans les deux sens du mot.
leup et lop, n., loup (Leu, lo). — Vieux franc, leu.
leuve nez, n. comp., curieux, flâneur, qui va le nez au vent, dé-
sœuvré, paresseux, qui au lieu de travailler regarde voler les
allouettes ; effronté. — Voir nairoue, querrenier.
levée, n., s'emploie pour fossé; petit fossé qu'on fait au bout d'un
champ, d'une vigne, soit pour défendre la propriété et en mieux
marquer la limite, soit pour écouler l'eau, soit enfin pour utiliser
la terre qu'on en retire.
lever des courres, expression qui signifie éclisser, diviser, fendre
des branches, spécialement de coudrier, en lamelles étroites,
pour tresser des paniers, des hottes, etc. On lève avec le pouce
la mince lanière, en faisant ployer la coudre sur son genou. —
Voir iclicher.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX 71
li et l', pron. pers. des deux genres, lui : Baille li; prends li
(Donne lui... ou donne le lui; prends lui... ou prends le lui).
EujeYai* dit ai lu, ou ai lé, c'est-à-dire je lui ai dit à lui-môme,
ou à elle-même. — Yoir lu et lé. — Li, lui, xiv e siècle : « Mar-
coul li répond....»
liaisse, n., liasse, cordon; jarretière : Eunne liaisse {liéce) de bas, -X £> J $•*/.
c'est-à-dire une jarretière. /j, *•'[/*,)
liarbe, n. t lierre. V - y l "*" s
libandelle et ribakdelle, n., ribambelle, kyrielle. — Libambelle,
kirielle, grand nombre, Gros.
LicHEet loche, n., lèche, loquette, toute petite tranche, spéciale-
ment de choses comestibles, viande, pain, etc., une quantité in-
suffisante, une miette, un rien : Tu \i baille teut çai de gailette?
eunne belle loche, eunne belle miottef Çai vai li monter comme
eunne fraijotte en lai gueule d'ein leup (Tu lui donnes tout cela de
tarte? une belle lèche, une belle miette? Ça va lui monter comme
une fraise, etc.). — Lèche, brin, miette, Gros. — Vieux franc.
lesche, petite tranche.
lichotte et lochotte, n. dim., petite liche ou loche, très mince < % / *■ V"
tranche, moins que rien.
lie (terre), terre meuble, en bon état, bien émiettée, facile à cul-
tiver.
liéfe, n., lèvre.
lieur et ailieur, n., lueur. La dernière forme doit être encore une
confusion du nom avec l'article.
ueur (au), loc. adv., au contraire, loin de là : I's devraint bin s'en-
tende ensembXe (ensemb'ieu) et traivoiller pou neurri los quaite
enfants, mas bin au Heurt c'est-à-dire bien au contraire, loin de
là I Sous-entendu, ils vont chacun de leur côté, ne travaillent
pas, etc. Au lieur de, loc. prépos., au lieu de.
liéve, n., lièvre : J'ai vu ein bieau liève, ou ein bieau \iéve (iéve),
c'est-à-dire un beau lièvre.
ligneu et linoneu (ou ligneux?), n., plante adventice, liseron.
Grand ligneu : convolvulus sepium\ petit ligneu : convoi, ar-
vensis. — Lignot, liseron, Gros.
1 Remarquez qne la lettre / du pronom le, /a, /' (le, la, F), né se
mouille jamais, à moins que ce pronom ne soit suivi du pronom li
(lui) avec lequel alors il se confond, comme dans l'exemple cité.
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72 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIBVAUX
LUOUE, n., liseur, qui aime beaucoup à lire; lecteur : Ç'ast ein
lijoû, eunne lijoure, c'est-à-dire un amateur de lecture.
liju et u, part. pass. du verbe lire : J'ai H ou j'ai liju euime
heure, c'est-à-dire j'ai lu pendant une heure.
limêrô, n., numéro. — Limèro, L. C.
lire, v., choisir, éplucher, monder; ne s'emploie guère que dans
cette expression, lire des pois, des nentilles, etc. : Hèlasl j* n'ai
jaimmas su lire que des pois pou mette dans note pot. Jeu de mots
sur lire au sens ordinaire et cet autre verbe du vieux français.
Imparf. lijôs, subj. lije, part. prés, lijant, part. pass. H elliju.
— Légeot, L. C. ; légeait, P. T.
liser, v., longer, suivre la lisière, côtoyer, tourner, doubler : J'ai
lise le bois, c'est-à-dire j'ai suivi le bord, la lisière, du bois.
lô, adj. poss., leur. S'emploie quelquefois au pluriel pour ses : Je
le dirai ai Us gens qui 1 s eut baittu, c'est-à-dire je le dirai à ses
gens (ses parents), qu'il s'est battu.
lô, pron. poss. : Euje lô diras (Je leur dirais). Lô, pron., a presque
toujours son / mouillée, lô, adj., assez rarement. — Leux, leus,
L. C. et P. T.
locher, v., lécher; embrasser, baiser : Griast pas gras de locher
les mureilles (Il n'est pas gras de lécher les murs). Tt n'en fini-
chent pas de se locher, c'est-à-dire ils n'en finissent pas de s'em-
brasser.
lochoue, n., qui embrasse souvent, qui aime à embrasser. (Lochoû).
lochu, n., eau de lessive. Ceux qui raffinent disent léchu.—Léchu,
eau de lessive, Gros, et Thév.
logai et loga (ou loguet?), n., flaque d'un liquide quelconque :
Eul meud i* en vai, ï y ai ein logai de vin desous, c'est-à-dire
le tonneau fuit, il y a du vin répandu dessous... T saingne au
nezpieun, ï y ai ein loga de sang. Absolument, flaque d'eau :
T ai plu, n' marche pas dans les loguets, c'est-à-dire il a plu, ne
marche pas dans les flaques d'eau. — Voir patoùillait. — De
l'ital. laghetto, petit lac?
lôoi, n., loisir : Je n'ai pas V lôgi de..., c'est-à-dire je n'ai pas le
loisir, le temps de...
loïbn (ou loyain?), n., lien. (Lo-tafn). — Voir rote.
loïer (ou loyer?), v., lier : Euje loe, euje loyains (lo-iain), qu'i'
loge (toîeu), logé (lote); je lie, nous liions, qu'il lie, lié. De môme
dèloïer, délier, et relater, relier. — Layey, L. C; layey, P. T.
— Vieux franc, loyeure, lien.
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PATOIS DE LA FORÊT DB CLAIRVAUX 73
lolo, n., mot enfantin, lait.
lôlusse (aï), ou ôlussb (ai /'?), loc. adverb., qui s'emploie pour
secrètement , en cachette, en fraude, dans cette expression :
Vende ai lôlusse, ou vende du vin ai lôlusse, c'est-à-dire sans
avoir fait de déclaration, sans payer les droits au Gsc. — Lolus
(vendre à), vendre du vin en cachette, Gros. ; olus (à /'), en
fraude, clandestinement, Thév. — Vieux franc, oluse.
lommer, v., nommer. De môme relommer, renommer, relommèe,
renommée, etc.
long (au), loc. adv., à côté, auprès : Viens au long de moi (Viens
près de moi). Mets-le au long de... (Mets-le à côté de...). Chau-
dronnia matou — Qui met lai pièce au long du trou. — Selon,
le long; selon la rivière, Gros. — Vieux franc, selon.
longuerelle, n., chose disproportionnément longue. En parlant de
terre, une longuerelle, c'est un champ plus ou moins long et
n'ayant que quelques raies; une longuerelle d'étoffe, une bande
d'étoffe, etc.
loquence et éloquence, n., élocution, loquèle, bagout; qualité de
celui qui parle longtemps sans s'arrêter, sans reprendre haleine,
vite, fort, etc.; voix, gosier : /' palerot comme çai V grand'
jonnée sans craicher, gué loquence! (H parlerait ainsi une grande
journée sans cracher, quelle facilité, quelle platine \)Ah, mâtin,
comme f gueule cT aivocait-lai ! ï faut qu'i' ot'n's.... éloquence!
c'est-à-dire il faut qu'il ait un fameux gosier. On dit aussi d'un
chantre d'église qu'il a une bonne loquence, une bonne éloquence,
quand il peut crier longtemps, fort et haut. — Eloquence, lo-
quance, voix forte, Gros. — Vieux franc, loquence, môme sens. v
loquet, n., hoquet : Aivoir eul loquet (Avoir le hoquet). Tai le £ / X *< - ^
loquet — Dieu me lai fait — Par Jésus — Je ne Vai pus, paroles
qu'il faut répéter plusieurs fois de suite, sans repenre son vent,
c'est-à-dire sans reprendre haleine, pour être guéri du hoquet.—
Double confusion de l'A aspirée avec l'A muette, et du nom avec
l'article, l'hoquet, loquet, pour le hoquet?
loquette de terre, n., petit champ, plutôt long que large, moindre
encore que la hâte. — Du vieux franc, aucquette?
loquot, n., loquet : Ein loquot dépote (Un loquet de porte). Ailler
lever les loquots, expression qui signifie aller solliciter, quêter,
mendier...
loquotte et loquette, n., morceau de viande cuite que les enfants
allaient quêter le jour d'un mariage à la porte de la maison où
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/
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74 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX
se faisait la noce, en chantant sur l'air des Lampions, jusqu'à
ce que la cuisinière se montrât : D'iai loquotte — Pa dessus lai
pote — Ein sieau d'ieau — Pa dessus le dos t — De loquot, loquet,
parce qu'on levait le loquot de la porte?
lor, n., loir, espèce de rat : F dort comme ein lor, c'est-à-dire
comme un loir.
lotiére, n., litière, paille qu'on répand dans les écuries sous les
animaux; mauvaise paille à demi consumée.
lou et lu, art. simp., le ; s'emploient pour eul, dans certains vil-
lages.
fj^T **>■ *- / louache et louaiche, n., espèce de tique ou de ricin, qui s'attache
à la peau des vaches et devient gros comme une noisette : Note
vaiche, eulle l ast maingée aux louâches.
loude, adj., fém. de lourd, lourde.
louvairou (ou loup vairou, ou vèrou?), nom qui s'emploie dans
le sens du français loup-garou, le plus souvent avec l'adjectif
p eût : Çast ein peut louvairou (C'est un vilain chien, un vilain
coucheur, un homme difficile). Ah, que louvairou, comme % mar-
che! (Ah, quel enragé, comme il marche!) Interj. : Loup vèrou,
que sale temps t
lu, pron. pers. masc., lui. S'emploie après les prépositions, et
comme complément direct du verbe être : Euje Y ai dit ai lu;
çast pou lu (Je lui ai dit à lui-même ; c'est pour lui). Si cètot
lu, ï maivailerot (Si c'était lui, il m'avalerait). Son féminin est
lé. Teutpa lu, ou tôt pa lu (tout par lui), tout seul : F s'en vai
teut pa lu, c'est-à-dire il s'en va seul, tout seul. A l'accusatif,
avec tout autre verbe que être, on se sert de le, V, dont le fémi-
nin est lai (la), comme en français.
lubre (faire), expression qui signifie selon les circonstances, tantôt
faire sombre, obscur, tantôt faire un peu clair... On dit qu'il
°~ fait lubre, là où on trouve inopinément une demi-obscurité en
t< j plein jour, une faible lumière en pleine nuit... Le sens de cette
expression est très vague.
luiia. n., mot enfantin, rameau, branche de verdure que les en-
» u fants portent en chantant, pour imiter la procession de Pâques
fleuries : Ah, les bieaux luiia ! Veux-tu que je te cope ein luiia
dans le bois ? Faire luiia, se promener en chantant, un rameau
à la main. — Espèce de parodie : Alleluiia, — Nos choux sont
gras, — Nos panées n' le sont pas II
LUMaice, n., limace.
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PATOIS DE LA FORÊT DB CLÀIEVAUX 75
lumaiçon, n. dira., limaçon.
lumbre, n., lumière; lampe, chandelle, flambeau quelconque :
Empoute lai lumére, c'est-à-dire emporte la lampe. Pour lu-
mière.
lumichon, n. dim., lumignon, petite lampe, petite lumière. — Du
vieux franc, limechon?
lun, adv., loin. Bellun ou be lun, pour bin lun, bien loin : Euje
m'en irôs bellun, de l'aute coûté de soleil lever, c'est-à-dire bien
loin, de l'autre côté du lever du soleil.
lunnk et lungne, n., lune : Vois4u Judas, dans lai lun-ne, d'aiveu
son fagot d'èpingne ?
lunné et lungné, adj. ou part, pass., capricieux, fantasque, qui
subit les influences de la lune, toqué.
lunnotte, n., lunette, petite ouverture ronde : Eurgaitku pa lai
lun-note, c'est-à-dire regarde par la lunette, par le petit trou. —
Voir boyotte. — - Quand un enfant a été fouetté par sa mère, les
autres lui chantent ce refrain sur un air moqueur : Cul fouetté
ai lai lunnotte — J'ai du pain dans maipochotte, etc.??
lUnotte et lunette, n., linote, petit oiseau, linaria.
lure-lurr (ai), loc. adv., à vue de nez, à peu près, approximati-
vement, au hasard, à l'étourdie, etc. : Je n' saivôs pas combin
i' faillot (fé-iot) de semence, j'ai semé ai lurelure, c'est-à-dire
j'ai semé au hasard, par approximation. S'en ailler ai lure-lure,
s'en aller devant soi, sans but fixe, sans savoir où ; se mettre en
route à l'étourdie sans avoir fait les préparatifs nécessaires, pris
les précautions voulues, etc. — Lure-lure, au hasard, Thév. —
N'y a-t-il rien de commun entre ce mot et lôlusse ?
lurette (t y ai belle), ou bellurette (i' y ai), expression qui si-
gnifie il y a longtemps, beau temps : T y ai belle lurette quT
ast pati, ma fié, et % ast lun si i' ai v'iu courre, c'est-à-dire il y
a beau temps qu'il est parti, ma foi, et il est loin, etc.
lustubeurlu, n., hurluberlu, étourdi, qui manque de réflexion,
de jugement.
luzarnb, n., luzerne.
mâche, n., grosse gerbe de chanvre, formée de meunnevés ou poi-
gnées, préparée pour être mise dans la rage ou rouissoir. (Mâche).
— Machon, chanvre, Gros.; machet, machot, petite meule de foin,
Thév. — Vieux franc, moche, meule, tas, monceau.
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r
76 PATOIS DE LA FORÊT DE CLATRVAUX
mâche, n., goût, saveur... S'emploie principalement dans cette
expression : Foin d'eunne bonne mâche, c'est-à-dire foin de bon
goût ; bon à mâcher, sain, appétissant, profitable aux animaux.
On se sert rarement de ce mot avec un adjectif dépréciatif. —
Mâche, qualité de foin bonne ou mauvaise, Gros.
mâchouiller, verbe dépréc., mâchonner ou mâchotter, mâcher
avec dégoût, indifférence, lenteur ou difficulté; mordiller : Ai-
mile et ne mâchouille pas tant ! V mâchouillât son mouchoi, il
mordillait, etc.
machouillis, n., débris, restes de choses mâchouillées... Mâchouil-
lis de raites (voir raitis).
machouillement, n., action de mâchouiller.
X ;/ ; \ ! maclotte, n., terre qui s'amasse en boulette aux crins des jambes
du cheval, aux poils du chien, etc. ; petite pelote de crasse,
d'ordure, etc., tenant aux poils. (Maclotte, mâquiotte). Ceux
qui raffinent ne mouillent pas 17.
made, n., merde. (Mode et marfieu).
maga (ou maguas?), n., abréviation péjorative de Marguitieu
(Marguerite), Marguerite sale, Marguerite négligente, insou-
ciante, etc. Par analogie, s'applique à toute femme sale, insou-
ciante, etc. (Magâ). — Fagas (Marie), fille malpropre, mal fa-
gottée, Thév.
magcenotte (ou magnotte?), n., centaurée jacée. (Mag-notte).
maigue, adj., maigre.
maigueurlin et maingueurlin, n. et adj., maigre, maigrelet, dé-
licat, faible, chélif, d'une mauvaise santé. — Dimin. de maigue,
ou de l'ital. mingherlino, môme sens? — Mingrelin, enfant fai-
ble et délicat, Gros.; mingrelet, frêle, chétif, Thév.
mailler, v., se dit de l'action de l'eau qui adhère aux parois d'un
vase et s'y roule en gouttelettes, comme à un corps gras :
Quast-ce quan ai don fait d'aiveu le baissin qui' maille? c'est-
à-dire qu'est-ce qu'on a donc fait avec le bassin pour que... l'eau
s'y attache ainsi ? Nous ne connaissons pas de mot français qui
rende celte idée.
maillon (ou mayon?), n., le gros bout d'un lien de bois, jusqu'à
l'endroit où il est tordu. (Mâ-ion). — Voir rôte. — Mayon, gros
manche de fouet, Thév.
maillouche et malloche, n., mailloche, gros maillet de bois. On
prononce ma-iouche, maloche.
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/
PATOIS DB LA FORÊT DE CLAIRVAUX 77
kainchot, adj., manchot. ^ ? /£- / £ ( le!
mainchottbs(ouminchottbsÎ), n. pi., cimettes, jeunes tiges de * ■"
choux verts qui repoussent au printemps. On dit aussi qui-
chottes ' S 4 JCc't^A
maingbaillbr, v., manger à chaque instant, sans besoin réel; ~ (\
manger peu, manger du bout des dents, sans appétit. */^ i* )? d '-n., *\*
maingeoub, n., mangeur; absolument, personne d'un gros appétit:
Çast ein maingeoût ï aivailerot Molesme et les trois Riceys.
maingbb, v., manger : Faire comme les servantes de curé, mainger
son pain blanc ï prommer. Ailler mainger du pain blanc, faire
ailler mainger du pain blanc, aller plaider, faire aller en justice,
parce que les plaideurs, dînant à l'hôtel le jour de l'audience,
mangent du pain de boulanger plus blanc d'ordinaire que le
pain de ménage,
maingetout, maingeteut et maingetot, n., prodigue, dépensier,
qui mange tout ce qu'il a. — Maingetin, mangeur, P. T.
mairerib, n., mairie.
mairiaige, n., mariage : r ai promesse de mairiaige — Entre Fon-
tette et St-Usaige — Que si vous vlez y mette empêchement —
Entrez au meûlin ai vent. Il y avait entre ces deux villages un
moulin à vent.
mairichaux, n., maréchal -ferrant; au fém. mairichaude. — Vieux
franc, mareschaude.
mairier, v., marier. S'mairier, se marier : Mairie-te (Marie-toi).
Note Pierrot, i' se manierai au c. de lai lunne pou engendrer
V bieau temps.
mairingne (ou mèringne?), n., culotte, pantalon, avec déprécia-
tion : F ai vendu jousqu'ai ses mairingnes pou li boire. Ote tes
mairingnes quej' les raicc mode. (Il a vendu jusqu'à ses cu-
lottes, etc.). — Dans quelques villages maronnes.
mairioue, n., homme à marier, dans un sens ironique, le plus
souvent : Lu se mairier? Ein bieau mairwç, j' m'en /".../ Au
fém. mairioure. Ne pas confondre avec mairie, mairiée, marié,
mariée. — Vieux franc, mairion : t Quand Gautiron se mairia,
— Mairion print qui dit li a. . . »
maissuelle et massuellb, n., scabieuse commune {scabiosa ar-
vensis). Maissuelle des bois, scabiosa succisa. — Du vieux franc.
massuette, petite massue?
MAISSU1LLER (ou MESSUILLER, OU MESSUYER ?), V., S6 dit de l'action
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- £
78 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX
d'une plante qui, sous l'influence du froid ou d'une maladie, se
déforme, se recroqueville et dont la tige s'aplatit, se tord bizar-
rement... On trouve des exemples fréquents de cette déformation
dans la chicorée des chemins. Nous ne connaissons point de
synonymes en français. Se coffiner ne donne pas l'idée exacte de
messuyer.
mai™, n., matin.
maitikgnée, n., matinée.
màjenotte, n. f dim., petite maison, maisonnette; petite cabane que
construisent les enfants, pour s'amuser, en gardant les bestiaux
dans les champs.
'V : majbu, adv., désormais, dorénavant, à l'avenir: Ah, si t'y r tonnes
tnajeu, gare ai tes cotes! (Ah, si tu y retournes dorénavant,
•>7 C ,'r>'\{. ele ). — Vieux franc, meshuy. — Maieu, plus, Gros. ; majeu,
à l'avenir, P. T.; majeu, id., G. et R.; mès'huy, id., Thév.
-"■ f i % \ C >u major, n., maison : /' dit des rajons — Comme des majons (II dit
'^ y w des raisons, grosses comme des maisons, c'est-à-dire de grosses
I" P. <{ £ bêtises.) — Majon, P. T.
malagé, adj., malaisé, difficile; fait au fém. mdagêe et malagére,
malagère, n. adj., femme difficile à vivre, acariâtre, querel-
leuse.
malainjotte, n., mésange, oiseau. Malainjotte, piège pour pren-
dre les mésanges et les autres petits oiseaux, espèce de cage dans
laquelle se trouve un appât, et qui se referme brusquement aussi-
tôt que l'oiseau y est entré. — De mésangettef
malbrou, n., grosse charrette on camion, dont les fortes roues ont
des jantes de onze à douze centimètres de largeur a n moins. —
Voir maringotte.
mâle, n. fém., merle, oiseau : J'ai prins ein nind de maie, c'est-
à-dire j'ai pris un nid de merle.
malheuroux, ad., malheureux; pauvre.
malice, n. f s'emploie pour désigner une espèce de parement, qui
tient lieu de poignet, aux manches des anciennes chemises.
malsauce, n., saule marceau {salix caprœa).
mamie, manmie et mîmie (faire), caresser légèrement avec la main :
Fais-li manmie, au toutou, mon gachenot, c'est-à-dire caresse le,
passe lui doucement la main sur le dos. Faire semblant de cor-
riger, frapper pour rire : Mas, vous ne le fouettez pas vote ga-
min, vous li faitïeus seulement mâmie. On dit aussi dans le
môme sens faire minette.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRYAUX 79
mancingne, n., viorne (viburna lantana) : J'ai rencontré, voisingne
— Ein homme au bois quillon — Qui copot des mancingnes —
Pou li faire ein beunntron. — Mairions nos filles, voisingne —
Mairions-les don !
manderolle, n., désigne, avec une nuance de mépris, toute bande
d'étoffe pendante ou flottante dans les vêlements, écharpe, ruban,
lambeau, guenille... Corruption de banderole? — On dit aussi
napperon.
manique, n., s'emploie dépréciativement pour machine, engin; en-
gin peu commode, ennuyeux, inutile, compliqué, invention ri-
dicule, etc. : Eunne belle manique ! c'est-à-dire un bel engin ! —
Voir engimelle, môme sens.
maniquer, v., arranger, agencer; combiner, manigancer, comploter :
Fs ont manique çai ensemble (ensemblexx), c'est-à-dire ils ont ar-
rangé cette affaire, machiné cela ensemble. Se prend le plus sou-
vent en mauvaise part, au prop. et au figuré.
mansillon (ou mencillon?), n., espèce de petit trait de fer, s'adap- . > ' l fl m' ^/ T<
tant au collier du cheval, et muni d'un large anneau dans lequel
entre le limon. On n'en fait plus guère usage. On dit encore,
en manière de proverbe, quand on donne une friandise à un en-
fant, par exemple : T n'en ferai pas des mansillons, co qui si-
gnifie : il va l'avaler tout de suite, il ne la gardera pas. Proba-
blement un jeu de mots sur mansillon et avaloire, une autre
partie du harnais. — Du vieux franc, mancelon, manchette?
mante, n., couverture de lit en laine foulée.— Vieux franc, mante,
sorte de vêtement.
mante et mantieau, n., manteau. Mante est le plus souvent dé*
préciatif.
maque (ou mas que?), loc. conj., quand, lorsque, dès que : Moque
j'ains fini * note champ j' goûterons , c'est-à-dire quand nous au-
rons fini, etc. On emploie aussi dans le même sens vaque : Vaque
j'ains fini, etc. — Mes que, quand, Gros. ; mais que, lorsque,
Thév... t Mais que nous soyons ivre, » Oliv. Basselin.
marcagb. n., marécage.
marchait et marchât, n., souille, petite mare, lieu bourbeux où
les sangliers viennent boire et se vautrer. — Sourd, petite mare
d'eau dans les bois, G. et R. — Du vieux franc, mareschat, ma-
rais, lieux marécageux ? ou marcheau, mare, amas d'eau ?
4 J'ains pour j'airons, cette expression demandant le subjonctif.
"V-
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80 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX
marchandée et marchaindige, d., marchandise. S'emploie dépré-
ciati vement pour désigner certaines choses mal faites, mal réussies,
ou qu'on trouve laides, peu commodes, etc. : Mas ton pain
gnast pas levé; vlai de lai belle marchandise ! c'est-à-dire du beau
pain, quelque chose de propre t
mahcou, n., matou, chat mâle entier : F rouille les œux comme ein
marcou qu an châtre, c'est-à-dire il écarquille, il tourne, il roule
les yeux comme un matou, etc. — Marcoux, pièce de pressoir,
Gros.; marcou, matou, gros chat, Thév.
, ^ w > margotte, n., marcotte, rejeton de plante, particulièrement d'oeillet.
" / y / . •' margouillait et margouillat, n., flaque d'eau bourbeuse, endroit
'■ ' f marécageux, vaseux; margouillis, patrouillis. — Vieux franc.
margoilloier, rouler dans la boue. — X oïr patouillait.
7 V /'*'"■ ; / k< * margouiller, v., barbotter dans l'eau, dans les margouillis, pa-
* [>.'?<*-? J J ' trouiller. — Voir patouiller, margouillait, etc. — Vieux franc.
/ margoilloier, se vautrer dans la fange.
margoulotte, n., belette; le menton, le dessous du menton : /' li
i( -, '.■ - < '.'■ c / , > ai rlevé lai margoulotte d'ein cueup de poing (Il lui a relevé le
* %9 J menton, etc.). Margoulotte, mouchoir, foulard, etc., passé en
fanchon pour se préserver du froid aux dents ou aux oreilles :
Otetai margoulotte, i ne fait pus frod. — Voir emmargoulotter.
— Vieux franc, bacoule, belette, fouine, mot qui s'emploie en-
core dans quelques villages.
marguitiotte, n. dim., petite marguerite, marguerite, pâquerette,
camomille, etc. Presque toutes les plantes radiées de la famille
des composées portent le nom de marguitiotte, marguerite.
maringotte, n., petite charrette à roues étroites, pointues, par op-
position au malbrou, dont les roues ont des jantes très larges.
marlin et malin, n., merlin, massue, gros marteau à long manche;
marteau-hache dont on se sert pour fendre le bois.
marque, n., s'emploie pour brandon : espèce de voyant fait le plus
souvent d'un échalas et d'un torchon de paille ou d'une latte en
croix, qu'on fiche en terre à chaque bout d'un champ emblave
pour en interdire la pâture, au milieu d'un sentier pour en dé-
fendre le passage, etc. On dit aussi remarque et torche.
marquot(ou marcot?), n., pièce de bois équarrie, de la grosseur
d'un chevron environ, qui se place sur le marc pour achever de
remplir l'intervalle entre la maie (ou le meth) et le levier du
pressoir. — Marcoux, Gros. — De marc?
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVADX 81
marriain, n. t merrain, planchettes de chêne destinées à faire des ' ( sv--ï ' / <? • ; v/
tonneaux. — Vieux franc, marrien, marren, bois. de charpente.
marronnier, n., fabricant de marriain ou merrain.— Vieux franc.
marroner, couper du marrien.
martieau, n., marteau; espèce de grosse fraise, capron. — Voir
maté.
mas, conj., mais. Mas que (voir moque).
mastoque (ou mastoc?), n. et adj., personne lourde, épaisse, in-
dolente, endormie, maladroite ; en parlant des choses, pesant,
grossi v, matériel : Tai des gros mastocs de souliers qui me las-
sent devant que d'été mins, c'est-à-dire j'ai des gros souliers mas-
sifs, pesants, qui me fatiguent ayant d'être mis, d'être à mes
pieds. — De masse, massif?
matau, interj. Voir malin. (Mâtâu).
maté, n., marteau, avec une nuance de dépréciation. On dit plus
souvent martieau.
maté re aux, n., matériaux.
matin! interj., du langage pop. général, équivaut à diable, diantre,
mazette, fichtre, peste, etc. : Ah, mâtin, tu ne te gênes pas! Ah,
mâtin, on s... mâtin 1 1 fait-ï frod! Les délicats disent mâtâu
et sapré mâtâu. — Mâtin, interj., Thév.
matingne, n. et adj., féminin de mâtin. (Mâtingne).
maton, n., petit amas de farine mal délayée, en boulette dans la
bouillie, etc. — Voir grumelot plus employé. —Vieux franc, ma-
ton, sorte de gâteau.
matou (chaudronnia), espèce d'injure sans doute, dont les enfants
poursuivaient les chaudronniers ambulants, étameurs, etc. :
c Chaudronnia matou — Qui met lai pièce au long du trou... »
c'eetrà-dire à côté du trou.
matre et maîte, n., maître : Eune fais pas tant ton mâtre! Le
fém. est mâtrôsse, maîtresse : Ç'ast lai mâtrôsse de lai majon,
c'est-à-dire la maîtresse de la maison.
m a tri, adj. ou part, pas.; ne s'emploie que dans cette expression : - - * (
Chanve matri, pour désigner les brins de chanvre desséchés, /
fanés, morts dans la chenevière avant la complète maturité. Les
' ( ^ ,V^ enfants l'arrachaient pour se faire des fouets et des codelottes.
matrige, n., maîtrise, droit de commander, qualité, pouvoir du
maître. Aivoi lai mâtrige, avoir le commandement, la direc-
tion : Ç'ast ce gamin lai qui ai lai mâtrige de lai majon, c'est-
à-dire qui commande en chef, qui dirige la maison.
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82 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX
mau, n., mal : J'ai mau au vente (J'ai mal au ventre). Mau, n.,
abcès, clou, tumeur, mal blanc, etc., en général bobo quelconque
suppurant et venu naturellement sans coup ni blessure : l'ai ein
mau dans lai tête quijitt'ieu, c'est-à-dire il a, à la tête, un abcès,
un bobo... qm jette, qui suppure. Été en mau de.,, souffrir de
l'absence de..., regretter, s'ennuyer : Eudepeûs que note Mairie
eulle l ast en pension, ï m* en ast en mau, ou i m'ast en mau de
lé, c'est-à-dire je souffre de son absence, je la regrette, je m'en-
nuie. M ai que deuxjous que je sens ici, ehbin, ï m'ast poutiant
daji en mau de chez nous, c'est-à-dire je trouve déjà le temps
long, je m'ennuie de ne pas voir ma famille, mon pays, etc. Ab-
solument aivoi des maux, bin des maux, avoir de la peine, tra-
vailler beaucoup. Aivoi bin des maux de faire, de dire, etc.,
avoir bien de la peine à se décider, à faire, à dire : J'airôs bin
des maux d' m'eurtenin de li /"... eunne c\aque (J'aurais bien de
la peine à me retenir, à ne pas lui donner un soufflet).— // m est
en mau, je m'ennuie, je regrette, Gros. ; mau, mal, P. T. —
Vieux franc, mau, mal.
maucabré (àbre), désigne une traînée de nuages (stratus), brossés
par un coup de vent dans le ciel sur une grande étendue, d'une
extrémité de l'horizon à l'autre quelquefois» et dessinant vague-
ment une espèce d'arbre avec son fût, ses branches et môme ses
racines.
maucalé, adj., mal calé, mal coiffé, mal 'peigné, négligé dans sa
toilette, particulièrement en ce qui concerne la tête : Ç'ast V
peute maucalée qui ai toujous Vair de soti de lai gueule de c'tu
qui prend les beurbis, c'est-à-dire de la gueule du loup.
mausaidreusse, n., mot qui ne s'emploie guère que dans cette ex-
pression : T n rit qu'en mausaidreusse, c'est-à-dire il ne rit qu'en
cas d'accident, quand il y a une maladresse de faite, quand il
faudrait plutôt pleurer... Maladresse se rend d'ordinaire par ma-
laidreusse.
méchant, adj„ s'emploie pour mauvais en parlant des choses :
Oh le méchant temps! Oh lai méchant' soupe ! Signifie quelque-
fois pauvre, avec la nuance de pitié, d'intérêt que comporte sou-
vent ce dernier mot : /' me tirot les larmes des œux, ce méchant
petiot-lai, c'est-à-dire ce pauvre petit.
meghingne et MECHiNE, n., moissine, faisceau de sarments coupés
avec les grappes mûres. (M'chingne).
mécueurdi, n., mercredi.
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PATOIS DE LA FOBÊT DE OLAIBVAUX 83
mégujon, n., bulbe comestible, tubercule du latyrus tuberosus; la
plante elle-même. — Macujon, Thév.
meidi, n., midi : Charcher ou çarcher meid\i (médAi) ai quatorze
heures.
meineut, n., minuit : Ai meineut comme aimeidli.
mêlée (faire de lai), mêler du français et du patois, en voulant
essayer de parler mieux que les autres.
mêler, v. intrans., se dit des raisins qui commencent à mûrir, et
dont quelques grains sont déjà rouges : Les ragins mêlent. Çai
c'mence ai mêler. — Grioler, Gros.
MBNiN ou menint (m'nîn), adj. ou part. pass. de bénir, bénit, altéra-
tion de bénin.— Cette voyelle composée longue m, substituée
à la voyelle simple •', est ici encore dépréciative.
menotte et mainnotte, n., espèce de champignon comestible, la cla-
vaire. — En forme de main?
menre, adj., délicat, chétif, pâle, maladif, amaigri, en dépérisse-
ment : Oh, i' ast bin menre son petiot t c'est-à-dire il est bien
pâlot, bien chétif, etc. Y se crot guéri, mas t ast toujous bin
menre, de pus en pus menre, etc. — Menre, ou moindre, maigri,
Gros. — Vieux franc, mendre, moindre, amenrir, amoindrir. —
Voir enmenri.
menteux et mentoue, n. adj., menteur. Fém. mentouse et men-
toure.
menuserib, n., menuiserie.
menusier, n., menuisier.
méprisoue et méprijoue, n. adj., celui qui méprise d'Labitude,
mauvaise langue, calomniateur. (Mêprijoû).
mere-goutte, n. comp.; on nomme ainsi le vin qui est tiré de la
cuve avant le pressurage.
merégb, n., merise, fruit du meréger, merisier.
MERÊGER, n , merisier (cerasusavium). (M'rêgé*).
mèrldgingne et mère EURLUGiNGNE, n., salamandre, celle qu'on
trouve dans les débris de murs humides, salamandra maculosa,
croyons-nous. — De mellusine?
merveil, adj., vermeil : Y lai des rasins qui sont enco aussi mer»
veils quai lai venainge, c'est-à-dire aussi vermeils qu'à la ven-
dange, aussi bien conservés.
mervô et mervor, adverbe de désir, de doute, d'étonnement, de
crainte, de défi, etc. ; Mervô s'ï vienraif(h me demande, avec
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84 PATOIft DE LA FORÊT DE CLAIRVAIX
curiosité, avec désir, etc., s'il viendra.) Mervor s' ï pourrai le
faire? Meroor si fairôs le couraige de mainger ton co teut en-
tier sans nous ? Mervô don s* ï ferai bieau temps demain ? Euje
vous dis qui' ai tiué ein Uéve. — Mas mervô? répondra égale-
ment celui que la chose étonne, celui qui en doute, qui la
souhaite ou qui la craint. — Les beaux parleurs disent mervoir.
— Meure vôi si, je m'étonne si, 6. et R. — Mirum videri?
meuche, n., mouche. Meuche, ou mouche ai miêe, mouche à
miel, abeille; mouche catholique, cantharide. Mette les mouches
ou les meuches, poser un vésicatoire : An ni ' ai mins les mouches
en deux plaices, c'est-à-dire on lui a posé deux vésicatoires.
meud, n., muid, tonneau. Le meud proprement dit est un tonneau
de la contenance de deux cent-vingt litres.
meue, n., moue, grimace. Faire lai meue, faire la moue, bouder.
On dit dans le même sens faire lai mingne. (Voir pipion, cul de
poule.) — Vieux franc, moe, bouche.
meule, n., espèce d'engelure au talon, dont la démangeaison est
très vive : Aivoir lai meule.
meulin, n., moulin: Meulin ai vent, meûlin ai Veau. — Melin,
moulin, L. C. et P. T.; rn'lin, G. et R. — Vieux franc, moelin,
muelin, moulin.
meunnetrer, n., ménétrier, joueur de violon qui fait danser. (Meun-
ntre).
meunnevé et meunnevieau, n., poignée de chanvre liée et disposée
pour être mise en mâche, puis au rouissoir... La mâche se com-
pose d'une vingtaine de meunnevés. — Mauvée, Gros. — Du
vieux franc, manée, poignée?
meur, adj., mûr, en maturité. (Meûr). — Vieux franc, meur, mûr.
meurgé (ou meurger?), n., monceau, tas de pierres amassées dans
les champs, les vignes, les friches, et provenant d'ordinaire de
l'épierrement des propriétés voisines, de défoncements , de
vieilles carrières, etc.; vieux mur en ruine... On dit plus sou-
vent murot. — Vieux franc, murgier.
meuri, v., infin., mourir. — MotchiJl P. T.; meuri, mourir,
G. etR.
meuri, v. infin. et part, pas., mûrir, mûri. (Meûri).
meurottb, n., provision, conserve, réserve, économies. S'ap-
1 An ni ai pour an li ai, on lui a.
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PATOIS DR LA FORÊT DE CL AIR VAUX 8 8
plique tout particulièrement aux provisions de bouche salées :
T'en aies don enco du saing\ier ? — Oui.j'aivôs fait V petite
meûrotte, c'est-à-dire j'avais fait une petite conserve, j'en avais
détourné, caché, salé un peu... C'est de là probablement que
vient l'expression sailé comme d* lai meûrotte, très salé, salé
comme des conserves salées. — De sailemeûre, saumure. — Voir
moinjotte.
mbusi, v., inf. et part, pas., moisir, moisi. Meusi, adj. et n., pâle,
blême, maladif : I'ast bin meusi pour ein monsieur qui mainge de
lai char (Il est bien pâle, pour un monsieur, etc.). Oh V peut
meusi que tu fais dont dira avec regret et dépit une mère à son
enfant, c'est-à-dire le vilain blême, le pauvre délicat, etc. —
Meugi, moisi, 6. et R. — Vieux franc, muisi, moisi.
mbusser (se), v., se musser, se cacher, caponner, reculer, se taire : . ? > ' ^\it6 (■
T vlot teut tiuer, mas quand je seus airrivé, t' sast meussé, c'est-
à-dire il s'est calmé, il a fait le mort, il s'est tu. Meùsse-tel tais-
toi 1 — S' musser, se cacher 1 ! G. et R.
mbdx, adv., mieux : F serot meux en tarre qu'en pré, c'est-à-dire il
serait mieux mort que vivant. — Miay, mieux, L. C.
miaille, n., menuaille, toutes sortes de petits objets dont on a pré-
levé le choix, criblures; spécialement, tout petit plomb de chasse,
n 08 7, 8, 9. — Voir cheni et raivauderie.
mialer, v., miauler. Se dit du cri des chats et des petits enfants.
(Miâle).
miaou (marcher ai, ou ailler ai) 9 marcher courbé, ployé en deux,
soit pour se dissimuler, soit pour cause de vieillesse ou de dou-
leur : r marchot ai miaou, mas je Vai toujous bin vu (Il marchait
en se courbant jusqu'à terre, mais je l'ai quand même vu), r ast
bin cassé, ï vai ai miaou, c'est-à-dire il est bien cassé, bien vieux,
il va tout courbé. — Voir se couligner. — Ne pas confondre avec
ai boucheton, bien qu'on emploie quelquefois ces deux mots l'un
pour l'autre.
michot, n. dim., toute petite miche, poignée de pâte qu'on jette
au four et qu'on retire avant le reste de la fournée. — Voir don-
dainne.
mic hotte, n. dimin., petite miche; la michotte est l'intermédiaire
entre la miche et le michot : S' ïs sont riches — l's maingeront
de lai miche — Nom je sons richots — Et je maingerons du mi*
chot, c'est-à-dire nous qui ne sommes pas riches, nous mange-
rons du pain tout comme ceux qui le sont. Une consolation qui a
bien sa petite nuance de dépit et d'envie.
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86 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX
micmac, n., s'emploie pour grimace, affectation, girie, pose : /'
fait bin des micmacs, c'est-à-dire il fait bien des embarras, bien
du train.
midri (ou midrit?), n., pierre en tronc de cône ou de pyramide
plus ou moins irrégulier se substituant au liège, dans un jeu
semblable à celui du bouchon, mais qui se joue avec des pierres
plates ou pailots (palets), au lieu de gros sous, et où la monnaie
d'enjeu est remplacée par des ferrailles. Par analogie, on donne
aussi ce nom aux képis de différentes sortes, à toutes les coiffures
d'uniformes plus ou moins en tronc de cône. — Midret, but de
jeu de palet, Gros. — De mi-droit? (ml-dret, m\-drit).
miée, n., miel. Mouches ai miée, abeilles.— Mouches à mié, abeilles,
Gros.
mignadon et mingnadon, n., mignot, enfant gâté; enfant câlin qui
cherche des caresses; enfant affété, précieux.— De mignard, mi-
gnarder?
minabr et minable, atîj., misérable, malheureux, souffrant; pau-
vre, sale, en haillons : Je n serôs pus aille, oh, je seus bin mi-
nâbet (Je ne peux plus aller, plus marcher, oh, je sris bien souf-
rant, bien à plaindre). I'aivot l'air bin mi?iâb\e (minâbieu),
c'est-à dire l'air bien pauvre, il était bien râpé, bien sale, bien
caduc. Se prend toujours en bonne part. — Minable, pauvre,
délabré, pitoyable, Thév.
MiNERESsEet minneresse, adj. fém., mineure, qui n'a pas atteint sa
majorité.
minet, n., chenet. — Vieux franc, queminel.
mingne, n., mine, air, figure. Faire lai mingne, faire la moue,
bouder. — Voir meue, pipion, etc.
mingne, n., mine : Qu'an en dépense don de c't' argent t 1' en faurot
V mingne, d'ailleurs t
minine, minotte et minonne, n. dim., terme enfantin, petite main :
Y fait frod, hiche t Caichez ses minines, mai gachotte, c'est-à-dire
cachez vos (ses pour vos) petites mains, etc.
mins, p. pass. de mette (mettre), mis : Eulle l ai mins sai caile de
traivers (Elle a mis sa coiffure, son bonnet de travers, c'est-à-
dire elle est mal disposée, elle est de mauvaise humeur). Le fém.
se fait en allongeant le son : min.
miolée, n., mie de pain émiettée dans du vin ou dans du lait :
lai maingé de lai miolée en lait. On ne désigne pas le liquide,
quand ce liquide est le vin : J'ai maingé de lai miolée, c'est-à-
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."/
PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX 87
dire du pain émietté dans da vin. — Miaulée, ce qu'on miche
u avant de le donner aux petits chats?? Gros.
miot et muot, adj., muet. Fém. miotte et muotte.
miotte, n., miette; miette de pain, reste, débris de nourriture;
j petit débris, petit reste d'une chose quelconque : V ai maingé
tente lai part, gn'en reste pas V miotte (Il a mangé toute la
viande, il n'en reste pas un atome). Miotte, mie de pain : Mainge
lai creûte et lâche me lai miotte (Mange la croûte et laisse-moi
la mie). Raimasser ses miottes, reprendre haleine en achevant
doucement un exercice plus ou moins violent, prolonger encore
un peu le plaisir ou la récréation pour en mieux savourer la
fin, jouir de son reste, gagner du temps : Ç'ast mon teur ai
m'èbranner, oie te «tfieu. — Aittends don ein poichot quej' rat-
masse mes miottes (C'est ,à mon tour à me balancer, ôte toi vite !
—Attends donc un peu que je jouisse de mon reste, que je m'ar-
rête doucement, etc.). — Voir chipette, fistule et talipe.
miquelot, n. adj., s'emploie pour douillet, délicat, câlin, qui aime
à être dorloté (voir mignadon). Faire eul miquelot, faire le ma-
lade, le souffrant, le triste, pour être plaint, soigné, caressé. Se
dit particulièrement des enfants : Ein bieau miquelot qui geint
toujoust
miquette, nonTgénérique des chattes, par opposition à marcou
(matou) : Ç'ast V miquette que j'ons, et vous ç'ast ein peut
marcou, c'est-à-dire c'est une chatte que nous avons, etc.
miroie et miroue, n,, miroir, glace. (Mirof). — Miroi, ch. de n.
misserandb (ai lai), expression qui ne s'emploie que dans une es-
pèce de jeu de boûchotte caichante. Le bouchot, à qui on a bandé
les yeux, crie : Ai lai misserandet Un des joueurs répond de
sa cachette : Qui que tu demandes?... L'enfant demandé va dé-
livrer de son bandeau le patient qui se met alors à la recherche
de ses autres camarades. — Mizerande, hydromel, Gros. ; mis-
serande, hydromel, Thév.
mitiainne, n., mitaine, espèce de gros gant pour travailler aux
champs par le froid, moufle. S'emploie quelquefois pour main,
avec dépréciation ou plaisamment : Fat laiver tes mitiainnes,
c'est-à-dire va te laver les mains.
mition, n., miton.
mode (mode et morfieu), v., mordre. Part, pass., modu elmodtu.
— Moghiu, mordu, G. et R.
modbssb, n., morsure : Taies don mau ai lai jambe ? — Oui,
'r,
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Si
88 PATOIS DE LA FOHÊT DE CLAIRVACX
eunne modesse de chien. Ceux qui font de la mêlée disent mo-
dasse et mordasse.
modon et modion, n., ce qu'on enlève avec les dents en mordant à
môme dans quelque chose, un fruit, du gâteau, du .pain : F ai
modu ein bon modon dans mai pomme, c'est-à-dire il a mordu
une bonne bouchée. Modon désigne aussi le vide laissé par le
morceau enlevé : F ai des modions teut ailentour de lai gailette.
Par analogie, entaille en rond occasionnée par un choc, une
chute, à un vase, une assiette, un couvercle de terre, etc.
moéche, n., mèche : Eunne moéche de lampe, eunne moéche de vir*
beurquin, etc.
moguigner et moguingner, v., mordre à petits coups répétés, mor-
diller, ronger : F moguigne ses ong\es, c'est-à-dire il mordille, il
ronge. Un jeune chien moguingne tout ce qui lui tombe sous les
dents. — Voir charonger.
moible, n., meuble. (Moible). — Vieux franc, moible.
moichener, v., moissonner.
moichenoue, n., moissonneur, aoûteron. (Moichenoû).
iioiCHÔN, n., moisson. La syllabe chon se fait très longue. — Mé-
chon, G. et R.
moillou, adj., meilleur : Ç'ast le moillou de tourteus, c'est-à-dire
le meilleur de tous.
moinche et moinge, n., manche : Ein moinche de sarpe, ein moinge
d'haiche. — Vieux franc, mange.
moingneau, n., moineau, pierrot.
moinjotte, n., petite réserve amassée, économisée avec soin et ca-
chée, ou du moins mise à part ; petite cachette : Eulle met sai
moinjotte dans sai paillaisse (pai-iesse), c'est-à-dire sa bourse
dans sa paillasse. — Voir Gauviotte. S'applique plus spéciale-
ment à certaines provisions de bouche d'une conservation facile,
fruits secs et séchés, friandises, etc. : Fai raimassé V bonne
moinjotte de noujottes que jegade pou lai S 1 Nicoulas, c'est-à-dire
une bonne petite provision de noisettes, etc. — Voir meùrotte.
Désigne aussi un petit sac, une espèce de bourse en toile, plutôt
longue que large, propre à contenir au besoin les choses à con-
server ainsi... — Maingeotte, de manger? Des vieux mots mu-
chote, cachette? ou montjoie ?
moiniser et mouner, v., sucer son doigt, ou plutôt son mouchoir
(voir non-non) ; ramasser et agiter les lèvres comme lorsqu'on
fait une succion. — Voir nonner.
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PATOIS DE LA FORÊT DB CL AIR VAUX 89
moins (du) } s'emploie pour c'est-à-dire, quand on s'est trompé et
qu'on se reprend : Viens d'aiveu moi, Ugène, du moins, non f
Baptisse ? Viens avec moi, Eugène, c'est-à-dire Baptiste, je me
trompe.
/ moison, n., taille, mesure, dimension. S'emploie exclusivement dans
cette expression : de bonne maison, pour dire de moyenne taille,
de bonne grosseur, do dimensions convenables : Note chanvegn'ast
pas grand, grand, mas ï ast de bonne moison (Notre cbanvre
n'est pas bien grand, mais il est de bonne taille, bien propor-
tionnée, de longueur suffisante). — Moison (grain de) grain tel
qu'il est recueilli par les fermiers?? — Vieux franc, moison, me-
sure, forme.
moitian, n. , milieu : Au moitian de lai rue (Au milieu de la rue.)\ / ^ ; -' ' '
Vlai les deux bouts et le moitian (Voilà les deux bouts et le mi- c
lieu, c'est-à-dire voilà la chose, c'est comme cela, c'est tout !) — ' ; Au-
Meitian, milieu, P. T. — Vieux franc, mitan, moitié.
molliture et moulliture, n., humidité, état de ce qui est humide,
mouillé, température très humide, temps pluvieux : An ne peut
pas traivoiller aux vingnes pa c 'te molliture lai % c'est-à-dire par
ce temps humide là, quand la terre est aussi molle, aussi dé-
trempée, etc. Ç'ast zeû seummé pa lai moulliture. — Moliture,
humidité. Gros.
monnition et aimonnition, n., munition : T vai ai lai chaisse sans
ses monnitions (Il va à la chasse sans ses munitions). Pain d'au
monnition, pain de munition. Vieux franc, amonition.
moque (Je vous en, oxxje t'en), se dit pour joliment ! quelle erreur!
Ah bien oui ! etc.; Aites-vous hèritié de vote onde? — Ah je vous
en moque t c'est-à-dire avez-vous hérité de votre oncle ? — Joli-
ment ! Ce n'est pas à nous que ces choses-là arrivent, etc. On dit
aussi dans le môme sens de belle : Tons hèritié de belle!
moque (aivoi lai), être dédaigné, oublié; être de reste, de trop, ne
pas servir : Ton dingner, i* ai zeû lai moque, c'est-à-dire n'a pas
été mangé, les convives ayant manqué volontairement ou non.
Tvous aivôs fait V boinne fouleire, mas eulle 1 ai zeû lai moque;
vous n'êtes pas venuns goûter au long de moi.
morelle, n., traverse de bois terminée à chaque bo t par une gar-
niture de fer, qui sert à relier entre elles et à maintenir les
ridelles d'une charrette. Morelle, insecte noirâtre, une espèce de
blatte, qu'on trouve souvent dans la farine et même dans le
pain.
t. i.. 7
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90 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX
mote (mote et mofieu), part. pas. fém. de meuri (mourir), morte.
Mote et mot'ieu, n.: Ein mort et eunne mote, ou eunne motieu.
motbr (n' pas), ne pas dire, ne pas répondre un mot, ne pas pro-
tester, être interdit : Euje 1» ai dit tôt çai et \ n'ai pas moté (Je
lui ai dit tout cela et il n'a pas ouvert la bouche). Eun mote
pas! c'est-à-dire ne proteste pas, ne dis pas un seul mot, ne
souffle pas ! — Voir grouiller , piper, souffler, etc.
mou et meu, adj., s'emploie pour mouillé, trempé : Euje seus rve-
nun pa lai p\eue, j'ètôs tout mou (Je suis revenu par la pluie,
j'étais tout trempé). ïast teut meu de suieur, c'est-à-dire tout
mouillé, tout trempé de sueur. — Mou, mouillé, moite, Gros.
moucé et mouché, n., morceau, monceau, tas : Ein moucé de pain
(Un gros morceau de pain). Ein mouché de fien (Un tas de fu-
mier). Ce mot est plutôt un augmentatif de morceau... — Mou-
chet, morceau, L. C. et P. T.; mouchai, G. et R.
mouchelot, nom diminutif par la forme, mais non par le sens qu'on
y attache ; signifie proprement morceau : Ein mouchelot de pain,
un morceau de pain. On dit un gros mouchelot, ou un moucé, un
gros morceau, et un petit mouchelot, un petit morceau.
mouchetaiche, n., moustache.
mouchette, n. dim., petit mouchoir qu'on attachait autrefois .à l'é-
paule des enfants, afin qu'il ne pût s'égarer.
mouillére, n., endroit humide, marécageux, dans les champs cul-
tivés ; endroit où l'eau s'égoutte, séjourne, dort. On dit aussi
ègouttîs. — Mouillére, endroit marécageux, Gros.
mouillotte et meuillotte, n., terme de fileuse, la salive dont elle
mouille son fil, à défaut de mouilloir ou d'épongé : Euf moguigne
des pnelles pou me bailler de lai mouillotte (Je mâchonne des
prunelles, etc.). Par extension, salive en général : J'ai lai bouche
si choche que je nai pus d' mouillotte, c'est-à-dire que je n'ai plus
de salive du tout.
mouire, n., petit fruit noir de la ronce, mûre, mûron. — Vieux
franc, meuron, mûre sauvage.
mourtia, n., mortier, et, par analogie, terre molle, détrempée :
Çast-x bin moupa les champs ? — Çast du mourtia, c'est-à-dire
la terre est comme du mortier. Chichie mourtia, goujat, maçon
qui fait le mortier ; espèce de défi dont les enfants poursuivent
les maçons afin que ceux-ci leur jettent une truellée de mortier :
On crie chichie mourtia, comme on crie dio d'ceûs. — De chiche ?
moutellb, n., poisson d'eau de rivière, la lotte, croyons-nous. Ce
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PATOIS DE LA FORÊT DB CLAIRVAUI 91
mot s'emploie par plaisanterie dans cette phrase : Vati'en pêcher
des moutelles, c'est-à-dire va-t'en où ta voudras, tu n'as que
faire ici, tu nous gênes, f... le camp t
moutte, n., petit morceau de terre, motte : J'ai èmouttelé mon champ
qui ètot p\eun de mouttes, c'est-à-dire j'ai émotté, etc.
mouvant, adj., s'emploie pour humide, marécageux : Ç'ast des
terrains mouvants, c'est-à-dire des terrains humides d'où l'eau
suinte. — Voir ègouttts, mouillére, sourds.
mouver, v. intrans., mouvoir, changer de place, bouger : Eune
mouve pas, ou je t'écrase (Ne bouge pas, ou...). Ne pas mouver,
quelquefois ne pas répondre, ne pas protester, rester interdit:
Euf li ai dit ses vérités et gnai pas mouvé, c'est-à-dire il n'a rien
répondu, il est resté coi. — Voir dans ce dernier sens : dèbailler,
grouiller, moter, piper, renifler, renoncer, souffler.
mouzon, n., grosse femme sans souci, rieuse, indifférente : Eulle
rit de teuC;~cle mouzon-lai (Elle rit de tout cette grosse noncha-
lante, cette sans cœur-là). On dit aussi grosse mouzon. Ce mot
est beaucoup moins injurieux que trouille, et s'emploie le plus
souvent plaisamment.
mugue, n., plante adventice, le melilot jaune (melilotus arvensis).
Muque, mélilot, Gros.
mujotte, n., petit mammifère insectivore, musaraigne. (Mûjotte).
mule, n , meule, dans le sens de tas : Eunne mule de foin, eunne
mule de paille (pé-\eu). (Voir tisse, poutée). Fronmaige de mule,
frommage de Gruyère.
mumelle, n., mamelle.
muraille, n., s'emploie pour mur : T te f...trôs 'n claque que lai
mureille t'en baillerot autant, c'est-à-dire un soufflet si fort que
le mur, contre lequel tu tomberais, te frapperait de l'autre côté.
murailler, v., maçonner, faire du mur. (Muré-ié).
muraillotte, n. dim., petit mur; mur éboulé, ruines de mur,
éboulis, (Muré-iotte).
murot, n., tas de pierres provenant de champs épierrés, de plan-
tations de vignes, de fouilles, de ruines, etc. : AnjUtien toujous
les piarres su les murots, c'est-à-dire l'eau va toujours à la ri-
vière. — Voir meurgé, synonyme.
muscadet, n., désigne une espèce de raisin, le chasselas.
musieau, muoieau, MsuGiEAu, meugeau, n., museau; nez, figure,
avec mépris.
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I 92 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVACI
\ nachouï, adj., délicat en ce qui concerne la nourriture, difficile à
nourrir, nachon, qui se dégoûte aisément ; qui mange du bout
des dents, comme avec défiance en épluchant ses aliments. Les
beaux parleurs disent nâcheux. — Voir chafrongnoux.
! mailles, n. pi., terme de mépris pour désigner les enfants : Vlai
les nâilles qui soient de l'école, c'est-à-dire voilà les enfants, etc.
— Nailles, enfants ; se dit en mauvaise part, Thév.
naillou, n., enfant, gamin, avec une nuance de mépris ou plutôt
d'ironie, de plaisanterie narquoise. Au fig., s'emploie comme
, - aiquais, nacou, etc.
tl : v '* naippe, n., nappe.
, / nairer, v., quêter, aller comme en flairant, avoir l'air de cher-
(? j v cher quelque chose à la sourdine, rôder ; épier curieusement,
J mettre le nez dans les affaires qui ne regardent pas, etc.: Quasi-
ce que t'aillas don nairerpa les vingnes ? (Qu'est-ce que tu allais
donc quêter, flairer, par les vignes ?) J'I'ai surprins qui nairot
pa mes paipiers, c'est-à-dire je l'ai surpris cherchant, fouillant
dans, etc.
• naiboue, n., celui qui naire, quêteur, curieux, rôdeur; flâneur,
et surtout flâneur quœrens quem devoret. Ne s'emploie qu'en
mauvaise part. (Nairoû).
naivette, n., navette. Gader, ou gadier les naivettes, être languis-
sant, traînant, malade, en parlant d'un nouveau marié*
nana, n., dadais, niais» bêta; mignard. S'emploie d'ordinaire avec
l'adjectif grand, grante, et est des deux genres. (Nana). — Voir
dadâ. — Nanas, femmelette qui croit tout, Gros.
napperon et naipperon, n., s'emploie avec une nuance de mépris,
de dédain, pour désigner : 1° un linge quelconque, du drap au
torchon; 2° tout vêtement flottant ou tombant des épaules, châle,
fichu, dentelle, collerette, etc.: Quast-ce que çast, arré, que ce
napp'ron-lai queulle aivot su le dos, ou qui pendot pa darré lé ?
c'est-à-dire qu'est-ce que c'est encore que cette guenille, etc.
(Voir dans ce dernier sens manderolle.) — Napron, torchon,
Gros. — Vieux franc, naperon, grande nappe.
naquard, n. augm., de naque, matière évacuée par le nez, épaisse
et formant comme un crachat.
naque, n., humeur visqueuse évacuée par le nez, ce*qu'on mouche,
morve.
naquer, v., répandre de l'humeur (naque) par le nez, morver,
1 • avoir le nez sale ; se moucher, se moucher souvent. — Nacquer
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^ > yvx^KO
PATOIS PB LA FORÊT DE CLAIBVAUX 93
aux mouches, tâcher de les attraper avec les dents, tuer le temps,
Gros... Se dit particulièrement des^chevaux, Thév. , ^ / -^
naqueter (bu NACQUETRR ?) les dents, claquer des dents de froid ; • /> î- ^/^°
F aivot frod qui' naquetot les dents, c'est-à-dire il avait si froid -
qu'il claquait des dents.
naquettes (ou nacquettes ?) n. pi., dents (ou mâchoires?). Ne
s'emploie guère que dans cette expression : Tende ses naquettes,
ricaner, rire en se moquant : J'ai cheâ et i's tendant los naquettes
(Je suis tombé et ils rient.) — Nacquelle, grande mâchoire;
nacques, dents, mâchoire ; nacquettes, première culotte d'enfant,
Gros.; nacquettes, grand os maxillaire des animaux, Thév.
naquiller (ou nacquiller ?), v., manger du bout des dents, sans
appétit ; faire le difficile, le nachoux. (Voir pluchotter). — Nac-
quiller, Thév.
naquou, ou nacou, n. adj., morveux, qui a le nez sale, ein pied de
beurbis au bout du nez. Au fig., s'applique dépréciativement à un
gamin qui veut faire l'homme, le fort, le brave : Toi, dire çai?
Toi, faire çai ? toi, pouter çai, méchant nacou ? (Voir aiquais,
aitrâ, etc.). Avec une nuance plaisante, presque admirative :
Tu vois bin ce nacou-lai, eh bin, çai boit daji dans ein baril I
narrée, n., récit niais, fadaise, conte à dormir debout, conversa-
tion longue et ennuyeuse, goguenette, mensonge, compliment
grivois, gravelure : /' membêtot d'aiveu ses narrées qui n'en fi-
nichaint pas (Il m'embêtait avec ses fariboles, etc.). Qués nar-
réesl (Quels mensonges, quelles fables !) /' conte des narrées aux
femmes, c'est-à-dire des gaudrioles, des gaillardises. — Voir
dandaines, flaube, nivelle, nasillerie, etc. Tous ces mots s'em-
ploient indifféremment les uns pour les autres. Cependant on
peut dire que dandaines signifie plus spécialement fadaises, niai-
series, narrée, guoguenette, fleurette, gaudriole, flaube, men-
songe, nivelle, conte bleu, récit de choses incroyables, nasillerie,
conversations ennuyeuses, fatigantes, etc. — Du vieux franc.
nare, moqueries, plaisanterie ?
nasillerie, n. pi., fadaises, bavardages, fables, propos grivois;
et plus spécialement, conversations ennuyeuses, fatigantes. —
Voir narrée.
nasiller, v., s'emploie pour bavarder, dire des riens, des fadaises,
faire des observations saugrenues, conter des narrées, des
nivelles, et surtout ennuyer, fatiguer de sa conversation.
nasilloub, n, adj., celui qui nasille, bavard ennuyeux, conteur de
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94 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX
sornettes, dej riens, faiseur d'observations ridicules, inutiles, etc.
Quand fie vois venin chez nous eue' grand nasilloû-lai, çai m'è-
pante, c'est-à-dire ce grand diseur de fadaises, d'àneries, ce rado-
teur assommant, etc. On dit aussi nivier.
nation, n., s'emploie pour race, engeance : Ç'ast V petite nation
que les poules, c'est-à-dire une ennuyeuse engeance, une vilaine
race. — Vieux franc, nation, famille.
nein (ou nin?) adv., non, nenni. Nin-da, non-da. — Nein, non,
nenni, L. C, P. T.; nein ou nun, personne, G. et R.
nêle, n., plante adventive des blés, nielle (lychnis githago).
nentille, n., lentille, légume, et lentille tache de rousseur.
nbntillé, n. adj., lentilleux, qui a des taches de rousseur : Oh le
peut nentille t On dit dans le môme sens vri.
néron, ou nairon de haiche, angle extérieur de la hache. — Vieux
franc., néron, nairon, môme sens.
neu, adj., neuf, opposé de vieux : Ein haibit neù.
nbunne, ou nunne, adj. fém., nulle. Ne s'emploie guère que dans
cette expression, nun-nepart, nulle part.
neurri, v., inf. et part, pas., nourrir et nourri, Faire du neurri,
faire de l'élevage.
neut, n., nuit : T ast neut, c'est-à-dire il est nuit. — Neu, nuit,
G. et R.
niain-niain, n. adj., niais, dadais; qui affecte une délicatesse, des
sentiments exagérés ; qui a des jeux, des manières, des caresses,
des joies, etc., trop enfantines. — Voir mignadon, nanâ, etc.
nicaisser et ricaisser, v., ricaner ; rire niaisement : Euje me sens
breûlé les dogts, et çai le fait nicaisser (Je me suis brûlé les
doigts, et ça le fait rire.) On dit aussi, dans ce sens, tende ses
naquettes. Y nicaisse pou rin comme eunne bête, c'est-à-dire il rit
bôlement sans cause. — Nicasser, grimacer, Gros,; nicasser,
rire sottement, Thév.
nicaissier, n., celui qui nicaisse, c'est-à-dire qui ricane mécham-
ment ou qui rit bêtement. — Nicassier, grimacier, Gros.
niche, n., rate: J'ai mainge lai niche de note couchon (J'ai mangé
la rate, etc.). De ce # que cette chair est fade? — Voir niche ad-
jectif.
niche, adj. des deux genres, mou, fade, qui manque de ton, d'as-
saisonnement, etc. Un homme est niche > quand il est paresseux,
mou, sans courage et sans vigueur; une cuisine est niche, quan<j(
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patois de la forêt db clairvaux 95
elle est doucereuse, qu'elle manque de saveur ou d'épices ; une
étoffe esl niche, quand elle ne se soutient pas, qu'elle manque de
corps, de raideur, d'empesage, etc. — Vieux franc., niche, nice,
sot, niais.
niô (ou niau?), n., nichet, œuf qu'on laisse dans le nid des vo-
lailles afin qu'elles reviennent y pondre. Au fig., et avec une
nuance dépréciative, petit enfant : Couche ton niô (gnô) en p\aice
de ï tenin su tes gênons, et vai ai ton ouvraige, c'est-à-dire
couche ton petit, etc. Niô, enfant bèta, simple, qui fait des
mignardises qui ne sont plus de son âge, qui s'amuse avec des
plus petits que lui, etc.: F faut enco que vous le poulains cou-
chei % , ce grand niô lai ? c'est-à-dire ce grand dadais-là. — Voir,
pour ce dernier sens, mignadon.
nivelle, n., niaiserie, fadaise, conversation futile, mensonge, gail-
lardise, et surtout conte bleu, récit invraisemblable. — Voir
narrée. S'emploie le plus souvent au pluriel de même que dan-
dainnes, nasilleries, etc.
niveler, v., niaiser, conter des fadaises, des bourdes, des grave-
lures, et spécialement des choses invraisemblables; perdre son
temps à des bagatelles, s'amuser à des riens. — Voir nasiller et
narrée. — Niveler, mettre beaucoup de temps à faire peu de
chose, Thév.
nivier 4 , n., celui qui dit des nivelles, des balivernes, des riens,
des gravelures aux femmes, etc.; imbécile, niais. — Voir nasiU
loue et narrée.
noge, n., neige. — Noef, neige, xin e siècle.
noger, v., neiger: l' ai toujous pour qu'ï n' noge bleu (Il a toujours
peur qu'il ne neige bleu, c'est-à-dire il redoute toujours des
choses qui n'arrivent jamais.) Qu'ï pleuve, qui' noge, qu'ï vente,
j'irai charcher mon bois.
non, ou nons, pro. pers., s'emploie dans quelques villages pour
nous : Chez non, chez nous.
non ou nond, n., nœud. D'où le calembourg qu'on fait aux en-
fants qui se plaignent de ce que les autres leur disent des noms
(des sobriquets): S'ïs te digent des nons, réponds liô des blouques,
c'est-à-dire s'ils te disent des nœuds, réponds-leur des boucles.
nonner, v. — Voir mouner.
4 On peut voir dans ce mot une contraction de nivellier, sans
doute un effet des il mouillées.
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06 PATOIS DE LA FORÊT DB CL AIR VAUX
nonnon, n., terme enfantin, mouchoir, guenille qui sert à nonner,
à mouner : J'aipèdiu mon non-non.
nor, adj., noir : Eut temps i' ast nor comme ein cul de chaudêre,
c'est-à-dire le ciel est noir comme, etc.— Noi, noir, L.C., P.T.,
G. elR.
nos, pro. pers., s'emploie pour nous dans quelques expressions:
Viens nos deux, viens nous deux.
noujotte, n., noisette.
noujottbr et noujottier, n., noisetier. On dit aussi coure.
nourri a, n., nourrisson : Eulle prend des nourrias de Pairis, c'est-
à-dire elle prend des nourrissons de Paris.
noyer (se prononce no-ié), v. , noyer : Y se nôe, qui' se noyé (no-ieu),
c'est-à-dire il se noie, qu'il se noie.
n'toyer, v., nettoyer. Spécialement, écurer, laver la vaisselle : J'ai
n'toyè (n'to-ié), et peûs je setis patie (J'ai lavé la vaisselle, etc.).
On dit dans le môme sens relaiver.
nuaige, n., nuage (nuége). On dit aussi brouillard: F y ai des
brouillards au temps, c'est-à-dire il y a des nuages au ciel.
run, pron. ind., personne : J'ai taipé ai lai pote t et gn aivot nûn
(J'ai frappé à la porte, il n'y avait personne.) Nûn nast venun,
personne n'est venu. — Nézun, personne, Gros. — Voix d'un,
voix de nun, xiv e siècle.
n'un va l'adte et n'un vai l'adte, pour l'un va l'aute (l'un vers
l'autre, ouïes uns vers les autres), par un changement assez fré-
quent de / en n.
nun, adj. nu. Au fém. on traîne le son : Euje vas tente nûn et tente
déchausse, c'est-à-dire toute nue et sans chaussure.
obeurdons (/"... les) à quelqu'un : le faire citer en justice, lui en-
voyer l'huissier, lui faire un procès ; lui donner une raclée : /'
m'ai r' tonné V roie, mas j'Y ai /"... les obeurdons (Il m'a re-
tourné une raie de champ, mais je lui ai flanqué l'huissier, le
papier timbré, etc.). Taies pûgé? Tai mère te /"... les obeur-
dons csoir, c'est-à-dire tu 't'es mouillé les pieds ? Ta mère te
donnera le fouet ce soir. — Oberdies, rêveries d'une tête embar-
rassée, Gros.
ocre, n., ogre : Oh V peut ocre t Oh le vilain ogre !
odon, n., chantier; besogne, tintouin, embarras: Euje vas ai mon
odon (Je vais à mon chantier). D'aiveu quate enfants, j'en ai de
l'odont (Avec quatre enfants, j'en 41 de la besogne, du tintouin!)
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLA1RVAUI 97
Tout traîne pa c'te majon-lai, çast ein bel odon, ein bel dquier !
c'est-à-dire un beau chantier, une belle besogne ! (Voir aria.)
— Ordon, rangée de vendangeurs, Gros.; ordon, tâche limitée;
où Ton en est de son travail, Thév. — Du vieux franc. Ordon,
rang, ordre, arrangement? de ordoï
œu, n., œil : G'nai pus depain chez nous, pas ce qui me ferot mau
en l'ceu (Il n'y a plus de pain chez nous, pas ce qui me ferait
mal à l'œil, c'est-à-dire pas une miette, pas un atome). Picher,
et môme ch... des œux { , pisser des yeux, pleurer. — Vieux
franc, eux, euz.
cbu, n., œuf: Tu n'airaies pastoujous deux œûs d'aiprèes tai soupeî
(Tu n'auras pas toujours deux œufs après ta soupe !) Ce dicton,
qui s'adresse ou s'adressait aux enfants difficiles, exigeants pour
la nourriture, prouve la sobriété des habitants de nos villages.
geillot, n. dim., petit œil, petit trou rond, œillet: p'tit œillot, gros
(Billot, etc. (Voir & jette.) Passe eul laiçot dans Vœillot, c'est-à-dire
passe le lacet dans l'œillet.
oeuvre, n., s'emploie pour désigner la partie la plus fine du
chanvre peigné, qu'on nomme aussi poupée. — Œuvre, filasse,
Gros.
offri, v. inf. et part, pas., offrir et offert.
ôgé, n., oiseau. — Ogeai, oiseau, P. T., G. et R. — Du vieux
franc, oisel?
oille, interj., cri de douleur, ahi : Çai me fait mau, oille (o-ieu) !
Oille oille oille î — De ahi? ou du vieux franc, aie, aide, secours,
hay, cri pour appeler du secours ?
oin, ou ouix, interj., espèce de oui goguenard, ironique, qui s'em-
ploie le plus souvent par antiphrase pour non, joliment, ce n'est
pas cela, au contraire, etc.: F paraît que vous aillez faire lai noce?
— Ouin t c'est-à-dire pas du tout ! Joliment! Ç'ast vrai comme
i p\eut du boudin. Taies gaingné ? — Ouin t du coûté de mai
poche, c'est-à-dire j'ai gagné comme on perd à Paris. Nous
l'avons déjà dit, la voyelle in substituée à l't ajoute en général à
la signification du mot une idée de dépréciation, d'ironie. On ré-
pond aussi dans le même sens bramant.
oisillb, n., oseille. Oisille des prés, différents rumex, rumex aceto-
sa, rumex acetosella, et rumex scutatus.
4 Nous écrivons au pluriel œûs (œufs) et ceux (yeux). La voyelle œu
du premier mot est très longue, et celle du second mot très brève.
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9$ PATOIS PB LA FORÊT DE CLAIRVAUI
ôlée, n. — Voir hôlée.
omption (aivoi V), avoir le dessus, prendre l'autorité, l'emporter,
dominer, commander : /' veut atvoi l'omption su tôt le monde,
t n'écoute nân, c'esl-à-dire il veut dominer partout, il n'obéit à
personne, etc.
ongle, n., (ong\e), ongle. On dit à un chat qui gratigneé par mé-
garde : Tu n'aies pas rongné tes on^uieu* aujd'heu. Qui t'a créé
et mis au monde? — Ç'ast lai mère une telle — une sage-
femme quelconque — d'aiveu ses ong\es : Espèce de parodie du
catéchisme.
OPiNiNioN, n., opinion. (Opingnon).
oqueler, oquelot, etc. — Voir koqueler, hoquelot, etc.
oreillotte et airoillotte, n. dim., petite oreille, oreillette.
orerie (ou orrie?), n., bijoux d'or, orfèvrerie : Aicheter des oreries,
acheter des bijoux, des joyaux. Ailler aux oreries, en particu-
lier, aller acheter l'anneau et les autres cadeaux de noce d'une
mariée.
orpéve, n., orfèvre.
oriller et airoiller, n., oreiller : Vorïller et Vtraiversin.
oriot, n., chardon acaule, circe laineux (cirsium eriophorum) ; ai-
grettes des graines de ce chardon que les pauvres gens recueil-
laient autrefois pour en faire des lits à leurs enfants : J'ai fait
ein oriller d'aiveu des oriots. Oriot, n., oiseau, loriot, par la
confusion de l'article et du nom.
ormoire (ou aurmoire?), n., armoire.
orniot (ou orgnot, ormeau?), n., mauvais coucheur, homme dif-
ficultueux, querelleur, bizarre; homme de petite taille, nabot,
avorton, homme faible, laid, contrefait, etc. S'emploie souvent
avec les adjectifs peut (laid), bel, méchant, etc.: Oh, le peut or-
niott r n'ast { jainmas content (Oh, le vilain oiseau ! etc.). Ein
bel orniot pou se mairier d'aiveu note Julie ! c'est-à-dire un beau
nabot, etc.
oroille, n., oreille. (Voir airoille).
ossenge (ai /'), expression qui signifie dans l'intention, dans le
but, avec l'arrière-pensée, etc. S'emploie le plus souvent avec la
négation : Si j'H ai rendu service, ce n'ètot pas ai l'ossence d'en
été récompensé, c'est-à-dire ce n'était pas dans le but d'en être
récompensé.
1 Au lieu de gn'ast qui sç dit plus souvent.
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PATOIS DE LA FOHÊÎ DB CLAIRVAUX 99
ostingnrr, v., Irriter, pousser à bout : Tiens, ne m'ostingne pas, tu
n'en seras pas le bon marchand, tu me V payeras, c'est-à-dire De
m'impatiente pas, ne me pousse pas à bout, etc. — S'ostingner,
v. p., s' obstiner, s'entêter:/' s'ostingne ai vouloi piaidier, quand
i' sait qui' ai tort (Il s'obstine à vouloir plaider, etc.). — Oste-
ner, impatienter, pousser à bout, Gros.
otib, n., ortie. Otie blainche, ouseûçot, lamium album. y
oudri, adj., employé seul signifie pourri, consumé : Ces piquots-lai
sont oudris (Ces pieux-là sont pourris). Ajouté à certain ad- 4
jectif, il marque l'excès, le superlatif : Oudri sq 3 très sec, archi- < - • - *
sec, oudri meûr, trop mûr, pourri mûr. — De outré ? que nous
avons entendu également employer dans le même sens avec ces
mômes adjectifs : outré so, outré meûr, etc. ou du vieux franc.
heudrir, pourrir ? Ou confusion de ces deux mots ensemble?
ougelot, n. dim., petit oiseau, oiseau avec dépréciation : /' y ai '^ 5
dans le bois ein ougelot qui dit: « Comme an te fait, fais-li » (Il y
a dans le bois un petit oiseau qui dit, etc.). l'ai tiué ein ougelot,
ein méchant ougelot dans toute saijonnée de chaisse, c'est-à-dire
un oiseau seulement dans toute sa journée de chasse ! Cet oiseau
pourrait être aussi bien une perdrix qu'un moineau... Du reste,
ougelot est un diminutif d'origine, de forme plutôt que de sens,
car on dit très communément : Ein gros ougelot, ein ptiot
ougelot.
oui (ah) y interj. d'admiration : J'ai tiué mes trois lapins c' maitin
dans les préres. — Ah oui t c'est-à-dire vraiment ï tu as de la
chance; quelle aubaine !
oussb, interj. (Voir housse).
ousére, n., osier: Pends eunn'ousére etrlôe laibeurtelle detai
hotte, c'est-à-dire prends un osier et relie, rattache, etc. — Ozière %
osier, Gros. — Vieux franc, ousier.
ousu, part. pas. du verbe oûser, oser. Condition: J'oûserôs, et j'oû*
sourds.
outons et otons. (Voir houtons).
ouvraigb, n., ouvrage. On fait ce mot fém.: De lai belle ouvraige
(ouvrége), du bel ouvrage.
ouvrer, n., ouvrier. Fém. ouvrére. Ein jou ouvrer, ou ein jou
l'ouvrer, un jour ouvrier, ouvrable.
ouvri, v. inf. et part, pas., ouvrir et ouvert. Eunne gueule ouvrie
(Une gueule ouverte), un muid qui n'a qu'un fonc| f
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100 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX
pa, prép., par. Pa lai p\aice (par la place), par terre, tombé : Le
v'iai pa lai piaice, ou le v'iai ai bas, ou le vlai cheû (Le voilà r^
tombé). Teutpa lai piaice, dans beaucoup d'endroits, partout : Des
pommes ai cueilli ? J'en ons teut pa lai p\aice, ou teut patent
(Des pommes à cueillir ? Nous en avons dans beaucoup d'en-
droits, dans toutes nos propriétés, partout. Tout, ou teut, ou tôt
pa moi, toutpa toi, teut pa lu, tôt pa lé, etc., seul, tout seul : T
s'en vai teut pa lu (Il s'en va seul, tout seul). — Par li, tout
seul, xin e siècle. — Pa de va (par de vers), du côté de, aux envi-
rons de : Si tu viens pa de va chez nous, t' entreraies (Si tu viens
du côté de, près de chez nous, tu entreras). /' demoure padeva
chez Jeannot, c'est-à-dire il demeure aux environs de chez Jean-
not. — Pa lai-bas, pa lai-haut (par là-bas, par là-haut), se disent
pour quartier du bas, quartier du haut : /' demoure jusqu'ai
faute bout de pa lai-bas, ai Vaute bout de pa lai-haut, c'est-à-
dire il demeure à l'autre extrémité du quartier bas du village,
etc. — Devant certains mots, l'r se rétablit : /' traivoille ai
tant par jou.
pace que, loc. conj., parce que.
paché, n., paisseau, échalas. (Pâche). — Pesseau, petit échalas,
Gros.; pachet, L. C, P. T.; pâchet, G. et R. — Vieux franc.
peyssel, pescheau.
pacheler, v., paisseler, piquer, ficher les paisseaux en terre, à côté
des ceps de vigne. Prés, de l'ind. : Euje pâcheulle, etc. — Pa-
cheler, mettre des paisseaux, Gros.; pâcheler 9 paisseler, G. et R.
— Vieux franc, passeler. (Pâch'lé).
pachelot, n. dim., petit pâché, petit paisseau; bout de paisseau,
paisseau usé. (Pâclïlo).
pacheloub, n., paisseleur, celui qui paisselle; instrument dont on
se sert pour paisseler. (Pâch'loiï).
padé, interjec., pardi, pardié, pardine, pardienne, abréviation de
pardieu.
pai, interj., s'emploie pour paix, silence, taisez-vous, et se pro-
nonce très brièvement : Pèt tandis que paix se prononce comme
en français ??
paie, n., omoplate du porc salé, paleron ; J'ai mins 'n' pat dans
not' pot.
paillaisse, n., paillasse; panse, ventre avec mépris: I'U ai crevé
ou cueurvé lai paillaisse. (Pai-iesse).
paille, n., paille, se prononce petite,
r
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PATOIS DE LA FORÊT DZ CLAIR VAUX 101
pailot, n., palet, pierre plate, plus ou moins arrondie, dont on se
sert à certains jeux.
pain d'ougblot (pain d'oiseau), désigne : 1° différents sedum,\e se-
dum acre, le sedum album, etc.; 2° le pain qu'on a de reste, qu'on
rapporte des champs et qu'on donne souvent aux enfants comme
une friandise : Mainge, çast du pain d'ougelot. On dit plutôt dans
ce dernier sens : du pain d'ailouette.
paingnottb (ou piNONOTTE ?), n., homme pauvre, misérable ;
homme de peu de valeur, de basse mine.
pairaidis, n., paradis; reposoir, particulièrement le reposoir qu'on
fait à l'église le jour du Jeudi-Saint.
pairesse, n., paresse.
pairessoux, adj., paresseux : Pairessoux et gormand, ç'ai ne vai
pas riun h sans l'aute.
pairou, n., chas, espèce de colle de pâte dont les tisserands se ser-
vent pour apprêter, parer leur fil. — De parer?
pàirtaige, n., partage (Pairtége).
pairtaigbr, v., partager.
pairtaigeoub, n., partageur, partageux, socialiste, communard.
paitte, n., patte; pied avec mépris ou plaisamment : /' n bouge ni
pied ni paitte (11 ne bouge, ne remue point du tout). Euriire tai
paitte que ;' pouille passer, c'est-à-dire retire ton pied, ta jambe,
etc. Paitte goyette, voir goyette.
paittblot, n., espèce de pou de bois, tique ou ricin.
paittoybr (ou pètoyer? ou PAiToiLLER ?), v., piétiner, marcher sur
place ; marcher où il ne faut pas, sur un terrain emblavé ou
fraîchement labouré, par exemple : Note chevau paittoye (pai-
to-ieu), t" doit aivoi mau au vente (Noire cheval piétine, s'agite,
frappe du pied, etc.). Quast-ce que tu viens don paitoiller dessus
mon rabouréf c'est-à-dire fouler aux pieds mon terrain labouré?
— On dit aussi, dans ce dernier sens, pillâuder, triper, tripoter,
tripâiller. — Du vieux franc, piétoier, se promener? — Ne pas
confondre ce mot avec patouiller, paitouiller.
paittotot, n., qui fait de petits pas en marchant, qui marche en
quelque sorte sans avancer ; qui marche là où il ne faut pas
marcher, sur un terrain cultivé, emblavé, etc. On dit aussi tri-
potot, et pilldudoue. — Vieux franc, piétoier, marcher.
1 Pfun pour l'un.
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102 PATOIS DE LA FORÊT DE CLÀIRVALX
paivé, n., p&vé.
paiver, v., paver.
paivoue, n., paveur. (Paivoû).
palbr, v., parler, causer : F pale bin (Il parle bien). Paler, par-
ler, xin' siècle.
paloub ai jonnée, voir causoue.
pan (aï) ou èpand? loc. adv., sans choix, en suivant Tordre, sans
rien passer, sans rien excepter: F prend. ïraimasse, etc., ai pan,
ou teut èpand, % n'y chôgit rin, c'est-à-dire il prend, il ramasse,
etc., en suivant l'ordre, comme cela se présente ou lui tombe sous
la main, sans rien démêler, rien rebuter... Tu peux empli ton p'ner
de pommes; mas ne chôgispas, prends tôt ai pan.— A pan, beau-
coup : Y a dou râgin à pan, il y a du raisin beaucoup, à tous les
ceps; provigner une vigne à pan, la provigner entièrement, L. C.
— De espandre, espandu, espand ?
* pancheb de Veau, expression délicate pour dire uriner, pisser :
Euf vas pancher de Y eau. — Épancher?
pané, ou panet de cheminge, pan de chemise, la partie inférieure
de la chemise. Eté en pané, s'eurlever en pané, rester en panet,
c'est-à-dire être en chemise, se relever en chemise, rester en che-
mise, sans s'habiller.
panée, n., panais, légumes. Ce mot est féminin. (Panée).
panserot, n. dimin., petite panse, spécialement, l'estomac da
porc.
pantager, v., haleter, panteler, anheler, être très essoufflé, très
O ^ oppressé, battre des flancs. Se dit surtout des animaux : /' ast
( /l prins de chaleur, notecôuchon, ï pantâge, c'est-à-dire il est pris
de chaleur, il halète, il bat des flancs. — De panteler?
pantainnes, n., voir dandainnes.
PAPiLLOT, n., papillon.
paquotte, n., chaton odorant du saule marceau, qui fleurit aux
environs de Pâques. Les enfants en mêlaient à leurs branches de
buis, le dimanche des rameaux. (Pâcotte).
paraite, v., paraître. De même les dérivés, disparaite, compa-
raîte, etc.
parche, n., perche, brin de bois. Parche ai moichon, perche qui
sert à maintenir, à serrer les voitures de foin, de gerbes, de fa-
gots. Mette lai parche (mettre la perche) achever une besogne;
par analogie, de ce qu'on termine, achève le chargement de ta
voiture en mettant, en serrant la perche.
Z-
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVÀUX 103
X&h J<" parchis, 11., taillis. — De parcke, perche.
. parchottb, n. dimin., petite perche. Une parchotte souple, fine,
lisse et droite, se nomme aussi foce.
parcommencer, v., synonyme énergique de commencer... Ne s'em-
ploie guère qu'à l'impératif et à l'infinitif : Parcommence ai te
taire (Commence bien vite par te taire, je t'ordonne de te taire).
Quelquefois on répète par: /' faurot parcommencer pa f...ton
camp, c'est-à-dire il faudrait bien Vite décamper, sans faire autre
chose avant.
parfonne, n., espèce de tarte à l'huile. — Pafourne, pain que
les paysans font cuire pendant que le four cbaufle, Gros.
parioub et pairioub, n., parieur, qui a la manie de parier.
pariure, n., pari, gageure; enjeu, chose pariée.
paroil, adj., Pareil : Ç'ast du paroil au même, c'est-à-dire c'est la
même chose.
part, n., s'emploie absolument pour chair, viande: /' mainge pus
souvent du fronmaige d'aiveu son pain que <F lai part.
parterrer, v., abattre, renverser par terre ; culbuter son adver-
saire en luttant corps à corps : T ai v'iu se collter d'aiveu moi,
mas f ai zeû bintiôt fait de V parterrer, c'est-à-dire il a voulu se
colleter avec moi, mais j'ai eu bientôt fini de le renverser à terre,
de le culbuter.
pas de chait (pas de chat), ricochet, bond que fait une pierre
plate, un morceau de tuile, etc., jeté presque horizontalement
sur la surface de l'eau : Viens faire des pas de chait su Vguè.
pas moins, s'emploie pour cependant, pourtant, néanmoins, enfin :
Pas moins t l'ai fait, ï Yy ast airrivé (Cependant, il l'a fait, il
l'y est arrivé). — Pas moins, cependant, néanmoins, Gros.
passabe, adj., passable. On prononce passâbe et passable (pas-
sâb\e\x).
passade, n., s'emploie pour averse, courte averse. Voir ruche. —
De passer, qui passe vite.
pàssmge et paissaige, n., passage
passance, n., temps à passer, durée, saison. S'emploie dans le sens
de consommation, provision suffisante pour passer un temps
déterminé, généralement l'année : fai rècorté du vin pou mai
passance, c'est-à-dire pour ma consommation pendant Tannée. On
dit aussi dans le môme sens, pou mai ou mon convenûn.
patapouf, n., personne grosse, grasse, lourde, qw peine en mar*
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104 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX
chant, qui se hâte sans avancer. Est, par surcroît, assez sou-
vent précédé de l'adj. gros. On dit aussi pouf; mais pouf est
plutôt employé pour l'état de repos et patapouf pour l'état de
mouvement. Des deux genres. S'applique aussi aux animaux et
plus rarement aux choses.
patarod (été en), express, du langage populaire général, être in-
quiet, tourmenté, troublé, irrité, en colère ; se démener, s'agi-
ter outre mesure : Son chien t" ast pèdiu et le vlai en patarou.
Fs sont bin en patarou, ïs n'ont pas V jarbe de rentrée, et vlai
V nuée du diâbe qui se prépare I
patatraque, interj., patatras, onomatopée, qui exprime le bruit
d'un corps qui tombe avec fracas. — Patatraphe, Thév.
pati et paiti. v., inf. et part, pas., partir et parti.— Patchy, partir,
P. T.; paqui, G. et R. — Dans quelques villages on mouille en
quelque sorte le t, on prononce patAi : est-ce cette prononciation
que MM. P. T„ G. et R. ont voulu figurer?
patingner et paitingnbr, v., patiner, manier indiscrètement, indé-
licatement, sans précaution. On dit plutôt tatingner. Voir aussi
peuçoyer.
pâtira,* n., s'emploie pour souffre-douleurs : Ç'ast ein pâtira, c't'
enfantlai, c'est-à-dire un souffre-douleurs, une victime, le jouet
des autres, etc.
patouillait et patouillat, n., flaque d'eau stagnante, particuliè-
rement d'eau de pluie, dans la rue ou sur un chemin où l'on est
exposé à patouiiler; margouillis, patrouillis. — Patouillat,
bourbier, Gros.; souillât, G. et R.; patouillat et patouillis, eau
stagnante des chemins, Thév. (Voir margouillait et logai). Pa-
touillait et margouillait impliquent généralement une eau plus
remuée, plus impure que logai.
patociller et paitouiller, v., marcher dans les flaques d'eau, vo-
lontairement ou non, barbotter avec les pieds et les mains, pa-
trouiller... Avec les mains seulement, on dit plutôt tatouiller.
Un enfant patouille et tatouille quant il fait des fontuines, en
barrant les ruisseaux des rues. — Patouiiler, marcher dans la
fange, Gros.; patouiiler, marcher dans l'eau et la boue, Thév.
(Voir gargouiller, gaisser). — De patrouiller? ou du vieux
franc, tooillierf
patouillis, n., endroit où l'on a patouille, patrouillis. Se confond
avec patouillait.
patouillot, n., petit enfant très gras, très potelé : Oh que gros pa*
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAÏRVAUI
10»
touillot l On dit dans le même sens peloton : Que gros p'ioton I —
Patouillà, Gros. — De pâte, pâté? ou de patouiller f
paumelles (faire des), exprès, de fileuse au fuseau : imprimer à son
fuseau un mouvement de rotation prolongé en le roulant rapide-
ment entre les paumes des mains, au lieu de le faire tourner
avec le pouce et l'index. (Pômelle).
patoue, n., payeur : Les conseilloûs n sont pas les payoûs
(pé-ioû).
p'cheunnb, pron. indéf., personne. Ne s'emploie guère que dans
cette expression : Griy ai p'chun-n (Il n'y a personne). On dit
plus souvent : Gn'y ai nû,n.
pé, adj., pis et pire : Çast bin pé, c'est bien pire.
pbcher,v., percer : Peuche ein trou dans lemeudpouy mette eunne
broche (Perce un trou dans le muid, etc.). Ce nast pas cheû dans
ein p'ner p'ché (Ce n'est pas tombé dans un panier percé, c'est-
à-dire la nouvelle est en bonne main, elle sera répétée). Cul
p'ché, voir cul-peché.
pède, v., perdre. Prés, de l'ind.: Euje perds; imparf.: pidôs; fu-
tur : pedrai; part, pas.: pèdu.
pèdrix, n., perdrix.
pèdu, pèdiu et p'du, part. pas. de pède : J'ai pèdu mes bieaux sai~
bots — Dans V petit bois d' tremblots. — Pedju, perdre, P. T.;
pedju, p'du, p'dju, G. et R.
peingne, n., peigne. Le peigne à démêler, démêloir, se nomme cW-
villoue (dèvi-ioû).
PEiNGNÉB, n., peignée, raclée, volée. — Voir tâgnée.
pbinoner, v., peigner. Eus' peingner d'aiveu ein râtieau, avoir la
tôle ébouriffée, ne pas se peigner du tout.
peihgnot, n., chardon à foulon (dipsacus sylvestris).
peis, n., pis, mamelle, tétine : Note miche, eulle ai ein gros peis
(pé) c'maitin, c'est-à-dire notre vache a un gros pis, etc.
pellotte, n. dimin., petite pelle; proprement battoir à lessive. —
Rouillot, Gros.
pblloyer(ou pelloiller ?), v., se servir d'une pelle, enlever
. quelque chose à l'aide d'une pelle, en particulier la terre pio-
chée, pelleter : r pioche, et moi, jpelloye (pelloieu) ou fpelloe,
c'est-à-dire il pioche et moi j'enlève la terre avec une pelle.
pe5auillbr, v., donner une raclée, une correction, pelauder,
épousseter. Voir èpenouiller, plus employé.
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106 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIftYACI
pendoue, n., espèce de bâton en forme d'arc, qui sert à suspendre
le porc quand il est tué, pendoir. — Vieux franc, pendouer.
Pendoue, n., celui qui pend, pendeur, bourreau. De même de-
pendoue: Ein grand dèpendou d'andouilles, un homme grand,
plutôt fluet, qui est censé dépendre les andoûilles du plafond
sans monter sur une chaise.
pbneau, n., extrémité de l'aile d'un gros oiseau de basse-cour, la
dernière phalange, dont on se sert en guise de plumasseau :
Baille ein cop d' peneau sur lai cWmingnèe pou oter V poussât
(Donne «n coup de plumasseau, etc.). Traîner les p'neaux, être
souffrant, malade, par analogie, sans doute, avec les volailles
malades qui laissent tomber, traîner leurs ailes. (Voir Corner).
— Penô, bout d'aile d'oie ou de canard. Traîner les penôs, être
mal en point, ou pour la santé, ou pour la fortune, Gros.
pbnblle, prbuhnellb et PEURNELLB, n., prunelle, fruit du prunel-
lier; pupille: y ai maingè des p'nelles gelées (J'ai mangé des
prunelles gelées). Jy tiens comme ai lai peurnelle de mes ceux,
c'est-à-dire à la prunelle de mes yeux.
pbnellbr, preunneller et PEURNELLBB, n., prunellier, prunier épi-
neux, prunus spinosa. (Fnellé).
pener, n., panier. P'ner p'ché, panier percé, homme prodigue. —
Vieux franc, penier. (P'né).
pbnbu etPENOT, adj. f capon, honteux, pantois... Et ta, norotf —
Et ta, rougeot f — Si mon cul s % effondrât — Tu seras bin p'not !
c'est-à-dire tu serais bien sol, bien attrappé, bien pantois. Dia-
logue-devinette entre le feu (rougeot) et la chaudière (norot).
— Penez, honteux, confus, xiv - siècle.
pennibe, adj., pénible. Se prononce piwnibe et />w-niïl*(pw-miieu).
penrb, v., voir prenre.
penser (se), s'emploie pour penser : Je m 9 pensas, c'est-à-dire je
pensais à part moi, je me disais. Pensez (ou pensé ?), impérat. ou
part, pas., s'emploie ironiquement pour hein, tu te figures peut-
être, tu crois, etc. Vous expliquez, vous affirmez quelque chose
à quelqu'un qui vous paraît douter, protester, et vous lui dites :
Je n' sais pas, pensez f c'est-à-dire tu crois peut-être, tu serais
capable de penser que je ne sais pas, hein ? Pensez que (ou pensé
que?) peut-être que, Dieu veuille que, je pense bien que, etc.:
Je V tueras c' carcan de chien-lai I — Pensé que non, tu n' le tue-
ras pas! c'est-à-dire j'espère que non, je te prie de ne pas le
tuer, de réfléchir, etc. Ce pensé est un appel à la réflexion,
une prière, une défense.
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PATOIS M LA FORÊT DE CLAIRVAUX 107
pèhale, n., patience (rumex patientia).
permette, v., permettre.. .
peset et p'zet, n. ? ti_ge mortty de certaines plantes, en particulier
des pois, des haricots, des pommes de terre et de la navette : Du
p'zet de pommes de terre, c'est-à-dire des fanes de, etc. S'ap-
plique plus rarement à ces mômes tiges encore vertes. On pro-
nonce aussi beset et b'zet. — Vieux franc, pesus, pesole, pois ;
p esac, pesaz, cosses de pois ; peseau, pezière, champ de pois.
petiot, adj., petit. (P'tiot).
petiolot et petiololot, adj. diminutif de petit, tout petit, tout petit,
petit. (Ftiolot, ptiololot).
petoue, n., péteur, qui pète souvent. — Vieux franc, pettour.
(Ptoû).
petuns, n. pi., débris de pierres de maçonnerie, ou de murs ébou-
lés ; débris de pierres en général, décombres : Les maiçons i's
ont fait, et je vas débarrasser les ptuns (Les maçons ont fini et je
vais enlever les débris, les décombres). Voir caffres. P'tuns,
butins, décombres de bâtiments, Gros.; p'tuns, décombres de
bâtiments, G. et R. — - Vieux franc, betuns, immondices, vi-
danges, etc. On forme de ce mot le verbe dèptungner, ou dèptunr
nier, enlever les p'tuns, démolir de vieux murs, de vieilles
fondations. Mais on dit plus souvent dans le même sens
dècaffrer.
peuce, n., pouce. Tnin sonpeûce dans sai main, tenir son pouce
dans sa main, c'est-à-dire se tenir sur ses gardes, agir avec pru-
dence ou même défiance.
peuche (mette en), mettre en perce : Mets en penche ein aute meud,
eunne aute fillette, c'est-à-dire mets en perce un autre muid, une
autre feuillette. Peuche, sing. du présent de l'ind. et de l'impé-
ratif du verbe pécher ou pcher, percer.
peuçot, n., petit fourreau, petite gaine de toile ou de basane, sem-
blable à un doigt de gant, dont on revêt un pouce malade ou
blessé. Le doyot se met au doigt, et le peuçot, au pouce ; mais
peuçot s'emploie souvent pour doyot.
peuçoyer et pecciller (ou peuçoiller ?), v., masser avec le pouce \ y ^ V *"' J
ou avec les doigts, tàtiner, presser, manier sans précaution : l ' .
Euri peûçoille pas tant ces poires-lai, tu vas les faire b\ossi d' r- £& ^ L
foiche (Ne presse, ne tàtine pas tant ces poires-là, tu vas les ^
faire blessir de force). Ton bouton n' se r' guérirai jainmas si tu
V peucilles comme çai, c'est-à-dire ton bouton ne guérira jamais
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108 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRYAUX
si ta y touches, si tu le presses, le tàtes ainsi. (Voir pâtingner
et tatingner). — Peuceyer, appliquer le pouce en appuyant,
Gros. — Du vieux franc. Peçoier, briser, détruire, mettre en
pièce? ou àepeuce?
peunkeréb, n,, panerée, le contenu d'un panier, le panier plein :
Eunne pun-rirée de rasins.
peupler, v., se prononce peupler (peupié). De môme peup\e, peuple.
peurge. n., purge, action de purger; purgatif; arrière-faix, «n
parlant des animaux : Ein mouchai sale, dégoûtant comme eunne
peurge de bique.
peurger, v., purger; jeter l'arrière-faix, la peurge: Eut vieau i'ast
fait, mas lai vaiche eulle n'ai pas enco peurge. S' peurger, V.
pron., se purger.
peurnon et pronnon (faire ein), expression qui signifie supposer
que..., prendre que..., etc.: Taies pèdu vingt sous ? Eh bin,
fais ein peurnon que tu les aies maingés, et tu ny penseraies pus,
c'est-à-dire suppose que, prends que tu les as mangés, etc. De
faire un prenons, de dire prenons que... ?
peurri, v., inf. et part, pas., pourrir et pourri : t Gallimard —
Veux-tu du lard f — Veux-tu des pommes peurries ? — Eh
bin, charche toi vie h Paroles qu'on adresse au joueur qui a les
yeux bandés, au jeu de Colin-Maillard, pour le prévenir que la
partie commence.
\ ' peurrion, n., quelque chose de pourri, de gâté, ou de très sale,
spécialement en fait de linge et de vêtement : EuUe traîne des
% i' -: * cotillons dégoûtants, d'ailleurs des vrais peurrions. S'applique
aussi aux personnes.
peursailler et peursiller, v., fréquentatif de peurser, presser par
saccades, presser avec insistance, mal à propos, d'une façon ma-
ladroite, ennuyeuse.... Ne pas confondre avec peuçoyer, peu-
ciller.
peurser, v., presser : Peurse lai-dessus, c'est-à-dire presse là-
dessus.
peursoi, n., pressoir. — P'choui, pressoir, G. et R.
peursourbr, v., pressurer. — Pchourey, écraser,? I P. T.; p'chou*
rer, pressurer, G. et R.
peurtbr, v., prêter : Peurte-me cent sous? c'est-à-dire prête-moi, etc.
An n' peurte quai les riches.
pburti, v., inf. et part, pas., pétrir et pétri : Quand an ai peurti
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIBTAUX 109
t faut enfonner (Quand on a pétri, il faut enfourner). — Preu*
tir et prétir, Gros.; ptchir, L. C; ptchi, P. T.
pburtintaille, n., pretintaille, gens ou choses de peu de valeur,
menu fretin, reste d'objets, de choses dont on a prélevé le choix,
rebuts, menuaille. débris, rogatons, ramassis, friperie, etc. On
dit: çast de lai peurtintaille, en parlant des gens, comme on dit
de la racaille. — Voir cheni et fripouille, plus dépréciatifs
encore.
P9URTOUB, n. adj., prêteur. Ein peurtoù d'airgent, un capitaliste,
un banquier.
pkus, adv., puis. Etpeûs, et puis. (La voyelle eu est très longue).
— Etpeue,et puis, G. et R.; peux, puis, peur?! P. T.
pbut, adj., laid, vilain : /' ast pus peut que c'tu qui pend les beur»
bis; il est plus laid que celui qui prend les brebis, c'est-à-dire le
loup. (Eu est long dans peut, et bref dans le fém. peute). — Put,
laid, P. T.; put, pute, vilain, vilaine, G. et R.; put ; laid, vilain,
Thév. — Du vieux franc, put, puant, mauvais, pute, laide au
morale, puttana :
« Toutes êtes, serez ou fûtes,
De fait ou de volonté, putes. »
phobmagie, n. pharmacie.
phormacibn, n., pharmacien.
piailler, v. t crier; s'emploie pour gronder : Si tu neurviens pas,
tai mère te piaillerai, c'est-à-dire si tu ne reviens pas, ta mère te
grondera.
piailloub et piaillard, n. adj., piailleur, qui crie, qui piaille, qui
gronde souvent. (Pia-ioû).
piarre, n., pierre : Eunne piarre jitiée n'ai point de quoue. Ein
cassoue depiarres. A formé le verbe èpiarrer, épierrer.
piarrottb, n. dim., petite pierre, pierrette : Tai V piarrotte dans
mon soulier. ***'-/< ' ~ '
piarroox, adj., pierreux, qui est plein de pierres; noueux, en
parlant de fruits: Ein champ piarroux; eunne poire piarrouse
ou nouyouse.
picader, v., piquer, picoter, aiguillonner, exciter, irriter, au prop.
et au fig. : /' picadot l'âne desous lai quoue d'aiveu ein bâton
pointiu, c'est-à-dire il piquait, il aiguillonnait l'âne, etc.
pichenet, n., petit vin acide, vin de mauvaise provenance ou d'une Ji pr \,
mauvaise récolte, ginguet. \ J>^'
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110 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX
picher, v., pisser ; couler en jet, en filet continu, jaillir : T saigne
au nez, ç'ai piche, c'est-à-dire ça ne tombe pas goutte à goutte,
ça coule, ça jaillit. (Voir gig\er et drager). Picher su ses quoues
(pisser sur ses queues), se dit d'un tonneau presque vide, dont le
vin coule sur le jable : Eulle meud t ast quasi veu, i' piche su
ses quoues, c'est-à-dire le muid est quasi vide, le vin coule sur
le jable. Picher des ceux, voir œu.
picherotte (coûter, cheur, s'en ailler, etc., ai lai), couler à jet
continu, jaillir, picher : F p\eut, i' en cheurt ai lai picherotte,
c'est-à-dire il pleut, il en tombe (sous-entendu : de la pluie) à
jets, à flots. T saingne, çai coule ai lai picherotte (Il saigne, le
sang jaillit). Eul meud i' en vai, çai piche, ou çai coule ai lai
picherotte. (Voir en ailler). — Picherotte, essui de lessive (?)
Gros.
pïchon, n., pissat, urine : Pichon d'âne, pissat d'âne.
picoté, n. adj., grêlé, marqué de petite vérole. S'emploie souvent
comme sobriquet : Eul picoté, lai picotée.
picotin (gaingnerson) t se rouler, en parlant des ânes. Par analogie,
on dit à un enfant qui trépigne, qui se roule de colère : Tu veux
gaingner ton picotin ?
pibau, nL, peau. Pieau de vieux-oing, la pellicule qui recouvre le
vieux-oing... Cette peau, séparée de la graisse, s'appliquait
comme résolutif sur certains bobos, clous, abcès, etc.
piéton, n., s'emploie pour facteur : Eut piéton t" ai V lette pou toi,
ou pou ta.
piednnerie, n., corvée, prestation : Nos gens ts sont zeâs ai lai
piun-n'rie lundU (Nos gens sont allés à la corvée lundi, c'est-à-
dire sont allés faire leur corvée, leur prestation. — Piounnerie,
corvée, Gros.; piounnerie, corvée, P. T. — On dit aussi
courvée.
pignagb et pingnage (ou piniage?), n., punaise : Eujef écraseras
comme eunne pignage.
pignajot et pingnajot (ou piniajot?), n., prunier de Sainte-Lucie.
(Prunus mahleb).
pionas et pingnas (ou pinias?), adj., punais : Ein œ&pignâs (pt-
gniâ), c'est-à-dire un œuf punais.
pignoler et pingnolbb les œux (ou pinioler?), cligner, papillotter
les yeux : Eurgaitieu vô P s'ro sans pignoler les ceux (Regarde
voir le soleil sans papilloter les yeux). — Ne pas confondre avec
rebouler et rouiller.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX 1 1 f
pué et PiDié, n., pitié : V m'faijotpiié, c'est-à-dire il me faisait pitié.
pile, n., tas, se prononce pi\e (pi-ieu).
pile et pilée, n., s'emploie pour volée, raclée, correction. F...
eunnepile à quelqu'un, le battre, le vaincre, être plus fort que
lui physiquement, au jeu, etc.: Eune Venteurpends pas d'aiveu
lu, t te f... tai pile, i' ast pus fort, pus malin que ta (N'essaie
pas de lutter avec lui, il te flanquerait une raclée, etc.). F t'ai
f... 'ri pilée, hein, au billard ? — Voir dégelée, frôlée, etc.
piler, v., s'emploie pour battre, rosser. Voir jpife et pilée.
pillauder et pillaudier, v., écraser, piétiner, fouler aux pieds,
particulièrement un terrain, une récolte : /' aiboutit su mon champ
et i' l'pillâude (pi-iôde) ai chaique fois (Il aboutit sur mon champ,
et il le foule, le piétine, l'endommage à chaque fois). Ses chevaux
Cs ont pillâudié mon aivoine. (Voir paittoyer, triper, tripoter.)
— De piler?
pillaudoue et pillaudioub, n., celui qui pilldude d'habitude, qui
surmarche, qui foule sans précaution les propriétés d'autrui.
pdiper les barbes, faire le pimpant, prendre une Ggure de circons-
tance, serrer gravement les lèvres, se donner de l'importance :
F pronmenot lai mairiée, mâtin, i' pimpot les barbes t
pinchbr, v., pincer.
piNcaoN, n., pinçon et pinson.
pingeon, n., pigeon : Veux-tu 'ri paire de pingeonsï Ah, les v'iai
envoûtés t Jeu qui consiste à croiser les doigts les uns sur les
autres, puis à les écarter brusquement pour amuser les petits
enfants.
pingeonnibr, n., pigeonnier, colombier.
pinpin (ou peimpin?), n., pépin: Ein pinpin de gueurzelle, ein
peimpin de ragin.
piochot, n. dim., petite pioche, serfouette. — Vieux franc, pio-
chet.
piochoub. n., piocheur, celui qui pioche; travailleur ardent. (Pio-
choû).
piolé, adj., s'emploie pour lentilleux, taché de rousseurs. On dit
aussi nentxllé et vri.
pionne (Y eau), n., opium : D' Veau (d'ieau) pionne. On dit de même
d' Veau d'anum, ou d' l'eau d'anum, pour du laudanum.
piotbr, v., piauler; se dit du cri des poussins : Nos poulets piotent
griont f'tète bin pas chaud. -— Onomatopée?
J»
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112 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX
piper, v., s'emploie pour fumer, en général: r pipe et ï prige
(Il fume et il prise). N' pas piper, ne pas répondre, ne pas pro-
tester, ne pas ouvrir la bouche : T n pipot pas quand j'ètos
lai, moit ï Y ai f... çai dans lai main, et gnai pas essayé de
piper. — On dit aussi dans ce dernier sens bruncher, grouiller,
renoncer, etc.
pipion, n., moue, grimace des lèvres ramassées comme pour piper:
Gnast pas content : ï fait ein pipion que toutes les poules du pays
ch.... dessus, c'est-à-dire il boude, il fait une moue, une gri-
mace si prononcée, que, etc. On dit dans le même sens cul de
poule, mené et reue.
pipolé, adj., s'emploie pour tacheté, marqueté, pointillé, grivelé,
moucheté. — Vieux franc, pipoler, parer avec affectation, pom-
peusement. '
piquâisse et piquasse, n., piqûre: Eunne piquaisse d'èpingue ou
èpingU (Une piqûre d'épingle). Eunne piquasse de chaidon.
pique, n., s'emploie pour piquette, mauvais vin, râpé : Dlai pique
en p nettes, c'est-à-dire de la piquette de prunelles.
piqueron, n., épine, piquant de certaines plantes : Eun f touche pas
les aironces, t' y ai des piquerons d'aiprées; çast p\eun de pi-
querons, c'est-à-dire ne touche pas aux ronces, il y a des piquants
après, etc.
piquot, n., piquet, pieux : T ast d'bout comme ein piquot.
pirouelle, n., toupie, sabot; pirouette dans les différents sens;
spécialement bouton de bois dans le trou duquel on a passé un
pivot, un bout d'allumette, par exemple, et qu'on fait tourner,
pirouetter, sur une table. — Pirouette, bouton de bois que l'on
enveloppe d'étoffe pour l'attacher aux vêtements, Thév.
pitioux, adj., sensible, qui s'apitoie facilement; piteux, digne de
pitié, propre à exciter la pitié. Se prend en bonne part.
pitotot (courre au), courir au pitotot j onomatopée des enfants pour
désigner et imiter le galop du cheval : F court au pitotot, au
grand pitotot (Il court au galop, au grand galop, à sabots rabat-
tus). Quand on fait sauter les enfants sur ses genoux, on leur
chante, en accélérant de plus en plus le mouvement : Au trot, au
trot, au galop, au galop, au pitotot, au pitotot!
piver, v., tourner, pirouetter: Taipivésu ses talions (Il a tourné
sur ses Ulons). Quand on joue à croix ou pile, on fait piver ein
sou en l'air. On fait piver et dèpiver, avec un levier surtout, un
fardeau, une masse quelconque, lorsqu'on fait glisser cette masse
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX 113
en tournant, ou qu'on lui donne quartier... Dipiver s'emploie
souvent absolument pour piver. Cependant ce mot signifie plutôt
piver une seconde fois et en sens contraire. — Piver (faire),
faire sauter, chasser, Gros.; piver, se sauver, s'esquiver, courir,
Thév.
placard, n., (placard), placard, espèce d'armoire; large et épaisse
tache, couche de boue ou de toute autre matière qui gâte,
souillle, salit : Sai jambière de cueulotte euç' nètot pus quein
p\acard (piacard) de boue, c'est-à-dire n'était plus qu'une tache,
une couche de boue. Ce mot est un augmentatif de plague (piaque)
qu'on emploie aussi dans le même sens.
plae et plaie, n., plaie : Plae (piâ) d'airgent n'astpas mortelle. T
ne charche que plaies (piaies) et bosses.
plagi, n., plaisir : Euje seus bin âge que çai te faige p\âgi (piâgi),
c'est-à-dire je suis bien aise que cela te fasse plaisir. — Plagi,
plaisir, G. et R.; plagy, plaisir, L. C.
plaice, n., place: Gn'ai point de bonne p\aice (piaice) ai l'odon
pou les lâches, ou pou les pairessoux (Il n'y a point de bonne
place à l'ouvrage pour les paresseux). Pa lai plaice, voir pa.
plaicer, v., placer, dans tous les sens : T plaice (piaice) de l'air-
gent tous les jous. Plaice tes briques, c'est-à-dire place tes vête-
ments, tes affaires.
plaidi ailler, v., fréquent, de plaidier, plaider souvent, plaider
pour rien.
plaidiailloue, n. fréq. de jriaûfroue, qui plaide souvent, qui plaide
pour rien.... (piédia-iaû).
plaidier, v., plaider : En plaidiant (piédian), an perd teus les
deux.
plajdioub, n., plaideur, qui aime à plaider : Ç'ast einplaidioû, ein
chicainnier.
plaifond, n., plafond. (Piaifon).
plaiponnbr, v., plafonner. (Piaifonné).
plaiponnode, n., plafonneur, plâtrier. (Piaifon-noû).
plàinche, n., planche: Entre quaite plainches (piainché), c'est-à-
dire dans le cercueil. Plàinche, outil de tonnelier, espèce de
grosse varlope renversée en plan incliné et formant banc.
plaincheter, v., planchéier, garnir de planches : F faurot plain- /
cheter (jpiaincKté) lai voitiure.
PLAiNCHOT,n. dim., bout de planche, petit bout, débris de planche;
rarement petite planche. (Piaincho).
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"^/ £ 114 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX
plainchottb, il. dim., petite planche, planchette; plas rarement
bout de planche. (Piainchotte).
plàinde, y., plaindre : /' ast pus ai p\ainde (piaindieu) qu'ai blâ-
mer (biâme).
plare et plaire, y. plaire : Çaimep\ait (piait) etçaime dèplait. Si
çai me p\ajot (piajot), tu V voiras bin, c'est-à-dire si ça me plai-
sait, etc.
plaît, n., plat, vaisselle : An ai mins lesp'titsplaits (piaits) dam
les grands.
plaît, adj., plat, uni, plan. (Piaï).
plan, n , (plan), plan : An ai levé V plan {pian) de lai commeunne
(commun-ne).
plant, n., (plant), plant : J'ai raipouté ein cent de plants (plants) des
vingnes.
plante, n., (plante), plante; absolument jeune vigne : Y ferai pus
de dix pièces de vin dans mai plante (piante), c'est-à-dire dans
ma vigne nouvellement plantée.
planter, v., (planter), planter: Airrive qui plante (piante).
plantoub, n. adj , planteur: Einplantoue (piantoû) d'âbres. Plan-
toue, n., plantoir, morceau de bois pointu dont on se sert en jar-
dinage pour repiquer les choux ou autres légumes.
plaque et plaiqub, n., plaque. Plaque (piaque) de boue, voir pla-
card.
platieau et plaitieau. n., grosse planche très large et très épaisse.
— Vieux franc, plateau, môme sens. (On prononce piatieau et
platieau.
platine, plaitine, platingnb, plaitingnb, n., patène: Biser lai
platine, c'est-à-dire baiser la patène. (On prononce platine et
piatine).
plâtre, n., se prononce plâtre (piàtre). De même les dérivés : plâ-
trer, plâtrer, etc.
plbue, n., pluie : V cheujot d' lai pleue (piew) ai sieau, c'est-à-dire
il tombait de la pluie à seau. — Pleue, pluie, L. C. et P. T. —
Vieux franc, pleuve, pluie.
PLBUMMB, n., plume. On dit à un enfant qui baille pendant la veil-
lée : Çasl V pleumme (piun-me) de ton lel qui t'aippelle (c'est
une plume de ton lit, etc.) ; et à un chasseur qui vient de
manquer un gibier de vol : Lai pleumme Vempottie, la plume
l'emporte.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVÀDI 115
pleummer, y., plumer. On dit, par analogie, pleummer (piunrtné) /
ein œû dur, pour ôter la coque; pleummer 'ri pomme, pour
pelurer, enlever la pelure, etc. Quand an mettrot 'ri demin~
jonnée pou pleummer ein œû, çai ne serot toujous quein œû
pleummé, s'adresse aux gens minutieux qui passent trop de
temps à parfaire leur besogne. — Pleummer -lai terre, en gratter
seulement la surface, labourer mal, peu profondément.
pleummure, n., pelure, épluchure de fruit, de légume, raclure de
fromage, etc.: Euri jitt'ieii pas tes pleummures (piun-mures) de
raibille pa note majon, c'est-à-dire ne jette pas tes épluchures de
radis, etc. Quelques-uns disent èpleummure.
pleun, adj., plein ; beaucoup, en quantité : Note puts ï ast pleun /
(pi-vri), c'est-à-dire notre puits est plein. V y aivot du monde
pleun (Il y avait beaucoup de monde). Tout pleun, teut pleun,
tôt pleun, beaucoup, en grande quantité, très: V y ai des rasins
teut pleun dans les vingnes (Il y a des raisins en grande quantité
dans les vignes) . T ast tôt pleun méchant, c'est-à-dire il est très
méchant, très mauvais.
pleuve, v., pleuvoir: F vai pleuve (pieuvé) (Il va pleuvoir). Çast
vrai comme V pleut du boudin, c'est-à-dire ce n'est pas vrai du
tout.
pleuvailler, v., fréquent, de pleuve (pleuvoir), pleuvoir souvent,
pleuvoir peu et à chaque instant : An ri faitrin, i' pleuvaille
(pieuvaille) toute lai jonnée.
plbuvigner et pleuvingner (ou pleuvinier ?), v., dim. de pleuvoir,
pleuviner, tomber une pluie fine : V pleuvingnerai (pieuvingne-
rai) comme çai et ï ri pleuvrai, ou pieurrai, pas pou tremper lai
terre. — Vieux franc, plouvignier et pluviner.
pli, n., levée au jeu de cartes : T ai fait ein pli, c'est-à-dire il a v
fait une levée. f ,
pliche (ou peliche c f) % n., morceau de peau d'agneau ou de brebis Ctl / ( ^
avec sa laine, qu'on plaçait à l'ouverture du sabot, moitié de- '
dans, moitié en recouvrement, pour garantir le pied du froid.
Par analogie, la feuille tomenteuse du pas-d'àne (tussilago), —
De pelisse ? f , v f
PLO t n., grosse bille de bois préparée pour être débitée à la sciej j L Ç
^ ^espèce de piège à raf; billot de cuisine. Dans le dernier sens,
^ ^- on * l pl alôt ploute. On prononce aussi blo. — Vieux franc, bloc,
/,
JU
billot. * ''■ !
plomb, n., plomb (plomb) : F ast loud comme ein sai de plomb
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1 10 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUI
(pion), c'est-à-dire comme an sac de plomb. Ç'ast ein coutieau
de plomb que t'aies lai. — Plion, plomb, L. C.
plomber, v., se prononce plomber (piombé).
pioute et plotb (oa peloute et pelote?), n., billot de cuisine;
pelote, petit coussinet à mettre des aiguilles, des épingles : Gope
c'te char-lai su lai phute (pioute). Quand on dit : V s' poute Un,
i' ast gras comme eunne ploie, gras comme eunne phute, doit-on
entendre gras, luisant comme un billot, ou gras, pelotonné, arrondi
comme une pelote coussinet? Y a-t-il confusion de ces deux
mots, ou plutôt de ces deux sens? On mouille généralement 17,
pioute, piote; cependant on prononce aussi pioute, plote, et
spécialement quand on veut désigner la pelote coussinet à
"%, aiguilles.
<, . ,1 ^ v ployon et plion, n., perche qui sert comme de levier pour tendre
J une corde, ou une chaîne de voiture, de manière à serrer et à
maintenir la charge : Mets V ployon (plo-iori) et sarre. — Du
vieux franc, playon et ploiortf
ployer, v., (se prononce plo-ié), plier et ployer. Prés, de l'ind.;
Euje plôe ; futur : Euje plôerai; prés, du subj.: que je ployé
(pto-ieu); part, pas.: ployé (plo-ie).
i 7 1 i < pluchotter, v., manger avec défiance, avec dégoût, comme en
\ v épluchant ses mets, sa nourriture; manger sans appétit, du
bout des dents : Ç'ast délicat, nachoux, çai n' sait pas si çai veut
aivailer, ç'ai pluchotte tout... Voir naquiller; mais pluchotter
exprime plutôt le dégoût, et naquiller le manque d'appétit.
plungeonou plunjon, n., javelle d'avoine ou d'orge dont les épis
sont placés en sens contraires, la moitié d'un bout, la moitié de
l'autre : Ce sont ces petits tas, ces brassées qu'on forme, en ra-
massant les andains avec le râteau...: ï y ai pus d* deux cents
plunjons (piunjons) par andain. — Plongeon, tas de gerbes nou-
vellement faucillées, Gros. — Vieux franc, plaujon, plonjeon,
plongeon, amas de gerbes.
pè, n.. pièce de bois debout formant pilier, pour soutenir une char-
pente, un toit, etc., poteau.
pochotte etPocHETON, n. dim., pochette, petite poche; petit gousset
de ceinture pour placer la montre.
poffer de rire, pouffer de rire.
poi, n., poil ; brin, miette, petite parcelle : An voit dâji des pois
blancs dans sai barbe. Ein poi d'ousére (Un brin d'osier). Gn'ai
pus pas einpoid'ètrain ai bailler ai lai vaiche (Il n'y a plus un
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^ ■•• >.> •> ' A
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX ' il Y
seul brin de paille à donner, etc.). Ts n'ont pas lâché et* poi de
soupe, i's ont teut maingé, c'est-à-dire ils n'ont pas laissé une
miette de soupe, etc. — De poil ? ou du vieux franc, poi, peu ?
ou confusion de ces deux mots ?
poi brout, n. comp., la tige du salsifis des prés (trapogogonpra- /
tense), que les enfants vont cueillir et mangent crue comme l'o-
seille. — De pot qu'on broutel
poiche, n., poche, cuillère à potage: Prends laipoichepou te servi
des pois. — Poche, cuillère à pot, Gros. , ^j(
poichée, n., pochée, le contenu d'une poiche ou cuillère à potage :
" Eunne poichée de beulie, c'est-à-dire une pochée de bouillie.
poichbnigo (ou poichenicot ?), n. et adv., dimin. de poicho, une
toute petite quantité, un tout petit peu. {Poich'nico).
poiiHo, pocho et p'cho (ou poichot?), n. et adv., peu : Baille-me
einpoicho de pain (Donne-moi un peu, etc.). — Pocho, peu,
Gros.; pocho, peu, L. G. et P. T. — Vieux franc, pochet.
poichotte, n. dimin. de poiche, petite cuillère à potage. S'emploie
souvent pour poiche. Ne pas confondre avec pochotte, pochette,
petit sac, petite poche, gousset. — Pochotte, dimin. de poche,
cuiller, Gros.
poichottée, n. dimin., le contenu d'une poichotte, une pleine poi-
chotte; pochée.
, poi de loup et poi de leup, n. comp., poil de loup, espèce de gazon
/ dru, sec et dur, des friches et des bords des fossés.
poi foullot, n. comp. , poil follet : T ai prins des ougelots tout rouges,
qu'griont pas même enco de poi foullot t (Il a pris des oiseaux tout
rouges, c'est-à-dire tout nouvellement éclos, qui n'ont pas même
encore de poil follet I) Poi foullot, barbe naissante, avec une
nuance de dépréciation. Pois blancs, espèce de sobriquet, blondin,
enfant dont les cheveux sont d'un blond très pâle. Cette syllabe
poi, plur. pois, est très brève.
poigre, espèce d'interj. qui s'emploie quand la fumée prend à la
gorge : Comme çai feumme ici, poigre! — Pouacreî
poilou, adj., poilu, garni de poils, pubescént.
poingniain et poingnie, n., poignée : Tast gros comme eunne poin»
gniain d'aiccolure, c'est-à-dire comme une poignée. Eunne poin*
gniain de sottises (Une bordée d'injures). Baille-li 'n' poingnie de
main. — Vieux franc, poignie.
poinne, n., peine : C n'ast pas laipoinne (Ce n'est pas la peine),
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118 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX
Çai me fait de lai poinne (Ça me fait de la peine). Voir gré. —
Pouine, peine, L. C, P. T., G. et R.
points, n., (pointieu), pointe, espèce de clou; champ dont un bout
est beaucoup moins large que l'autre, qui finit en pointe, quel-
quefois par une seule raie. On dit aussi aipointis (t mouillé,
aipointAi) et coutainnes quand le champ en pointe est très court,
aussi large que long. Su lai point\eu dujou, sur le point du jour.
Par analogie, on dit ironiquement : /' s' leuve su lai point ieu des
neuf heures, des dix heures, etc.
poirer, n., poirier : I'ast r monté su son poiré (Il est remonté sur
son poirier, c'est-à-dire sa santé ou ses affaires sont rétablies, il
est relevé). Faire eul poiré fourchu, se dresser verticalement sur
la tête et sur les mains, les pieds en haut.
poirottb, n. dimin., petite poire; spécialement le fruit du poirier
\,<r " \^ sauvage (poirotler) : Çai ne coûte pas despoirottes blosses, cest-
, A , / * à-dire cela ne coûte pas rien, cela coûte cher. Mainger des poi-
V , x rottes, être immobilisé, maintenu de force en l'air quand on joue
\
î \
.J~
à la bascule. Voir èbranner.
poirotter, n. dimin., petit poirier; spécialement poirier sauvage
{pyrus communis).
pois, n., s'emploie pour haricot. — Vieux franc, pois, haricot.
poitoux, n. adj., qui a des habits gras et sales : c'est une épithète
qui s'applique spécialement aux fabricants d'huile. — De poix,
poisseux, poiteuxf
poitral, n., poitrail; avec mépris, poitrine, gorge: Que poitrail
c'est-à-dire quelle gorge ! quels appâts !
polie, n., poulie. — Ampolie, Gros.
pommer, n., pommier : J'ai p\anté ein pommer. — Poumé, pommier,
L. C. et P. T. — Vieux franc, pumer.
pommotte, n. dimin. de pomme, petite pomme; spécialement le
fruit du pommier sauvage ou pommotter. On dit aussi pommotte
de bois.
pommotter, n. dimin., petit pommier; spécialement le pommier
sauvage {pyrus malus) : Des chânes brainchus comme des pom-
mâtes.
pondoure, n. adj., pondeuse, poule qui pond beaucoup : Çast V
pondoure, c' .est-à-dire une bonne pondeuse.
popa et poupa, n., papa, père.
popilier, n., peuplier : Y azt long comme ein popiUer (popi-ié)
d'Hollande. On dit aussi poplin.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX 119
poplin (ou popblin?), ii., peuplier, arec nne nuauce de plaisan-
terie. Voir popilier plus employé.
poriginel, n., polichinel; enfant espiègle qui tait des grimaces, des
singeries. Se prend d'ordinaire en bonne part, plaisamment.
posoue, n., poseur, dans toutes les acceptions de ce mot.
postigb, adj., postiche : Eunne barbe postige.
pote, n., porte : Fronme lai pote (Ferme la porte). On prononce
pote et /wrfieu. — Pouot's, porte, ch. de n.; potche, porte, L. C,
P. T., G. et R.
potottb et potiotte, n. dimin., petite porte. On prononce aussi
potottieu.
pou, prép., pour. De même les composés : pouquoi, pourquoi,
pouç'que, pour ce que, poutarU, pourtant, etc.
poucheler, v., gâcher la besogne, travailler malproprement, comme
un porcher, cochonner : Ce riast pas fait, c't'ouvraige4ai, ç'ast
pouchelé. F ne raboure pas, % poucheulle. On dit aussi hacheler.
pouchbnot, n. dimin. de poucher, petit cochon. Se confond dans
l'usage avec couchenot.
poucher, n., porcher; s'applique le plus souvent au porc même :
Tons tiué note poucher. Y gaidiot les beurbis, les biques et les
pouchers (Il gardait les brebis, les biques et les cochons). Ce mot
est une injure plus grossière encore que cochon.
(La fin au volume suivant).
j^Ê
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MÉMOIRES
r w
SOCIETE ACADEMIQUE
D'AGRICULTURE
DES SCIENCES, ARTS ET BELLES -LETTRES
DU DÉPARTEIEIT DE L'AUDE
TOME LI DB LA COLLECTION
TOME ZZIV. — TROISIÈME SÉRIE
ANNÉE 1887
TROYES
DUFOUR-BOUQUOT, IMPRIMEUR DE LA SOCIÉTÉ
Rvi Notre-Dame, 43 et 41
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M
GLOSSAIRE
PATOIS DE 11 FORÊT DE CLAIRYADX
PAR
M. ALPHONSE BAUDOUIN
MEMBRE ASSOCIÉ DE LA SOCIÉTÉ ACADÉMIQUE DE l'AUBE
pouf, n., homme replet, gras, lourd, qui se remue avec peine. Est
précédé ordinairement de l'adj. gros : Que gros pouf! ï ne peut
pas seulement souffler, aillez t (Quel gros plein de soupe, etc.).
Voir patapouf.
pougblot, n., pouliot, thym des jardins, marjolaine (origanum ma-
jorana).
pouillassb et pouillaisse, n., gens pauvres, de peu de valeur mo-
rale, lie, populace, racaille : Ç'ast de lai pouillasse (Ce sont des
gens de rien, c'est de la racaille). On dit aussi pouillasserie, et
plus souvent fripouille, dans le même sens.
POUILLASSERIE et POUILLAISSBRIE, n. Voir pOUilloSSe.
pouiller, n., poulailler : Eul fouin t aiprins nos poules dans note
pouiller (pou~ie) pendant lai neut y c'est-à-dire la fouine a pris
nos poules dans notre poulailler, etc.
pouillot, n. dimin. de pou, terme enfantin, petit pou : N'eurmue
don pas que f preunne tes pouillots (pouiots).
pouilloux, adj., pouilleux, qui a des poux. Au fi g-, pauvre, misé-
rable, meurt de faim.
4 Voir les Mémoires de la Société Académique, t. XLIX, paye
6-143, et t. L, page 5-119.
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8 PATOIS DIS LA FORÊT DE CLAIHVAtfl
pouitron, n., fruit rouge de l'églantier. S'emploie presque exclusi-
vement dans cette expression : Les pus belles roses devingnent
pouitrons. D'ordinaire on dit graitte-cul et cul de chien.
poulmonique, adj., pulraonique, phthisique, poitrinaire.
poulottb, n. dimin., petite poule, poulette; terme mignard, petit
mot d'amitié dont on se sert arec les enfants, comme biquotte,
chaitotte, raitotte, etc.
poulottbr, v., caresser, choyer, câliner, dorloter, gâter, pour ainsi
dire appeler poulotte, spécialement les enfants.
poupée, n., la partie la plus fine du chanvre peigné; on dit aussi
oeuvre. Aivoi 'n poupée au dogt, avoir un doigt blessé et envelop-
pé de linge, ein doyot, ein peuçot. — Poupée, chanvre à filer,
Gros.
poupou, n., terme enfantin, soupe.
pour et pou, n. , peur : / n'ai pas pus pour de lu que d'ein mort et de
deux tiués. Y ne faut pas aivoi pou d'eunne méchante année : i en
vient bin deux tout de suite (Il ne faut pas avoir peur d'une mau-
vaise année, etc.). Taies pour de lai bête queulle l ast dans toi
cheminge ? (Tu as peur de la bête qui est, etc.). — Vieux franc.
paour, peur.
, t a ' j. v J pouragine et pouragingne, n., poix résine : /* y ai ein rètamoue —
' $ ' J ou ein eurtamoue — par ici : çai sent lai pouragine (Il y a un
étameur, un chaudronnier aux environs: ça sent la poix résine).
— Prononciation auvergnate de poix résine, sans doute.
pourcblaingne et pourcbline, n„ porcelaine.— Pourselaine, pour-
pier, Gros.
pourpier sauvaigb, n., renoncule rampante (ranunculus repens) :
Eut pourpier sauvaige, ç'ast 'ri méchant denrée; an riserot tdè-
trainger, c'est-à-dire une mauvaise marchandise, une mauvaise
plante; on ne peut le détruire, le déraciner. — Pourselaine^
Gros. ; piè-pou, aux environs de Troyes.
pourre, n., poudre, et spécialement la poudre à tirer : Lai pourre 9
çai me fait pour (La poudre, ça me fait peur). — Vieux franc.
pourre.
pourreau, n., poireau : Vart comme êtinne quoue de pouweau.
p pourrottb, n., espèce d'ail sauvage qui abonde dans certaines
vignes, en juin, allium rotondum, croyons-nous.
pousque, conj., puisque. Ne pas confondre avec/wu ç que, pou Câ
que, pour ce que. — Peuy qu, puisque, L. C,
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRYAUX 9
poussée, n., s'emploie pour échappée, dans le sens de à F échappée,
intervalle de temps saisi qu'on met à profit à la hâte; coup de
feu : Euje sens zeûe V poussée sâcler (sâquier) pendant que mon
p'tiot dormot (Je me suis échappée, je suis allée un moment, à la
hâte, sarcler pendant, etc.). Aillons, enco V boinne poussée et
peûsj'airons fait, c'est-à-dire un bon coup de collier et puis nous
aurons fini. On dit aussi aittelèe, mais aittelée implique plus de
temps et moins de hâte. — Vieux franc, arsée.
pousser aivant V feu, attiser le feu, pousser les tisons pour les
rapprocher : iV lâche pas èteinde eul feu, pousse-le aivant, c'est-
à-dire attise-le, rapproche les tisons.
pousserotte et pousserot, n., poudre fine, et spécialement la poudre
d'écritoire, sable, plâtre, etc. : Tai mins d'iai pousserotte su mai
paige pou lai faire chochi, c'est-à-dire de la poudre, de la pous-
sière sur ma page pour la faire sécher.
poussot, n., poussière : V ai du poussot p\eun su tes souUers (11 y a
de la poussière, etc.). Faire du poussot dans lai boue ou beue,
faire du train, vouloir paraître plus qu'on n'est, vouloir jeter de la
poudre aux yeux et n'y pas réussir, etc. Poussot, n., brin, miette :
Grien ai pus pas ein poussot (Il n'y en a plus une miette, pas un
atome). — Poussier, poussière, Gros.
poutant et poutiant, conj., pourtant. — Pou itiant, pourtant, P. T.
poutée et potée, n., meule de grain en épis dans la grange, tas de
blé non battu, d'avoine, d'orge, etc., entassé en rond ou arrangé
avec ordre : Note poutée de b\é, eulle riast pas haute eue t' année
(an-née), gn'ai quasiment point de paille (peille). On dit aussi
tisse. — Potée, tas de blé en grange non battu, Gros.; potée ou
poutée, meule de blé dans la grange, Thév.
pouter, v., porter : Euje m'en irôs tant que terre me pout'rot. Oh,
t'en pout 'raies enco bin eunne, et peus enco bin eunne, disait à son
âne l'homme de Cunfin aux cuillères de bois. De môme les déri-
vés : aipouter, empouter, r pouter, raippouter, rempouter, etc.
poutot, n. dimin. de pot, petit pot, potot. (Poûto).
poutoub, n., porteur. Poutoue de soupe, par plaisanterie, les valets
au jeu de cartes : Tai les quaite poutoâs de soupe, c'est-à-dire les
serviteurs, ceux qui portent à manger.
pouturb, n., s'emploie pour désigner un mélange de farines diverses / y
et de son qui sert à nourrir et à engraisser les bestiaux.— Vieux / ' ' f (
franc, peuture, pâture, nourriture. <- M x - v j
prauve et prouve, n. adj., pauvre, mendiant : An meurt tort eus,
t. u 2
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10 PATOIS DE LA FORÊT DE CLA1RVÀUX
les riches et les praûves. V y ai ein vie' prouve ai lai pote qui dit
ses prières.
phauvbté et prouvbté, n., pauvreté. (Prôv'té).
précepteur, n., percepteur.
prêche, n., pèche, fruit du pocher.
prêcher, n., pêcher, arbrisseau.
prêchotte, n., chaire à prêcher, avec une nuance d'ironie ou de
dédain plaisant. On dit aussi cueulotte de bois : Monsieur le curé
i ai monté dans sai cueulotte de bois.
prêchoue, n. adj., prêcheur, curé qui prêche longtemps et souvent :
Note curé ç riast pas ein prêchoâ, ç n'ast pas ein breûle-cire, et
an nast pas longtemps ai lai messe d'aiveu lu : messes coûtes et
longs dingners.
précorce, adj., précoce, hâtif. On dit plutôt tôtive, au masc. comme
au fém.
prenre et penrb, v., prendre : Je ri sens pasprins, mas faicûe ai
prenre. Les concilies eulles chantaint « t' faut V penre, ï faut
V penret » — Ind. prés, et itnp. preunnons (prun-nori) onpeur-
nons, preunnez ou peurnez; imparf. j' preunnôs ou peurnôs; subj.
que f preunne (prun~ne) t etc. De même les dérivés : aipprenre
ou aippenre, r'prenre ou r penre, etc. — Vieux franc, pranre
et panre.
prérb, n., perrière, carrière où Ton tire de la pierre. F... dans les
frères, jeter à la voirie : Ç'ast ein carnaige ai f. . . dans les préres.
Eune vai pas au long des préres; r homme rouge te tirerot d'dans.
— Vieux franc, perrière.
prête, n., prêtre. On prononce quelquefois prétien.
prétexe, n., prétexte.
pRBtJNNOUE et peurnoub, n. adj., preneur. (Prun-noû). De même
les dérivés entrepeurnoue, etc.
, prevet et privé, n., espèce de champignon comestible; par ironie,
I *$ ' * v ■ chapeau de feutre mou, à cause de la forme, qui ressemble à celle
( - du champignon en question.
v principau, adj., principal : Lai santé, ç'ast le principau, c'est-à-
dire le principal, l'essentiel.
prinjo*, n., prison : Oh, si tu touchas ai çait t'irôs en prinjon, lai
voù qu'an mainge des cheunri veuilles et qu'an boit du pichon d'âne.»
C'est ainsi qu'on présentait la prison aux enfants de notre temps.
paras, part. pass. du verbe prenre : Eul gode m'ai prins, c'est-à-
%J
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VA IX 11
dire le garde ma pris, m'a fait un procès. (Prin). — Prias au
xiv« siècle.
prisoue et pruoub, n. adj., priseur, celui qui prise beaucoup.
Voir tabatiou.
probabe, adj., probable. On prononce probâbe et probable (probd-
iieu).
profitiabe, adj., profitable On prononce projitidbe et profitiâble.
profitirr, y., profiter.
prommenaillbr ($), v. fréquentatif de se promener, se promener
trop souvent, mal à propos, pour flâner, perdre son temps, etc.
prommer, adj. num., premier; au fém. prommére (pron-mère) :
Euje sens V prommer (pron-mé) d' l école* — Promé, promère,
P. T.
prommrtte, v., promettre. S'emploie pour assurer, jurer • Euje te
pron-mets que j' seus bin ai plainde (piaindxeu), bin mailaide,
etc., c'est-à-dire je te jure que je suis, etc.
prope, adj., propre.
prop'té, n., propreté.
prop'mbnt, adv., proprement.
prôt, adj., prêt : «T seusprot ai pat i, c'est-à-dire je suis prêt à partir f .
prugnoler et PRUNONOLBR (ou prunioler?), v., pâturer à la manière
des moutons, en tondant ras, en foulant le terrain et en y laissant
des crottes... On dit que les lièvres, les lapins ont prugnolé, prun»
gnolent un sainfoin, une friche, quand ce sainfoin, cette friche
gardent de nombreuses traces du passage de ces animaux,
semblent avoir été parqués.
prunieau, preunnieau et PEURNiEAu, n., pruneau : Blanc (bianc)
comme ein prugnieau laivé, c'est-à-dire noir.
PRUNIÉRE, PREUNNIÉRE, PEU RM ÈRE, OU PRUGNIÉRB, CtC. ? (ailler en,
ou lâcher en), se dit de l'action du pâtre qui, pendant les fortes
chaleurs de l'été, s'en va aux champs dès le matin, pour rentrer
vers neuf heures et repartir le soir, quand le soleil décline : S ï
fait enco chaud comme çai demain, V boirger '1 irait en prunier e,
ou V boirger ï lâcherai en peurgnére.
pruntemps, n., printemps.
p'sou, n. (Voir vessou).
p't'étb, adv., peut-être. F Vête bin, peut-être bien, probablement.
1 Dans quelques villages on mouille le t : pat-li f
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12 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX
p'tiot, p'tiolot. (Voit petiot).
p'tuns. (Voir petuns).
puche, n., pace : Lai promtnére voitiure de foin, fast 'ri voitiure
de puches.
puger, v., emplir d'eau, par accident, ses sabots ou ses souliers, se
mouiller les pieds : Tes bas i's sont tout mous, t'aies don pugé ? Si
tupuges enco, tu seraies claqué. — De puiser? — Vieux franc.
puchoir, puisoir.
puissant, adj., s'emploie pour gros, gras, corpulent, obèse.
porisie, n., pleurésie, pneumonie : Ah, gri aittraiperai pas deux
purisies dans einjout c'est-à-dire, il ne se foule pas la rate,
pus, adv., plus. Pustiôt, plus tôt. — Pus, L. C; P. T.
put, interj. qui exprime tout ce qu'on veut, mais particulièrement
le dédain : Eul gode te pincherai (Le garde te pincera, te pren-
dra). — PûtU! c'est-à-dire je m'en moque, je ne le crains guère,
etc. On vante quelque chose : PâtU t répond celui à qui on s'a-
dresse, si tu voyôs... telle autre chose; sous-entendu, tu serais
bien plus ébahi encore. Voir tti et zut.
putif, n., fumier. Ce mot s'emploie assez rarement, par excès de
délicatesse, quand on ne veut pas dire fumier ou fien.
putiôt, adv., plutôt. — Putcho, plutôt, L. C. ; putchot, plutôt, P. T.
puts, n., puits : Vlai ein Ϟ qui ast creux comme ein puis, c'est-
à-dire un œuf qui est profond comme un puits, fai cheu dans
note puts.
quand, conj., se prononce cante. Quand et, en môme temps que :
J' goûterai quand et vous, quant et zeux, c'est-à-dire je dînerai en
môme temps que vous, en môme temps qu'eux. Ceux qui font
de la mêlée disent quand à, vieux français.
quarantain, n., giroflée, baguette d'or, violier des jardins.
quarrb. (Voir carre). — Quarre, bon côté, Gros.
quarré. (Voir carré).
quarron. (Voir carrori). — Quarron, petit morceau d'héritage,
Gros.
quatb etQUAiTB, n. de nombre, quatre. Tr'oûquaite, contraction de
trois ou quaite, trois ou quatre.
Eunne, deusse, troisse, quaite,
Les meûlins vont s'baltte, etc. ;
\ine des formules dont on se sert pour faire le premier bouchot
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\
PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX 13
(voir boûchotte). Vouloir, ou ne pas vouloir, une chose pa ses quate
bons dieux, s'entêter vouloir, ou ne pas vouloir absolument,
avec persistance, sans admettre aucune explication, etc.
quater, quartier, morceau : Eingros quater (coté) de pain (Un gros
morceau de pain). Que caté! Quel morceau ! eu parlant d'une
grosse personne.
que, adj., quel, quelle : Que temps! Que majont (Quel temps I
Quelle maison \)Eul que? Lai qué?pvon. interrog., lequel?
laquelle? Eul que ! Lai que t sous-entendu gros, grand, ou, par
ironie, petit, etc.: Voyons vor tai pomme? Oh, lai que! c'est-à-
dire oh, quelle pomme ! qu'elle est grosse ! — La queulle, la
quelle, L. C; Que, quieu, quel, P. T.
quechingnf, n , agneau femelle : Nos beurbis n' nous ont fait rin
que des quchingnes, eue' t' an-née (Nos brebis ne nous ont fait
que des femelles, cette année). Çast V petiote queuehingne,
c'est-à-dire une petite brebis, un agneau femelle. — Quetine ou
ctine f brebis vierge. Gros.; Queutchine, le lit et les rideaux, L.
C; Queutchine, rideau, Queutchinotte, queutchin, jardin, P. T.;
Quetignot, rideau, qutchin, jardin, G. et R.
queulotte. (Voir cueulotte).
queulottier. (Voir cueulottier) .
^ quêler, v., flâner, surtout aller flâner en quelque endroit par cu-
riosité, indiscrètement, comme pour y mendier quelque chose
par sa présence ; rôder, quémander. Un enfant va chez le voisin,
qui vient de tuer un porc, et rapporte du boudin : Quast-ce que
tu vas don quêler comme çaipa les majons ? lui dit sa mère en le
grondant. On prononce aussi guêler ou gaîler: Est-ce une confusion
de mots, et y a-t-il quelque rapport entre ces expressions etgaile-
feurtier, gaile-terre ? — Voir aussi querrener.
quêloue, n., celui qui quêle, flâneur indiscret, rôdeur. On dit plus
souvent querrenier.
\ quenaisser (ou c'naisser?) et queneller, v., babiller, jacasser,
cancaner, perdre son temps à des discours oiseux, nasiller: V
vaurot meux queulle faige (ou faigie) sai besongne que d' s en
aillei % c'naisser pa les rues, c'est-à-dire il vaudrait mieux qu'elle
fit sa besogne que d'aller faire des paquets par les rues. Du
vieux franc, canabasser, discuter ?
quenaissier (ou c'naissier?), n., qui c naisse d'habitude, cancanier,
babillard, diseur de riens, faiseur de paquets.
quéqub, adj. ind., quelque. — Queuque y quelque, P. T.
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H PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX
quéqu'fois, adv., quelquefois.
quéqu'un, pron. ind., quelqu'un.
quêrelloub, n. adj., querelleur, chicanier.
queri, v. inf. et part, pas., quérir, chercher : Vai qu'ri ton père;
j' sens zeû qu'ri d' Veau, c'est-à-dire va chercher ton père, etc.
querinc ailler, n., quincailler (crincaillé).
querrener (ou qubrner ?), v., rôder, flâner dans un but intéressé,
en quête de quelque chose (voir quêler); fureter (voir nairer).
S'emploie plutôt quand l'intention de la personne qui querrenait a
été déçue. Un enfant, en cherchant des nids, s'est piqué aux
épines : Çast bin fait, lui dit son père, qu'ast-ce que t'aillôs
querner (cairné) pa les bas ? Ces mots nairer, quêler, querrener,
ne se prennent qu'en mauvaise part et se confondent souvent
dans l'usage.
querrbnibr et querrenoue (ou quernier?), n., celui qui querne,
flâne, rôde, surtout dans un but intéressé ; braconnier (cairnié).
— Voir nairoue.
quôtoue, n., quêteur, solliciteur, mendiant. Au fém. quêtoure, quê-
teuse : J' ont zeu V belle quêtoure, V belle poutoure de pain
m'nint, dimainche : j'airons V belle sernainne.
queu. (Voir cueu).
quburb. (Voir cueure).
quiaçu, contraction de qui ast-çu, qui est-ce. On prononce plutôt
«\s-î tiaçu '
i 2 ' quiaune (ou QUiÔNE?), n., quenouille. Les beaux parleurs pronon-
u \L cent clone et clôgne: d'où on pourrait inférer qu'ils prennent le
(l ~ / son i pour le son de l mouillée. — Quelongne ou quelogne, que-
nouille, Gros. — Vieux franc, quelongne, conoingnole.
quiaunéb (ou qoiônée), n., quenouillée.
quiche, n., cime d'un arbre, faite, sommet d'un édifice, d'une
montagne, etc. : J'ai vu ein nind de conoille ai lai quiche d'ein
châne. Des fagots de quiche. Lai quiche du c\ocher (quiocher) (J'ai
vu un nid de corbeau, de corneille à la cime d'un chêne, etc.).
— Dans quelques villages, chique. — Du vieux français suc et
suque, sommet?
quicheri, n., le fin sommet, l'extrémité la plus élevée de la quiche,
l'extrême cime, la pointe, le vertex, le point culminant : Su V
quicheri de lai côte. Eul quicheri de lai tète.... Le quicheri est
pour ainsi dire un point, tandis que la quiche peut être une ligne,
une surface, même un volume.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVACX 15
Quichotte, n. dimin., petite quiche, extrême cime des arbres et des
plantes : Ai lai fingne quichotte du popilier. DaDS ce dernier sens
il se confond avec quicheri. Quichotte, cimette de chou. Voir
mainchotte, plus employé.
qui-con, interj., imitation du cri de l'âne, hi-han : /' en fait des
quî-con, ton âne l
quié. (Voir clef).
quiée. (Voir c\êe).
quingne. (Voir caingné). — Queigne, fille de mauvaise vie, Gros. ;
queigne (faire la), G. et R. ; queingne, chienne en chaleur,
Thév.
quingnets (aivoi les). — Voir caingnets.
quioche. (Voir cloché).
quiocher. (Voir clocher).
quiqu'cheuse et quéqu'cheuse, pron. ind., quelque chose: J'airai
quiqu cheuse ou rin.
quittier, v. inf., quitter.
quoingnbu. (Voir coingneu).
quoue (ou coue?), n., queue : Quand an pale du loup, an en voit
lai quoue (Quand on parle du loup, etc.) Eunnepiarre jitièe n'ai
pus de cime, c'est-à-dire qu'on ne peut plus la retenir. — Coue
d'eurnard (queue de renard), une espèce de prêle commune dans
les champs humides, equisetum arvense, et dont on se sert pour
nettoyer les objets d'étain. Ai lai coue du loup, à la queue leu
leu, les uns derrière les autres sur un seul rang. — Vieux franc.
coe.
quouére (ou couére?), n., partie du harnais d'un cheval fixée à
l'avaloire ou à un prolongement de la bride, trousse-queue :
Ç'ast insulter l'âne jousquai lai couére, comme on dit jusqu'à la
bride.
quouet (ou couet?), adj., au fém. quouette ou couette, qui n'a plus
de queue, qui a la queue coupée, diffamé, en terme de blason :
Ein chien couet, an n s' rot le penre pa lai quoue, c'est-à-dire un
chien qui a la queue coupée, etc. De là ce calembourg, cette ré-
ponse plaisante aux curieux qui vous font la question quoi: Eh
bin quouet? quouet ? çast ein chaît qugnaipus d* quoue.
quouette. (Voir coite).
qu'tia, qu'tia, espèce de cri, de son qu'on fait entendre pour appe-
ler le porc, comme on dit petit, petit t pour appeler les poules.
— Quia-quia, porc, terme d'enfant, Thév.
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/Vi
16 l PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX
babille et raibille, n., radis en général, radis noir, raifort, petite
rave. — Vieux français rabe, rahbe.
rabotée et raibotée, n., kirielle avec mépris, tirade: Eunnerai-
botée de sottises, c'est-à-dire une kirielle, une tirade d'injures.
Rabotée, quantité. Voir dans ce dernier sens tournée.
raboter et raiboter, v., bougonner, grommeler, témoigner du
mécontentement en se plaignant, en murmurant, en grognant,
en faisant des reproches; importuner par de sottes observations;
se plaindre mal à propos de tout et toujours : Allons, an n'ai pas
enco fait ai son idée, le v'iai qui raibote. — Voir les mots
catonner, grimonner, botteler, ragonner, etc., qui ont à peu près
la même signification, et entre lesquels il est assez difficile de
saisir des nuances.
rabotoux et raibotoux, adj., raboteux. On dit aussi rafloux.
rabour, n., labour.
rabourer et raibourer, v., labourer, cultiver: Raibourer aux
vingms, labourer les vignes avec le vessou ou vsou.
rabouroue et raibouroue, n., laboureur, cultivateur.
rache, n., maladie du cuir chevelu, teigne, ou espèce de teigne.
Les gamins, par plaisanterie, jettent quelquefois en l'air des
pierres, de la terre, etc., et crient en guise de sauve qui peut :
Gare-louvoir ! Ceux su qui çai cheurrai, ïs airont lai râche. • —
Voir gareJouvoir.
rachée, n., cépée, trochée. On dit plus souvent torchée.
rachoux, adj., qui a la râche, teigneux; qui a la tête enfoncée
dans les épaules, engoncée dans les habits de manière à cacher le
linge. S'emploie aussi par mépris, par ironie, comme nacou,
charcueulot, etc., en parlant à un gamin qui veut faire l'homme:
Veux-tu bin te taire et t'oter de lai t méchant râchoux, méchant
nacou, méchant glairoux I Ai quoi don que fées prope ?
raclée, n., raclée, décharge, volée de coups. Se prononce raclée.
racler, v., s'emploie pour renâcler, et pour exprimer l'action de
faire remonter avec effort de la trachée, comme en raclant, les
muquosités qui s'y trouvent, d'expectorer bruyamment: Tées
don bin enrheummé qu' tu racles comme çai? — Vieux franc.
rachier.
raclotte, n., racloir, racloire et radoire, tout instrument qui sert
à racler ou à rader; spécialement le racloir du ramoneur et le
racloir dont on fait usage pour ratisser la maie.
racloue, n., celui qui racle, racleur (râquioû).
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX 17
racoin et raicoin, n., coin, avec une nuance de mépris, recoin :
l'y en ai des coins et des raicoins dans ces vieilles majons-lai t
rafle, n., se prononce rafle (rafiexx). De même rafler, rafler.
rafloux, adj., râfleux, dont la surface est inégale, mal unie:
J'ai les mains raflouses (rafiouses), c'est-à-dire j'ai les mains ra-
boteuses, rêches.
rafot, aHj. et n., petit, rabougri, malingre, mal venant : J'onsein
méchant rafot de couchon qui n'aimende point. S'emploie quel-
quefois en bonne part, plaisamment, pour court, trapu, épais :
/' ast fort, vai, c' méchant rafot-lai, c'est-à-dire ce bout
d'homme-là.
ragonnbr et raigonner, v., bougonner, murmurer, rognoner,
parler en grognant et en faisant des reproches. — (Voir raboter, ra-
goter, etc.) — Ragonner, grommeler entre ses dents, Gros.
ragot et raigot, n., éclat de bois, bâton noueux, chicot, pointe,
crochet, dent qui raccroche le passant (voir ragoter); chicot,
reste de dent ; mauvais balai usé qui gratte le pavé, balai avec
lequel on nettoie le four avant d'y mettre le pain, etc. — Ragot,
id. que tricot, Gros.; ragot, bavardage, Thév. Dans ce dernier
sens, ragot est français.
ragoter et raigoter, v., s'emploie pour accrocher, raccrocher :
Ç'ast le bout de lai brainche qui m'ai ragoté lai figure. Euje me
seus raigoté dans ein broutné. S'emploie aussi pour marmonner,
grommeler, rabâcher, dire des ragots, chercher de mauvaises
excuses, etc. Voir raboter. — Ragoter, revenir sur les mômes
choses, Gros.
raibait, n., rabat. De raibaitte, rabattre.
raibêti, v., inf. et part, pas., abêtir et abêti. — S'raibêti, s'a-
bêtir.
raibigoter, v., ravigoter.
raibille, raibillotte. (Voir caibille, caibillotte).
raibeutelée, n., kirielle, tirade, quantité.— Voir raibotée, râtelée,
tournée.
raibobiner et raibobingner, v., raccommoder de vieilles choses,
vieux habits, vieux meubles, etc., de manière à les faire servir
encore un peu, ravauder, rapsoder; rapatrier, réconcilier. —
Voir rètapsôder.
raibotée et rabotée, n., kirielle, tirade. — Voir râtelée.
raicc'môdaige, n., raccommodage.
baigg'môder, v., raccommoder.
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18 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVACX
raicc'môdoue, n., raccommodeur.
raiccousingner, v., appeler cousin, surtout avec affectation, ou en
rappelant des degrés de parenté trop éloignés. — Vieux franc.,
accousiner.
RAiCB, n., race, engeance: Oh, lai pente raice! c'est-à-dire oh, la
vilaine race, la vilaine engeance !
raichefi, raichevi, raigefi et RAiGEvi, v., achever, donner le coup
de grâce. S'emploie comme aiehevi. On prononce : RaicKfi,
raich'vi, etc.
RAicHBTER et raigeter, v., racheter. S' raicheter, s' raigeter, se ra-
cheter.
raicheter et raigeter, rasseoir. S' raicheter et *' raigeter, se
rasseoir. Même prononciation que le mot précédent.
raicingne, n., racine. De môme les dérivés : enraicingner, dèrai-
cingner, enraciner, etc.
raigousser (ou itfecoussER?), v., aiguiser, affiler, repasser avec la
cousse (voir ce mot) : Raicousse tai faulx. J'ai rècoussé mon
coidieau, mai sarpotte, etc., c'est-à-dire affile, aiguise ta
faulx, etc.
raidoter, v., radoter.
raidotier etRAiDOTouE, n. adj., radoteur.
raidrbdsser et r'dreusser, v., redresser. — De môme : dreusser,
dresser, aidreusser, adresser, etc.
raiffingner, v., raffiner, finir, parfaire; essayer de parler un
meilleur français que ses concitoyens, faire le beau parleur. —
Voir mêlée.
raiffutier, v., affûter, aiguiser, soit à l'aide d'une pierre, soit
sur une meule.
raifristoler, v., rafistoler et afistoler, raccommoder, orner, em-
bellir.
raifrodi, v., inf. et part, pas., refroidir et refroidi. Le d se mouille:
raifrthdU.
raigaugnies (ou règôgnies?), n. mas. pi., restes de mangeaille,
débris de vieux mets, de mauvais plats ; emporte une idée de
dégoût : Je n' mainge pas ces règaugnîs4ai (Je ne mange pas ces
vieux restes là). On dit aussi raigognaisses, fém. pi., dans le
môme sens.
raigaumion (ou règomion?) n., restes d'un bon repas : Euje sons
airrivès Vlendemain d' lai fétïeu, et j'ons maingé les raigau-
"V
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FATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX 19
mions. Vous nattes pas enco ein p'tiot régomion devoteribote
d'hier f Se prend toujours en bonne part, au contraire du mot
raigaugnies. — Régomion, même sens, Gros.
raigk, n., rage.
raigbr, y., rager.
raiorandi, v., inf. et part, pas., agrandir et agrandi.
RAioRippER, y., rattraper une ehose qui tombe, la ressaisir ou la
retenir avec les mains. S* raigripper, se raccrocher à quelque
chose quand on est sur le point de tomber : Taillas cheur, euje
me seus raigrippé d'aiprêes 'n' chaire.
raiorunneb et raiguburnrr, v., enlever, ôter ce qui reste, ce qui
s'attache aux bords, aux parois, au fond d'un sac, d'un vase,
ramasser en quelque sorte les derniers grains, nettoyer : Rai-
grun-ne ton aissiette (Nettoie ton assiette, achève de manger les
restes qui sont dessus). Pou aicheter çai, j'ai raigueurné le fond
de mai gauviotte, c'est-à-dite j'ai épuisé ma bourse, pris les der-
nières pièces de monnaie. Raigrunner 9 raigueurner, enlever le
gueurnon (voir ce mot). — Regrener, détacher en grattant le re-
grenon, Gros. ; ragrener, râteler, Thév. — Raigueurner, Labou-
rasse, Patois de la Meuse. De l'ital. raggrenellare f
raigueurnon et raigrunnon, n., tout ce qu'on raigrwwie, au fond
d'un vase, d'un sac, etc.: /' te baille eut raigueurnon de mai
bourse, de mai saquée, etc., c'est-à-dire le fin fond, le dernier
reste. Ne pas confondre ce mot avec gueurnon, qui désigne plus
spécialement le gratin de certaines cuisines au lait. — Regrenon
ongrenon, grattin de bouillie, Gros.; ragrenon, ragueumon, gra-
tin de cuisine qui s'attache au fond de la marmite, Thév. —
Raigueurnon, Labourasse, Patois de la Meuse.
raiguger et raigukugbr, v., s'emploie comme aigûger, aigueûger,
aiguiser, émoudre : Tiens, v'iai mai cousse, raigûge tai sarpe. —
Oui, mas i' faurot queulle feût raigûgée su 'n' meule. On dit
aussi dans le môme sens raicousser.
raigujotte et raigueujotte, n., cous (cousse); toute pierre à aigui-
ser, à affûter.
raioujoue, n., celui qui raiguge, rémouleur, gagne-petit. On dit
aussi rèmouloue et rpassoue.
rauustaige, n., rajustage, ajustage. De même raijuster, rajuster,
ajuster.
rauustoue, n., rajusteur, ajusteur, celui qui ajuste ou rajuste.
r'ailler (s en), v., aller de nouveau, s'en retourner. (Rè-lé).
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20 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVACX
raimaige, n., ramage.
raimaiger (ou rèméger ?), v., apaiser, calmer, consoler, particu-
lièrement un enfant qui pleure. (Voir raipâger). A l'idée de
consoler, raimaiger ajoute l'idée de soigner, de protéger, de satis-
faire aux besoins, etc. Une poule rèmége ses poussins quand elle
les abrite sous ses ailes.
raimasser et raimacher, v., ramasser, a deux significations oppo-
sées, outre le sens français : i° accueillir favorablement, témoi-
gner de l'amitié : Euje li ai m'né mon ptiot, % Vai bin raimassé
(Je lui ai conduit mon enfant, il l'a bien accueilli) ; 2° par
antiphrase, sans doute, répondre vertement, répondre avec ai-
greur, relever, rabrouer, river le clou : Ah, j* te Vai raimassé
au demi-çoc\e, popement, c'est-à-dire je lui ai bien rivé son clou.
— Raimasser ses miettes (voir miotte). — Ramasser, relever
quelqu'un qu'on trouve en faute, Gros.
raimassoue, n , ramasseur : Ein raimassoû d' crottes.
raimioter, raimignoter et raimingnoter, v., mignoter, amignoter,
caresser, consoler, flatter, dorloter, traiter délicatement : /' rai-
miote les bêtes et ï hait ses enfants (11 caresse, flatte les animaux
et il bat ses enfants). Quand i* ast malin comme çai, t n faut
pas V raimignoter, mas V c\aquer, c'est-à-dire quand il est mé-
chant ainsi, il ne faut pas le dorloter, le caresser, mais le fouetter.
On dit dans le môme sens poulotter.
raimmier, n., rangée de taillis abattu, avant qu'il soit fabriqué,
mis en fagots, espèce d'andain de perches ou de ramilles. Raim-
mier (rain-mié), pingeon raimmier, ramier, pigeon ramier.
raimonnances, n. f. pi., restes, débris, choses de peu de valeur,
particulièrement en mangeaille: Tons enco quéques raimonnances
que y maingerons pou note souper. Ce mot est moins dépréciatif
que raigaugnies, et marque plutôt la petite quantité que la
mauvaise qualité. — Vieux franc, remanant, remenant, surplus,
restant. De remanere.
raimonner, v., ramoner, ôter la suie d'une cheminée; remuer, dé-
ranger, bouleverser quelque chose avec bruit, fouiller, farfouil-
ler : J' V entends qui raimonne les chaires, qui raimonne pa
Vormoire. (Voir raivâter). Au fig., grommeler, murmurer,
rognoner, etc. Voir dans ce dernier sens raboter.
raimonnot et raimon, n., grande perche garnie de ses ramilles,
auxquelles on ajoute souvent de menues branches de genévrier,
dont on se sert pour ramoner les cheminées : Raipoute ein rai-
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX 21
monnot du bois, que j' raimonnains note ch'mingnée. Ne pas
confondre ce mot avec ramongnia, raimonna, petit savoyard,
ramoneur. — Du vieux franc, ramon, rameau, balai.
raimonnoue, n., qui grogne, qui gronde, murmure d'habitude,
se plaint sans cesse.
raimourre, v., émoudre, aiguiser sur une meule. Vieux français
amourre.
'Raimsins et ramasins, n. pi., menu bois restant de la fabrication
des perches en ckarbonnetle, extrémités, cimes des branches,
ramilles à faire des fagots. Fagot d* raimsins, fagot de menu
bois, de brindilles, par opposition aux cotrets ou fagots de
branches plus grosses. — Voir bourrelotte.
rain, n., ramille, brin de menu bois, brindille. — Rain, petit brin
de saule, Gros. — Vieux franc, raim, rain.
rainge, n., rangée : Eunne rainge d'âbres, eunne rainge de hottées.
De même rainger, ranger, et les dérivés : airrainger, arranger,
airraingement, etc.
raingeoue, n., rangeur, qui range, soigneux, qui a de Tordre.
raingne, n., grenouille, particulièrement la grenouille verte, rai-
nette (hyla viridis). On dit plutôt gueurnouille. — Raigne, gre-
nouille, Gros.; Raigne, grenouille, Thév.
raipager, v., au lieu de aipâger, apaiser, calmer, consoler, parti-
culièrement un enfant qui pleure. On dit plus rarement rai-
maiger.
raipatronner, v., réunir, rajuster ensemble les deux bouts d'un
objet qui a été coupé, tranché, cassé, afin de s'assurer que ces
deux bouts se rejoignent exactement et faisaient corps avant la
séparation : Eul gode i ai rempouté lai parchotte au bois, et t
Vai raipatronnée, c'est-à-dire le garde a remporté la petite perche
(le corps d'un délit) au bois, et il l'a rajustée sur le tronc. —
Vieux franc, rapareller,' rassembler, réunir; reparrier 3 reper-
rier, retourner, revenir; reppareil, réparation, raccommodage :
appatronner, comparer avec le modèle, étalonner.
raipetioti, v., inf. et part, pas., rapetisser, devenir plus petit,
rendre plus petit : /' n'aimende point et' enfant-lai; j' cros pu-
tiôt, qui' raiptiotit, aillez, c'est-à-dire il ne grandit point, cet
enfant-là; je crois plutôt qu'il diminue, qu'il devient plus
petit.
raipieau et rapibau, n., rampeau, mot qui s'emploie dans certains
jeux, en particulier le jeu de quilles, pour exprimer la parité,
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22 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX
l'égalité de points entre les coups de deux ou plusieurs joueurs :
Taies quaite quilles et moi èteut,j'ons raipieau, onj'onsfait
rapieau.... Il y a alors renvi, c'est-à-dire que les joueurs remet-
tent un second enjeu, et recommencent la partie.
raippareiller, v. raparier, réassortir. S'emploie quelquefois pour
raipatronner.
raipiéceter, v.,rapiéceter. Cul raipiéceié, espèce d'injure plaisante
qui s'applique à un pauvre, à un enfant remuant dont les fonds
de culotte sont chargés de pièces, etc. — Voir cul péché, cul
dèpiéceté, etc, tous ces mots se confondant parfois.
raippouter, v., rapporter. Raippouter d' lai chaisse ein bec rouge,
revenir de la chasse bredouille, avec le nez rougi par le froid.
raipropier, v., rendre plus propre, nettoyer, laver, blanchir : T ètot
sale, guenilloux, maingè aux poux, ai lai varmingne, et j' lai
raipropié.
raipsôdbr, v., rapsoder, raccommoder malproprement, raccommoder
de vieux habits qui n'en valent presque plus la peine. — Voir
rètapsôder. Vieux français.
rassembler, v., rassembler, s'emploie pour assembler : An vai
raissembXer V conseil pou voter le bulget. Raissembk (missent-
bieu) dâji tes lettes, assemble d'abord tes lettres, c'est-à-dire
raisonnoue, n., raisonneur, enfant qui n'obéit pas sur le champ,
qui discute les ordres, qui réplique.
rait, n. rat :
M, le curé, peurnez vos bottes,
Et peus v'nez nous malrier :
Dans note cœur l'amour y trotte,
Comme les raits su vote gueurnier,
raitaitingner (**), ▼•> se ratatiner. On dit plus souvent s'récoquiller
et se reteurli ou s'eurteurli.
raite, n., fém. de rait, souris. Beaucoup de gens autrefois
croyaient que la souris était la femelle du rat. Raite, n., rate,
viscère, qu'on nomme aussi niche.
raité, adj.ou part, pas., rongé aux souris, pâturé, détérioré, gâté,
souillé, foulé, détruit en partie par les souris ou les rats : D' lai
paille raitée, du grain raité, c'est-à-dire de la paille mangée par
les souris, etc.
raitis (ou raitie?), n., paille, épis, débris de grains mangés par
les rats ou les souris, soit dans les champs, soit dans la grange ;
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX 23
Note blé (bié) ï ast maingè, confondu ; j'ai j'tié trois charpin-
gnées de raitis ai nos poules.
raitotte, n. dimin., petite souris; petit mot d'amitié, de ten-
dresse, qu'on emploie avec les enfants, comme chaitotte et
poulotte.
raitoure, n. fém., ratière, souricière.
raittelée, n., seconde aittelèe, attelée de l'après-midi.
raivaiger, v., ravager, s'emploie pour remuer indiscrètement,
changer les objets de place, toucher à tout, etc., particulièrement
en parlant des enfants. Voir raivâter.
raivaigeot, n., celui qui raivaige, remue, déplace les objets, brise,
détruit; en particulier, enfant remuant, qui touche à tout.
raivailer, v., ravaler. Raivailer son craichon, ravaler sa salive,
déglutir ; au fig. se taire. Raivailer, en parlant des branches des
arbres chargées de fruits, retomber, pendre :Tyen ai des bloches
que les brainches eulles en raivailent, ou tout simplement : /' en
raivaile, des bloches, c'est-à-dire il y a tant de prunes que les
branches en ploient, retombent vers la terre.
raivâter et ravater, v., recevoir mal, renvoyer de cent lieues,
gronder, rabrouer; toucher à tout, fouiller partout, changer les
objets de place, les culbuter, remuer bruyamment, etc.: Euje
vlôs li bailler ein avis, mas i' m'ai joliment raivâté. G'te p'ttt
mâtin-lai, i' raivâte teut, i' traîne teut, pa lai majon. On dit
aussi dans ce dernier sens raimonner et fonnoiller. — Ravacher,
ravauder, radoter, gronder sans sujet. Gros.; ravater, tancer
vertement, G. et R.
raivatier et ravatier, n., rêveur, radoteur, grognon, qui bou-
gonne toujours et à tort; enfant qui raivâte, qui touche à tout,
dérange tout.
raivadder, v., ravauder. — Voir raivâter, dans les deux sens,
raimonner, raboter, etc.
raivauderie, n., ravauderie, mauvaise raison, mauvais argu-
ment; gens ou choses de peu de valeur, rebut. — Voir dans ce
dernier sens cheni.
raivaudier et raivaudoue, n., ravaudeur, celui qui ravaude, dans
les deux sens de ce mot. — Voir raivatier.
raivb, n. , rave, navet, radis. Faire d'une chose quelconque des choux,
des raives, en faire ce qu'on veut, en disposer à son gré : Vlai
tai part, fais-en des choux, des raives, c'est-à-dire fais-en ce que
tu voudras, uses-en bien ou mal. Cette expression renferme une
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24 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX
menace, par exemple: ne te plains pas ensuite, n'y reviens
plus, etc.
raivioion, n., changement d'avis, de caprice. — Voir aivigion. On
dit de môme s'aiviger, s'raiviger, etc.
raivin, n., ravin, ravine.
raivingner, v., être ravagé par des ravines; faire, creuser des
ravines : /' ai tant p\u hier qui' y ai des vingnes de rai-
vingnées. C'te gnuée-lai eulle vai raivingner lai moitié du fin-
gnaige.
raivoinde, v., s'emploie au Heu ftaivoinde, aveindre. Ce verbe
marque le plus souvent un effort à faire en allongeant les bras :
/' ai raivoindiu note sieau de note puis. Raivoins /' pain de des-
sus lai p\ainche. On prononce raivoindiexx, en mouillant le d.
rajon, n., raison : Taies rajon, et moi f n'ai pas tort t F dit des
rajons comme des majons, c est-à-dire il donne de mauvaises
raisons, il dit de grosses bêtises.
rajonner, v., raisonner, discuter. De même les dérivés, rajon-
nab\e, dèrajonner, etc.
râle, adj., rare.
RALETé, n., rareté. De même râlement, rarement.
ramieau (/"... du), fouetter, corriger : Si tu n' rentres pas chez
vous tout en sotiant d 1 l'école, tai mère eulle te f... du ramieau,
ou t'airaies du ramieau, V ramieau, c'est-à-dire tu auras du
bouleau } tu auras le fouet, tu seras corrigé. Cette expression ne
s'emploie guère qu'en parlant aux enfants.
rancer, v., siffler de la gorge en respirant, respirer avec bruit,
être enroué, râler. On rance dans certains rhumes, certaines
bronchites, etc.
rançoux et rançoue. adj., celui qui rance, quia comme un embar-
ras dans la gorge, qui est enrhumé, malade de la poitrine,
asthmatique, etc.: /' ast enroué, rançoux. Taise4e don, rançoue
ai jonnée, c'est-à-dire toi qui rances à la journée, continuelle-
ment. Cette prononciation longue, ainsi que nous l'avons dit
dans l'introduction (page 33), marque plutôt l'action que l'état.
rancunner, v., grogner, bougonner, être mécontent : /' rancun-ne
toujous (Il grogne, il bougonne continuellement). Rancunner
quéquun, malmener quelqu'un en parole, le tancer, le rabrouer,
le quereller, lui faire des reproches.
rancunmer, adj., celui qui rancun-ne. S'emploie pour grognon,
bougon. - On dit aussi rancun-noue.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLA1RYA0X 25
rancuser et rancueusrr, y. , dénoncer, rapporter ce qui s'est dit,
s'est fait, dans un lieu où Ton se trouvait... Nous n'avons guère
entendu employer ce mot que dans cette expression : Rancuser
l'école, rapporter dans sa famille, dans le village, etc., ce qui se
dit, se passe a l'école. — Remputer, dire les nouvelles de
l'école, Gros.; raiqueuzer, Labourasse, Patois de la Meuse. —
Vieux français racuser.
randon (ou rendons?), n., défaut, manque dans le labour, saut de
la charrue causé par un obstacle, un écart des chevaux, etc.:
/' s'ast trouvé V piarre devant lai diarrue, ou lai charrue eulle-
l-ast venûn trop ai roie, et j'ai fait ein randon. — De rendons,
sous-entendu la main, c'est-à-dire cédons ? — Vieux français
randon, de randon, avec force et violence.
ranfraichi, v., inf. et part, pas., rafraîchir et rafraîchi.
ranter (ourenterî), v., raccommoder, faire un renton, rajuster
une partie neuve à un objet, un vêtement, un outil, etc., cassé,
usé, etc.: l'ai rente son limon de voitiure, c'est-à-dire il a remis
un bout neuf à son limon de voiture. Ranter des bas, des
chaussettes, tricoter des pieds neufs à de vieux bas, de vieilles
chaussettes. — Voir réponde.
rapiat, n. adj., ladre, avare, qui tondrait sur un œuf, qui rapine
sur tout, qui a les mains crochues. Vieux franc rapiax, ra-
visseur.
rapport et rajpport, n., s'emploie absolument pour procès-verbal :
Eul gade-champête mai fait ein rapport (Le garde-champêtre
m'a fait un procès). Rapport, concours de personnes dans un
endroit, ordinairement à l'occasion de la fête d'un saint, espèce
de pèlerinage à jour fixe : /' n vai pas tant d' monde au rapport
de saint Abdon quai c tu du Val des Dames. — Rapport ou
raipport ai, loc. prép. à cause de : Je n seus peu soti raipport ai
lu, c'est-à-dire je ne suis pas sorti à cause de lui. — Rapport,
foire, concours de peuple, Gros.
rasin et ragin, n., raisin : Gros comme eunne grun-me de rasin.
— Ragin, raisin, L. C.; rajain, rajin, P. T.; râgin, G. et R.
raté et ratibau, n., râteau. (Raté, râtieau).
râtelée et raitelée, n., râtelée; au fig., kirielle, quantité, tirade:
Eunne râtelée de sottiges (Une kirielle d'injures). — Vieux fran-
* çais. On dit aussi raibotée et raibeut'lée.
ratelot, n. dim., petit râteau; en particulier, espèce de râteau, de
t. u 3
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26 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX
crochets de bois, qui s'adapteut a la faulx pour ramasser en
même temps qu'on fauche.
ratlier, n., râtelier. On prononce rât\ier (râtier).
rayée de soleil, rayon de soleil qui perce un nuage, courte appari-
tion du soleil entre deux nuages par un ciel couvert : /' ai
poutant fait quéques rayées de soleil aujd'heu, c'est-à-dire le soleil
s'est pourtant montré par courts intervalles aujourd'hui.
rebailler, v., donner de nouveau, redonner : Bailler (bé-ié) et
peûs r bailler, ç'ast ein péché. Se prononce souvent eurbailler t
comme tous les mots qui commencent par re. — Voir l'intro-
duction, page 30. — Rebeiller, redonner, L. C; rebeillay, id.,
P. T.
rébecca, n., enfant, en particulier jeune fille, qui répond avec ar-
rogance, qui se rebéque, se rebiffe, qui répond de travers, aigre-
ment, à des observations légitimes, etc. Se prend toujours en
mauvaise part : Taise4e, rébecca t c'est-à-dire tais-toi, répondeuse,
raisonneuse, impertinente l
reblainchi, v., inf. et part, pas., reblanchir et reblanchi, blanchir
et blanchi. En particulier, lessiver, laver, tenir propre: J' les
r'b\ainchis et f les r couds. — Voir b\anchi et raipropier.
rebouler et rembouler, v., émousser, refouler, écacher, tordre la
pointe, le taillant. On remboule ou r boule une lame, une pointe,
un clou, etc.: /' ai remboule sai faulx dans V piarre. Euce bôs-
lai, t ast si dur qui' r'boule les chus (quioui), ou que les c\ous
seurboulent dessus. Dans ce dernier cas, on dit aussi que les
chus rnif\ent (voir renifler). — R bouler quéquun, mal re-
cevoir quelqu'un, répondre, répliquer durement. Voir rebourrer.
— Rebouler, moussser, Gros.; rebouler, repousser, brusquer,
Thév.
rebouler et ribouler les œux, écarquiller les yeux, les ouvrir tant
qu'on peut. On dit aussi rouiller ou reuiller les œux, avec cette
différence qug r bouler ou ribouler signifie plutôt ouvrir de sur-
prise, comme pour mieux voir, tandis que rouiller ou reuiller
veut dire ouvrir avec affectation, rouler, faire les gros yeux
pour inspirer de la crainte. — Gnen ai pas ai r bouler Vœu, il
n'y en a pas en abondance, de quoi faire écarquiller les yeux ; il
n'y en a guère : N'en mainge pas d' si grousses bouchies, gnen
ai pas ai r bouler Vœu, c'est-à-dire il n'y en a pas à dévorer ainsi
d avance, à écarquiller les yeux de plaisir, etc.?... D'autant qm,
cette expression s'applique à peu près exclusivement aux vic-
tuailles, aux friandises, etc.
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PATOkS DE LA FORÊT DE CLAIRVADI 27
rrbourrer, v., mal recevoir, gronder, rabrouer, repousser dans
tous les sens, par tous les moyens, du mot dur, aigre, à la
bourrade inclusivement, au propre et au figuré : Euce prouve-
lai li demandot du pain, mas t faut vor comme % ast uu
r bourré I Y mai r'bourré si fort qui* m'ai fait cheur.
rèboutener et rèbouteunner, v., reboutonner. Srèbout'ner ou
seurbouVner, se reboutonner : Rèbouteunne ou eurbouteunne tai
cueuloUe. Rèbout'ner sai gueule, se taire. S'emploie aussi quel-
quefois pour aiboutener, boutonner.
rebbaqger (se), v., se redresser pour ne rien perdre de sa taille,
regimber, se rebiffer : Sitiôt qu'an li dit ein mot qui n'ii p\aît
pas, t s'eurbraque, c'est-à-dire il se redresse prêt à répondre, à se
défendre, à protester, à discuter, à chercher querelle.
rebrater, v., retourner en arrière, par peur, par ruse, par pru-
dence, etc., quitter son chemin pour prendre une voie oblique,
battre en retraite : Y v'not su moi tôt drot ton \iéve, mas, quand
i' m'ai r'cueunû, i' ai r'brâté. Empoingne don ein gourdin et
fais-le rbrâter, quand i' courrai, comme çai, su toi, c'est-à-di re
fais le reculer, quand il courra ainsi sur toi. On dit quelquefois
dans le même sens brâter.
bebuer, v., s'emploie pour buer, laver, lessiver; lessiver souvent:
Y faut que j'eurcoude et qu' j'eurbue tous les jous, d'aiveu ces
enfants-lai, c'est-à-dire il faut que je couse, que je racommode
et que je fasse la lessive tous les jours, etc.
recaler, v., remettre la cale, recoiffer. Au fig. refaire, attraper :
/' croyot gaingner, et t ai pèdiu, % ast bin r'caié. Y t'ai aittraipé,
mas moij' l'eurcalerai ai mon tour, mit — Requilleroxx reca-
ler quelqu'un, lui répliquer vertement, Gros,
rêcarcitrant, adj., récalcitrant.
recas, n., recassis, terre recassée, c'est-à-dire labourée pour la
seconde fois : Les recas sont dâjip\euns (pi-uns) d'harbe.
RECHAiNGE, n., rechange. De même rechainger, rechanger: feur-
chainge, tu r'chainges, etc.
rech arche et resarche, n., recherche : An ai fait des r'charches
dans sai majon, c'est-à-dire on a fait une perquisition, etc.
rechingner, v., rechigner. Faire quelque chose en r'chingnant,
faire quelque chose malgré soi, de mauvaise grâce.
récompenser, t., s'emploie au lieu de compenser. — Voir rècom>
penson.
rècompenson, n , portion supplémentaire qui fait compensation!
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28 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX
qui rétablit l'équilibre, l'égalité, entre deux ou plusieurs parts:
Note pari d'arpent riètot pas fameuse, mas j'ons zeû ein p'tiot
rècompenson, c est-à-dire notre part d'affouage n'était pas très
bonne, mais nous avons eu une petite portion supplémentaire en
compensation.
recontroyer et regontrater, v., se dit des plantes qui poussent
des tiges nouvelles à côté des vieilles à demi-sèches, par suite de
maladie, de sécheresse, de température contraire : Èud'peûs lai
pleue, les pommes de terre, qui ètaint quasi choches, eurcontroyent
(eurcontro-ien), c'est-à-dire qu'il pousse des tiges nouvelles, et
môme de petites pommes de terre à côté des autres déjà mûres,
ou mûries de force. — Dans quelques villages de l'Aube, on
dit roingnei*.
rècoquiller (s'), v., se recroqueviller. On dit aussi se recrincheler
ou s'eurcrincheler, et se reteurli ou s'eurteurli. — Recrocriller,
effet de l'action du feu sur le parchemin, Gros.; racrocriller, rac-
courcir, Thév.
rècortb, n., récolte.
rècorter, v., récolter.
recoucher, v., renfoncer jusqu'à la pousse de l'année, jusqu'au
sarment, un cep de vigne autour duquel on a enlevé la terre
en creusant une espèce de trou (provin), et dont on a respecté la
racine. R coucher ou eurcoucher ein provin, le replanter en se
servant des vieilles souches épargnées à cet effet. On rcouche de
môme une lige de plante, un surgeon, etc.
recoub (ou raicoué ?), p. pas. ou n. adj., maladif, souffreteux,
réchappé, trompe la mort, etc. (Voir rècouer.) On dit avec une
nuance d'intérêt ou de dédain à un eufant faible, ou réchappé d'une
maladie grave : Prouve rècoué t — Voir charcueulot, jaidrou, etc.
rècouer (ou raicouer?), v., tirer d'une maladie grave, sauver,
aider à réchapper, plus que ravigoter, presque ressusciter : J'ai
rècoué c'V aingné-lai qu gnaivot pas de mère (J'ai nourri, forcé
à vivre, sauvé cet agneau-là, etc.). /' ai cheû, an V croyot mort,
mas an ai pu Vrècouer, c'est-à-dire on a pu le rappeler à la vie et
le guérir.
recouiner(s'), v., crier de douleur, de surprise, etc.; crier haut, fort.
Faire rècouiner, faire crier haut, fort, sur le ton de la plainte.
Ou dit aussi dans le môme sens srègueuler et faire règueuler.
recouler, v., donner le second labour à la vigne, retcrcer : fai
fii\i de sombrer, j'eurcoule. C'est ce qu'on appelle recasser eu
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX 29
agriculture. Donner le troisième labour, se dit r' faire de trois
fois. — R'couler, donner aux vignes le troisième labour, G. et
R. — Le second labour se dit aux Riceys, d'après MM. Guenin
et Ray, à r'meuvoi, s'campé à r'meuvoi ; sans doute de à remue
voir, c'est-à-dire remue voir encore la terre? ou de aile m'revoit,
elle me revoit ?
rbçoupb et recipe, n., copeau, tronçon de bois à brûler, pris au
collet de l'arbre, du brin, de la perche, de la cépée, bouts de
sciage : Ç'ast du bon bois, les r'çoupes, ç ai fait du bon feu.
recouper et reciper, v., recéper, couper, scier perpendiculaire-
ment à l'axe le bout inférieur d'un arbre, d'une branche, d'un
brin plus ou moins en biseau ; retailler le tronc d'une cépée,
d'un arbre, etc., mal taillé ou coupé trop haut : J'ai r coupé ou
r'çipé les troncs, et ç'ai m'ai fait V grante voitiure de copelots,
d'eurçoupes.
recousesse, n., couture, cicatrice : /' ai eunne eurcousesse ai lai fi-
gure, c'est-à-dire il a une cicatrice, etc.
rècousser (ou RAicoussER ?), v. affiler, aiguiser un outil tranchant
avec la pierre appelée cousse, cous : Raicousse tai faulx qui ri
cope pus.
recrincheler (se), v., se recroqueviller. S'emploie plus particuliè-
rement en parlant des étoffes, se gripper, se froncer : r ai p\u
su mon cotillon et ï s'eurcrincheulle. — Voir rècoquiller et re-
teurli.
recruter, v., s'emploie pour quêter, chercher, trouver, découvrir,
prendre, etc.: Lai voit don qui ast zeâ rcruter ces haibitslai f
F aivot vendu les siennes (Où donc a-t-il pu aller chercher, dé-
terrer, etc ?) Qu'ast-ce que tu viens don r'crûter au long de nous ?
(Qu'est-ce que tu viens donc chercher, épier, etc.?) Lai y'où
diâbe eurcrute-t-% don tout c' qui' raiconte ? c'est-à-dire où
peut-il bien prendre, etc.? Dans ce dernier cas, recruter est em-
ployé in bonne part, on admire.
recueilloue, n., recueuilloir, espèce de jale qui se met sous le
cuvier pour recueillir l'eau qui coule de la lessive : F ai du
lochu p\eun l eurcueuilloue (eurcueu-ioue) . Par extension, toute
espèce de jale, tine, baquet.
recueuléb, n., ruelle, cul-de-sac, endroit reculé d'un village,
éloigné du centre : /' demourot lai-bas, au fond d' lai cour, dans
eunne eurcueulée, dans lai rcueulée. On dit aussi dans le môme
sens recueulis. — Vieux franc, recullis, retraite.
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30 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVACX
RBcuEULOïc,n., envers: Ce n'ast pas ce coutéJai l'aidrot de ton
étoffe, ç'ast Veurcueulon, c'estrà-dire c'est l'envers.
recubulons (ai), loc. adv., à reculons, à l'envers : I'vai ai r'cueu-
lons (11 va à reculons, il recule). On prononce quelquefois ai
l'ercueulons, ou ai lai r'cuetdons : V ai mins sai ch'minge ai
l'ercueulons, c'est-à-dire à l'envers.
rrcueunruchàncb, n., faculté de reconnaître : Ah, tu n m'aies pas
r'cueunu ? Tu n'aies guère d'eurcueuneuchance, c'est-à-dire tu
n'as guère de mémoire pour reconnaître les gens.
recubuneutb, v., reconnaître. (Voir c'neute). — Vieux français
requenoistre.
recule, n., hercule, homme fort, hercule forain : Ç'ast ein r'cule,
i' ast fort comme ein r'cule.
rècuron, n., torchon de paille qui sert à écurer {récurer) les mar-
mites, les vases de fonte, à l'aide de cendre; laveuse de vaisselle.
Au Gg. femme malpropre sur elle.
redent (ou redan?), n., saillie à une montagne, au flanc d'un
coteau, d'un fossé, etc.; pierres en saillie, moulure autour d'un
édifice, d'un meuble, ressaut, etc.: Ç'ai fait ein r'dan, juste au
moitian d' lai côte (Ça fait une saillie, un renflement brusque,
etc.). L'eurdan du foussè (Le rebord du fossé). Au moitian du
mur, i' y ai ein r'dan, c'est-à-dire une moulure, des pierres en
saillie.
rédicule, adj., ridicule, s'emploie le plus souvent pour difficile,
bizarre, raide, hautain, et avec la négation : /' ast-t' bin gentil
c' ( homme-lai ? — Oht gn'ast pas rédicule, c'est-à-dire oui, il est
est assez gentil, assez bienveillant, d'humeur facile, etc.
rédiculer, v., marchander, débattre le prix en achetant ou en
vendant, hésiter, ne pas tomber d'accord : Allons, n faut pas
rédiculer;j* vous loche mon couchon pou cent francs et c n'ast
pas cher I
rrdonder, v., s'emploie encore pour rebondir : Lai piarre eulle li
ai cheû su lai tête et peus eulle ai rdondé. Eut martieau i' r'donde
sut' piquotqui n'entre pas. — Redonder, rebondir, Thév.
rbdouiller, v., rédarguer, battre en paroles, battre au jeu ou de
toute autre manière, apaiser le caquet, tancer, refaire (voir
recaler) ; punir, corriger : Taies trouvé ton maire, hein ! ï t'ai
r'douilléyC' tul-lai?(Tu as trouvé ton maître, hein? Il t'a
secoué, tancé, etc., celui-là t) Çai les r douille les malins, çai t
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX 31
c'est-à-dire ça les attrape les malins. — Redouiller, vexer, mor-
tifier, Thév.
rèfier (s'), v., s'emploie pour se fier. S'rèfier su, se fier à, se con-
fier en, compter sur : T s'ast rèfié su sai foiclw et peûs, ï ast zeû
baittu, c'est-à-dire il s'est Rè en, il a compté sur sa force, etc.
rèfrillé, part. pas. et adj., refroidi, devenu frileux à la suite
d'une pluie, d'un malaise, etc.: Jai du rheumme, çai m'ai rè-
frillé {rèfri-ié), je ri peux pas quittier note feu. /' seus zeû
mouillé cmaitin et j'en seus teut rèfrillé. Oh, que vieux rèfrillé
que tu fais t
rèfriller, v., rendre frileux : Été mouillé, traip'ché, çai rèfrillé,
c'est-à-dire être mouillé jusqu'à la peau, ça rend frileux. —
Voir rèfrillé.
rèfrodi et r'frodi, v., inf. et part, pas., refroidir, refroidi. Se
prononce en mouillant le d, rèfrodAi.
rèfrodighement et r'frodichbment, n.,- refroidissement: J'ai
aittraipé ein rèfrod-Uchement.
rêfroi (ou réfroid?) n., refroidissement subit, maladie qui en est
la suite, principalement chez les femmes: Eulle ai zeûe ein
réfroi, et çai li ai duré d'où trois ans, c'est-à-dire elle a eu
un refroidissement, et elle en a été malade pendant deux ou trois
ans.
regaidiure, n., yeux, figure, tête; on dit plaisamment : Les quaite
trottingnons et lai rgaidiure d'ein vieau, c'est-à-dire les quatre
pieds et la tête d'un veau.
règailer, v., régaler, répandre, aplanir : J'ai règailé du foin. Y
règailot des taupéres. S'règailer, tomber, s'étendre par terre :
Eulle s'ast régailée juste au moitian du patouillait, c'est-à-dire
elle est tombée juste au milieu de la flaque d'eau.
regaitiant, adj., regardant, intéressé, trop ménager, trop économe,
avare : /' ri peut pas trouver ai s' faire servi, i* ast trop r'gai-
tiant.
regaitier, regaidier et regamer, v , regarder : Eurgaite ou r'gaite
(t mouillé : eurgaitieu) vô V belougelot t c'est-à-dire regarde voir
le bel oiseau! — Eurgatde, L. C; regardiay, regarder, P. T.
— Vieux franc, gaiter, observer ; aigaiter, agaitier, épier.
règaucher (ou règôcher ?), v., recevoir dans les mains un objet
qu'on a lancé en l'air, ou qui vous est lancé par un autre, ou
qui tombe, attraper au Vol : Tiens, règauche lai balle quej* t'en-
vôe. Sij' riaivôs pas règôché l'aissiette, eulle cheujot. En donnant
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32 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVACX
un soufflet à quelqu'un on dira : Règauche çai t (accipe hoc /).
Dans quelques villages règuicher. — Régosser, saisir une chose
jetée en l'air, réfaler, Gros.; rafaler, ratafaler, id. Thév. —
De esquicher, esquiver la balle au jeu de paume? ou du vieux
mot regaust, rebondissement?
beginouer, v., ginguer, ruer, regimber : Ein ch'fau qui r'gingue
(Un cheval qui rue). Se r'ginguer, se redresser, répliquer vive-
ment, se rtbéquer, se révolter : J'ai v'iu li bailler ein avis, mas
% s'ast r'gingue, t" s'eurgingue. On dit aussi requinquer.
reginguet, n., ginguet, petit vin acide, mauvais vin : Les rasins
ne meûrirontpas ; an ferai du r ginguet.
règle, n., règle. Prononcez en mouillant 17 rég\e (r^uieu). De
môme rêg\er (réguier) et les autres dérivés.
règliche, n., réglisse. RègMche en bois, racine de réglisse.
regobiller, v., vomir, dégobiller. Se prend toujours en mauvaise
part : /' ai r'gobillé su lai table.
regobillis, n., dégobillis, vomissement.
règouleb, v., couler, en parlant de l'eau ou d'un autre liquide;
rouler, «n parlant d'un objet rond sur un plan incliné : Veau
regarde du tôt; les larmes règoulent su ses joues ; eunne piarre
règoule dans ein foussè, ai ïaivailée d eunne côte, etc.— Rigoler,
couler, ruisseler, Gros.; régotUer, L. C; règouley, P. T.; régou-
1er, couler, rigoler, Thév.
règoulotte, n. dimin., petite rigole; rigole, petit fossé, raie par ou
l'eau règoule ; fente, entaille, coche, coulisse, etc.
reguèri, v., inf. et part, pas., guérir et guéri : Vote petiot ï asUÏ
r'guèri I — Oh I i' n' s'eurguèrirai p't'éte bin jainmas t c'est-
à-dire votre enfant est-il guéri? — Oh 1 il ne se guérira peut-
être bien jamais !
règueuler [s\ gueuler, crier très fort, hurler ; pleurer tout haut ;
crier de surprise, se récrier ; se réclamer, etc. : Ç'ai li faijot
bin mau, car i' s' règueulot qu'an Vairot entendiu ai V lieue,
J'ètôs pédiue et j' me règueulôs. Faire règueuler, faire crier,
pleurer, hurler : Pouquoi don que tu fais règueuler cte chien-lai
comme çai ? — On dit de môme s'rècouiner.
reingne, n., influence, épidémie: T ai tout p\eun des enfants d'
mailaides, ç'ast comme ein reingne, ou çast ein reingne, c'est-à-
dire c'est une épidémie.
RHEumuTissB, n., rhumatisme (run^natisse).
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PATOIS DE LA FOUET DE CLAIRVAUX 33
rheumme, n., rhume. On prononce run-me. De môme enrheummé,
s'enrheummer, etc.
rejau (ou rejô?), n., reginglette, rejet, rejettoir, piège à prendre
les oiseaux, baguette de bois vert courbée au bout de laquelle
est fixé un lacet. Ne pas confondre le r'jô avec la raquette. —
Faire eurjaû, faire ressort, se détendre brusquement. — Vieux
français rejaux, rebondissement ; regipper, regimber ; regimba,
ressort, mentula; regetoore, engin à prendre les oiseaux.
bejaunkr (ou rejôner?), v., singer, contrefaire, imiter en char-
geant, particulièrement la manière de parler, la voix, les gestes:
Pace que je bègue, t meurjône... (Parce que je bégaio, il mo
singe..,) — Dégeigner, Gros ; dèjauner, G. et R.; rengeingner,
répondre à quelqu'un en le grimaçant, Thév. — Vieux franc.
rechigner, faire la moue, la grimace. Nous avons entendu em-
ployer resigner dans le môme sens.
rejition, n., nouveau jet, surgeon; second essaim d'abeilles:
L'âbre t ast mort, mas ï pousse des rjitions au pied.
rejonfler et se rejonfler, v., se renfler, se distendre, regonfler,
dépasser les bords ; se relever avec élasticité, ôtre élastique : Lai
pâte eurjonf\e (eurjonf\en) pa d f ssus les caibaits (La pâte re-
gonfle, déborde, etc.). J'ai mins mon let au soleilet i' seurjonf\e...
Son gros cou r'jonf\ot pa d'ssus sai craivaite. — Voir redonder. —
Rejonfler, déborder, regonfler, Thév.
relaiver, v., relaver, spécialement laver la vaisselle : C'ètot lai
fille quirlaivot les aissiettes. — Voir ntoyer.
relaivotte, n., lavette, petit torchon, guenille qui sert à laver la
vaisselle; langue : Sai rlaivotte, eulle vai toujous, c'est-à-dire sa
langue va toujours.
relaivube, n., eau grasse, eau de vaisselle : An baille les rlaivures
aux couchons.
relioue de meuds, n., tonnelier- rhabil leur : Tons zeû Veurlioû,
c'est-à-dire nous avons eu (sous-entendu : en journée) le relieur,
le rhabilleur de tonneaux. — Vieux franc, relieur, tonnelier.
reloge et heurlogb (ou eurloge?), n., horloge : Vous aites ein
bieau rloge, ou ein T)el heurloge (ou ein bel eurloge, avec Y eu
euphonique?). — Reloge, horloge, Gros.; rloge, horloge, G. et
R. — De môme r loger, heurloger, horloger.
relure, v., luire, reluire, briller: Eul soleil eurlut pou tout le
monde. Çair'lut, c'est-à-dire ça brille. Part. prés, rlujant.
remarque, n., s'emploie pour brandon: N 9 passe pas lai, i' ai
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34 PATOIS DE LA FORÊT M CLAIR VAUX
eunne eurmarque» Faire eunne eurmarque à quelque chose,...
faire une marque pour reconnaître cette chose. — Voir
marque.
rembarder, v., barder au plus haut point, couvrir d'une couche
très épaisse, crotter de haut en bas, crotter jusqu'aux épaules :
Oh, comme te v'iai rembardé t (Oh, comme te voilà crotté, souillé,
couvert de boue I) S'emploie le plus souvent au part, passé.
remblaiver, v., remblaver; semer de nouveau, de blé ou de toute
autre graine. On prononce ranbiaivé.
rkmbraisser, v., embrasser, donner un baiser.
rbmbrunche, n., accident, contre- temps, retardement ; obstacle,
embarras, inconvénient ; mauvaise excuse, détour, etc. : Quand
f veux soti d' chez nous, ï s' trouve toujous des rembrunches,
euj' seus mailaide, ï m* vient quéquun, note vache eulle fait son
vieau, etc. Allons, dis qu tu n'aies pas vlu et n charche pas
tant de rembrunches. — Rembrunche, obstacle, embarras, Gros.
— Vieux franc, embrunche, embuscade; embruncher, entortiller,
embarrasser.
rembruncher, v., au propre, tordre, ployer, river; au fig., riposter,
répliquer vertement. Rembruncher ein clou, le tordre ou le river ;
rembruncher quelqu'un, lui river son clou. Un clou s'rem-
branche, quand il se tord au lieu de s'enfoncer. Un clou dont la
pointe est émoussée, tordue, est un c\ou rembrunche. On dit
dans les mêmes sens, propre et figuré, rebouler.
remède, n., remède. Se prononce en mouillant le d: r'médlm.
remontrance, n., s'emploie pour figure, image, portrait, ressem-
blance, trace, ombre, souvenir : /' ast maigue, cassé, gnai pus
de cheveux, pus de dents.. . gnai pas lai r'montrance d!ein homme.
Lai grêle eulle ai tout brigè, gn'ai pus de rasin dans les vingnes,
gnen ai pas lai r'montrance. — Du vieux franc, remembrance ?
ou de montre, montrer ?
rèmouloue, n., rémouleur, gagne-petit. On dit aussi repassoue.
rèmourre,v., émoudre, affûter, aiguiser sur une meule. — Vieux
franc, amourre, aiguiser.
rempleummer (5'), v., se remplumer, reprendre de la santé, des
forces, de l'embonpoint, etc. (S'ranpiun-mê).
rempli, v., inf. et part, pas., remplir et rempli : Taies rempli, tu
vas rempli ton pner (Tu as rempli, tu vas remplir ton panier).
Mon p'ner ï ast rempli, c'est-à-dire est plein.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVADX 35
renader, v., renarder, vomir par suite d'un excès de table, faire
des renards.
renaré, part, pas., rusé, On, habile, astucieux, retors : Oh, défie-
tel t ast bin r'nârè. Nous avons entendu employer quelquefois
l'infinitif: /' faurot Veurnarer, c'est-à-dire il faudrait le dresser,
le déniaiser, lui apprendre les ruses, les roueries du monde. —
De renard ? ou de nares acutœ, emunctœ ?
renauder, v., maugréer, grommeler, grogner, radoter, etc.:/'
r'naude ou t" eurnaude toujous, c'est-à-dire il est grognon, de
mauvaise humeur, il se plaint, etc., en tout temps. — Voir bot-
teler, entonner, etc.
renchéri, v., inf. et part, pas., enchérir et enchéri.
rende, v., rendre, vomir.
rendition de compte, reddition de compte.
renégat, adj., s'emploie pour vif, remuant, turbulent, espiègle,
drôle, plaisant, en parlant des enfants : Ah, que rnégat t t ast
toujous prêt ai s* sauver, toujous en train $ toucher ai tout,...
t m' fait chochi, d'ailleurs t
rengreunner et rengueurner ($'), v., se rengrénor, retrouver,
regagner, rattraper, ravoir de la graine ; regagner au jeu ou
autrement, de quoi se remettre à flots, quand on est épuisé,
ruiné... Une femme dira:/' n'ai pas rècorté ein pois Van-née
passée, etf sens zeûe obligée d'en aicheter ein litre c' t' an-née pou
m* rengreunner (rangrun-né) ; et un joueur qui a perdu toute sa
sa monnaie et qui regagne quelque sous, s'écriera : Ah, v'iai pou
m' rengueurner t ou çai vai m' rengueurner t
renifler, v., sentir, flairer avec défiance ; reculer, caler, caponner ;
protester, répliquer ; se tordre, s'écraser, s'émousser, en parlant
d'une pointe, d'un clou; rebondir, en parlant d'un marteau, d'un
maillet : Q'ast-ce que tu r f nif\es (r'm/ieu) don comme çai Ion
aissiette? aivaile, nâchoux t (Qu'est-ce que tu flaires donc ainsi,
etc.). Ah t tu nées pas aissez hadi, tu r'nif\erôs, c'est-à-dire lu
caponnerais. N'eurnif\e pas, tiens t (N'ouvre pas la bouche pour
essayer de protester, de te justifier, tiens!). Eul marlin r'nif\c
su c tronc-lat qui ast p\eun de nons. — Voir fleurer, cusser,
grouiller, piper, renoncer, redonder, etc.
renifloue, n., renifleur. On mouille 17 : rnif\oue.
renlbvbr, v., re-enlever, enlever de nouveau.
renmenri, v., inf. et part. pas. — Voir enmenri.
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36 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAÏUVAIX
renoncer, v., s'emploie pour protester, essayer de se disculper,
dire un mot, faire un geste de dénégation, souffler: /' l'ai fait
ailler coucher sans souper , et i ri ai pas r nonce, c'est-à-dire il n'a
pas protesté, pas dit une parole, fait un geste. Tiens, rieurnonce
pas t si tu rnonçôs f. . . . (Tiens, ne réplique pas, ne souffle pas i si
tu faisais seulement mine de vouloir parler !...)> dit une mère,
en levant la main d'avance. C'est le quos ego. On emploie de môme
grouiller, moter, renifler, piper.
renoyer et renier, v., abandonner, en parlant des oiseaux qui
abandonnent leur couvée, leur nid : T'aies zeû rôdé ailentour
du nind,et peûs lai mère eulle l'ai r'noyé (rno-ié), ou eulle Veur-
noerai.
rentillon, n., dim., petite rente, intérêt des iutérôts : T niai
fait payer les rentes et les rentillons, c'est-à-dire les intérêts
composés.
rentraite, n., rcntraiture, reprise, couture de ce qui est rentrait :
/' ai sauté eunne étincelle su mon devante; fais-me 'ri rentraite.
— Voir châtrure.
renvecher, v., renverser : /' ai renvchi sai voitiure dejarbes (Il
a renversé, culbuté, etc.) N' renveucfie pas tai hottée. — Voir
tumer. — Renvechey, P. T.; renvcher, G. etR. — Vieux franc.
revei % cher.
reparer, v., s'emploie pour parer : Les haibits ri font pas V
moine, mas i's Veurparent bin.
rèparme, n., épargne, économie.
Rèp armer, v., épargner, ménager, faire des économies: V faut
rèparmerl' vin, les vingnes sont gellées (gè-lées), c'est-à-dire il
faut ménager, etc.
repassoue, n., repasseur, rémouleur, gagne-petit : L'eurpassoû
d' coutieaux, i' ast cassé sai meule. Repassoure, n., fém., lingère.
repiquer le foin, secouer le foin, le retourner avec une fourche,
quand il est sec d'un côté, pour le faire sécher de l'autre.
replant, n., plant. — Voir plant.
replat, n., s'emploie pour plateau, surface plane au sommet d'une
colline : Su Veurplat d' lai côte, c'est-à-dire sur le plateau, sur
le sommet plan de la colline. — Vieux franc, replat.
réponde, v., répondre; rallonger, raccorder, attacher un bout de
ficelle à un autre bout trop court, une pièce à un morceau d'é-
toffe, etc.: J'ai répondu lai ventrière de m'tn ch'fau qui ètot trop
coûte, ou qui ètot cassée, f faut que j'rèponde mon gilet (gi-iet)
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J
PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX 37
d* flanelle qui s'ast r'tiré, c'est-à-dire j'ai rallongé, etc.; il
faut que je rallonge, etc. S'emploie quelquefois pour vanter ou
renter,
repouser, v., reposer, poser de nouveau; prendre du repos, dor-
mir : N' dèrainge pas V mailaide, V r'pouse, c'est-à-dire il dort.
Se r'pouser, s'eurpouser, se reposer.
rkpousoi, n., reposoir. — Voir pairaidis.
rrpousot, n., endroit plan sur une petite éminence — un rebord de
fossé, par exemple — le long "d'un chemin, d'une montée, etc.,
où l'on peut s'asseoir avec une hottéeet se relever facilement en-
suite. — R'posou, G. et R.
rbpousoub, n., bâton qui sert à supporter, à soulever un peu la
hotte qu'on a sur les épaules, quand on veut se reposer sans
s'asseoir : Mets ton rpousoû desou (dzou) ton hotte et airrêle-te
ein poicho pou souffler. Se confond parfois avec le mot précédent :
rpousot. — R'posou, endroit propre à se reposer quand on porte
un fardeau, G. etR.
réprouves (ailler aux), expression qui signifie aller aux preuves,
quand on est accusé à tort d'avoir dit ou fait quelque chose, aller
demander des explications aux personnes qui ont répandu
ces faux bruits, ou desquelles l'accusateur prétend tenir ce qu'il
a avancé.
requinquer (s'), v., outre son sens français, signifie se regimber,
se rebéquer, répliquer vertement, se redresser en quelque sorte
pour mieux protester contre les paroles de quelqu'un qui fait des
reproches, donne des ordres, des conseils, etc.: Ah! ï n se la-
cherai pas mainger lai laine su ïdos, ctul-lai t ï s'eurquinque
d'aivance. V ast-ï bintôt r'quinqué ! c'est-à-dire est-il bientôt sur
la défensive ! — Voir reginguer.
résida, n., réséda.
résipére, n., érysipèle.
résous, part, pas., s'emploie comme adjectif pour résolu, déter-
miné, hardi, brave : Oh, gnirai pas l' trouver, V Préfet t gnast
pas aissez résous pou çai, c'est-à-dire pas assez résolu, hardi.
respectabe, adj., respectable. On prononce respectâbe et respec-
table. 11 en est de môme de presque tous les mots en able.
ressarré {été), être resserré, être constipé. On prononce rsarré ou
eursarré.
ressauter, v., rebondir. On dit aussi redonder.
ressueu, v., sécher: Eul soleil ressue l % chemin. S* ressuer, so
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38 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX
ressuyer, se sécher quand on est mouillé : Aillun-me ein p'cho
d* feu pou nous ressuer (rè-sué). — Ressuer (se), se sécher après
une sueur, ou après avoir été mouillé, Gros.
rétabli, v., inf. et part, pas., rétablir et rétabli. On mouille 17.
rètaimmer, v., étamer. On prononce quelquefois : Eurtaimmer.
rètaimmoue, n., étameur, chaudronnier ambulant: Vlai V rètaim-
moue ou l'eurtaimmoûe de cuillers (cu-iés), c'est-à-dire voilà réta-
meur, le chaudronnier.
rètapsôder, v., raccommoder grossièrement, rajuster, réparer du
vieux, vieux, des objets tombant de vétusté, en particulier du
linge, des vêtements en guenilles. Augmentatif péjoratif de raip*
sôder, rapsoder. — Rètapsôder, raccommoder de vieilles hardes,
Gros.
r'étb, v., être pour la seconde fois, être de nouveau : V r'asten
prinjon, c'est-à-dire il est de nouveau en prison. Se prend, le
plus souvent, en mauvaise part.
rbteurli, v., inf. et part, pas., recroqueviller, rétrécir, rider, et
recroquevillé, rétréci, ridé. S'eurteurli, se recroqueviller, se ra-
tatiner, se rider, se rétrécir. S'applique plus particulièrement
aux fruits : Nos pommes seurteurlichent. Si tu pends tes rasins
au p\aincher, i's s'eurteurliront, V grand air les r'teurlirai. On
dit d'un visage ridé qui' ast tout eurteurli, c'est-à-dire tout ra-
tatiné. — Voir rècoquiller et recrincheler.
retirer (O, v > s'emploie pour se rétrécir: Lai flanelle s'eurtire
quand an lai laive, c'est-à-dire la flanelle se rétrécit, etc.
RBTONNB, n., tour incomplet qu'on fait en labourant un champ plus
large à un bout qu'à l'autre. On fait eunne eurtonne chaque fois
qu'on retourne, c'est-à-dire qu'on revient sur ses pas, avant d'être
arrivé jusqu'au fin bout de la pièce. R'tonne, n., carte retournée
à certains jeux de cartes.
rbtonner, v., retourner. R' tonner ou eur tonner 'n' roie, retourner
une raie, prendre en labourant une raie du champ voisin pour
la mettre dans son propre champ. Absolument en r tonner, re-
tourner une ou plusieurs raies, voler du terrain. S'en r'tonner,
s'en retourner.
retrait, n., s'emploie pour ressemblance, trait de ressemblance :
/' ai des retraits de son grand-père.
heu, n., ruisseau, ruisselet (Reû).
&BUE, n., moue, grimace. Faire lai reue, faire la moue, la mine,
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX 39
bouder : /' fait 'ri reue, c f maitin, qu toutes les poules du pays
ch... d'ssus. — Voir meue, pipion, cul de poule.
reuille, n., rouiïle.
reuiller, v., mouiller, se couvrir dérouille. On dit aussi vri. Reuïl-
ler les ceux. Jo\v rouiller et rebouler.
rêvassoue, n., rêveur, rôvasseur. — Voir remue.
revas-y et revais-y (senti V), expression qu'on emploie plaisamment
quand on vent dire qu'une liqueur, un vin, un plat, etc., a bon
goût, est agréable, laisse l'envie d'y retourner, d'en reprendre :
Quast-ce qui' sent mon vin? Y n'ai pas dégoût, hein? — Non, i'
ri sent qu Veurvais-y, c'est-à-dire qu'est-ce qu'il sent mon vin?
Il n'a pas de mauvais goût, hein ? Non, au contraire, etc.
rbvenin,. v. inf., revenir. Présent du subj.: qu' j'eurvingne, que tu
r'vingnes, etc.; part. pas. r'venun. — Voir venin.
revi (de) rêvai (de). — Voir de revi, de rêvai.
rèvoil, n., réveil.
rèvoille-maitin, n. comp., réveille-matin.
rèvoiller, v., réveiller et éveiller. On dit d'un enfant: /' ast bin
rèvoillé (rèvoi-ié), pour il est bien éveillé. S'rèvoiller, s'éveiller,
se réveiller.
revoinge, n., revanche : Baille-me mai r'voinge, c'est-à-dire
donne-moi ma revanche.
revoinger, v., revancher ; défendre : An bait ton frère, vai don
l'eurvoinger (On bat ton frère, va donc le défendre). Ser'voinger
ou mieux s'eurvoinger, se défendre. Mas, t'ées aissezfort, pouliant,
rvoinge-te, c'est-à-dire défends-toi.
rêvoue, n. , rêveur, radoteur ; grognon, qui maugrée, rognone
souvent à tort ou à raison.
revoyure (ai lai) et revoyotte (ai lai), se disent parfois, en plai-
santant, pour à revoir.
rhaibiller, v., rhabiller; acheter, vêtir des habits neufs; faire
cadeau d'un habillement : J' me rhaibillerai, f s'rai rhaibillè
ai lai fête ("J'aurai, je m'achèterai, on m'achètera des habits
neufs à la fête). Son parrain Vai rkaibillé pou sai pronmére com-
munnion, c'est-à-dire son parrain lui a fait cadeau d'un habille-
ment, etc.
rhaibilloue, n., rhabilleur : Ein rhaibilloûe d' meûlin.
rheumme, n., rhume. On prononce run-me.
rheummblot et rhumelot, petit rhume; absolument le râle du
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40 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VA IX
mourant : /' ast ai l'aigonîn, ï ai V rheum.neht (run-melot). —
Crâlot, Gros.
riban, n., ruban. Riban de quoue, ruban de queue, long bout de
chemin visible se déroulant devant le voyageur: Que riban de
quoue enco f c'est-à-dire quel long chemin à parcourir encore !
ribandelle, n., ribambelle.
ricainner, v., ricaner, rire sottement, à tout propos: Qui te ricainne
(ricain-ne) pou rin, comme çai, vai ! On dit aussi ricaisser et
nicaisser.
ricainnoue, n., celui qui ricane, qui rit à tout propos, sottement.
(Ricain-noûe) — Voir ricaissier.
ricaisser, v., ricaner, rire niaisement. — Voir nicaisser.
ricaissier et ricaissoue, n., celui qui ricaisse ou nicaisse. On dit
aussi ricainnoue.
ricandrillb, n., racaille, traîneur de route, truand ; homme de
peu de valeur... On dit : Ç 'ast des ricandrilles, çast d % lai ri-
candrille, comme on dit : ç'ast des trainoûes, ou çast d' lai ra-
caille.
ridé et ridié, n., rideau avec une nuance dépréciative le plus sou-
vent.
ridieau, n., rideau.
ridielle, n. ridelle. Charcher charrotte dèridiellée, chercher char-
rette sans ridelle, chercher chape-chute, une occasion de s'amu-
ser, un désordre, etc. On dit dans un sens plus restreint : Char-
cher souUor faire, soulier à refaire.
rigodon, n., s'emploie pour régal, festin, repas copieux et gai, ri-
bote : Faire ein rigodon.
rillon (guè), n. corap., gué du ruisseau, gué formé dans le
village par un ruisseau. — Vieux franc, riller, couler, ruijot et
ruiot, ruisseau d'une rue.
rin et ren (ran) t adv. et pron. ind., rien : Çai n vaut rin (Ça ne
vaut rien). Ç' riast ran teut nette. ï ri ai rin ai faire. — Ré>
rien, chose, P. T.; ré, rien, G. et R.
rincée, n., averse reçue, essuyée: f* sont patis c* maitin et ïs
ont zeûs 'ri bonne rincée su V dos. Au ùg., s'emploie comme
orage, averse, pour réprimande, leçon. Rincée ou mieux rainsée,
volée, raclée, décharge de coups. — Vieux franc, rainser, battre
à coups de bâton.
rioue, n. rieur.
jtiPOPETTE, n., gens ou choses de peu de valeur, racaille, rebut:
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX 41
Ces gm$4ai, çast £ lai ripopeUe, c'est-à-dire des gens de rien,
de la racaille. On dit dans le môme sens : Çast <T lai fripouille,
d' lai p'tite bière, i* lai peur t intaille, d' lai raivaud'rie, du
cVni, etc. — Ripopée, gens de peu de valeur, Thév. — De ri-
popée?
riqui et riquiqui, n., petit, chétif, de taille exiguë. S'applique aux
personnes, aux animaux et quelquefois aux choses. Appliqué
aux personnes, il ajoute souvent à l'idée d'exiguité une idée de
vivacité, de gentillesse, de bizarrerie, de vanité plaisante, etc.,
et peut se prendre en bonne part : Comme ï s'eurdreusse eue petit
riqui ou riquiqui-lai, comme % fait l'malin I et ç'ast gros comme
pou deux \iards de beurre I c'est-à-dire comme il se redresse
ce nabot-là, etc. Riquiqui, ginguet, vin de mauvais crû, de
mauvaise année, vin sûr, aigrelet.
risibb, adj., risible. Se prononce rîsibe et risible.
risque (gnai pas d'), s'emploie ironiquement pour il n'y a pas à
craindre, dans les phrases suivantes et les semblables : Ah, gnai
pas d* risque qui 1 traivoille, quand ï fait si chaud qu çai !
Gnai pas d' risque qu f i' raimasse quiqucheuse en s'en aillant
aux vingnes! c'est-à-dire il n'y a pas à craindre qu'il travaille,
il se gardera bien de travailler, etc.; il n'y a pas à craindre qu'il
ramasse quelque chose, etc. Dans cette dernière phrase on veut
faire entendre qu'il s'en va trop tard, et que les objets perdus
sont ramassés depuis longtemps.
risquer, v., s'emploie par antiphrase, avec un sens menaçant,
ironique, dans les expressions suivantes : Ah, tu ne risques rin,
ou d* rin, vai, euje te raittraiperai bin sans courre ! (Ah, tu
risques gros, tu peux préparer tes côtes, etc.) Tu ne risques rin,
j'te frai airrainger pa ïmaîte d'école, c'est-à-dire tu n'as qu'à
te bien tenir, gare à toi, etc.
rive, n., s'emploie pour côté; limite d'un champ, d'une propriété,
dans le sens de la longueur, par opposition à bout : Les bouts et
les rives de mon champ. F ai des bônes ai lai rive d'en bas, c'est-
à-dire du côté du bas. Vlai V bout et lai rivet c'est ainsi,
voilà mon dernier mot ! M'ner sai rive, mener sa rive, tenir
son bout, bien travailler, ne pas rester en arrière au chantier.
rivérb, n., rivière.
rivot, n. , rivet.
ro, n., roi : T s* laive les paittes toutes les fois que Yro passe, c'est-
à-dire il ne se lave jamais les pieds.
t, u 4
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42 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX
robottb, n. dim., petite robe, robe d'enfant. On dit aussi bobot.
rocher, y., crépir, enduire un mur de plâtre, ragréer, badigeonner,
crotter, souiller de boue : Euje venons de faire rocfier note mu-
veille, et vlai qu tu lai déroches, rai roche sai cueulotte jus-
qu'aux gênons — Voir, dans ce dernier sens, barder et rem-
barder.
rochot, n., petit cotillon mince qui traîne, qui bat les jambes; co-
tillon usé, râpé, déteint : T n'aivôs mins quein méchant rochot,
et j'ètos gellée, c'est-à-dire je n'avais mis qu'un mince jupon,
etc. — De rochet ? ou de rocher, qui se roche, se crotte facile-
ment?
roghoue, n., ouvrier qui roche, plâtrier, plafonneur.
rochurb, n., enduit de plâtre, de mortier, badigeon : T fait cheur
lai rochure, ï déroche. — Voir rocher.
rode, adj., raide. Se prononce rodieu. De même rodi (en mouillant
le d 9 rodAi), raidir, dérodi, etc.
RODiNGOTTB, n., redingote, paletot en général. Avec ironie, mépris,
roding\aude ou rodinglôde: Pace qu'ï met 'rigrant' rodinguiaude,
ï s' crot bin (T quoi.
rôdoub, n., rôdeur. On mouille souvent le d: rôdioue.
rôge, n., roise, rouissoir, routoir, fossé, mare où l'on fait rouir le
chanvre. — Roise, eau morte où le chanvre se rouit, Gros.;
roise, id., Thév. — Vieux franc, roise, rouissoir.
roie et rôe, n., raie ; spécialement raie de terre : An mai r' tonné
d'où trois roies dans mon champ de... c'est-à-dire le voisin m'a
pris deux ou trois raies, etc. — Voir retonner. — Vieux franc.
roie.
rôle, n., instrument pour tirer ou ranger la braise du four, espèce
de racloir muni d'un long manche. Ne pas confondre le rôle
avec le feurgonqm sert à exciter le feu, ni avec le ragot : Prends
V rôle, eurtire lai brége, et peâs, bailôe ou bailoille, les cendres
d'aivev l' ragot. — Vieux franc, roable, rouable.
rompurb, n., hernie : T ai 'ri rompure qui V fait bin soujfri. On
dit plus souvent : ï ast rompu, il est rompu. — Du verbe rompe,
rompre.
roncher, n., rancher, montant placé de chaque côté et à chaque
bout de la charrette, pour maintenir les ridelles, ou pour les
suppléer. — Vieux franc, ranche, ranchier.
ronfloue, n. ronfleur, qui ronfle d'habitude : T riaimme pas les
ronf\oûs (ronfioû), surteut quand ïs ronflent si fort.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX 43
rongeon, n., trognon de pomme ou de poire; reste d'un fruit, d'un
morceau de pain, etc., rongé: T m'ai j'tié ein rongeon <f
pomme au nez (Il m'a jeté un trognon, etc). Jen' veux point
<f tes rongeons, c'est-à-dire de tes restes, du pain que tu as
rongé, etc.
rongnoler, v., rognonner, grommeler.— Voir botteler.
roqubladre, n., bêtement long, redingote ou paletot, avec dédain.
On dit aussi rodinglôde. — Voir rodingotte.
Roquer (ou rauquer ?), v., rendre au frottement un son dur et sec.
On dit que les dents roquent, qu'un os déboîté roque, etc. : T ai
p't-èie bin quiqucheuse de dèmins ; çai roque quand an li r'mue
ï braîs, c'est-à-dire il a peut-être bien quelque chose de
démis, etc.
rossée, n. , fessée, frottée, correction. — Voir dégelée, pile, etc. —
De rosser.
rôt, n., rôti de porc exclusivement.
Mementomo qu' t'aies maingé du rôt
Et qu* tu n'en maingerales pas de sitiôt :
Parodie du Mémento homo du jour des Cendres.
rôte, n., espèce de hart pour lier les fagots, lien; brin de bois
vert en général, surgeon : Aies-tu des rôtes pou loïer tes sar-
ments f S'ï n (écoute pas, pends V bonne rôte (ou rorieu en
mouillant le*) et f...Âi 'n' dégelée. Le hart qui sert à lier les
gerbes se nomme plus particulièrement loi en (lo-iain). La cime
de la rôte est tordue en une espèce de boucle dans laquelle on
fait passer le gros bout du brin ; au contraire, c'est le gros
bout du loien qui se tord autour de la cime. — Vieux français
reorte, roertre, roorte, rorte, roollon, rooite, etc.
rôtie, n., tartine : Eunne rôtie de beurre ; eunne rôtie de confi-
ture.
rotier, n., gril : Prends-l' rotier et mets ton beudin dessus, c'est-à-
dire prends le gril et mets ton boudin dessus. — Vieux français
roteil, rotiaus et rostier.
roti-pain, n. comp., grille-pain, ustensile de cuisine pour faire
griller du pain.
roubar, n., vaurien, mauvais sujet, drôle (?)
rouelle, n., roue de l'avant-train de la charrue. On dit plutôt
hirson.
bougeotte, n., espèce de champignon comestible d'un rouge vio-
lacé (?).
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44 PATOIS DE LA FORÊT DE C! A lit VAUX
bougie et rougée, n., rougeole, maladie exhanthématique.
rouichon, n., échantillon de chanvre. — Voir essayon.
rouiller et REuiLLBR les œux, faire les gros yeux pour inspirer
de la crainte, rouler les yeux. — Voir rebouler.
roulant (chadon, chadion et chaidion), n., panicaut, eryngium
campestre.
roule, n., espèce de long rouleau de foin ramassé au milieu du
champ pour être chargé sur la voiture. On met ainsi le foin en
roule, quand il est bien sec et qu'on peut se dispenser de le mettre
en tas.
roule (de), loc. adv., de façon à pouvoir rouler. Se dit de la ma-
nière de placer les tonneaux parallèlement à l'axe, sur les
douves, debout, par opposition à de bout, sur le fond.
roulée, n., œuf teint, œuf de Pâques. Bailler à un enfant ses rou-
lées, lui donner des œufs de Pâques : Euje te baillerais tes roulées
ai Pâques, mon gaichenot. Le double sens de ce mot, qui
signifie aussi volée, décharge de coups, donne lieu à de nombreux
calem bourgs.
roulé-gras, expression qui signifie très gras, fin gras. — Gras comme
une boule de graisse ? Gras à rouler ?
roulot (pois), n. comp., pois, petit pois; sans doute pour distin-
guer ce légume du haricot qu'on nomme aussi pois, et qui ne
roule pas? Ceux qui raffinent disent pois rond.
roulotte, n., disque de bois scié plus ou moins perpendiculaire-
ment à l'axe, au bout d'un arbre non équarri, d'une branche
ronde, etc., que les enfants de la campagne font rouler pour
s'amuser ; bille, boule, sphère, en général tout ce qui peut rouler.
roupie, n., s'emploie pour désigner la caroncule du dindon. On dit
aussi naque.
roupioux, n., roupieux, qui a souvent la roupie au nez.
rousée, n., rosée. De même airrousèr, arroser, airrousaige, arro-
sage.
rousse et rousset, adj. n., roux, rousseau, rouge, en parlant des
personnes et des animaux : Oh, V peut rousse t c'est-à-dire oh, le
vilain roux 1
routelot, n. dimin., roitelet, petit oiseau.
ItoYOR, h., fossé, saignée, petit canal d'irrigation, rigole; sillon,
raie : Griai pus pas V gueutte d' Veau (d' ieau) dans les royons
(ro'ions) des prés. ïai planté mes pois en royons. — De rayon,
rayonner?
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX 45
rubrique, n., s'emploie pour réplique, tour, stratagème, ruse,
excuse : Ah, ï ai de bonnes rubriques, eul mâtin I (Ah, il a de
bonnes répliques, etc.). En v'iai V rubrique t c'est-à-dire en
voilà une ruse, une excuse !
ruche, n., petite averse subite et qui ne dure guère : Tons r'çu
V bonne ruche de p\eue, ou simplement, V bonne ruche.
Ceux qui raffinent prononcent rouche et rouge. — Yoitaicueullée.
— On dit aussi passade.
ruchée, n., averse un peu plus prolongée que la ruche.
ruellotte, n. dim. de ruelle, petite ruelle.
ruge, n., ruse.
rugé, adj. et n., rusé.
rungne, n., ruine.
rungnb, part, pas., ruiné.
rungnrr(s'), v., se ruiner.
saclot, n., sarcloir, instrument dont on se sert pour sarcler : J'ai
raigugé mon sâc\ot.
sacler, v., sarcler : J'ai sâc\é (sâquié) lai moitié d' mon seillon.
sacloue, n., sarcleur. (On mouille l).
saga, n., souillon, femme malpropre; femme toujours pressée, qui
ne prend pas le temps de soigner son ménage. Voir magâ. Peut-
être ces deux mots n'en font-ils qu'un, et saga n'est-il qu'une
prononciation défectueuse de magâ.
sai, n., sac. Eulle en ai pleun son sat, elle en a plein son sac, c'est-
à-dire elle est enceinte.
sai, adj. pos., sa.
saibbait, n., sabbat; bruit, tapage, vacarme. En parlant d'un
enfant bruyant, remuant, difficile à garder, une femme dira : /'
m' fait V saibbait.
saibot, n., sabot. Casser son saibot, en parlant d'une fille, faire un
faux pas, devenir enceinte.
saiccaiger, v., saccager, briser, mettre en pièces ; endommager,
fouler aux pieds, en parlant de récoltes, de terres ensemencées,
de plantations.
saichenot, n. dim. de sac, petit sac, sachelet, sachet.
saicquée, n., sachée, contenu d'un sac, un plein sac.
saide, adj., doux, moelleux, d'une saveur agréable dont le type
est la saveur de la noisette. Ne s'ap^licjue qu'aux choses cornes-
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46 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX
tibles : Çast bon, ç'ast saide, ç'ast saide comme de lai noujotte.
— De l'ancien adjectif sade, agréable, charmant?
sailé, n., porc salé. Sailé, part. pas. de sailer (saler), salé.
sailemeure (ou sailmeure?), n., saumure. — Voir meûrotte.
sailer, v., saler. Se sailer, à certains jeux d'enfants se neutraliser
en quelque sorte momentanément, se mettre hors de prise, ne
plus faire partie des joueurs, afin de replacer le but, par exemple,
de satisfaire un besoin, etc.
sailoue, n., saloir, vase, espèce de tonneau où Ton sale le porc.
saingkh et chainger, v., changer, échanger : J'ai chaingé mon
champ pou le sien. ï chainge son cKfau bane pou ein aiveug\e,
c'est-à-dire son cheval borgne contre un aveugle.
sainglb, n., sangle; ceinture, écharpe, avec mépris : Eul maire
i' ai mins sai saingle, c'est-à-dire le maire a ceint son écharpe.
saingler, v., sangler, ceindre: Te v'iai saingU (sainguié), c'est-à-
dire te voilà sanglé, ceint. Jeu de mots avec saing\ier (sanglier),
qui se prononce de la même manière. On prononce de même
aussi cingler, cingler.
sainglier, n., sanglier : Eunne pieau d' saingUer (Une peau de
sanglier). Se prononce absolument comme saingXer (sainguier),
sangler, et comme cing\er {cinguier) t cingler, ce qui donne lieu
à des jeux de mots plus ou moins grossiers. — Vieux français
sengler.
sainglot, n., sanglot. Pousser son darré sainght (sainguiot), expi-
rer. De même sainghter, sangloter.
saipingne, n., sapine, seau plus large et moins haut que le seau
ordinaire, servant à soutirer le vin. — Sapine, seau de sapin,
Gros.; sapine, baquet à deux anses servant à soutirer le vin, G.
etR.
saivaitb, n., savate; avec mépris, soulier; babouche, pantoufle,
etc. Jouer ai lai saivaite, jouer à une sorte de jeu qui se nomme
ailleurs jeu du furet. S'emploie au fig. comme en français.
saivaot, n. et adj., savant.
saivoir et saivoi, v., savoir. Fut. euje sairai; cond. prés, euje sai-
rôs; prés, du subj. quef saive, etc. En saivoir de belle, ne pas
savoir du tout ce dont il s'agit, ce sur quoi on est questionné, et
de plus, n'avoir aucune raison pour le savoir : J'en sais de belle t
c'est-à-dire que me demandez-vous? Où diable aurais-je appris
cela ? Comment voulez-vous que je sache ? etc. Réponse imper-
tinente le plus souvent.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CL AIR VAUX 47
saligôdron, n. 9 saligaud, homme sale sur soi ; qui salit tout ce
qu'il touche ; qui travaille salement. — Voir salpétrer. — De
salir et de gôdron, goudron ?
saur et sailir, v., en parlant d'un champ, produire beaucoup de
mauvaises herbes, de plantes adventices : Çast ein terrain qui
salit toujous p\eun (C'est une terre qui produit toujours beau-
coup de mauvaises herbes). Ces champs-lai salichent en diâbe.
salpétrer, n., salpêtrier; homme sale sur soi, sale en travaillant,
qui fait malproprement, qui gâche sa besogne; au 6g., qui parle
grossièrement. On dit dans le même sens saligôdron.
sandale, n., s'emploie pour savate, vieux soulier; pantoufle,
chaussure en général, avec mépris.
sangonnant, adj. sanglant, ensanglanté, dégouttant de sang :
r ai raippouté ein Méve, son carnier % ast tout sangonnant.
sangsuce, n., sangsue.
sanve, sénevé sauvage, sinapis arvensis.
sanvin (ou sent vin?), n., cornouiller sanguin, cornus sanguinea.
Aivoi des chantiers d' sanvin — espèce de jeu de mot sur sanvin
(sans vin) — n'avoir plus de vin dans sa cave, sur les chantiers
de sa cave.
saquet, n., petite secousse. Y ailler par saquets, pousser par sa-
quets 9 pousser irrégulièrement, par petites secousses, etc.
sarchbr, v. — Voir charcher. — Vieux franc, sercher.
sargot et s argot, n., secousse violente et brusque, cahot. S'em-
ploie particulièrement quand il s'agit des secousses d'une voiture.
On dit plus généralement hoquelot.
sarpe, n., serpe. Par antiphrase, drot comme eunne sarpe, c'est-à-
dire courbe, tortu. On dit de même drot comme eunne faucille,
drot comme mon braîs quand euf me mouche, etc.
sarpent, n., serpent, couleuvre, etc., ophidien en général.
sarpottb, n. dim., petite serpe, serpette. — Sarpotte, serpotte,
serpe, P. T.; sarpotte, serpette, G. et R.
sarre, n., serre ; spécialement aclion de serrer, de presser les rai-
sins au pressoir : I's baillent lai pronmére sarre, c'est-à-dire
ils pressent les raisins pour la première fois. Baillei* lai darrére
sarre, se dit en plaisantant pour manger, prendre part au festin
qui suit le pressurage.
sarrer, v., serrer. De même les dérivés, dessamr, desserrer,
rsarrer, resserrer, rsarrement, etc.
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48 PATOIS DE LA FOBÊT DE CL AIE VAUX
sassot, n. dim. de sas, petit sas.
saupbe, prép., sauf, excepté.
sausse (ou sauge ?), n., saule, salix.
Tonne, tonne, sausse l
Su lai côte de Bar-sur-Aube,
J'ai rencontré 'n' beurbis fouirouse, etc.
(Tourne, tourne, saule ! etc.) Espèce de grossier refrain que
chantonnaient les enfants de nos pays en même temps qu'ils
frappaient avec le manche de leur couteau, afin de séparer l'é-
corce, le bout de rameau de saule dont ils voulaient faire un sif-
flet. — Sauce, saule, Gros.; sauce, saule, P. T.
sauterelle, n,, cep de vigne recouché; espèce de petit provin fait
d'un seul cep renfoncé en terre.
sautoue, n., sauteur.
sautret (ou sauteret, sautrait?), n., œuf de la mouche à vers ou
le ver à peine éclos. — De sauter, qui saute?
sauvagin, n., sauvageon ; jeune pied d'arbre sauvage destiné à re-
cevoir une greffe. — Vieux franc, sauvagin, sauvage.
sauve, interj., sauve-toi, fuis, dérange-toi, gare: Aillons, sauve!
ouf vas t' écraser. Sauve ! vlai tai mère qui vient d'aiveu ein
rain.
scéier, v., scier : An vai scéier (sé-ie) l'abre.
sgéiure, n., sciure (Sé-iuré).
scellé, part, pas., écorché par la marche, la chaleur, etc., à l'in-
térieur des cuisses. S'applique plus spécialement aux petits en-
fants. — Voir aicueu. — Scellé, se dit des cuisses des enfants
entamées dans le maillot, Gros.
SCUEILLER, SCUEILLI, et ESCUEILLER, ESCUEILLI, 6tC., V., SOCOUer,
agiter : Scueille ow. escueille eul blocher (Secoue le prunier) Eus-
cueille tai blaude, ï y ai du feu d'aiprées. Ah, f te scueillerai,
vai! c'est-à-dire je te secouerai, je te corrigerai, va! — On dit
de môme escouer ou euscouer. — Sequeiller, secouer vivement,
rincer, Thév.
se, pro. pers., soi. Teut, tout ou tôt pa se, seul : S'en ailler teut
pa se (S'en aller seul, tout seul). On dit de même : T s'en vai
tôt pa lu, il s'en va tout par lui, c'est-à-dire seul, tout seul. —
Voirjwi.
se', n., sel : Mets-li ein grain d f se su lai quoue. Se £ bique et sel
de bique, cristaux de carbonate de chaux qu'on trouve dans les
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX 49
champs, soit isolés, en forme de petites boules, soit enchâssés
dans une autre pierre. — Sey, L. C , P. T.; se, G. et R.
séiance, n., séance. Un exemple des mombreux cas d'iotacisme,
dont nous parlons, page 21 de l'introduction.
seillon, n., sillon, aire, division, partie d'un champ comprise entre
deux raies creuses.
sellotte, n. dira., petite selle, sellette; escabeau, petit banc à trois
pieds : Aicheute-te su tai sellotte, c'est-à-dire asseois-toi, etc. Se
confond avec selle.
semoue, n., semoir, espèce de grand tablier où le semeur met la
graine à semer; semeur, celui qui sème: Mon s' moue ï ast
p'ché. Tu seummes {sun-me) tout par p\alces : tu fais ein bieau
s' moue, j* m'en moque t c'est-à-dire tu sèmes par tas, inégalement.
senterot, n. dim., petit sentier, — Vieux franc, senteret.
seré, n., séran, sérançoir, peigne à peigner le chanvre. — Vieux
franc, serens.
sbro, n., soleil : Eul s'ro ï ast mailaide aujd'heu (Le soleil est ma-
lade aujourd'hui). Ce mot n'est guère employé qu'avec une
nuance de plaisanterie. — S'ié, soulet, soleil, P. T.; sole, soleil,
6. et R.
serôs, sbrot, sourôs, sourot, etc., cond. prés, du verbe saivoir,
savoir; s'emploie pour le présent de l'indicatif ou le conditionnel
présent du verbe pouvoir : T n 9 s'rôs faire çai, non je n' sourôs V
faire; je ri s'rains vous payer, etc., c'est-à-dire je ne peux ou
je ne pourrais faire cela ; nous ne pourrions, etc.
sbtier (ou seutier?), n., chacun des deux associés formant
ensemble une charrue: Tai ein méchant seutier qui nast jainmas
prêt (J'ai un mauvais associé qui n'est jamais prêt). Ailler ai
seutier, être associé, s'associer avec un autre laboureur pour
former ainsi à deux un attelage de charrue, quand on n'est pas
organisé de manière à pouvoir faire sa culture seul, particuliè-
rement quand on n'a qu'un cheval et peu de terres. On laboure
alors un jour pour l'un, un jour pour l'autre : Euje vons ai
seutier d'aiveu mon onde. Dans quelques villages sosson. — As-
sentie, asseutier, associé, associer, Gros. — Vieux franc, soçon
et sosson, compagnon, camarade, ami. — De sequor?
seu, n., seuil : Eul seu d' lai pote, c'est-à-dire le seuil de la
porte.
seu et sou, n. — Voir aissou. — Vieux franc, seu et sou, étable à
pourceaux.
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50 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX
sbucer, v., sucsr. De môme les dérivés r'seûcer, sucer de nouveau,
seûçot, etc.
sbuçon, n., suçon. Seûçon, n. , espèce de mouchoir de poche que quel-
ques petits enfants sucent avant de s'endormir, et qu'on nomme
aussi non-non et nin-nin, mouchoir sale ; enfant qui suce son
doigt ou son mouchoir : Mets ton seuçon dans tai poche. Grand
seûçon t tu seûceraies don jousquai temps qu'an f mairie ? On dit
aussi seûçot.
seuçot, n., enfant qui suce son doigt ou son mouchoir; labiées dont
les enfants sucent les fleurs pour en tirer le miel, particulière-
ment le lamium album et la salviapratensis. — Voir seûçon, ces
deux mots se confondant souvent dans l'usage.
seugue, v., suivre: Je n' s'rôs Vseugue (Je ne saurais le suivre).
Présent de l'indicatif, euf sens ; futur, evj' seuguerai ; présent
du subjonctif, que]' seugue; participe présent, seuguant; parti-
cipe passé, seugu. — Seug, suis, L. C; je te seug, je te suis,
P. T.; seugre, suivre, 6. et R. — Vieux franc, segre, suivre.
seule, n., solive, soliveau, poutre : Les seules du plaincher. V y
ai pleun du lard de pendu d'aiprées les seules. Ct f âbre-lai
pourrot fournin 'ri petite seule. — Vieux franc, solle, seule,
solive.
sbunailler, v., fréq. de seûner, sonner souvent, d'une façon inter-
rompue, irrégulière ; sonner de manière à ennuyer, à fatiguer
les gens; sonner mal.
seuner, v., sonner: F s ont seûné les cloches (quioches) toute lai
nettt. — Snay, L. C. ; Senay, sonner, P. T. — Vieux français
suner.
seunoue et sonnoub, n., sonneur, celui qui sonne les cloches. —
Seneux, sonneur, L. C, P. T.
sieau, n., seau, vaisseau à puiser de l'eau. Sieau ou scieau, n ,
espèce de petit bondon.
sieur, suieur, n., sueur.
signelle (ou cignelle ?), n., senelle, spécialement le petit fruit de
l'aubépine : Euri mainge pas des cignelles, çai (frot v*nin des
poux, c'est-à-dire cela te ferait venir des poux.
sineau (ou sinot?), n , étage fait de planches, de claies, de perches,
etc., sous les combles, pour mettre le foin, grenier à foin. — Sinot,
perches jetées sur des étables où l'on place du foin, Gros. —
Vieux franc sanail, endroit où l'on met le foin; synau,
sinault, dessus d'une bergerie ; san, foin ; sanic, menu foin.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX 51
sïnbautîs (ou sinotîs?), n., espèce de sineau, grenier à foin plus
rustique encore, plus provisoire que le sineau.
singne, n., signe : Fais4% vor sinpie. Fais F singne de lai croix.
singner, v., signer : Griast pas saivant, ï n* sait pas seulement
singner son nom. De môme singnature, singnalement, etc.
singneulle et siNGNOLLB, n., espèce de dévidoir, manivelle, spécia-
lement la manivelle du treuil qui sert pour tirer l'eau d'un puits.
— Vieux franc, signolle, soignolle.
si tellement, loc. adv., s'emploie par pléonasme pour tellement,
tant : T ai si tellement p\u que lai tarre eulle en ast toute
détrempée, c'est-à-dire il a plu tellement, il a tant plu, etc.
sitiôt, adv., sitôt, aussitôt. De même aussitiôt, aussitôt.
so, adj., sec. Au fém., soche, sèche.
socheron et ghogheron, n., pré sec où il pousse peu d'herbe.
sochi, v., sécher. — Voir chochi.
socle, n., cercle. — Voir code.
soclier, n., cerclier. — Voir çoc\ier.
soi et so, n., soif: J'ai soi, ou/at so (J'ai soif). — Soi, soif, L.
C, P. T., G. et R.
soie ou soye, n., cheville de fer qui retenait les limons d'une char-
rette à l'essieu. Ces chevilles sont aujourd'hui remplacées par
des chanti gnôles qu'on nomme èchantignoles. — Vieux français
soyée, soye, cheville.
soiller, n., pierre d'évier : Mets ton aissiette sale su V soiller
(so-ié). On dit aussi laivier. — Vieux franc, seiller, lieu où
l'on met les seilles ou seaux ; yauve, eau, yauver, arroser.
soingnoux, adj., soigneux.
soleil couché (d' Vaute coûté d % ), expression qui signifie loin,
bien loin : r ast au diâbe, Un lun, d Vaute coûté d' soleil couché,
c'est-à-dire au-delà de l'endroit où le soleil se couche!
sombre, n., terre qu'on laisse reposer, jachère : Les beurbis vont pa
les sombres. Lâcher ein champ en sombre, laisser un champ en
jachère. — Sombre, n., premier labour donné aux terres en
repos : An vai c'mencer V sombre, c'est-à-dire, le labour des
terres en repos, en jachères. Le second labour se nomme recas.
— Sombre, terre en repos, premier labour, Gros. — Voir som-
brer.
sombrer, v., donner le premier labour de l'année aux sombres, aux
jachères ; donner le premier labour aux vignes. — Voir recasser
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52 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX
et recouler. — Sombrer, donner le premier labour de printemps,
après une récolte d'orge ou de sarrazin, Tb.
somme, n., s'emploie pour sommeil : Aivoi somme, c'est-à-dire
avoir sommeil, envie de dormir.
sonnot, n., son, écorce des graines de céréales moulues : V y ai du
sonnot pleun note pain Eul méchant sonnot t An dirot du sonnot
d'orge. — Sonà, son de farine, Gros.
son, n., soir : /' crie du maitin au sor, c'est-à-dire il pleure du ma-
tin au soir.
sosson (ou soçon?, n. f associé de charrue. — Voir setier.
son, v., inf. et part, pas., sortir et sorti. Soti d' faire, venir de
faire: Mes courvées? j' sors de les faire, c'est-à-dire je les ai
faites il n'y a pas longtemps, je viens de les faire. On mouille
souvent le t : sot-li. — Soyti. sortir, P. T.
sotie, n., sortie : Ç'astmai pronmére sotie aufd'heu.
sottige et sottise, n., s'emploie le plus souvent pour injure : V rn
dit des sottiges (11 me dit des grossièretés, des injures). C'est
dire eunne sottise à quelqu'un que de l'appeler voleur, ou imbé-
cile, par exemple.
sottisioue et sottisoue, n., diseur de sottises, d'injures, homme
grossier, mal embouché.
sou et seu, n., étable à porc. — Vieux français sou. — Voir
aissou.
soublbh, v., siffler : /' souble (soubieu) dans sai c\é (quié), c'est-
à-dire il siffle dans, avec sa clef. — Vieux franc, sibler et subler.
sooblot, n., sifflet : JTai fait ein soub\ot (soubiot) d'aiveu d 9 lai
sausse (voir sausse). Coutieau ai soubiot, petit couteau d'enfant à
manche de bois formant sifflet, eustache. — Vieux franc, siblet
et subie t.
soubre-coup, n., comp., contre-coup : Ç'ast le soubre-coup qui mai
fait mau, c'est-à-dire c'est le contre-coup, etc.
soubriquet, n., sobriquet. On dit aussi nom, dans le même sens :
/' m dit des noms, c'est-à-dire il me dit des surnoms, dev
sobriquets.
souchon, n., partie d'un animal de boucherie, bœuf ou vache, com-
prenant les muscles internes de la cuisse.
souchotte et chouc hotte, n. dim., petite souche, petit tronc ; spé-
cialement le tronc et la racine de la vigne, même le cep entier :
Gnai pus d' feuilles d'aiprées les souchottes. Toutes les sou-
ckottessont motes. — Voir dans ce dernier sens cop et billon.
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■--<••■ ■'■■- — -'-M
PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAtJI 53
souci, n. sourcil. Se prononce absolument comme souci, inquié- >^
tude. ' . J'î'
soucier {ri pas s), s'emploie pour : ne pas consentir volontiers,
n'être pas disposé à. . . Viens-tu d'aiveu moi ai lai foire ? — Je
ri m'en soucie pas, c'est-à-dire cela ne me plaît guère, je ne suis guère
disposé, etc. Ce n'est point un refus formel.
soude, adj., fém. de sourd, sourde. Ce mot, comme la plupart
des mots où se trouve la syllabe ou, a trois prononciations diffé-
rentes, selon les villages: soude, seude et sodé. De plus le d se
mouille quelquefois.
soudé, n. adj., qui est très sourd, sourd comme un pot : Tu ri en-
tends don pus rin, soudé ? Se prend le plus souvent en assez
mauvaise part.
soue, n., petit trou creusé en terre pour servir au jeu de billes *t s
au jeu de boule au bâton.
souffler (ri pas), ne rien dire, se taire : Euri souffle pas t — Voir
brancher, grouiller, etc.
soufflot, n., soufflet : Prends V souffbt (soufjlot) et souffle eul feu
(souffieulfeu). Soufflet, coup, se dit c\aque.
souhaite (je vous en), s'emploie pour joliment, bien loin de là, ah
bien oui ! etc.: Aies-tu gaingné ai lai loterie ? — T vous en sou-
haite I c'est-à-dire j'ai joliment gagné, c'est bien à moi que ces
choses-là arrivent ! etc.
souhaiter (t" ri s* rot pas aï), s'emploie pour : il n'est pas possible,
et, si c'était, gare à toi !... Momman, je ri seus pas zeû ai
V école auj'd'heu. — Ah ! t ri s rot pas ai souhaiter t c'est-à-dire
tu plaisantes, j'espère, mais si tu disais vrai, gare! Il ne
serait pas à souhaiter pour toi que tu aies fait cela, etc.
soulaire, n., vent du midi, ou plutôt du sud-ouest :
Soulaire
Met lai pleue en l'air ;
Et drot vent
Lai répand; s
c'est-à-dire et droit vent (le vent d'ouest) la répand, la fait tomber.
— Soulers, vent du sud, Gros.; soulaire, vent d'Orient, P. T. ;
solaire ou soulaire, vent de l'est ou du sud-est, G. et R.
soûlant, n., s'emploie pour soulard, ivrogne, qui est saoul, qui a
l'habitude de se saouler.
soulever, v., s'emploie pour enlever, voler: Taivôs lâché mai
pioche ai mon odon, et an m' l'ai soulevée.
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54 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX
soulier du bon Dieu, n., ancolie vulgaire. — Souléro, ancolie, G.
et R. — Ces noms sont dus, sans doute, à la ressemblance des
pétales de cette Oeur avec un petit soulier.
soulior faire (ou soulio r'faire?), imitation du cri des savetiers,
contraction et prononciation défectueuse de soulier à refaire.
Charcher sou-ior faire. — Voir ridielle.
soupe, seupe, sope (naivoi pas maingé aissez <f), n'avoir pas
mangé assez de soupe, s'emploie pour n'être pas assez grand,
assez âgé, assez fort, etc.: Ta, chaisser ?... ta, t'mairier ?... ta,
m'empoîcher d! passer ?... Ah, tu n aies pas enco maingé aissez
d! seupe !
soupe en vin, n., orchis à fleur violacée, Yorchis militaris et l'or-
chis variegata, croyons-nous.
soupe, n., s'emploie pour désigner l'extrémité postérieure du fer
de la charrue, la partie d'arrière où se trouvent fixés les
manches. — De sous pied ?
sourcer, v., sourdre, jaillir : Veau sourçot d' lai mureille, c'est-à-
dire l'eau sourdait, etc.
sourcîs, n., endroit mouvant d'un terrain d'où l'eau suinte plutôt
qu'elle ne sourd : Ces champs-lai i's sont bin mouvants, ï y ai
des sourds tout pa teut.
sourdingne, n., sourdine. Ai lai sourdingne, à la sourdine.
sourdité, n., surdité.
souriat, n., petit cochon, cochon de sourie. S'emploie en plaisan-
tant pour désigner un enfant malpropre.
sourie et sourée, n., troupeau de jeunes porcs (voir lanceron) :
Vlai ein marchand d' couchons qui passe d'aiveu V belle sourie.
— Vieux franc, soure, troupeau de porcs.
souriot, n., espèce de tubercule farineux, comestible, de la gros-
seur d'une petite noix environ, produit par la racine d'une om-
bellifère, le bunium bulbocastanum. — Sorelle, plante, bulbocas-
tanum, terre-noix, Gros.
souRis-vouLAHTB,n., souris volante, chauve-souris.— Souris-chaude,
chauve-souris, Gros.
soutrait, n., litière, paille, mauvais foin, etc., dont on recouvre
d'abord le sol avant de commencer une meule, afin que le grain
ne soit pas en contact direct avec la terre ; sous-main, buvard,
papier qu'on place entre la table et la feuille sur laquelle on
écrit.
statuer ou estatuer (se), v., s'appliquer beaucoup, mettre toute
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX 55
son attention, se concentrer, s'absorber : /' s'estatue toute lai
jonnée su les livres.
stô et stoue (ou stau?), il., siège. — Voir aichetâ.
su, prépos., sur : Mets ton chaipé su tai tête. Su, interj., debout,
lève-toi, en route, allons vite 1 A une personne assise ou couchée,
ou dira : Su I et partons. Su t v'iai deux heures que tu dors. —
Du vieux franc, sus ?
subtil, adj., s'emploie au prop. pour vif, agile, preste, et au 6g.
pour adroit, ingénieux : Saute vor pa d'ssus lai hâe ? Tu n'aies
pas aissez subtil, hein f
sucre, n., s'emploie pour suc: Çast f sucre (T lai terre; ç'ast V
sucre de Vharbe. On dit également le sucre d'uu fruit, le sucre
d'un mets, etc., pour l'essence, le meilleur, la partie la plus
substantielle, la plus savoureuse.
sue, n., suie : T ai d* laisuepleun note chemingnée.
surteut, adv., surtout.
suyon (ou suillon?), n., sureau: D«J fleurs de suy on (su-ion).
— Seuillon, sureau, Gros.
t, s'emploie quelquefois comme lettre euphonique ou explétive :
Ç'ast d' t'ai vous, çast d' (ai leux, etc.. (C'est de vous, c'est
d'eux). Ces phrases ne sont-elles pas un mélange, une confusion
de : C'est à vous et c'est de vous, c'est à eux et c'est d'eux, etc.?
ta et to, pron. pers., toi.
tabatioux, n. adj., priseur, qui prise beaucoup, surtout qui a le
nez plein de tabac, qui sent le tabac.
tabb, TAiBEetTAiBLE, n., table: T ai renv'ché lai tabe. On prononce
tabe et table, taibe et taible.
tablette et taiblette, n., alphabet, croix de Jésus, croix de par
Dieu : Empoute tai tablette ai l'école et n lai perds pas.
taboulement, n., action de tabouler, tabourement, élancement. —
Voir tabouler.
tabouler et taibouler, v., labourer; frapper à coups redoublés sur
un objet plus ou moins sonore, soit en travaillant, soit par dis-
traction; se prend en mauvaise part dans les deux cas : Tai ta-
boulé su nos meuds toute lai semainne, et gnai enco rin (T fait
(Il a travaillé au rhabillage de nos tonneaux, etc.). Tu m' casses
lai tête ai toujous tabouler comme çai su lai table. — Tabouler
quéquun, battre, corriger quelqu'un. Tabouler, en parlant d'une
douleur, d'un mal, causer des élancements : Jai ein clou qui
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56 PATOIS DB LA FORÊT DE CLAIRYACX
m' taboulé (J'ai un clou, un abcès, qui m'élance, qui me cause
des élancements). On dit de même par analogie: Les dogts m'
taboulent de frod. — Tabouler, frapper à coups redoublés, Gros.;
tabouler, frapper, battre, Thév. — Vieux franc, tabouler,
frapper, faire beaucoup de bruit ; taborer, tabourer, battre le
tambour.
tacoter et taicoter, v., tapoter, frapper doucement, à petits coups;
battre, corriger (voir tabouler); faire semblant de travailler,
perdre son temps à des travaux peu pressants, futiles: Eul volet
gnétot pas bin frommé, ï ai tacoté toute lai neut. En piaice de
s' dèpoicher ai boicher ses vingnes, t" tacote pa sai majon.
Voir dans ce dernier sens baicuter, beurlauder, tanuger, etc.
tacotot, n., qui tacote, qui perd son temps à des riens, qui tra-
vaille peu habilement, avec peu de courage.
TAFFioNet taiffion, n., nippe, colifichet, falbala, ornement, vête-
ment de luxe; vêtement de femme en général, avec mépris : /'
vaurot meux queulle gadée * son airgent pou payer ses dettes que
d'aicheter tant de taffions.
tai, adj. poss. fém., la : Peurte^ne taip\eumme {piun-me), c'est-à-
dire prête-moi ta plume.
taiche, n., tache: Eunne taiche (téche) dheule, c'est-à-dire une
tache d'huile.
taicher, v., tacher.
tailer, v., taler, fouler, froisser, meurtrir. — Tailer, meurtrir,
Gros.
t' ai l'heure, contraction de tout ai Vheure, tout à l'heure, c'est-
à-dire dans un moment, bientôt.
taille, n., talle, jeune pousse d'arbre et même de plante; spécia-
lement jeune pousse de la vigne : /' y ai des rasins d'aiprées
chaique taille {tèle). — Talle, jeune jet de la vigne, Gros.
tailon, n., talon. — De même les dérivés : tailonner, tailon-
nette, etc.
tailure, n., meurtrissure, foulure, contusion.
tailus, n., talus; le dernier cerceau placé à chaque bout du ton-
neau, sur le jable, à côté et au-delà du sommier.
tairi, v., inf. et part, pas., tarir et tari : Noteputsï ast tairi, ou
t vai s' tairi.
tairibuster, v., tarabuster.
1 Le d se mouille. Gadée y gaidiêe, gaidie, etc., espèce d'imparfaits
du éubjonctif : le présent est gade ou gaide.
\ l
PATOIS DB LA FORÊT DB CLAIRVAUX 57
talaire (ou talère?), n., espèce de losse, de tarière pour amorcer,
amorçoir. — Vieux franc, tairelle, talière.
talandier, n., taillandier.
talifon et tailifon, n., morceau mal taillé ou plus gros qu'il ne
convient, particulièrement en victuailles; gros morceau de pain,
de viande, morceau mal coupé, énorme bouchée : T copedestali-
fons d' pain, t" en mainge, ï en ai aivaile des talifons t (Il
coupe des morceaux de pain, il en avale des bouchées I) Se prend
le plus souvent en mauvaise part. — Voir quater.
talipe et tailipe, n., miette, vestige, trace: s'emploie seulement
dans cette expression: Gn'en reste pas talipe, c'est-à-dire il n'en
reste pas une miette, pas trace. On dit de môme fistule et quel-
quefois chipette. Nous avons entendu certaines personnes pro-
noncer galipe ?
talvande et tailvande, n., dessous de la gouttière à l'intérieur du
bâtiment ; espace qui se trouve sous le rampant du toit, c'est-à-
dire entre le toit et le mur où s'appuient les chevrons.
talvandier et tailvandier, n. On avait donné ce nom, sous le
premier empire, à quelques conscrits réfractaires de nos
villages qui s'étaient cachés sous ou dans les talvandes.
tamoin, n., témoin; petite brioche, reste de pâte, qu'on met au
four en même temps qu'une plus grosse, et qu'on retire un peu
avant, afin de pouvoir goûter et s'assurer ainsi de la qualité, de
la réussite, de la cuisson, etc., sans être obligé d'entamer la
pièce principale. — Vieux français témoing, montre, échan-
tillon.
tan, n., bryone dioïque, bryonia dioïca.
tanner, et tanner d' coups, v., battre avec cruauté, donner une
forte correction : /' V tanne (tan-ne), ou ï V tanne de coups,
c'est-à-dire il le roue de coups. Tanner, v.,mal faire un travail,
une besogne, spécialement en agriculture : ï n' l'ai pas rabouré
son champ, % l'ai tanné (tawné). T n' lai fauche pas sai luzarne,
t" lai tan-ne: c' nast ni fait ni ai faire.
tant (pousque ç'ast), puisque c'est tant, locution qui signifie
puisque, puisqu'il en est ainsi : Pousque ç'ast tant qu tu n' veux
pas m* obéi, je n' te d manderai pus rtn, c'est-à-dire puisqu'il en
est ainsi, que tu ne veux pas, etc.
tantainnbs, n. (Voir dandainnes).
tant qu et plus, loc. adv., beaucoup, en grande quantité. Aivoi
T. LI 5
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58 PATOIS DE LA FORÊT DB CLAIRVAII
S l'airgent tant qu et plus, avoir beaucoup d'argent. En dire
tant qu' et plus, en dire par-dessus la corde, faire des reproches
sanglants, agonir d'injures, etc.
tanuger, v M perdre son temps à des travaux futiles, à des riens
(voir tacoter) ; plus particulièrement traîner sa besogne en
longueur, faire durer le travail trop longtemps. Ceux qui raffinent
disent tanuser : le ser doux aimant à se changer en ger.
tanujot, n., qui tanuge, perd son temps à des riens, traîne sa be-
sogne en longueur ; homme lent, peu habile, mauvais ouvrier.
tapée et taipée, n., grande quantité, averse, avalanche : J'aiftié
V piarre d'aiprées V cacâtier, et ï ai cheu 'n' tapée d' cacas.
— Voir tournée. — On emploie aussi dans ce sens les mots décoc-
tion et tambour igniée.
taper et taipeb, v., frapper; crever, éclater avec bruit; crever,
mourir en parlant des animaux, et particulièrement crever pour
avoir trop mangé : An tape ai lai pote (On frappe à la porte), T
J£ ai fait taper eunne aimorce; ï ai fait taiper V veussie (Il a fait
éclater, détonner une capsule, etc.) Note vaiche eulle-l-ast trop
pleunne, etUle vai taiper, c'est-à-dire elle va crever, pour ainsi
dire éclater bruyamment. — Voir tapot.
tapin, n., tambour, avec dédain, celui qui tambourine ; drap
grossier sur lequel on met les cendres de la lessive, charrier
(voir fleuré) ; drap bleu à grands ramages blancs, qui servaient
autrefois de couverture, de dessus de lit.
tapot et taipot (ou tape au?), n., bout de sureau évidé — c'est-à-
dire dont on a enlevé la moelle — avec lequel les enfants s'amu-
sent à lancer des balles de chanvre ou de filasse. Chaque coup
s'accompagne d'un bruit, d'un claquement plus ou moins so-
nore. Tapot, n., une espèce de silène, silène inflata, dont les
enfants font claquer, taper le calice. Tapot, n., outil avec lequel
on tape, on bat l'aire d'argile d'une grange, pour la rendre com-
pacte, unie, et l'empêcher de se crevasser. — Taperiau, sureau
creusé dans lequel une boule de chanvre en chasse une autre
par compression, Gros.
taqubr, v., tisser, tistre : Toquer d' lai tôle (Tisser de la toile). Du
bruit de tic-tac que fait le métier du tisserand? Tic, tac, prends,
etc. — Voir èchevotte.
taquiotte et taiquiottb, n., plat de la couverture d'un livre car-
tonné ou relié : /' ai cassé les taquiottes (ou tacXottesT) de sai
géographie.
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PATOIS DE LA FORÊT DB CLAIRVÀUX 59
tarauder et TAiRAUDER, v., s'emploie pour corriger, battre, don-
ner une volée... Ce mot de patois douteux n'aurait-il pas été
introduit dans le langage par des gens de métier, maréchaux ou
mécaniciens? On dit dans le même sens burinei\ Voir aussi
trempe.
tarme, n., terme : Note vaiche evlle vai pas d'ssus son tarme, c'est-
à-dire dépasse son terme. Ai tarme de, au lieu de, loin de, au
contraire : Ai tarme de m'aidier, i* m'eurtade, c'est-à-dire au
lieu de m'aider, il me retarde.
tarre, n., terre. Peu employé.
tartre et tarte, n., tertre, sommet, plateau.
tatille, n., tatillon, tatillonne, qui tatillonne, qui bavarde sans
cesse, qui dit des riens, qui fatigue de ses bavardages. On dit de
môme tatiller, pour tatillonner. — Tatille, tatillon, femme ba-
varde, Thév.
tatingner et TAiTiNGNBR, v., tâtiner, manier sans précaution, tou-
cher indiscrètement : /' n' faurot pas tatingner ces prêches-lai
(Il ne faudrait pas manier, toucher, ternir ces pêches-là). On
dit dans le même sens patingner et peuçoyer. — Tatiner, ma-
nier, Gros.
tatouille, taitouille, tatouillon, n., qui tatouille; en particu-
lier femme qui fait tout à la hâte, qui gâche tout, qui tatouille
au lieu de laver, par exemple; correction, volée, décharge de
coups : r V M ai /*... V s... tatouille, c'estrà-dire il te lui a
flanqué une fameuse volée.
tatouiller et TAiTouiLLER, v., remuer, agiter l'eau avec ses
mains (voir patouiller et gargouiller) ; gâcher la besogne, parti-
culièrement en fait de cuisine, cuisiner mal ou malproprement :
Je n veux point d' son gâtieau qu'eulle ai tatouille en peingnant
ses p'tiots.
tatouillis et taitouillis, n., eau sale dans laquelle on a tatouille;
mauvaise cuisine, trop délayée, trop mélangée, malpropre.
taudion, n., taudis, maison sale, mal tenue. Se prend en très
mauvaise part, et s'applique plutôt à l'intérieur, au ménage, au
mobilier.
taupérr, n., taupinière, petite butte de terre soulevée par la
taupe.
taure, n., taureau. Taure bannal (ban-nal), injure qui signifie
taureau par excellence, triple taureau. — Vieux franc, thoureau,
taureau; thoré, géoisse, jeune vache.
m.
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60 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR Y AUX
taureler, v., se dit de l'action du taureau sur la vache : F l'ai
taur'lée. — Tauriner, Gros.
taurie, n., jeune taure, petite génisse. Les beaux parleurs disent
toire.
tayilloN) n., espèce de latte large sciée en lame de rasoir.
tàvillonner, v., poser, clouer sur les chevrons le tavillon qui
supportera la tuile.
tavin, n., taon, tabanus, la grosse mouche qui tourmente les ani-
maux.
té, n. f taupe-grillon, courtilière. — En forme de T?
té, adj. et pron., tel, telle : Té mère, té fille. Téjou ast V pronmer,
té jou ast V huit, c'est-à-dire tel jour est le premier, tel jour est
le huit.
têchon, n., tesson, débris de poterie, de vase brisé; avec mépris
tète, caboche.
teilles, n. pi., tailles, impôt : Tons payé nos teilles et nos
courvées, c'est-à-dire nous avons payé nos tailles, etc.
teinde et toinde, v., teindre. Imp. euje teindôs ou toindôs; subj.
prés, que j' teinde ou toinde; part. prés, teindant ou toindant ;
part. pas. teindu ou toindu. — De même dèteinde, r teinde, etc.
teindoue et toindoue, n., qui teint, teinturier.
teintière, n., têtière, espèce de muselière du cheval.
temps, n., s'emploie pour ciel : Eut temps % ast p\eun d'ètoles (Le
ciel est plein d'étoiles). /' ast fier, tast haut comme eul temps,
c'est-à-dire il est orgueilleux, altier, haut comme le ciel.
tende, v., tendre. De même les composés : aittende, étende, en-
tende, prétende, r' tende, etc., attendre, étendre, entendre, pré-
tendre, retendre, etc.
tendon, n., bugrane rampante, ononis repens; l'épine de cette
plante : J'ai ein tendon dans lai main, c'est-à-dire j'ai une épine
de tendon, etc.
tenin, v., tenir. T pèdrot son c... s'ï n' tenot pas. Fut. euje tien-
rai; cond. prés, euje tienrôs; part. pas. tenun, t'nun. Bailler
des beurbis ai t f nin ou ai r'tenin, donner des brebis, un
troupeau à bail cheptel. De même les composés r'tenin ou rèt'nin,
retenir, aippartenin, appartenir, soutenin, soutenir, etc.
tenot (ou teneau?), n., cuvier, petite cuve à lessive: J'ai des
hades p\eun mes deux t'nots. — Tenô, Gros.
tenrk, adj., tendre : Du pain tenre; d* laxpiarre tenre. — Tenre,
tendre, frais, Gros.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX 61
tenrerb (miche), vache qui vient de voler, fraîche de lait : Ç'ast
V vaiche tenrére, eut lait gn'ast pas si gras.
tenun, n., tenue, maintien, dégaine: Tiens-te meux qu çait Vlai
V belle tenûn qu (aies lai ! On allonge le son un en le pronon-
çant, pour former le féminin, pour remplacer en quelque sorte
le son de Ye muet.
terre-breulee (en vouloir comme), en vouloir beaucoup, avoir une
haine profonde : ï m'en veut comme terre-breàlée, c'est-à-dire il
me déteste, il m'en veut à mort. Est-ce en vouloir comme terre
breulée en veut ? ou en vouloir comme on en veut à terre breûlée ?
Nous n'avons jamais pu nous expliquer littéralement le sens de
cette expression.
trrringnb, n., terrine, vase de terre, espèce de grand creuset.
terroux et tarroux, n., terreux. Ein cul terroux, une fille de la
campagne dont les parents possèdent des terres. Se prend en
mauvaise part : I's digent que note maîte d'école, en p\aice de
penre eunne belle demoiselle de lai ville, t" s'ast mairie d'aiveu
ein cul terroux qui n' sait quasiment pas lire.
tétar (ou têtard?), n., cornue de l'alambic: rai si tellement
chauffé son ailambille qu'i' ai fait sauter V tétar.
tedle et tieule, n., tuile. On dit tuilot (tuileau) et non teulot. —
Vieux franc, tieule.
tbummere et tumbré, n., tombereau : Sarge çai dans ton teumm'ré.
Désigne aussi le contenu d'un tombereau : Ein teumm'ré d' fien.
J'ai teû trois tumrés d' pommes de terre dans mon champ. —
Vieux franc, tumerel, tumereau, tombereau.
teummerée et tumerée, n. f., contenu d'un tombereau, charretée :
Eunne teumm'rée d* pommes d' terre. C'est le mot précédent fémi-
nisé.
TEURBiLust, v., marcher en trébuchant; chanceler après s'être
heurté à quelque obstacle, chanceler en avançant ou sur place :
r s'en vai en teurbillant (Il s'en va en trébuchant, en se heur-
tant à tous les obstacles du chemin). Euje me sens boqué dans V
piarre, fat teurbillé et peusj'ai cheû.J'air'çu ein cueup d* poing
qui m'ai fait teurbiller. — Voir teurteler.
tburbillot, n., qui teurbillé, qui a l'habitude de teurbiller, de tré-
bucher, de chanceler, de se heurter aux objets. Se confond avec
teurt'lot.
teurteladb et tortbladb, n., action de teurteuler ou de teurbiller,
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62 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX
faux pas suivi de plusieurs autres qu'on fait précipitamment
pour reprendre suréquilibre. — Voir teurteler et teurbiller.
teurteler et torteler, v., chanceler, marcher comme un homme
ivre, tituber : Tètos si foib\equej' teurt'lôs. Marque en général
une action de plus de durée, moins accidentelle que teurbiller :
L'homme qui a reçu un choc teurbille, l'homme ivre teurteulle;
mais ces deux mots se confondent souvent dans l'usage. — De
tarte ire?
teurtelot, n., qui teurteulle, qui a l'habitude de teurt'ler, peu so-
lide sur ses jambes ; qui se heurte à tout, étourdi.
teusser et t'sser, v., téter : J'ons deux aingnées qui teussent lai
même mère (Nous avons deux agneaux qui tètent, etc.). Popa,
note vieau n veut pas t'sser. — Si I j'vas bin V faire teusser, vai,
moi. On voit qu'on prononce teusser ou t'sser selon la terminai-
son du mot précédent.
teussi, v., inf. et part, pas., tousser et toussé : T ai teussi tente lai
neut; f n' fait qu teussi.
teussotte, n., espèce de tétine artificielle, de biberon improvisé
fait ordinairement d'un chalumeau et d'une guenille, dont on se
sert pour faire boire les jeunes animaux, en particulier les
agneaux qu'on élève sans mère.
tbussoue et toussoue, n., tousseur, qui tousse d'habitude, qui en-
nuie à tousser.
tbut et tôt, adj. et pron., tout. Selon les villages, on prononce
tout, teut ou tôt, toute, tente ou tote, ètout, èteut ou ètot (aussi),
etc. — Teut pa teut, adv. Voir tout pa tout.
tiaçd et quiaçu? Contraction de qui ast-çu, qui est-ce. qui est
celui...: Tiaçu qui en veut ?(Qui est-ce qui en veut? Qui est
celui qui en veut?) On dit de môme : Diâbe ast-çu qu' çai ? c'est-
à-dire diable est-ce cela ?
tiaffer, v., faire avec la bouche en mangeant ce bruit que font
certains animaux, le porc en particulier : Euri tiaffe pas comme
çai, c' n'ast pas prope. On dit aussi lai gueule li tiaffe, comme
on dit lai gueule li c\aque, ou lai gueule lifrioule (voir friouler) :
Sitiôt qui' voit lai tabe dreussée, lai gueule li tiaffe, c'est-à-dire
il est impatient de manger, l'eau lui vient à la bouche, il fait
déjà claquer ses lèvres comme s'il mangeait.... — Onomatopée.
tiatia et tata, n., terme enfantin qui désigne la viande : T aimme
bin lai tiatia, note enfant, aillez, c'est-à-dire il aime bien la
viande, etc.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CL AIR VAUX 63
tiatias, n., espèce de grive, qu'on nomme aussi drainne. Onomato-
pée du cri de cet oiseau : tia-tiâ. — Quias-quias, espèce de
grive, Gros.; tiatia, grive, P. T.; quia-quia, porc, terme d'en-
fant, Thév.
tignache et tingnachb, n., teignasse, terme de mépris pour
désigner la chevelure, et, par extension, la tôte : Oh, que
tignache ai poux t An n' peut rin li faire entrer dans lai
tingnache.
tignoux, adj., teigneux. Au Gg. entêté, cabochard.
tille, n., écorce ou partie de Técorce d'un brin de chanvre prise
séparément, filament de chanvre : Vlai V tille qui vai cheur
de tai dée. — Voir dée et tiller.
tiller, v., teiller, casser le brin de chanvre pour en détacher l'é-
corce. — Vieux franc, teiller, ôter, enlever ?
tillol et tillot, n., tilleul.
tilloter, v., rompre, briser quelque chose de ligneux, comme on
brise le chanvre, fendre de manière à réduire en lattes minces,
en éclats. S'emploie surtout en parlant des arbres rompus, bri-
sés, fendus par la foudre ou le vent : L'oraige tai brigé tous
les popiUers ; t y en ai qui sont cassés, fendus, tillotés, en bouts
d'aillummeUes (ailun-mette).— Tilloter, briser, mettre en pièces.
Se dit seulement des corps ligneux, Thév.
timonner, v., ennuyer, talonner, importuner, tarabuster, dans le
but de persuader, de décider, de convaincre : Je n' 1* vendrai pas
mon champ, non, % airai bieau m' timonner.
tintamarre, n., espèce de van nommé aussi tarare. Du bruit que
fait cet instrument ?
tiôt, adv., tôt : /' vaut tneux pus tiôt qu pus tard. De même les
dérivés, aussitiôt, bintiôt, etc.
tiran, n., tiroir avec une nuance de dépréciation. D'ordinaire on
dit tiroi,
tirk-lairigot et tire eul rigot (boire ai), boire à tire-larigot.
tire-monde (mère), n., sage-femme.
tirer su et tirer d'ssus 'n' cheuse, avoir une certaine ressemblance
avec une chose, s'en rapprocher : Lai mugue çai tiré su lai lu-
zarne (Le mélilot a une certaine ressemblance avec la luzerne).
/' n' pale pas français, t" pale allemand... ou, si c' n'ast pas
d' l'allemand, çai tire bin lai-d'ssus.
tiroue, n., tireur, chasseur : Çast einbon tiroûe, c'est un bon ti-
reur, un bon coup de fusil.
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64 PATOIS DE LA FORÊT DE CLÀIRVAUX
tisse, n., meule de blé, ou d'autres céréales, en grange. — Voir
pontée. — De entesser, ent'ser, entasser? Nous avons entendu
prononcer entisser.
titi, n., mamelle, gorge, sein de femme. Mot du dictionnaire en-
fantin qui s'emploie en goguenardant... — De téter î
tocane, n., mauvais vin, de mauvaise provenance, de mauvaise
année, piquette. — Voir reginguet.
tode, v., tordre. Part pas. todu et todiu. De môme les dérivés de-
iode y détordre, r'tode, retordre, etc.
tôgnée, n., lutte corps à corps, action de tôgner, peignée. La tôgnée
suppose rarement des coups donnés ou reçus... Quand, dans une
lutte, une espèce d'assaut, le vaincu est renversé, on dit qu'il a
été tôgné, qu'il a reçu sa tôgnée. Ne pas confondre avec breâlée,
dégelée, frôlée, pile, etc., quoique la tôgnée dégénère assez souvent
en véritable bataille. — Voir tôgner.
tôgner, v., empoigner à bras le corps et culbuter. S' tôgner, lutter
à qui sera le plus fort, se colleter, essayer de se culbuter, plutôt
que se battre sérieusement: Tôgnez-vous vor, vos deux (Col-
letez-vous voir, vous deux). Ts s' sont tôgnés, mas i's n* se sont
point fait mau.
toib et toe, n., taie : Eunne toie d'oriller; eunne toe d' let.
toillon, touillon et tôdion, n., souillon, femme sale sur elle, sale
dans son ménage. — Voir tatouille et gôion. — Vieux français
toullon, torchon.
toindb, v. (Voir teindej.
tôle, n., toile : Que grosche femme f Mas ffaut autant d' tôle pou li
faire eunne cheminge que pou rhaibiller ein meûlin.
toli, v., inf. et part, pas., priver, privé ; faire tort, être frustré :
F tolit sai femme de teut, c'est-à-dire il prive sa femme de tout,
elle n'a aucun droit, elle ne jouit de rien... Euje sens zeû toli
d' bin des cheuses dans lai sucession (On m'a frustré, on m'a fait
tort de bien des choses, etc.). — Vieux franc, tollir, ôter, enle-
ver de force.
tonde, v., tondre, couper les cheveux. Tonde les beurbis, tondre
les brebis. De même r'tonde, retondre.
tondoue, n., tondeur, perruquier coiffeur : Baille-me don Vaidreusse
de ton tondoue ? Çai dot été ein m'nusier, pousqu'% t'ai fait des
escaliers (Donne-moi donc l'adresse de ton perruquier ? Ce doit
être, etc.). V ast tondoue, c'est-à-dire il est perruquier, coiffeur.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIBVAUX 65
tonnailler, v., fréq. de tonner (tourner), tourner souvent, tour-
ner mal à propos, etc. On dit de même r tonnailler, retourner
souvent.
tonnant, n., tournant^ détour: Au tonnant d' lai route, c'est-à-dire
au tournant, à l'angle de la route.
tonné, part, pas., tourné. S'emploie pour prêt dans cette expres-
sion : Gnast jainmas tonné, c'est-à-dire il n'est jamais prêt, il
n'en finit pas, quel lambin !
tonnée, n., tournée, voyage. — Voir tournée.
tonn'lier, n., tonnelier. On mouille 17 : tonriMer, à peu près
ton-nié.
tonneb, v., tourner : Tonne don vor ton chaipé autrement (Tourne
donc voir ton chapeau autrement). Qu'ï tonne, qui vire, x n
réussirai pas y c'est-à-dire qu'il fasse ce qu'il voudra, les démar-
ches, les efforts qu'il voudra, etc., il ne réussira pas. Se
prononce et se conjugue absolument comme le verbe unipers.
tonner. De même les composés détonner, détourner, r'tonner, re-
tourner, etc.
tonnot, n., plateau de bois sur lequel on pétrit, on fait et souvent
on sert les galettes, les tartes, etc.
toquard, n.,qui a une grosse tête; au fi g. cabochard, entêté.— De
toque?
toquer, v., heurter, frapper, taper : T m'ai toqué en passant (Il
m'a heurté, etc.). Toquer ai lai pote, frapper à la porte. — Voir
boquer. — Vieux franc, toquer, même sens.
torche, n., s'emploie pour brandon (voir marque). Torche, n., tro-
chée : Eunne torche d'harbe, c'est-à-dire une trochée d'herbe.
Torche, n., pièce de linge lavée, encore molle et tordue: Vai
étende les d'où trois torches qui sont daji laivées, c'est-à-dire va
étendre les deux ou trois hardes, etc. — Torche, voyez frotte,
Gros.; torche, brandon, Thév.
torché (été bin ou été mal), être mal habillé, sans goût, sans soin,
être fagoté * Te vlai bin torché! (Te voilà bien fagoté!) /' ast si
mal torché! c'est-à-dire il est si mal habillé, avec si peu de
goût 1 On dit dans le même sens : été bin ou mal ficelé, été bin
ou mal jabi, été bin ou mal gôné, etc. — Torché bien ou mal,
bien ou mal arrangé, Gros. — Vieux franc, torcher, travailler
grossièrement.
torchée, n., trochée, cépée : Eunne torchée de sainfoin; eunne tor-
chée d 9 noujotter. On dit aussi torclie. — Troche, pied d'herbe
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66 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAÏRVAUX
sauvage ou potager, Gros.; troche, plante d'herbe à pied touffu,
Thév.
torcher, v., s'emploie pour taller en parlant des plantes, particu-
lièrement des céréales : Note b\ê griast pas fondé, mas ï
torcherai au bon temps. T faut boire sept coups en tnaingeant V
roulée, ai Pâques, pou faire torcher les blés. — Trocher, pulluler,
Gros.
torchette, n., ne s'emploie — ou du moins nous n'avons entendu
employer ce mot — que dans cette expression : n^te comme tor-
chette, c'est-à-dire très net, très nettement, très proprement, tout
à fait, sans hésitation, etc. : Çai l'ai copé net K comme torchette
(Ça l'a coupé très net, sans difficulté). Euje li répondras çai,
moi, net comme torchette, c'est-à-dire sans hésitation, sans bargui-
gner.
torment, n., tourment. De môme les dérivés : tormenter, tour-
menter, tormentant, tourmentant, tormentoue, tourmenteur, etc.
tortiller, v., hésiter à prendre un parti, réfléchir, lanterner, ter-
giverser : Gn'ai pas ai tortiller, t faut qu tu me V vendes (Il
n'y a pas à hésiter, à réfléchir, etc.). Quast-ce que tu tortilles
don ? Mairie-V don, pousqui' veut s* mairier. — Voir rédiculer,
jaser, épier, etc.
tortillon, n., ce qui est tortillé, tordu, roulé sans précaution,
chiffonné, en parlant de paille, de foin, de linge, et d'autres
choses semblables : Ein tortillon d'ètrain (Une poignée de paille
tortillée). V met son col en tortillon (Il met sa cravate en corde,
en torchon). Une vache aivaile des bons tortillons d*harbe, c'est-
à-dire de bonnes goulées tortillées. Par analogie on dit également
qu'une personne aivaile des bons tortillons d' pain. . . — De tor-
tiller.
tôt, n., toit : /' ai cheû ai Vaivailêe du tôt, c'est-à-dire il est tombé
du toit.
tôtive, adj. des deux genres, hâtif: Des rasins tôtives (Des raisins
hâtifs). Gnastpas tôtive, dit-on, en parlant d'un homme qui ne
se lève pas matin, qui n'est pas pressé, qui est souvent en retard
dans ses trawtux, etc. — Tôtif, hâtif, Gros.
tôtivet, n., râpé fait avec des raisins cueillis un peu avant la ma-
turité, ou du moins quelques jours avant la vendange, dans les
1 Ce mot se prononce d'ordinaire au masculin comme au féminin,
c'est-à-dire en faisant sonner fortement le t : net-t.
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'3
* , *"i
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,*
^
PATOIS DB LA FORÊT DE CUIR VAUX 67 ' 'M
années où Ton manque de vin : Euje riaivains pus ai boire, fons £|
fait ein tôtivet, pou ri pas nous mette eut bec ai Y eau pendant lai • )ç$
vnainge. D'ordinaire ce sont les pauvres gens qui font des ^
tôtivets. V?-
toto, n., mot du dictionnaire enfantin qui signifie soulier : T airai
des bieaux totos ai Pâques, note Fanfan, c'est-à-dire il aura de
beaux petits souliers à Pâques.
tôt-tôt (Marie), n., femme toujours pressée, qui fait tout en cou-
rant, et, par conséquent, tout mal, tout à demi ; brouillon,
gâcheuse de besogne. — Voir tatouille.
totu, adj., tortu. Ein ϝ totu, une crotte de poule ou de coq : Note
co % ri pond qu' des Ϟs. totus.
toturer, v., muser, faire des pas inutiles, perdre son temps ; s'oc-
cuper à des choses de rien par paresse, par désœuvrement, etc.,
au lieu de faire la besogne principale et censée plus difficile.
Voir tacoter, tanuger, etc. Toturer signifie plus spécialement
perdre son temps en flâneries, en allées et venues : T s'en vai
toturer d'aiveu son feusil, c'est-à-dire il va perdre son temps à
chasser, à braconner.
toturot, n., qui Mure, qui flâne. Voir tanujot, tacotot. Toturot,
n., par plaisanterie, la vigne, le cep tortueux qui va de
tous côtés : Du jus d' toturot, ç'ast d' l'heule de braîs, c'est-à-
dire le jus du cep, de la vigne, c'est de l'huile pour les bras.
touche et teuche, n., s'emploie pour manière, maintien, tenue:
Oh, % ai 'ri peute touche ! c'est-à-dire une vilaine tenue, une
triste dégaine. — Voir tenûn.
toue ! toue ! et choub 1 choue t interj., cri dont on se sert pour ap-
peler les chiens : Tiens, toûe I toûet ou choûe t choûe t — Tou,
interj., pour appeler un chien, Thév.
touffe (faire), faire un temps lourd, épais, une chaleur étouffante:
Eut temps, i* ast couvri, mas t" fait touffe, c'est-à-dire le temps
est couvert, mais il fait chaud cependant, une chaleur lourde,
étouffante. — Touffa, temps chaud et lourd, Gros., Thév.
toujous, adv., toujours.
toulipe, n., fleur, tulipe : Fanfan lai toulipe. : : \
toulon (ou tout long?), n., champignon comestible qui pousse dans N :
les friches, une espèce d'agaric, croyons-nous (?). V
toupette, n., houppe, touffe, flocon, et spécialement la houppe du
bonnet de coton.
tour et tourbt, n., rouet à filer. — Vieux franc, touret.
\';r
•-Si
68 PATOIS DE LA FORÊT DE GLAIRYAUX
tournée, n., s'emploie pour quantité, abondance, etc., et pour vo-
lée, décharge de coups : J'ai raippotUé des estragots d'aux vingnes
et j'en ai maingé'n bonne tournée (J'ai rapporté des escargots des
vignes et j'en ai mangé beaucoup, sans compter, une grande
quantité). On dit aussi tapée dans ce môme sens. F. . . li V tournée,
c est-à-dire Qanque lui une raclée, une brossée. Voir dans ce
dernier sens dégelée, frottée, tatouille, trempe, tripotée, etc. —
Tournée, dans le sens français de voyage, se dit tonnée.
tourniole et torniole (ou tourgnole ?), n., coup, chiquenaude,
mornifle, taloche. La tourniole se donne ou se reçoit comme la
chiquenaude ou la taloche, et elle n'est pas aussi violente, aussi
grave que Yèdane.
tournure, n., s'emploie pour détour,[biais, mensonge : N'nousf...
pas V tournure, tiens I tu nètôs pas mailaide euc'jou-lai, pousque
t'ètôs ai lai chaisse.
TOURTOUS, TOURTEUS, TEURTOUS, TEURTEUS, TORTOUS, TORTEUS, adj.
ind., tous sans exception. Fait au fém. tourtoutes, tourteutes,
«te. Se place ordinairement à la fin de la phrase : /"* sont r've-
nuns tourtous, c'est-à-dire ils sont revenus. tous, sans exception.
On dit pourtant bien : /** sont zeûs tourteus mailaides (Ils ont
été tous malades, tous, sans exception). — Vieux franc, trestot,
trestuit, tretous, etc.
tout de même, s'emploie pour peut-être bien, oui-da, volontiers, etc :
Veux-tu v'nin d'aiveu moi ai lai fête ? — Tout d' même, çai m'
pronmeunnrai (Veux-tu venir à la fête avec moi ? — Volon-
tiers, je n'y vois pas d'empêchement, ça me promènera). Pieu-
vrai-t-V aujd'heu? — I' p\euvrai tout d' même, c'est-à-dire il
pleuvra peut-être bien, il est possible qu'il pleuve, je le crois.
tout pa l', tout pa lai, par tout le, par toute la : /' ai s'mé son
blé tout pa V chemin, c'est-à-dire il a semé son blé tout le long
du chemin, tout à travers le chemin, etc. Taies ftié les jarbes
tout pa laigrainge.
TOUT PA TOI, TEUT PA LU, TOT PA SE, etC. — Voir pa.
TOUT PA TOUT, TEUT PA TEUT TOT PA TOT, etc., adv., tout par tout,
partout, en tout lieu : Eul chiendent, çai pousse tout pa tout,
c'est-à-dire partout, en tout terrain.
tout pleun, teut pleun et tôt pleun, exprès, adv., beaucoup,
abondamment : T ai des ra&ins tout pleun (pi-un), c'est-à-dire il
y a des raisins beaucoup, abondamment, plein tout. — Tout
plein, beaucoup, en grande quantité, Thév.
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TJpVW^ 1 ^ ' '- fT ';1|
M
PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIHVAUX 69 ■''Ij
toutelot (ou toutlot?), n., espèc* de gâteau assez indigeste fait de "|
farine et de saindoux. — Voir dondainne et dourdon. "1
touter, v., corner, souffler dans une cornemuse, et, en général, , ^(|
jouer d'un instrument à vent quelconque : Vlai V boirger qui ^
toute, lâchez les beurbis (Voilà le berger qui corne, etc.). J'ai .. - ;: $
écouté lai musique : i's ètaînt V vingtainne qui toûtaînt. . . ;>1
c'est-à-dire une vingtaine qui jouaient. Quand l'instrument rend 3
des sons aigus, on dit plutôt f\eùter. — Voir aussi tromper et
coinner. ^
toutotte, n., cornemuse, corne, trompe, etc., en général tout ins- V
trument à vent dans lequel on souffle, depuis la flûte en écorce
de coudrier que confectionnent les enfants, jusqu'aux cornets
les plus compliqués. Quand ce mot n'est pas dépréciatif, il
exprime une nuance de plaisanterie : T soufflot dans sai toutotte
pendant qu l'aûte % racïot son violon. Nous avons quelquefois
entendu dire ein toutot. — Voir fleûte et toutoûte.
toutou, n., terme du dictionnaire enfantin qui signifie chien :
Aippelle eul toutou, mon enfant, c'est-à-dire appelle le chien.
toutoûte, n., terme enfantin, petite trompette de bois ou de fer-
blanc qu'on achète chez les marchands de jouets. Ce mot est
employé plaisamment par les grandes personnes : I's en fai-
jaint-fs ein vaicairne, ein saibbait, d'aiveu los toutoûtes, ces
commédiens-lai! c'est-à-dire en faisaient-ils un vacarme avec leurs
instruments, ces saltimbanques-là I Se confond souvent avec
toutotte.
traicais, n., tracas.
traicaisser, v. , tracasser.
traicaissier, n., tracassier.
trauoue d' bique, n. comp., qui trait la bique, homme qui s'oc-
cupe plus qu'il ne convient des affaires du ménage. (Tré-ioûé).
— Voir baissottier, caissottier, tâte poules.
traimme, n., trame, espoulin, fil roulé sur un petit tube de roseau,
de chardon à foulon, etc., que les tisserands mettent dans leur
navette et qui forme la trame de la toile : Pou s' mairier d'aiveu
ein tisserand, ï faut saivoi faire des trainmes, c'est-à-dire il faut ,
savoir dévider le fil sur les espoulins ou espolins en question.
trainailler, v. fréq. de traîner, traîner à tort, maladroitement,
lentement, avec arrêts et reprises; lambiner, rester en arrière ;
flâner, truander : Fais don coper ces cK feux-lai qui traînaillent
pa-d'ssus tes épaules. Qu'ast-ce que tu traînailles don, comme çat,
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70 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUÏ
pa darrê les ailles ? Ç'ast ein vieux fainniant qui traînaille pa
toutes les fermes.
trainaillerie, n., négligence, nonchalance, défaut de celai qui
laisse traîner : l'ai tout pèdiu pa sai nêgUgence, sai traînaîU'rie.
Tu n'aies pas enco fait d' seummer ? Ç'ast d' lai traînaUVrie,
çai.
traine-chochos, n. comp., traîne-savates, mal chaussé ; indolent,
lourdaud, qui lève à peine les pieds en marchant; traînard,
truand. — Voir chocho.
trainoue, n., traînard, traîneur de grande route, vagabond, truand.
(Trénoûe). — Voir landrou.
trainoux, n., négligent, sans soin, qui laisse tout traîner autour
de lui : Plaice don tes briques, trainoux (tré^nou). Ne pas con-
fondre avec trainoue.
traipbcheb, v., traverser, en parlant de la pluie, mouiller de part
en part : /' p\eut qu çai traipeuche mon parapluie. Traipecher,
subir l'action de la pluie, être mouillé, être trempé. On dit éga-
lement : Si tu n te mets pas ai l'aibri, tu vas traip'cher, ou tu
vas t' faire traip'cker, ou tu vas été traip'ché. Ylai des haibits
su lai hâe qui traipeuchent, ou qui vont traipcher, ou qui vont
été traip'chés. — Les beaux parleurs disent trapercer. — Tra-
percé, mouillé jusqu'aux os, Gros. ; traipchay, id., L. C. ;
trapechay, transpercer, P. T.; trèpercer, mouiller à travers les
vêtements, Thév. — Vieux franc, trespercer, percer à travers.
traite, n., traître. On mouille le t : treit'iQu*.
traite, n., ce qu'on tire, en une fois, de lait à une vache : J'ai
mêlé* lai treitieu du maitin d'aiveu cté du sor.
traitier de haut en bas (traiter de haut en bas), maltraiter en
paroles, injurier, invectiver : /' m'ai traitiée du haut en bas, et
gny ai qu çai s'i' n' m'ai pas baittue, c'est-à-dire il m'a agonie
d'injures, etc.
traivars, n., travers. En traivars, de traivars, en travers, de tra-
vers, etc. De même traivarse, traverse, traivarser, traverser, et
les autres dérivés.
traivoil, n., travail.
traivoiller, v., travailler : Traivoille, mon corps, i' n' te s'rai
point fait d' tort, c'est-à-dire travaille, mon corps, on ne fera
1 En perdant le son ouvert, les voyelles aî, é, n'en restent pa»
moins longues dans la presque totalité des ca3.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX 71
point d'économie ; ta auras, ta boiras, tu mangeras tout ce que
tu gagneras : dicton qu'on prêle aux viveurs, aux ivrognes, aux
prodigues.
traivoilloub, n., travailleur, ouvrier: Ç'ast ein bon traivoilloûe,
c'est un bon ouvrier.
thalle thalle (ailler), se hâter lentement ; aller avec assurance,
d'un pas allègre, dégagé, mais non précipité: T s'en ailltà
traite traite aux vingnes su lai pointien des neuf heures, c'est-à-
dire gaillardement, sans trop se presser, sans s'émouvoir, bien
qu'il fût neuf heures. J'ai vu mon liéve qui s'en v'not traite
traite, c'est-à-dire en trottinant doucement, hardiment, sans
se douter du sort qui l'attendait. — Voir traiter, qui paraît de
môme origine, malgré une assez grande différence de significa-
tion... Le sens de traite traite n'aurait-il point été altéré?
traller, v., presser le pas, aller vivement d'un lieu à un autre, en
quête de quelque chose ; aller d'un pas ému, saccadé : /'
traite, eue maitin, pou aivoi desjonnées. Ah,j' l'ai fait traiter,
vai, c'est-à-dire je l'ai forcé à se hâter, à courir pour obéir à mes
ordres, pour parer le coup que je lui portais, etc. — Voir valider.
thasse, n., tresse, en particulier tresse défaille que les enfants et
les femmes de nos campagnes fabriquaient autrefois, et qui ser-
vait à faire des chapeaux rustiques. Trasse,n., espèce d'argile
jaunâtre mêlée de sable, et complètement stérile.
trasseb, v., tresser, spécialement tresser la paille pour faire des
chapeaux.
trassoue, n., qui tresse, qui fait de la trasse (tresse) de paille.
trater, v., traire : Vai trayer (tré-ié) les vaiches.
trèfiller, v., frissonner, frémir, avoir un brusque frisson de
froid ou de peur : T faijot si frod c' maitin que f trèfillôs en
m'haïbillant. Tais-te t tu m' fais trèfiller, tu m' bailles lai char
de poule d'aiveu tes contes.
tremble-au-vent, n. comp., qui est délicat, maladif, que le vent
pourrait renverser : Ein bel homme, aillez, pou faire ein soldat,
c' méchant tremble-au-vent-lai, qui n' sWot seulement pouter sai
hotte vende.
trembler (çai fait), expression qui marque un superlatif de
quantité dans cette phrase et d'autres semblables : Des poires su
note poirer ? % y en ai qu çai fait trembler, c'est-à-dire il y en a
une quantité énorme, épouvantable.
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X
72 PATOIS DE LA FORÊT DE CL AIR VAUX
tremblot, il. dimin., petit tremble :
J'ai cassé mes bieaux saibots
Dans V petit bas d' tremblots.
trembloue, n., trembleur, peureux: Ç'ast ein tremb\oue, c'est un
peureux, un couard.
trèmeure et trèmoure, n., trémie : Eul munier ï pêche dans sai
trèmeûre putiôt deux fois qu'eunne. — Vieux franc, tremuée,
trammeure, trèmoure.
trempe, n., s'emploie pour trempée, volée de coups, correction.
Voir dégelée, frôlée, tripotée, etc. — Ce mot, comme tarauder et
buriner, aura sans doute été employé d'abord par quelque for-
geron, maréchal ou taillandier. Trempe, n., bonne pluie qui
trempe la terre. Voir trempée.
trempée, n., paii qu'on a fait tremper dans du vin ; grande pluie
qui arrive à propos quand la terre a besoin d'eau : Tons maingé
9 ri trempée au sucre. T ai cheâ 'ri bonne trempée, c'est-à-dire il
est tombé une bonne pluie qui a bien trempé la terre.
tremper lai buie, essauger, mouiller le lingo sale avant de Yent'ser,
c'est-à-dire de l'entasser dans le cuvier.
très-bin, adv., très-bien, s'emploie pour beaucoup. — Voir bin.
tret (ou trait?), n., entrait, poutre horizontale, grosse pièce
d'une charpente qui soutient les arbalétriers. — Vieux français
tre, poutre.
treue, n., truie; femme sale, injure grossière :
En aivant deux,
Les coches et les treues.
treufe, n., trèfle, trifolium.
treuffb, n., truffe. Se prononce absolument comme le mot précé-
dent.
tricer et dricer (ou trisser ?), v., jaillir en filet rapide. Se dit
spécialement du liquide d'un vase qui s'échappe brusquement
par une ouverture étroite, ou du sang qui jaillit d'une veine.
On emploie plus souvent drager. Voir aussi gig\er.
tricoter et tricoter les côtes, s'emploie pour battre, frapper, cor-
riger : Ah, si tu m' fais ailler va toi, j' te tricoterai, dit un père
à son enfant, ou f te tricoterai les côtes. Au fig., tricoter les
côtes à quelqu'un, le miner, chercher à lui nuire, le dénoncer,
le poursuivre de sa haine. Tricoter des jambes ou des guiboles,
jouer des jambes, courir, s'enfuir, se sauver.
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PATOIS DB LA FORÊT DB CLAIR VAUX 73
trie, n., terre glaise battue remplaçant le pavé on le parquet dans
une chambre ; couche d'argile ou de terre étendue sur de mau-
vaises planches de merrain en guise de plancher, de plafond.
— Vieux franc, terriz, chaumière, cabane couverte de terre.
trie, n , triage, choix : An ai fait V trie d' nos pommes et an ai
baillé les vèrouses ai nos couchons, c'est-à-dire on a fait le triage,
le choix, etc.
trio, n., besogne, entreprise difficile, tracas, tintouin : Ç'ast ein
gros trio que d' soingner trois godelles. (C'est une grosse besogne
que de soigner trois vaches). Oh, j'ons bin du trio en c moment-ci
quef faijons bâti! c'est-à-dire nous avons bien du tracas, bien
du tintouin, etc. — Voir aitaine.
triôler (ou triaulbr?), v., perdre son temps en allées et venues ;
tourner autour de la besogne, auUieu de s'y mettre sérieusement.
C'est toturer, mais en général plutôt forcé par les circonstances
que volontairement.
triolot, n., espèce d'agenouilloir, garde-genoux à l'usage des la-
, veuses de lessive. — Triolot, promenoir d'enfant, meuble de
"lessiveuse, Gros.; triolon, triolot, promenoir à roulettes pour
les petits enfants, Thév.
tripaillbr, v., fréquent, de triper, triper souvent, triper sans
motif, marcher sans précaution sur un terrain ensemencé ou
récemment cultivé.
triper, V., fouler aux pieds. Triper quiqu'cheuse, triper su
quiqucheuse, etc., poser son pied dans ou sur quelque chose :
Eun tripe pas su mai robe (Ne marche pas sur ma robe). l'ai
tripe dans lai bousée. Euje triperôs d'ssus, si je n* m'eurtenôs
pas (Je marcherais dessus, j'écraserais, je foulerais aux pieds,
si je ne me retenais pas). /' triperot su les gens d' son pays qui
n' \iô palerot pas. Absolument fouler la terre cultivée de ma-
nière à y laisser une trace de pas, des sentiers, faire des
tripes : Eun tripe pas mon rabouré, ou su mon rabouré. —
Voir paittoyer. — Triper, fouler aux pieds, Gros.; triper, mar-
cher sur quelque chose, fouler aux pieds, Thév.— Vieux franc.
triper, sauter, bondir.
tripes, n. plur., pas qui s'enfoncent dans la terre meuble et la
rendent plus difficile à cultiver ensuite : Traivarser les vingnes
pa ces temps mous-lai, c'en fait des tripes t — Voir triper et
tripoter.
T. u 6
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74 PATOIS DE LA PORE* M ÛlAltkYAtt
tripotée, n., décharge de coups, volée, correction.— Voir dégelée,
frôlée, trempe, etc.
tripoter, v., s'emploie pour triper avec précipitation et réité-
ration, piétiner, trépigner; marcher à petits pas, aller et venir
sans but : /' aijitiè soi cale ai bas d' colère, et peus, % ai tripoté
pa d'ssus (Il a jeté sa casquette à terre, et puis il a piétiné des-
sus). Les gamins en s'aimujant, ts ont tripoté tout pa V jadin.
F n peut pus aille, eue' vie -lai, € tripote, % tripote. Quast-c que
tu tripotes don ? aicheute-te; c'est-à-dire qu'est-ce que tu te pro-
mènes donc ainsi de long en large? asseois-toi. Tripoter, v.,
manier indiscrètement (voir tatingner). — Trippoter, frapper
des pieds, aller et venir sans objet, Gros.; trippoter, piétiner,
Thév.
tripotot et tripotoub, n., qui tripote, qui marche où il ne faut
pas marcher; qui fait de petits pas en marchant; qui fait des
pas inutiles. — Voir patttoyot et toturot.
triquéb, n., décharge de coups de triques, volée de bois vert, cor-
rection. — Voir dégelée, frôlée, etc.
triqueh, v., choisir, démêler. — Voir dètriquer.
trogne, adj., court, camard, le contraire d'effilé. Se dit en parti-
culier d'un biseau, d'une pointe, d'une lame, d'un cône, etc.,
qui se termine brusquement : Eut V bouvreuil ï ai V bec trogne.
N'aiguge pas tes pochés si trognes, c'est-à-dire aiguise tes pais-
seaux plus en pointe, en pointe plus effilée. On prononce aussi
trongne. Nous ne connaissons pas à ce mot d'équivalent exact en
français.
trois-pieds, n., trépied, ustensile de cuisine à trois pieds.
trompé, part, pas., s'emploie pour malheureux, infortuné. Un
homme souffrant, malade, accablé de besogne, de chagrin, etc.,
dira : Que j' sens don trompé I c'est-à-dire que je suis donc
malheureux, que je suis donc à plaindre t
tromper et trompetter, v., souffler dans une trompe, une corne-
muse, jouer d'un instrument à vent quelconque. Se prend géné-
ralement en bonne part, tandis que toûter et coinner sont le
plus souvent dépréciatifs, à moins qu'il ne s'agisse des pâtres de
la commune.
trompoue, n., trompeur, filou, voleur. Trompoue et trompettoue,
n«, qui joue de la trompette, qui joue d'un instrument à vent
quelconque, l'orgue excepté, bien entendu.
tronchot, n., tronchet, petit billot sur lequel on appuie le mor-
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PATOIS DE LÀ FORÉf DB ClÀIRVAUX 75
ceau de bois qu'on veut travailler à la serpe ou à la hachette,
en parliculer, le paisseau. — Vieux franc, tronchet, billot, mor-
ceau de bois.
tronc d' chou, n., la tige du chou privée de sa tête. Au fig., femme
petite, boulotte, mal faite. — Tron de chou, pivot de tête dé
chou, Gros.
trop (que), expression qui s'emploie pour peut-être bien, probable-
ment, etc.: Tirai qu' trop au bois d'maxn (J'irai probablement
au bois demain). T p\euvrai qu 9 trop aujd'heu, c'est-à-dire il est
possible qu'il pleuve, il est probable, je crois, qu'il pleuvra au-
jourd'hui. — Voir tout (T même.
trottignoi* et trottingnon, n., pied ou patte : T ai réservé les
quaite trottingnons et lai r'gaidiure de son vieau. — Voir regair
diure.
troubiot, n., trèfle sauvage, trifolium repens. Les beaux parleurs
prononcent troubiot, ce qui semble indiquer que le son i est
encore dû ici. à VI mouillée, et qu'il faudrait peut-être écrire
trouhht ?
troubli, v., inf. et part, pas., troubler et troublé : An ai troubM
Veau (On a troublé l'eau). T n' faut pas troubM lai boutoille. On
dit aussi troub\er (troubier). On prononce de même, en mouillant
Yl, troub\e f trouble.
trouille, n., terme injurieux qui s'applique à une femme grosse,
grasse, nonchalante, malpropre, etc. Il est le plus souvent
accompagné de l'adjectif grosse : Que grosse trouille! que grausse
coche t Ces deux mots sont à peu près synonymes. — Voir aussi
mouzon.
trouillbr, v. t péter.
trouiot, n. dim. de trou, petit trou : T ai p'ché ein méchant
trouiot (trou-io) dans l'meud, quefseus'n'grant' heure pou empli
note cruche 1
troupe, n., s'emploie pour troupeau : /' y ai trois troupes de beur-
bis dans V pays, c'est-à-dire il y a trois troupeaux de moutons
dans la commune.
tr'ou quaite, contraction de trois ou quaite, trois ou quatre : Baille-
me vô trou quaite sous pou aivoi du se.
troussé, n., trousseau ; vêlement, linge en général : /' en ai du
troussé dans c'te majon-lai ! c'est-à-dire il y en a du linge, des
vêtements, de la literie, etc.
trouve, trbuve et trovs, n., trouvaille, chose trouvée: Euf viens
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76 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX
d' faire eunne belle trouve: en tiens-tu part ? c'est-à-dire je viens
de faire une belle trouvaille, etc. - Vieux franc, trceve.
troyen, n., espèce de raisin noir ressemblant assez au pineau, mais
à grains moins serrés, moins fins et moins savoureux (?).
tuaison, n., action de tuer : Quand j' f'rons lai tuaison (tiuaison)
d' note couchon, tu seraies rf' lai fête, rieustrce-pas ? — Vieux
franc, tuaison, môme sens.
tuaisse, n., restes de ce qui est tué, cadavre. S'emploie le plus
souvent en plaisantant : Eut' tuer ? mas, quast-ce qu'an frot d'
lai tuaisse? c'est-à-dire te tuer? mais que ferait-on de tes
restes, de ton cadavre? Sous-entendu si tu étais seulement bon
à saler, à manger, etc.l « Que feriez-vous, Monsieur, du nez
d'un marguillier? » Dans ces mots, on mouille ht: Huer,
t tuaisse, tiuaison, etc.
tue-bois et tue bôs, n., grosse hacbe de bûcheron, cognée.
tuiter, v., se dit proprement du chant, du cri, du tuituit de cer-
tains petits oiseaux : Vlai V pruntemps; an entend daji les ouge-
lots tuiter. Par analogie, et avec ironie ou en mauvaise part, se
dit du cri d'un enfant, des criailleries d'une femme, d'une per-
sonne qui se plaint, qui récrimine, qui bavarde, etc. : Aies-tu
bintôt fait d' tuiter ? c'est-à-dire as-tu fini de crier, de te plain-
dre? vas-tu bientôt te taire?
tumbr et teummbr,v., renverser, verser à côté, répandre, répandre
par dessus les bords. On tume son vin, sai soupe, eul blé de son
sai, lai pousserotte de son ècritoire, etc.: Tiens don ton aissiette
drote (drotieu) que tu vas tumer, c'est-à-dire tiens donc ton assiette
droite, sinon tu vas renverser, répandre une partie du contenu.
Veuche ai boire et n' teumme pas. Quand le liquide se répand par
dessus les bords d'un vase trop plein, on dit plutôt que ce vase
en vai pa d'ssus. On emploie aussi quelquefois plaisamment
tumer ou teummer dans le sens de verser, en sous-entendant à
boire: Aillons, tumet c'est-à-dire allons, verse 1 — Voir renve-
cher. — Teumer, renverser, répandre, Gros. ; teumer, id., L.
C. ; tumey, P. T. ; tumer, G. et R.
turlutaingnb, n., turlutaine ; avec mépris, tout instrument de
musique: Baille-li don du pain ai c prouve-lai qui' s'en aille
(£ieu), et qu'i' n' m'embête pus iïaiveu sai turlutaingne, c'est-à-
dire avec son orgue de Barbarie.
turlututer, v., perdre son temps à des riens, s'occuper à de la
besogne facile, peu pressante, inutile, pour faire semblant de
travailler... — Voir baicuter, tanuger, etc.
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PATOIS DB LA FORÊT DE CLAIR VAUX 77
turnb, n., chaumière basse, étroite, masure; maison en ruine;
maison sale, mal entretenue, taûdion ; maison en général avec
mépris. Se prend toujours en mauvaise part: A^, / n'y f...
d' longtemps les paittes dans sai turne f c'est-à-dire je n'y remet-
trai de longtemps les pieds dans sa cassine. On emploie, à peu
près dans le même sens, cambuse et castafour; mais le mot turne
marque le plus souvent la malpropreté, la sordidité unie à la
pauvreté, et est plus dépréciatif que les deux autres.
turot (ou turaut?), n., sommet aride et pierreux; tas de pierres
amassées dans les champs, les vignes, etc., et provenant de défon-
cements, ou de l'épierrage des propriétés voisines; reste de vieux
mur éboulé, qu'on nomme plus particulièrement murot. —
Voir aussi mergé. — Vieux franc, turaut, tertre, élévation.
tutot, n. t petit cylindre de bois percé dans le sens de Taxe, qui
sert à maintenir l'aiguille sur laquelle la tricoteuse prend la
maille, affiquet; brin de bois creux, tige de plante fistuleuse,
tube étroit quelconque. — Tutd, chalumeau dont on se sert pour
tûter, Gros.; tutrit, goulot de bouteille, Thév.
tutkr, v., boire avec un tutot, un chardumè (chalumeau) ; par
extension, boire facilement, bien avaler le liquide, boire à longs
traits, flûter. S'emploie souvent avec une pointe d'ironie : S'i' n'
mainge guère, en récompense ï tùte bin, V bon vin surteut, c'est-
à-dire s'il ne mange guère, en compensation il flûte bien, etc. —
Tûter, pomper une liqueur avec un chalumeau, Gros.
u (<f ) vient. — Voir d'ù vient.
umblbr, v., oublier: T n' faut pas umb\er (umbié) d' dire tes
prières. Taies umb\è tai pioche, t'aies umblé ton eût il... ah,
mâtin, tu numb\eraies pas tai b'saice (bzaice) f c'est-à-dire tu
n'oublieras pas tes provisions de bouche. — Ubiey, umbiey,
P. T.; umbier ou imbier, G. et R.
un, adj. numéral, fait au fém. eunne (un-ne). Ne pas confondre
avec l'article ein, un, qui fait également eunne au féminin.
UBiNOWE, n., urine. On dit plus souvent pichon.
usaige, n., usage; bois communal que les habitants d'un village
se partagent chaque année ; affouage, part d'affouage, usage
d'affouage. On dit aussi arpents, part d'arpents : An vai bailler
les arpents, les parts cTarpents, c'est-à-dire on va distribuer, par-
tager les affouages. — Vieux franc, usaige.
usinons, n., usine, en particulier moulin.
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78 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAtiX
ustubburlu et LUSTUBBURLD, n., qui manque de jugement, qui
agit sans réfléchir, étourdi, tète en l'air, étourneau : /' ai en-
gaigé sai singnature comme ein ustubeurlu qui 1 ast, quoi! c'est-
à-dire il a engagé sa signature comme un étourneau qu'il est,
quoi I
csurfruit, n., usufruit.
usurfruitibr, n., usufruitier.
va, prép., rers, auprès, du côté de : Viens va moi (Viens vers moi,
auprès de moi). T d'tnoure va chez nous (Il demeure près de
chez nous, à côté, aux environs de chez nous). Pa d' va, du
côté de, aux environs : Euje vas pa d' va f bois, c'est-à-dire du
côté, aux environs, non loin du bois. Les dérivés gardent l'r :
envars, envers, dèvars, dévers, traivars, travers, etc.
vagabond, n., vagabond ; coureur, maraudeur : A h, f (ai vu pa
les vingnes I QuasUce que failles y faire, ptit vacabond ?
vagabonder, v., vagabonder ; courir les rues en parlant des en-
fants; marauder.
vaghoux, n., qui s'habille avec négligence, sans goût, sans soin,
sans ordre, qui fripe ses vêtements, son linge : Aibouteunne don
tes poingnets et r'monte ton col de ch'minge, vâchouxt On dit
aussi sans soin, dans le même sens : Gros sans soin, tu tripotes
su tes laiçots £ souUerst — Vacheux, id., Thév.
vadi, v., inf. et part., verdir et verdi. On mouille le d.
vadiurb, n., verdure.
vaichb, n., vache. On prononce véche. —Veche, P. T. ; vèche, G. et R.
vaichbr, n., vacher.
VAiGHERiE, n., troupeau de vaches, troupeau communal : Toute lai
vaickerie (vécKrie) eulle4-ast dans les prés.
vaichottb, n. dim., petite vache ; espèce de grosse prune, d'un
noir bleu, de qualité inférieure.
vailée (ai lai). — Voir aivailée.
vaillantigb, n., vaillantise: Oht lai belle vaillantigel On pro-
nonce de même veillant, vaillant: N' fais pas tant d* ton
Jacques veillant, c'est-à-dire ne fais pas tant le brave, le rodo-
mont.
vailles, n., vallée; désigne quelquefois, d'une manière générale,
un groupe de villages situés dans la même vallée. Ainsi, quand
les habitants de Fontette, Saint-Usage, Cunfin, etc., disent
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PATOIS DE LA FOBÉT DE CLAIRVAUX 79 ^
qu'ils viennent de vende los bois dans lai vaillée, il faut
entendre qu'ils viennent de la vallée de l'Ource et presque exclu-
sivement des communes d'Essoyes, de Loches ou de Landreville.
vàillon, n. dim., vallon.
vaillotte, n. dim., toute petite vallée, petit vallon; pli de ter-
rain. On dit aussi baisse et bamotte.
VAiLOT (ou vêlot?), n. dim., petit veau, veau de lait; terme
mignard et plus particulièrement à l'usage des enfants.
vainc', v., vaincre, s'emploie pour convaincre : Tairaies bieauli
en dire, tu n' pourraies pas V vainc 9 (vainque), c'est-à-dire tu
ne pourras pas le convaincre, lui faire entendre raison.
vairou (loup), interj., espèce de juron : Loup-vairou, comme çai
fait mau les mouches t (Matin, comme ça fait mal un vésica-
toire !) S'emploie quelquefois comme nom synonyme de mâtin,
enragé, original, drôle, loup-garou, etc.: C loup-vairou-lai,
comme V marche! (Ce mâtin-là, cet enragé-là, comme il marche!)
Ç'ast ein peut loup-vairou, c'est-à-dire un vilain coucheur, un
drôle de sire.
valider, v., aller, courir, marcher bon train pour ses affaires...
Faire valider, faire marcher, faire aller. — Voir traller et
faire traller. On dit aussi dans le même sens valser et faire
valser.
valsoue, n., valseur.
vambée, n., flamme de courte durée, feu clair de menu bois à
grande flamme, feu qui lampe (voir lamper) : Mets des raimsins
su note feu pou faire eunne vambée. — Voir fouleire et gaûdelle.
Au ûg. , vambée, coup de feu au travail: T traivoille eunne
vambée, et peâs t n 1 fait pus rin d* lai sainte jonnée. T sens zeû
V vambée aux vingnes. Voir poussée. — Ne pas confondre
ce mot avec envambée.
vamber, v. (Voir envamber). — Ces deux verbes ont à peu près
la môme signification. Mais envamber s'emploie le plus souvent
avec le pronom réfléchi se, et vamber est presque toujours suivi
d'un nom complément direct. On dira : S* envamber pou sauter,
et vamber ses brais, son bâton, etc. — Voir bamboler.
vannoue, n., vanneur. On prononce van-noue. De môme van-ner,
vanner, van-née, vannée, contenu d'un van, etc.
vant, n., vantance, vanterie, ostentation : T ai pus d' vants que
d' corbeilles — jeu de mots sur van pour vanner, et ce mot
vont, vantance — c'est-à-dire il a plus de bagout, de jactance,
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80 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX
que de fond, que de valeur réelle ; il se vante de ce qu'il n'a
pas ; il en dit plus qu'il n'en fait, etc. On dit aussi vantardige.
vantardigb, n., vanterie, vantance. — Voir tant.
vanvoule (ai lai), à la vanvole, à la légère, à l'étourdie, sans ré-
flexion.
vaque, conj. — Voir maque.
varcolb, n., espèce de harnais qui remplace le collier pour les
chevaux de trait, bricole. Par analogie, et avec une idée de dé-
préciation, tout ce qui se met autour du cou, de la taille, en
bandoulière, en sautoir, etc., cordon, ceinture, écharpe, etc.: Je ri
sais pas c* que cfètot que cte varcole-lai qui* aivot mins ailentour
de lu, note député. Eulle met 'ri grante varcole de soie pa d'ssus
ses épaules. En varcole, en bandoulière, en écharpe, de guingois.
— Vieux français vercolle, espèce de bricole.
varge, n., verge, fouet; plante adventice des moissons, ivraie,
lolium temulentum. — Verge, ivraie, Gros.
vAROBNTé et vargencé, adj., plombé, noirâtre, livide. Se dit d'une
plaie, d'une tumeur, d'un coup, et plus rarement de l'effet du
froid, sur le visage ou sur le corps: /' ai Un mau; sai jambe
eulle-l-ast enflée, vargentée, c'est-à-dire sa jambe est enflée, li-
vide, de couleur noirâtre, plombée. Ne serait-ce point un parti-
cipe ? En tout cas, nous ne nous rappelons pas avoir entendu
jamais employer les autres temps du verbe.
vargeon, n., manche de varge (verge), manche de fouet.
varment (ou varement?), adv. et interj., tiens, à propos, oui-da,
etc. Quelqu'un vous rappelle une promesse, un engagement,
une chose à faire, etc.: Varment, f ri y pensas ma fié pus! ré-
pondez-vous, c'est-à-dire, tiens, en effet, je n'y pensais ma foi
plus. — De vraiment ? Du latin vere f De voire mais ? — Vieux
franc, veirs, vrament, voirement.
varmingne et vrèmingne, n., vermine. S'emploie en parlant des
souris et autres rongeurs : Note b\é i ast maingé ai lai var-
mingne.
varre, n., verre, dans tous les sens. Ein varre de vin. Du varreai
vitre. — Vieux franc, voirre.
vart, adj., vert. Le fém. est vade, verte, qu'on prononce en
mouillant le d : vadieu. Grien ai pas pus que à' chien vart, il
n'y en a pas plus que de chien vert, c'est-à-dire il n'y en a
point.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CUIR VAUX 81
va-t-a pied, n., domestique, valet, qui va à pied. Se prend en
assez mauvaise part.
vau, n., val. L' Vau-Pdiu ou B'diu, le Val-Perdu, hameau de la
commune de Couvignon. — - Vieux franc, vau.
vauhin, n., vaurien.
véb, n., veau. Peu employé; on dit d'habitude vieau. —Vieux
franc, veel.
veille, adj. fém. de vie (vieux) ; Eunne veille femme (Une vieille
femme). — Veye, P. T.
vbilli, v. 9 inf. et part, pas., vieillir et vieilli. De même veille,
vieille, veillesse, vieillesse, veillement, vieillement, etc.
vêlai et v'lai, adv., voilà : Le v'iai ou etd vêlai (Le voilà). Leur- t
vêlai (Le re- voilà, le voilà de nouveau). S'emploie souvent pour
voichi, voici. — Ylai, G. et R.
velimoux, adj., venimeux et vénéneux : Les griffes de chait, ç'ast
v'limoux. — V'limeux, id., Gros.
velin, n., venin : Les craipauds i's ont du v*lin. Velin, n., grosse
chenille velue des friches, considérée dans nos villages comme
un poison pour les animaux qui la mangeraient en broutant
l'herbe : N' cope pas c'te torchée d'harbe-lai, i" y ai ein gros v'lin
d'ssus. — V'lin, venin, chenille, poison, Gros. ; v'lin, id., P. T.
venaingb, n., vendange : Ailler en v'nainge (Aller en vendange).
Tons fait d' venainge, c'est-à-dire nous avons fini de vendanger,
la vendange est terminée. Ylai <F lai belle venainge, voilà de
la belle vendange, c'est-à-dire voilà de beaux raisins, bien sains,
bien mûrs. — Vninge, G. et R. — Vieux franc, venange, ve-
nenge, venoinge.
VBNAiNGEouB, n., vendengeur : Les vnaingeoûes et les hotteilhûes
(oté-ioue), c'est'à-dire les hotteurs et les coupeurs.
venaingeb, v., vendanger. — Vieux franc, venanger, venoinger.
vende, v., vendre : V li ai tout baillé ai vende et ai dépende.
vbndoue, n., vendeur : Pou qu'i ot ein vendoue, i' faut qu'i' ot ein
aichetoue, c'est-à-dire pour qu'il y ait un vendeur, etc. De même
r* vendoue ou eur vendoue,
vengboub, n. et adj., vengeur ; vindicatif, qui a de la haine, de la
rancœur.
venin, v., venir. Futur, euf vienrai; conditionnel présent, eu?
vienrôs ; subjonctif présent, que j' vingne ; participe passé,
venun, vnun. De môme, les dérivés, parvenir parvenir, pré-
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82 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX
vnin, prévenir, souv'nin (s*), se souvenir, r 9 venin, revenir, etc.
On dit viens-nous-en, pour allons-nous-en.
venredi et vendeubdi, u., vendredi: Si tumaingeôsd' laichaein
venr'di, ï ( vienrot 'ri beûchotte su l'nez, c'est-à-dire si tu man-
geais de la chair, de la viande un vendredi, il te viendrait une
bûchette sur le nez. Eul grand venr'di, le vendredi saint. —
Venr'di, G. et R. — Vieux franc, divenres.
vente, v., ventre : Quand t'airaies maingé gai, tu ri air aies pas V
piarre dans V vente, c'est-à-dire tu ne te plaindras pas, quand tu
auras mangé ce morceau, Dieu merci ! tu auras le ventre plein;
etc. Aivoi pus grant' œux qri grand vente, avoir plus grands yeux
que grand ventre, convoiter, prendre, se servir du pain, des
mets, etc., plus qu'on n'en peut manger, de manière à en lais-
ser, à en être rebuté, régoulé.
ventraïllb, n., ventrée, entrailles, intestins, tripaille.
vépre, n., guêpe, frelon : JV vai pas pa lai, f y ai ein nind d' vêpres
(Ne va pas par là, il y a un nid de guêpes). — Vêpre, guêpe,
Gros.
vermouché (ou ver- mouché ?), n., grosse larve de hanneton qu'on
trouve dans la terre en labourant. — De l'ital. vermicciuolo,
vermisseau ? ou de mouché, moucé, monceau, tas, à cause de sa
grosseur?...
vâroux, adj., véreux : Ein pois vèroux, eunne pomme vèrouse.
verre-joli, n. comp., marchand de verres ambulant, à cause de
son cri : « Jolis verres, jolis ! » T rions pus d' verre; si vous
entendains ein verre-joli, vous nous l'envôerains, c'est-à-dire si
vous entendiez un marchand de verres ambulant, etc.
verrière, n., cheville ou broche mobile de l'avant-train d'une
charrue, qu'on place dans différents trous, selon qu'on veut
prendre de grosses ou de petites raies, c'est-à-dire ailler plus ou
moins ai roie, comme on dit en termes de métier.
verse, n., s'emploie pour averse, pluie subite et abondante. —
Voir aicueulée, ècrôlèe, ruche.
vessou, v'ssou et p'ssou, n., outil dont se sert le vigneron pour
labourer les vignes, houe, hoyau, marre ; à Bar-sur-Aube, fous-
seux: J'ai cassé mon v'ssou ou p'ssou. J'ai tiué 'ri vipère ai coups
(T vessou. — Vesuy, L. C; Pschoui, pioche, fer de charrue,!!!
P. T.; P'souy, meigle, outil de vigneron employé pour le labour,
G. et R. — Vieux français : fesseur, fœsseur, fessoir, fessour, fes-
souer, feçoir, fessoul, foisson, fossou, fossour, foissou, fosson,
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX 83
f assort, foussoir, foussouer, fossoer, fossierre, besouch, besoutz,
etc. La bêche de saunier se dit encore fesour.
veu et vbude, adj., vide, vidé. On crie en se moquant au chasseur
qui vient de tirer et de manquer: Ch... d'dans, t ast veu ou i"
ast vende. On mouille toujours le d : veud'ien. — Veuide, vide,
P. T.
vbucheb et v'chrr, v., verser : Veuche ai boire. T faurot v'cher V
sai. Imp. euj' veuchôs; fut. euf veuch'rai; subj. prés, que f
veuche ; part. pas. veuché et v'ché.
vbudibr, v M vider, verser : Vende {veudieu) ton sai (Vide ton sac). /
Vende ai boire (Verse à boire). Fut. euf veud'rai {d mouillé) ;
cond. euj' veud'rôs ; subj. prés, que j' vende; part. pas. veudié.
vbudret, n., verderet, lézard vert. On dit d'un enfant vif, espiègle,
difficile à surveiller : /' ast vif, f ast tonjous sauvé; ç'ast comme
ein veudret, <£ ailleurs.
vbdrdailler et VEURDiLLRR, v., fréquent, de veurder, courir,
s'échapper souvent, sans but, sans raison, d'une manière en-
nuyeuse, fatigante, etc. Ne pas confondre avec feurdailler, bien
que ces deux mots semblent d'origine commune.
vburdrr, v., en général, jouer, courir, gambader; d'une manière
plus spéciale, s'échapper furtivement» vivement, pour se sous*
traire à une surveillance, pour aller jouer, courir, etc., en
parlant d'un enfant; s'échapper, s'enfuir, en parlant d'un ani-
mal : T n'aivôs pas V temps d' tonner les tailons, qu't ètotvenrdé,
e' petioUai. Cours d'aiprées ton cKfau qui ai cassé sai longe. . . eut
vois4u comme t veurde t Faire veurder, faire aller, commander
avec dureté, être raide, exigeant, etc.: Ah, f les fait veurder
ses domestiques! (Voir traiter et valider). — Verder, sauter, s'en-
fuir, Gros.; veurder, verder, courir rapidement en sautant,
Thév. — Deverter?
vburdingo, n., vertigo, vertige, fantaisie, caprice; maladie des
moutons, tournis. Aivoir eut veurdingo, ne pouvoir tenir en
place, être impatient ; être en colère, furieux, avoir comme un
accès de folie.
vrussr, n., vesse. Veusse de loup, vesse de loup, espèce de champi-
gnon.
vbussi et v'ssi, v., inf. et part, pas., vesser et vessé.
vbussib et vssie, n., vessie : V met son taibaic dans 'n' venssie. T ri
f aurai pas j'tier lax v'ssie <F note couchon. T penrot des v'ssies pou
des lantarnes, c'est-à-dire il prendrait, etc. \
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84 PATOIS DB LA FORÊT DE CUIR VAUX
veut (s'i ). — Voir vouloi.
vbzilleb et v'ziller, v., faire entendre ce sifflement aigu particu-
lier à certaines mouches au vol rapide : Les latins (taons) vzil-
laint ailentour de nos ch'faux. Se dit aussi du sifflement des
projectiles : Lai piarre m'ai vzillé aux airoilles. T faillot en-
tende veuziller les balles t c'est-à-dire il fallait entendre siffler
les balles !
viare, n., espèce d'armature de fer qui sert à fixer la faulx au
faucher ou manche.
vicaillb, n., victuaille, vivres.
vie, n., s'emploie pour bruit, train, vacarme, tapage : Ces enfants-
lai, i's font V vie, ein saibbati qu'an n s'entend pas. T n faut
pas faire tant <F vie qu'çai, si vous n' v'iez pas que V gibier s*
sauve.
vré, adj. et n., vieux, vieillard. Au fem. veille, vieille. Se pro-
nonce long : viée. — Vie, viey, P. T. — Vieux franc, triez, vies,
vieix, veill.
vœau et véb, n., veau. Vieau, n., espèce de coagulum qui se
forme dans les barils en vidange transportés et secoués :
N'escoue pas tant V baril, çai frot des vieaux. En beuvant, j'ai
aivailé ein vieau.
vient Cannée qui), Tannée prochaine.
vif, adj., fait au fém. vife.
vilain, n. adj., s'emploie pour ingrat, malhonnête, qui a un
mauvais cœur, qui donne difficilement : T l'ai rendu bin des
services, et aujou d'auj'd'heu ( n* me cneut pus, V vûain. /' ai
tiué ein saing\ier et { n' nous en ai point baûlé, ç'ast ein vûain
(vi-iain). T asU't vilain f Y gode tout pou lu.
villa (ou villbr?), n., clématite sauvage, clematis vitalba. — De
villotte, vrille? — Ce mot et les mots enviller, dèviller, villure,
paraissent avoir une commune origine.
villotte, n. dira., petite vrille, et. par extension, vrille. — VeH-
lette, petite vrille, Gros. — Vieux franc, villette.
villure, n., vrille, nille, cirre. — Voir envillure. Villure, s'ap-
plique plutôt à la vrille du sarment, et envillure, aux longues
vrilles emmêlées, aux tiges envillées des haricots, de la
bryone, etc.
vinaigub, n., vinaigre. On prononce le plus souvent vin-nttigue.
vinéràire, n., vulnéraire, mélange de plantes desséchées servant à
faire des infusions.
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PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIRVAUX 85
yingne, n., vigne. Les trois personnes du sing. du prés, du subj.
du verbe venin, se prononcent absolument de môme : Que j'
vingne, que tu vingnes, etc.
vingnée, n., vinée, cellier, lieu où Ton place les cuves, où se fait
le vin. — Vinée, cellier, Gros.
vingner, v. , donner, rendre, fournir beaucoup de jus, en parlant
des raisins, de la récolte des raisins en général : Çai vingnerai
c't' année ; les grummes (jgrun-mes) eulles sont tout pleun grosches
(Ça rendra du jus, du vin cette année ; les grains de raisins
sont très gros). T p\eut dans lai baingnoure : çai frai vingner.
vingkeron, n., vigneron.
« Vingn'ron, vingn'ron qui eh...
Pou qu'an H* aippoute lai fticaissie. »
Traduction libre du chant de la linotte.
vingnobe, n., vignoble. On dit aussi vingnob\e.
vionner, v., jouer du violon ; crier, grincer, en parlant d'une
porte, d'un frottement mal graissé, de chaussures neuves, etc.:
Entends-tu vionner? Viens don ai lai danse. Du vient qu'Us
souliers vionnent comme çai ?
vionnoue et violonnoue, n., violoniste, joueur de violon, méné-
trier.
virade, n., glissade, faux-pas, tour sur soi-même en perdant
l'équilibre : J'ai manqué d' cheur;j'ai fait V virade... c'est-à-
dire j'ai fait une glissade. On dit aussi teurtelade, mais la virade
se prolonge moins que la teurt'lade, et se fait en quelque sorte
sur place.
virebeurquin, n., vilebrequin. — Virebrequin, Gros.
vireverse et vireveughe, n., virevolte, virevousse, allées et
venues, tours et retours; zigzags, marche en lacet. Un chasseur
fait des vir verses ou des vir'veuches dans la plaine. On fait des
vifveuches en suivant un sentier tortueux dans les montagnes,
etc. — Virevauche, écart, marche d'ivrogne, Gros.
vireverser et vireveucher, v., virevolter, faire des vireverses, des
tours et des retours ; suivre un chemin en lacet.
viRÔDBR (ou virauder ?) v., fréquent, de virer, tournailler, faire
beaucoup de tours et de détours sans s'éloigner du môme point.
1 On prononce également : qu'an niaippoute y qu'an-iaippouie et
qu'an liaippoute.
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86 PATOIS DE LA FORÊT DE CLÀIRVAUI
virolot, n., mal blanc qui vire, qai tourne autour de l'ongle d'un
doigt.
virot, n., rouleau, cylindre, espèce de treuil placé à l'arrière
d'une charrette, et autour duquel se roule le trait ai parche ou
liure; court levier de bois qui seri à faire tourner ce treuil.
visaige, n., visage, figure : Çast visibe ou visible, comme eul nez
au moitiandu visaige ; ou ironiquement : Çast caiché comme eul
nez, etc.
visoir et visoi, n. masc., visière, partie avancée de la casquette
qui abrite le front et les yeux.
vite, adj. et adv., se prononce en mouillant let: utfieu. De môme
vitiesse, vitesse, vit'ment, etc.
vive, v., vivre. Part. pas. vivu. — Vive, P. T. — De môme les
dérivés r'vive, revivre, survive, survivre, etc.
vive-airgent, n. comp., vif argent, mercure: Aivoi du viv' airgent
d* zous les pieds ou dans les veinnes.
v'lu, part. pas. de vouloi, vouloir ; T ai v'lu v'nin, c'est-à-dire il a
voulu venir.
voichi et v'chi, prép., voici: Ah, t voichi? (Ah, te voici?) Se
remplace souvent par vlai, voilà. — Vequi, voici) L. G., P. T.;
vqui, voici, G. et R.
voillb, n., veille. Çast auj'd'heu, ou au'd'hieu, lai voille de d'main,
c'est aujourd'hui la veille de demain : réponse plaisante qu'on
fait à qui demande le quantième du mois ou le jour de la se-
maine.
voiLLÉB, n., veillée.
voiller, v., veiller. De môme les dérivés èvoiller, éveiller, rèvoil-
ler, réveiller, survoilier, surveiller, etc.
voillode, n., veilleur.
voillotte, n., fleur du colchique d'automne, colchicum autum-
naliSy qui apparaît au moment où les jours deviennent sensi-
blement plus courts, comme pour annoncer les veillées
d'hiver.
voirjus et veurjus, n., verjus, raisin encore vert, le jus exprimé de
ce raisin ; en particulier, raisin en retard qui mûrit après les
autres, quand il mûrit, et qui se coupe lors de la seconde ven-
. dange appelée grappillage.
voirlou (ou voir-loup?), sorte d'interj., mâtin, diable, etc. S'em-
ploie comme loup vairou : Ah, voirlou, qu'ï fait frod t (Ah,
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PATOIS DE LA FORÊf DB CLAIR VAUX 87
mâtin, etc.). Voirlou, n. (voir loup-vairoiï) : Ein drôle dé voirlou,
ein peut voirlou, etc., c'est-à-dire un drôle de pistolet, un vilain
sire, etc. — Voir loup, loup-garou, Gros.
voitiure, n., voiture. De môme voitiurer, voitiurèe, etc.
volie, n., volige, planche mince ainsi nommée à cause de sa légè-
reté.
vomin, v., inf. et part., vomir et vomi : Tu vas m' faire vômin.
T ai vômin tripes et boyaux.
vor et vô, v., voir : Viens vor les commédiens (Viens voir les sal-
timbanques, les bateleurs). De même r'vor, revoir. Vor et vô
(ou voref), adv., s'emploie comme explétif; c'est peut-être le
vere et Yenimvero latin : Tache vor ou tâche vô de t' taire t Eujè
voirrai vor si tu m J écoutes, c'est-à-dire avec menace, je verrai si
tu m'obéis. Écoute vô, c'est-à-dire écoute donc, viens donc, etc.
- Voi t L. C.
vosce, voisgb et voschb, n., vesce, plante légumineuse : T ast vif,
% seurmue, t saute, etc., comme ein craipaud dans des vosces
(vosse), c'est-à-dire il n'est pas vif, il est au contraire lourd, em-
pêtré comme, etc.
vou, adv., où. S'emploie ordinairement avec l'adverbe lai, là,
surtout dans les interrogations : Lai vou qu' tu vas don f (Où
vas-tu donc ?) Lai voit qu' ç'ast (Où est-ce ?) — Vou, où, Gros. —
De l'ital. dove, laddove ?
voul, n., vol dans les deux sens du mot français : /' ai commins
ein voul eti' ast zeû en prinjon (Il a commis un vol, etc.). Lai
caille eulle ai ein voul bas, lourd.
vouler, v., voler, dérober; voler avec des ailes : An m'ai voulé des
jarbes. Eulle voule enco bin tai pèdrix, et tu n'aies pas dû l'ait-
traiper. De même s'envouler, s'envoler, et les autres dérivés. —
Vieux franc, vouler, voler avec des ailes.
vouleu, n., voleur : Tous les vouleûs n' sont pas ai CXairvaux.
vouloi, v., vouloir. Imparf. euj' v'iôs; fut. euj' vourai ou ;' v'rai;
condit. prés, euj' vourôs ou j' v'rôs; subj. prés, que j' vouille ;
part. prés, v'iant; part. pas. vlu. La troisième personne du
singulier, du présent de l'indicatif de ce verbe, précédée de si ou
s'i, s'emploie pour tant pis, qu'importe, ça m'est bien égal, etc.
On dit à un vigneron qui s'en va par un temps incertain, me-
naçant : Tu seraies mouillé, vai. — Oh s'i veut t répond-il, c'est-
à-dire tant pis, je pars quand même, etc. S'i veut, là I répondent
les enfants capricieux, volontaires, à une menace quelconque ;
-s
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88 PATOIS DE LA FORÊT DE CLAIR VAUX
Tu vas t' pède; tu vas saili tai cueulotte; si tu bois tent qu' gai,
tu vas t' griger, etc., etc. — S'i veut, nà I répond l'enfant. C'est
aussi, comme on le voit, une espèce de protestation. An dirai c'
que s' vourai ou c' que s' voure (On dira ce qu'on voudra). Dans
cette phrase le second pronom an, on, est rendu à la manière
italienne, par le pronom réfléchi se.
vousiller, v., employer le pronom vous en parlant à une per-
sonne, le contraire de tutoyer.— Voir aivousier. — Vieux franc.
vosoier.
voutîs, n., mauvaise voûte, plafond fait de solives dont les inter-
valles sont remplis avec des pierres et du mortier.
voyaigeouk, n., voyageur. De môme voyaige, voyage, voyaiger,
voyager, etc..
v'rait, n., verrat, porc mâle.
vreiller, v., labourer, avant l'hiver, à l'entrée de l'hiver, une
éteule de céréales, déchaumer, entre-hiverner.
vri, v., inf. et part. pas. , rouiller et rouillé : Mon coutieau t ast
vri (Mon couteau est rouillé). N 1 touche pas mon rasoi, gai V
frot vri. Vri, part, pass., tacheté de rousseur, lentille (voir
nentillé, piolé). Dans ce dernier sens, on n'emploie guère les
autres temps du verbe.
v'rou, n., verrou : Eté darré les gros v'roux, c'est-à-dire être der-
rière les gros verroux, être en prison.
v rouiller, v., verrouiller : /' faut v rouiller lai pote.
vrououou et vourrr, espèce d'interj. qu'on emploie pour imiter le
bruit d'une ou de plusieurs perdrix, d'un ou de plusieurs gros
oiseaux qui s'envolent : Euf m'aipprochôs, euf maipprochôs...
mas, oui, vourrr t les vlai teurteutes pattes t — Onomatopée.
v'tot et f'tot, n., espèce de balle de plomb forée dont on leste
certains engins de pêche.
z, se met devant certains mots, sans doute comme lettre eupho-
nique: Aivant-zhier (aivanzier) avantrhier; ç'ast pou zeux, c'est
pour eux ; çast d' t'ai zeux, c'est d'eux; ç'ast zeux, ce sont eux,
etc.
zeu (ou z'eu?), part. pas. du verbe aivoi, avoir, qui s'emploie
également comme part. pas. du verbe être, et même dans la
plupart des cas, du verbe aller : Tai zeû lai fiéve; euje sens zeû
mailaide; j' sens zeû en campagne, et toi, (y vas (J'ai eu la
fièvre; j'ai été malade; je suis allé en voyage, et toi, tu y
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PATOIS DB LA FORÊT DE CLAIRVACI 89
vas). Cependant le verbe ailler, aller, a son part. pas. propre,
aillé, allé : ï sens aillé ai lai messe. Te v'iai aillée ? c'est-k-dire
te voilà partie?
zeux, pron. pers., eux, elles : Ç'ast zeux (Ce sont eux ou ce sont
elles). On dit : Ç'ast zeux, pou zeux, d'aiveu zeux, etc., ce sont
eux, pour eux, avec eux, etc., ainsi qu'on dit chez eux. N'a-
t-on point fait ici encore confusion de lettres, comme il est ar-
rivé pour la voyelle composée ai de l'article lai, et attribué au
mot eux, le z ou Y s du mot précédent, chez, vers, par exemple?
— Os, oz, eux, elle, P. T.
ziÉBE, n., hièble, sambucus ebulus: Guy ai don point d' ziébes pou
aittaicher mon âne f demandait l'aveugle qui visitait un champ
à Tendre.
zorbr, v., dorer. Des lettres zorées, des lettres dorées.
zut, interj., ut, c'est-à-dire va te promener, je me f... de toi, tu
m'embêtes, etc. C'est le mot de Cambronne raffiné. Ne pas con-
fondre avec put.
Ce serait le moment de dresser Y errata.,.. Mais, nous trouvant
dans la nécessité de préparer un travail complémentaire, nous
nous réservons de corriger en même temps les fautes de toutes
sortes qui se sont glissées dans notre ouvrage, malgré nos soins
et le concours intelligent de l'Imprimeur.
Aussitôt que nous aurons mis en ordre les matériaux nou-
veaux que nous rassemblons encore chaque jour, au hasard de nos
souvenirs, et qui s'entassent depuis l'impression de notre pre-
mière feuille, nous publierons un court supplément.
C'est pourquoi, dès aujourd'hui, nous faisons un pressant appel
à la bienveillance et à l'érudition de nos lecteurs. Nous prions
instamment toutes les personnes que ces sortes de travaux inté-
ressent, en particulier nos savants confrères de la Société Acadé-
mique, de vouloir bien nous signaler les erreurs qu'ils rencontre-
ront, et nous adresser une liste des mots omis qu'ils pourront dé-
couvrir Nous remercions d'avance nos collaborateurs et nous
les assurons de notre vive gratitude et de notre entier dévouement.
T. Ll
/S
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ççw* .«•'
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